Point de vue du médecin traitant Pierre Vallon Président de la Société suisse de psychiatrie et psychothérapie SIM Congrès annuel 2015 Expérience personnelle • Médecin cadre du Secteur psychiatrique Nord à Yverdon-les-Bains de 1982 à 1992 • Psychiatre psychothérapeute en pratique privée de 1992 à 2001 • Médecin du SMR Léman de 2001 à 2004 • Retour à la pratique privée depuis 2005 • Expert certifié par la SIM en 2010 Politique professionnelle • Membre du Comité de la SSPP depuis 2006 et président de la Commission permanente assurances de la FMPP • Rédaction des « Critères de qualité pour les expertises psychiatriques dans le domaine de l’Assurance invalidité » publiés en 2012 sous l’égide de l’OFAS et de la SSPP • Président de la SSPP et de la FMPP depuis novembre 2011 Deux mondes que tout oppose ! « En effet, un médecin traitant, qui a entrepris une psychothérapie, a naturellement le souci d'éviter tout ce qui pourrait perturber son travail et souhaite notamment éviter de provoquer chez son patient un ressentiment qui rendrait sa mission plus difficile ou même impossible…. Dans ces circonstances, il n'est pas arbitraire de considérer comme plus objective l'opinion émise par des experts choisis en toute indépendance par l'autorité dans le seul but de renseigner la justice. » (BGE 124 I 170) Deux mondes que tout oppose ! La hiérarchie de crédibilité établie par la jurisprudence constante du TF Expert > Médecin SMR> Médecin traitant crée les conditions idéales pour un conflit interminable, nourri de préjugés ! Médecin traitant (M) vs Expert (E) Une comparaison systématique des caractéristiques des deux catégories que sont médecin traitant et expert nous permettra de mieux identifier ce qui les oppose et ce qui les réunit Médecin traitant (M) vs Expert (E) M est mandaté par son patient pour investiguer et traiter un problème de santé E est mandaté par un organisme tiers pour évaluer l’état de santé de l’assuré (sur le modèle de l’expert du Service des Automobiles) Médecin traitant (M) vs Expert (E) M établit une relation thérapeutique avec son patient, fondée sur la confiance et sur la confidentialité E doit s’abstenir d’établir une relation avec l’expertisé et l’avertir qu’il est tenu de communiquer tout ce qui lui est dit à son mandant Médecin traitant (M) vs Expert (E) M joue souvent un rôle thérapeutique dans la durée, parfois pendant plusieurs années E procède à une évaluation ponctuelle, réalisant un « instantané photographique » de l’état de santé de l’expertisé lors de son examen Médecin traitant (M) vs Expert (E) M tend à prendre parti pour son patient et se voit fréquemment reprocher de jouer le rôle d’avocat de ce dernier auprès des tiers E est par principe objectif et sans parti pris Médecin traitant (M) vs Expert (E) M est en prise directe avec les difficultés de son patient, dont celles occasionnées par la durée de la procédure et leurs conséquences socio-économiques E n’est pas concerné par la suite de la procédure, à moins d’être cité à comparaître au Tribunal Médecin traitant (M) vs Expert (E) M participe à la mise en œuvre de mesures de réinsertion professionnelle et/ou de mesures médicales. Il est en contact avec les conseillers en profession et les case managers E fait des propositions de changements de médication, de méthode thérapeutique ou… de médecin traitant ! Médecin traitant (M) vs expert (E) M ne connaît souvent pas bien le contexte administratif et juridique des assurances sociales ou privées. Ses rapports médicaux sont parfois lacunaires et peu précis E est familier des procédures et rédige des rapports complets et précis, ciblant les renseignements nécessaires à l’organisme mandant. Il discute d’éventuelles divergences entre ses constatations et celles d’autres médecins Médecin traitant (M) vs expert (E) M ressent parfois la procédure d’expertise comme un désaveu de ses diagnostics ou de ses traitements, d’autant plus s’il y a divergence sur la capacité de travail exigible E évalue la capacité de travail exigible de l’expertisé sur un plan médico-théorique, sans se soucier de sa mise en oeuvre Un changement de mode de pensée se développe Depuis la 5ème révision de la LAI, les mesures de détection et de suivi précoces sont devenues familières au corps médical. Les notions d’exigibilité, de limitations fonctionnelles et d’activité adaptée ont trouvé leur place dans la pratique des médecins traitants, qui collaborent de plus en plus aux mesures de réinsertion professionnelle Comment mieux faire • Renforcer les connaissances du corps médical en matière d’assurances sociales et privées • Faciliter la communication entre les médecins traitants et les conseillers en profession ou les case managers, mais aussi avec les médecins conseils, les médecins des SMR ou les experts • Mieux tenir compte du temps qui s’écoule et des conséquences socio-économiques qu’entraîne une procédure de longue durée Comment mieux faire • Avec l’accord du patient/assuré, augmenter la transparence en donnant accès au médecin traitant à des informations sur l’évolution de la procédure • Lever les préjugés de partialité envers les médecins traitants, qui les démotivent à participer aux mesures professionnelles en soutenant leur patient Comment mieux faire • La mise en œuvre du principe « la réadaptation prime sur la rente » passe inévitablement par l’établissement d’un partenariat de collaboration tripartite entre patient/assuré, médecin traitant et assurance. • C’est en faisant participer le médecin traitant à l’ensemble du processus que le changement de mode de pensée visé par ce principe pourra s’établir durablement, à l’avantage de tous Collaboration entre médecins traitants et Offices AI Etude menée sur mandat de l’OFAS par Christian Bolliger et Marius Féraud du Bureau Vatter de 2013 à 2014 Avec la participation de Pierre Vallon comme délégué de la FMH au groupe d’accompagnement. Publication au printemps 2015