6e Printemps Éthique de Nice
La Lettre
Lettre d’information de l’EEA | Hors série n°8 | Sept. 2016
Hors Série
Lettre d’information Hors série
Responsable publication : Dominique Grimaud
Réalisation : Direction de la Communication
CHU de Nice - Visuels : Fotolia.com
Programme des conférences
Le 11 mars 2016 de 8h30 à 17h
Matin : 8h30 : Accueil et allocutions de
bienvenue
Modérateur : Dominique Grimaud,
Professeur émérite d’Anesthésie-
Réanimation, Président de l’Espace
Éthique Azuréen (EEA), Responsable
du Département d’Ethique et Sciences
Humaines de la Faculté de Médecine,
Haut Conseil de la Santé Publique
> 9h30 : Bertrand Weil, Professeur
émérite de Néphrologie, Doyen
Honoraire de la Faculté de Médecine
de Créteil, membre du CCNE - Dans la
relation de soins et de prise en charge
de l’autre, où se situe l’Ethique et la
médecine de la personne ?
> 10h : Marie Gaille, Directrice de
recherches en philosophie, SPHERE
(UMR 7219, CNRS-Université Paris
Diderot,USPC) - Accompagner les
patients : norme de la relation de soin.
> 10h30 : Pause
Modératrice : Karine Lambert, Maîtresse
de Conférence en Histoire Moderne,
ESPE-Nice, membre de l’EEA.
> 11h : Myriam Le Sommer-Pere,
Médecin Gérontologue, CHU de
Bordeaux - L’étape de la consultation
mémoire : un temps de reconnaissance.
> 11h30 : Elsa Dorlin, Professeure
de Philosophie sociale et politique,
Département de sciences politiques
- Université Paris VIII, Vincennes/Saint-
Denis - CNRS, Um2 Crespa/labtop - Qui
prend soin de nous ? Ethique du care et
théorie féministe de l’injustice.
> 12h : Béatrice Birmele, Médecin
Néphrologue, CHU de Tours, Docteure
en Philosophie, Directrice de l’Espace
de Réflexion Éthique de la Région
Centre - Quel accompagnement
médical proposer au malade souffrant
d’une maladie chronique.
> 12h30 : Repas libre
Modérateur : Patrick Baqué, Professeur
d’Anatomie-Chirurgie, Doyen de la Faculté
de Médecine de Nice
> 14h : Jean Leonetti, Députe-Maire
d’Antibes-Juan-Les-Pins, Ancien
Ministre - Soigner et prendre soin
jusqu’à la mort.
> 14h30 : Walter Hesbeen, Infirmier,
Docteur en Santé Publique, Professeur
à l’Université Catholique de Louvain,
Responsable pédagogique GEFERS
- Prendre soin de l’humain : quelle
vigilance éthique dans le quotidien des
pratiques ?
> 15h : Table Ronde animée par :
Jean- Pascal Choury, Aumônier au
CHU de Nice , membre de l’EEA.
Christine Saglietto, Responsable
Soignante du Pôle Cardio-Vasculaire,
Thoracique et Métabolique au CHU de
Nice, membre de l’EEA.
> 16h30 : Conclusion
« Soigner et prendre soin »
Faculté de
Médecine
Mosaïques byzannes du Ve siècle de Qsar Libya
2
CHERS AMIS,
SIX ANS DÉJÀ !
Cela fait six années consécutives que
nous vous accueillons, avec de plus
en plus de plaisir, au nom de l’Espace
Éthique Azuréen(EEA) du CHU et du
Département d’Éthique et Sciences
Humaines de la Faculté de Médecine
de Nice, à notre réunion d’Éthique
« grand public » de Printemps, devenue
rituelle….et que vous y répondez avec
enthousiasme. Cette année, le thème,
très porteur, nous a contraints à refuser
200 entrées dans cet amphithéâtre qui
ne contient que 650 places.
« SOIGNER ET PRENDRE SOIN »
Ce sujet n’est pas nouveau, (cf. Médecine
de la Personne : Dr Paul Tournier : 1940).
Il est pourtant de plus en plus d’actualité :
> Que faisons-nous de notre médecine
devenue très scientifique et technique ?
Certes nous savons bien qu’une
éthique du soin, dépourvue de rigueurs
scientifique et technique….n’est pas
éthique !
Mais la personne malade existe-t-elle
pour nous, encore et toujours, en tant
que personne ?
> Pourquoi cette apparente « opposition
complémentaire » entre le CURE et
le CARE ?
> Les attitudes (plus que les
concepts) comme altruisme,
empathie, compassion, disponibilité,
accompagnement, résonnent-elles en
nous (et comment ?), devant un patient
et une famille inquiets, vulnérables,
avides de notre avis et de nos soins,
de notre attention bienveillante…..
mais aussi désireux qu’on respecte
leur autonomie ?
> Le « prendre soin » (Care) est-il réduc-
tible à une qualité naturellement fémi-
nine, …ou encore à un paternalisme
ne portant pas son nom ?...ou n’est-il
pas tout simplement l’expression
morale et universelle de la solidarité
et de l’attention à l’autre ?
Le « prendre soin » ne concerne pas
que le malade et sa famille. Il concerne
presque tout autant l’ensemble des
personnes qui nous entourent, en
particulier nos collaborateurs, les
membres de notre équipe, de notre
service, de notre institution.
Si soigner est un acte individuel et
personnel, « prendre soin » est une
attitude générale, un tout qui n’ignore
personne. Prendre soin de l’équipe,
c’est améliorer le prendre soin du
malade car l’un est inclus dans
l’autre, se rendant mutuellement
indissociables.
Ceci nous conduit naturellement à
l’apprentissage du « travailler ensemble »,
qui est une des déclinaisons du « vivre
ensemble ». C’est ce qu’on appelle
volontiers aujourd’hui le « Management
organisationnel »
L’éthique du management (ou éthique
des organisations) est une partie
intégrante de l’éthique des soins
qui, sans elle, serait inconsistante,
nébuleuse….voir néfaste à l’équipe et
au malade, car déstructurée.
« Vivant jusqu’à la mort » (P. Ricoeur)…
l’Éthique du soin va jusqu’à la fin de la
vie : elle est de plus en plus difficile, de
plus en plus exigeante, de plus en plus
dérangeante, parfois même de plus
en plus décourageante, mais à travers
le soin aux autres, elle ouvre notre
personne physique et spirituelle à ce
que pourra être notre propre mort.
…Et n’oublions pas de prendre aussi
« Soin de nous » !
BONNE JOURNÉE A TOUS
Dominique Grimaud
Professeur émérite d’Anesthésie-Réanimation,
Président de l’EEA, Responsable du
Département d’Ethique et Sciences Humaines
de la Faculté de Médecine, Haut Conseil de la
Santé Publique.
Introduction
3
I - Aider a enseigner les
pratiques soignantes
Les « savoirs » fondateurs de la
pratique de la médecine
L’acquisition des compétences
fondatrices de l’exercice soignant se
fait sur trois niveaux de savoirs intégrant
sciences fondamentales et sciences
cliniques :
1) Le « savoir » en sciences fondamentales
et en sciences cliniques appliquées.
2) le « savoir-faire » c’est le comportement
professionnel et social vis à vis de la
personne malade. Cet apprentissage
ne peut se concevoir que par une
pratique « au lit du malade » et par
compagnonnage.
3) Le « savoir être » : prise en compte
chaleureuse et respectueuse de
la personne souffrante dans ses
composantes culturelles, psychiques,
spirituelles, familiales, sociales,
professionnelles. L’acquisition
du « savoir être » peut se faire par
compagnonnage mais il implique
une réflexion collective et une critique
réciproque des participants.
La relation soignante : du médecin à
la personne souffrante
Comme pour les « savoirs », trois niveaux
de relations soignantes méritent d’être
enseignés et acquis par tous les
soignants. Entre le médecin, ou les
soignants non médicaux, et la personne
se confiant à eux, ont pu être conçus et
identifiés :
1) le « cure », curatif : l’objectif prioritaire
est de procéder à l’identification de
la maladie et à l’optimisation de son
traitement ; c’est la partie technique et
scientifique de la médecine,
2) le « care », compassionnel, reproduit en
quelque sorte une relation fusionnelle
rappelant la relation parentale ; cette
relation donne confiance au malade et
fait qu’il se sent pris en charge,
3) le « take care », respectueux,
dominé par le souci de donner sa
pleine autonomie de décision à
la personne souffrante dans tous
les choix d’investigations ou de
modalités thérapeutique ; soignant
et soigné élaborent ensemble et
sans relation hiérarchique le concept
de risques / bénéfices vis-à-vis des
examens complémentaires, plus
ou moins invasifs, et de la stratégie
thérapeutique.
Il est nécessaire de tenter de différencier
Médecine Personnalisée et Médecine de
la Personne.
II - La Médecine Personnalisée
De la médecine classique à la
médecine de précision : la première
étape de l’evidence based medicine
(EBM)
La création de « groupes homogènes
de malades » (GHM), il y a déjà trente
ans, a eu pour but de comparer des
situations analogues et de développer
une médecine fondée sur des bases
dites « évidentes1 » par un consensus
d’experts et par les données de la
littérature médicale. Cette démarche a
rationalisé les procédures diagnostiques
et thérapeutiques pour une majorité
des patients. Pour une proportion
notable d’entre eux elle ne s’appliquait
cependant pas2.
Toutefois, ces « groupes homogènes »
ont pu être d’un grand intérêt pour
l’évaluation objective et comparative des
processus soignants mis en place dans
les institutions.
Les résultats des essais thérapeutiques,
énoncés en termes statistiques, n’ont
pas eu pour objet de décrire l’effet sur un
individu. Ils ont eu pour effet d’effacer la
personne devant le but de la recherche.
La personne est devenue un objet
statistique.
La médecine personnalisée : la science
émergente immédiatement au service
de la médecine
La Médecine Personnalisée repose
essentiellement sur les premiers niveaux
de relations et de savoirs. D’émergence
récente, elle est centrée sur la maladie
plus que sur la personne.
Elle est née, il y a une vingtaine
d’années du développement des
sciences dites « omiques3 » en ce
qu’elles intègrent une énorme quantité
de données et permettent l’exploitation,
par des spécialistes du traitement de
l’information, des grandes bases de
données issues de la clinique, de la
biologie, des sciences expérimentales,
de la bibliographie.
Outre l’exploitation des grandes bases
de données, la médecine personnalisée,
dite encore médecine de précision,
repose sur l’usage multidisciplinaire de
concepts nouveaux :
> Le séquençage complet du génome
humain,
(1) Evidence based medicine (EBM)
(2) Cette démarche un peu administrative n’a pas convaincu la totalité des médecins pour lesquels la personne demeurait une individualité échappant à la mise
en groupe. Ce constat pouvait les conduire à remettre en question le principe consistant à admettre la priorité de la réduction de la complexité de la personne
à une classification par maladie.
(3) Om en sanscrit signifierait à la fois la grande dimension, la complétude et la plénitude d’un objet observé.
Médecine personnalisée et médecine de la personne
Bertrand Weil, Professeur émérite de Néphrologie - Doyen Honoraire de la Faculté de Médecine de Créteil -
Membre du Comité Consultatif National d’Éthique (CCNE)
4
> la génomique « fonctionnelle »
> la pharmaco génomique,
> la pharmaco génétique,
> l’anatomie pathologique,
> l’imagerie fonctionnelle,
> et la numérisation et l’archivage de
l’ensemble de ces données.
En Californie, sous la houlette de Lee
Hood, du fait du développement de
toutes ces approches nouvelles, est
apparu le concept de la médecine
des quatre P : prédictive, préventive,
personnalisée et participative. Pour
ses promoteurs c’est une révolution
concernant la santé publique et le bien
être individuel. Elle met en œuvre toutes
les sciences dites omiques au premier
chef desquelles la génomique mais
surtout l’exploitation des grandes bases
de données : les « big data ».
Il s’en suit une efficience préventive
et curative de plus en plus grande
dont on ne peut que se féliciter mais
qui risque de donner la priorité à la
maladie plutôt qu’à la personne, au
« cure » plutôt qu’au « care » anglo
saxon.
Les potentiels de la médecine
spécialisée et ses limites
La puissance de cette médecine
nouvelle peut devenir stupéfiante
et enthousiasmante par ses effets
bénéfiques pour le malade.
Le pronostic des cancers, par exemple
dès maintenant, peut s’en trouver
bouleversé au bénéfice évident de la
durée de vie, souvent même du confort
de vie des patients.
Mais elle ne se soucie pas de la
souffrance de la personne, souvent
réduite à un diagnostic et à un traitement.
La médecine spécialisée demande
de plus des équipes nombreuses,
des moyens techniques coûteux, des
médicaments chers. Elle ne peut que
grever lourdement les dépenses sociales,
collectives et solidaires, dévolues aux
soins. Les enveloppes financières
n’étant pas illimitées, le développement
de la médecine de précision risque
bien de se faire au détriment d’autres
actions de santé publique. Elles sont
peu conciliables avec l’économie des
pays en développement… Elles ouvrent
le spectre d’une médecine à deux
vitesses : la médecine spécialisée et
progressiste pour les riches, la médecine
classique conservatrice et moins
efficiente pour les pauvres.
Augmentant la durée de vie, la médecine
de précision augmente par contre coup
la durée et les coûts des traitements de
chaque patient.
III - La Médecine de la Personne
Le role particulier du soignant dans
l’approche de la médecine de la
personne
Le terme « médecine de la personne »
a été utilisé, dès les années mille neuf
cent quarante, par le docteur Paul
Tournier, médecin à Genève, pour
désigner la pratique spécifique de
l’approche clinicienne d’un patient.
Cette pratique médicale repose sur
« l’homme global ». « Elle met l’accent
sur la prise de conscience de la
personne dans son intégralité physique,
psychique, spirituelle, et sa dimension
communautaire et sociale4 ».
Le soignant privilégie alors la dimension
relationnelle et humaine ayant, en soi,
un effet apaisant voire thérapeutique et
même curatif.
La personne souffrante, « ayant perdu la
santé », devient une entité indissociable
bien plus vaste et complexe que ce
qu’impliquerait la seule approche
organiciste, et même psychologique,
de la perte de santé ressentie.
L‘idée est qu’il existe des liens forts et
permanents entre l’insertion sociale et
professionnelle, les accidents affectifs,
pathologiques voire traumatiques de la
vie de la personne et son état de santé5.
La Médecine de la Personne intègre
la relation entre ce qui relève du
psychique et ce qui relève de la
pathologie organique du corps
6
, « elle
reste d’actualité au moment où les
progrès techniques de la médecine et
les contraintes économiques pourraient
réduire l’intérêt de « l’humain » au
dysfonctionnement biologique
techniquement corrigeable7 ». Elle se
caractérise par le fait de prendre soin
de l’autre au moins autant que de le
« traiter » de sa maladie. Elle repose
essentiellement sur les troisièmes
niveaux de savoirs et de relations,
tels qu’énoncés plus haut, étant
nécessairement passés par les deux
niveaux précédents.
Le récit dans la pratique de la
médecine de la personne
Il est traditionnellement dit, « il n’y a
pas de médecine sans récit ». Le récit
concerne au moins autant la personne
dans son entièreté psychologique,
familiale, sociale, citoyenne que les
troubles à connotation médicale dont
elle se plaint.
Siri Hustvedt dans « La femme qui
tremble8 » cite le programme de
médecine narrative de l’Université de
Columbia ayant pour objet d’intégrer l’art
du récit dans la pratique médicale : sans
lui la réalité des souffrances d’un individu
est perdue et la médecine en souffre.
Elle cite Rita Charon : « La connaissance
non narrative tente d’éclairer l’universel
en transcendant le particulier ; la
connaissance narrative, en observant
de près les individus aux prises avec les
conditions de l’existence, tente d’éclairer
ce qu’il y a d’universel dans la condition
humaine en révélant leurs particularités
9
».
Lorsque le médecin veut s’astreindre
à prendre le temps nécessaire à
une vraie relation soignante, en début
de consultation, il convie la personne
à raconter, à exprimer ses plaintes, à
indiquer les signes ressentis de son mal
être, de sa perte de santé. Le médecin
écoute, prend le temps d’entendre,
cherche à comprendre. Il est entièrement
disponible. Il transforme les symptômes
décrits en signes cohérents avec ce qu’il
va rechercher par l’examen clinique du
corps ou de l’esprit.
Il prend part aux souffrances exprimées
dans une compassion et une
bienveillance chaleureuse. Mais il est
concentré sur sa démarche clinique.
Il est disponible à l’autre. Il participe au
« récit ». Il « prend soin ».
Il s’enquiert du contexte familial, social
et professionnel ; du contexte mental
pouvant prendre part ou favoriser le
désordre maladif, du contexte spirituel
si celui-ci est exprimé.
Il prend en compte la personne dans
ce qu’elle est pour elle-même et dans
5
son milieu.
Dans le respect de la personne et à
son profit, il fait usage de ce récit pour
construire les bases de son examen
clinique.
La démarche diagnostique se poursuit
donc par un examen clinique orienté
et minutieux du corps de la personne,
visant à corroborer les symptômes
fonctionnels, tels qu’ils ont été décrits
et entendus, par des signes cliniques
traditionnels et objectifs.
Le médecin explique ce qu’il fait, indique
les signes nouveaux qu’il découvre par
son examen ; il donne les raisons et les
conséquences de ses gestes cliniques.
Il partage les données positives et
négatives qu’il enregistre. Il fait participer
le patient.
Le consentement éclairé
Des résultats de l’examen clinique
sont déduits une ou des hypothèses
diagnostiques. Il en découle la nécessité
ou non d’examens complémentaires
pour en vérifier le bienfondé ou pour
les écarter devant des résultats négatifs.
Le soignant explique au patient ce qu’il
attend des examens prescrits et en
quoi les résultats leur permettront de
prendre ensemble des décisions de
réaliser ou non de nouveaux examens
complémentaires, éventuellement plus
invasifs, mais, surtout, après avoir affiné
le diagnostic, d’envisager des décisions
thérapeutiques.
Dans les deux cas les risques et
les bénéfices seront explicités. Les
choix seront partagés. Le patient sera
totalement informé des démarches
entreprises, de leurs conséquences
possiblement néfastes, de leurs
avantages et inconvénients.
Le consentement véritablement éclairé
pourra être obtenu dans un respect
mutuel du soigné et du soignant.
Les trois niveaux de la relation soignante,
cure, care, et take care ont été respectés.
Une telle démarche, pour souhaitable
qu’elle soit, prend un temps médical non
négligeable allongeant les consultations,
augmentant la valeur des actes.
Il est facile de mesurer combien
la disponibilité du médecin de la
personne doit être grande. Une
tarification adéquate doit pouvoir être
envisagée pour permettre au soignant
de n’être pas, financièrement, pénalisé
par sa disponibilité et sa démarche
soignante.
IV - Un effet de balancement
entre précision et personne
La médecine personnalisée de précision
mobilise des moyens d’investigation et
des thérapeutiques sophistiquées de
plus en plus coûteuses, dont la société
n’aura peut- être plus les capacités de
financement. En contrepartie elle permet
des guérisons spectaculaires. On peut
espérer toutefois que les coûts de
diagnostic puissent aller en diminuant
et que les procédures des sciences
omiques ne soient plus aussi onéreuses.
La médecine de la personne demande
de donner du temps médical et soignant
au patient. Elle suppose l’allongement
de la durée des actes de soins ; elle peut
mieux satisfaire la demande des patients,
et peut, par la rigueur de sa démarche
clinique, contribuer à une meilleure
maîtrise des dépenses de santé.
Il apparaît ainsi qu’il existe un mouvement
inverse : plus on affinerait la médecine
de précision, plus on délaisserait la
personne et réciproquement.
L’exemple des « soins palliatifs »
montre bien que la médecine curative
personnalisée avoue ses limites : dès lors
que l’espoir d’une guérison ne justifie
plus des traitements sophistiqués, que la
fin de vie se rapproche, les médecins de
la précision, aujourd’hui, passent la main
à ceux qui s’occupent de la personne
soumise à des soins volontairement
palliatifs et visant à soulager et
accompagner toutes les souffrances
ressenties dans cette période de vie
précédant sa fin.
Il est nécessaire que la médecine de
la personne intègre la médecine de
précision, fusionnant le « cure », le « care »
et le « take care » dans une médecine de
« l’homme global ».
Extraits tirés du texte publié en Novembre
2015 dans l’ouvrage coordonné par
Simon Daniel Kipman : « Découvrir la
Médecine de la personne » : Regards
croisés Doin Edit. (copyright John
Libbey) Eurotext Paris 2015
(4) www.medecinedelapersonne.org/fr
(5) La santé est un état de complet bien-être physique, mental et social, et ne consiste pas seulement en une absence de maladie ou d’infirmité. Préambule à la
Constitution de l’Organisation mondiale de la Santé, tel qu’adopté par la Conférence de l’Organisation mondiale de la Santé, n°. 2, p. 100), et entré en vigueur
le 7 avril 1948.
(6) Voir : « La médecine psychosomatique : un mythe devenu une réalité ». Thématiques en santé mentale Doin 2008
(7) www.medecinedelapersonne.org/fr
(8) Siri Hustvedt : La femme qui tremble, une histoire de mes nerfs, essai traduit de l’américain par Christine le Bœuf Babel Actes Sud 2010 p. 42
(9) Rita Charon : Narrative medicine : honoring the stories of illness (Oxford : Oxford university press 2006 p. 9)
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