3 Principe de réalisation d`une horloge atomique

3 Principe de réalisation d’une horloge atomique
Nous nous limitons à considérer la réalisation d’un très bon oscillateur, qui devra-t-être complété par un
compteur ou autre dispositif de mesure de phase pour constituer une horloge. Plus précisément donc, nous
considérons ici la réalisation d’un « étalon primaire de fréquence », soit un oscillateur dont la fréquence est relié
le plus directement possible à la définition de la seconde.
3.1 Quelle transition choisir pour la fréquence d’horloge ?
On veut connaître la fréquence νde façon la plus parfaite. Il faut donc que les états E2et E1soient bien
définis ou que leurs durées de vie soient plus grandes que le temps d’interrogation T. La largeur de résonance
sera ν1/(2πT ).
A cause de l’émission spontanée, la plupart des transitions ont des durées de vie limitées. Par exemple, pour
le césium, les transitions dipolaires électriques 6S1
26P3
2
ont une durée de vie de l’ordre de 30 ns (la largeur
de résonance est de 5 MHz).
Un atome dans l’état fondamental possède a priori une durée de vie infinie. Or, pour le césium, Il existe 2
niveaux dans l’état fondamental 6S1
2
et on choisira la transition qui s’effectue entre les 2 niveaux hyperfins F= 3,
F= 4.C’est une transition dipolaire magnétique (en négligeant les transitions quadripolaires électriques). Elle
est donc stimulée par un champ magnétique oscillant. Le Hamiltonien d’interaction est donné par : H=~
M·~
B
ou Mest le moment magnétique associé à l’état.
Depuis 1967, c’est cette transition qui est utilisée pour définir la seconde et la valeur de la fréquence corres-
pondante a été fixée à :
νcs = 9192631770 Hz (1)
3.2 La méthode d’interrogation des atomes
L’objectif de l’horloge atomique est de rendre accessible le signal atomique. Il existe 2 façons possibles :
1. Les atomes, préparés dans l’état d’énergie supérieur, fournissent directement le signal par effet stimulé
(horloge active comme laser, maser ou plus généralement les oscillateurs). L’effet stimulé dépend fortement
du nombre de photons que voit l’atome et ces photons doivent avoir les mêmes propriétés (fréquence,
vecteur d’onde). Pour stocker ces photons les atomes sont placés dans une cavité résonante possédant les
bonnes propriétés pour conserver les photons stimulés. Il faut aussi un grand nombre d’atomes pour que
le gain qu’ils apportent soit aussi grand que les pertes de photons : une cavité n’est jamais parfaite et
la durée de vie d’un photon ne dépasse guère la nanoseconde sauf cas très exceptionnel (cavité supra-
conducteur). Dans ces conditions il existe des perturbations relativement fortes qui déplacent la fréquence
de résonance atomique : interactions entre atomes, avec les parois de la cavité et un effet d’entraînement
de fréquence par la cavité si celle-ci n’a pas une fréquence de résonance qui coïncide avec celle des atomes ;
ce qui finit toujours par arriver à cause de dérives mécaniques de la cavité. En terme d’exactitude de
fréquence ces dispositifs ne sont pas très bons. En revanche la fréquence peut être très stable sur des
temps de plusieurs secondes comme pour les oscillateurs à quartz (effet stimulé de phonons), d’un laser où
de quelques heures comme dans le cas du maser à hydrogène (transition à 1,4 GHz) ou d’un laser asservi.
Les masers à hydrogène sont par exemple très utilisés en VLBI pour assurer la cohérence temporelle sur
quelques heures entre les signaux observés.
Ces oscillateurs vont aussi être des compléments indispensables aux horloges atomiques passives.
2. Les atomes, préparés dans un seul état d’énergie, interagissent avec le signal fourni par un oscillateur
externe (très stable sur le temps d’interaction). En détectant le nombre d’atomes ayant été transférés
dans l’autre état, on obtient un signal de résonance qui atteint un maximum lorsque la fréquence de la
résonance atomique coïncide avec la fréquence du signal. Ce signal de détection pourra alors être utilisé
pour contrôler la fréquence de l’oscillateur afin de transférer l’exactitude et la stabilité de la résonance
atomique (c’est un asservissement). C’est ce procédé qui est utilisé pour réaliser l’horloge à césium.
18
3.3 Schéma général de l’horloge
4 Interrogation de la transition hyperfine de l’état fondamentale du
césium
Dans le cas du césium la transition hyperfine sera excitée par une interaction dipolaire magnétique : appli-
cation d’un champ magnétique oscillant.
4.1 Interaction de Rabi
Lorsque le champ magnétique oscillant est aligné selon l’axe du champ statique z, le hamiltonien d’interaction
s’écrit :
Hint =gJµBSzBgIµBIzB(2)
Mais les états propres |F, mFidu hamiltonien atomique ne sont plus états propres de ce hamiltonien d’in-
teraction (les opérateurs ~
Iet ~
Sne commutent pas avec l’opérateur ~
F).Il faut donc utiliser la décomposition
des états F, mFsur la base des états propres de ~
Iet ~
S:|I, S, mI, msi. Par exemple l’état F= 3,mF= 0 s’écrit
dans la base mI, mS:
|3,0i=p1/2|1/2,1/2i − p1/2|−1/2,1/2i(3)
Sous l’action de Hcet état devient :
(gIµBIzB+gJµBSzB)hp1/2|1/2,1/2i − p1/2|(1/2,1/2ii(4)
=1
2µBBh(gI+gJ)p1/2|1/2,1/2i − (gI+gJ)p1/2|−1/2,1/2ii(5)
=1
2µBB(gI+gJ)hp1/2|1/2,1/2i+p1/2|−1/2,1/2ii(6)
=1
2µBB(gI+gJ)|4,0i(7)
Le Hamiltonien Hint couple donc les 2 états hyperfins. Nous avons donc un système à 2 niveaux que l’on
note |eiet |fid’énergies ~ωe>~ωf. L’équation d’évolution de la fonction d’onde est donnée par :
i~d
dtΨ(t) = HtotalΨ(t)=(H0+Hint(t)) Ψ(t)(8)
19
Soit Ψ(t) = a(t)|fi+b(t)|eiavec a(t)et b(t)des fonctions complexes et |a(t)|2+|b(t)|2= 1.
En remplaçant :
i~d
dta(t)|fi+d
dtb(t)|ei=a~ωf|fi+b~ωe|ei+aHint |fi+bHint |ei(9)
En multipliant par les 2 états duaux hf|et he|on obtient donc 2 équations différentielles complexes du
premier ordre couplées :
d
dta(t) = fa(t)i
~b(t)hf|Hint(t)|ei(10)
d
dtb(t) = eb(t)i
~a(t)he|Hint(t)|fi(11)
Pour simplifier, nous pouvons remplacer a(t)par α(t)eftet b(t)par β(t)eet:
d
dtα(t) = i
~β(t)ei(ωeωf)thf|Hint(t)|ei(12)
d
dtβ(t) = i
~α(t)ei(ωeωf)the|Hint(t)|fi(13)
Dans la suite on posera ω0=ωeωf.Nous avons hf|Hint(t)|ei=1
2µBB(gI+gJ). Soit B=B0cos(ωt) =
B0
1
2(et +eiωt)avec B0et ωconstantes. Soit Ω = 1
2~µBB0(gI+gJ), que nous appelons la « fréquence de
Rabi ». Il vient :
d
dtα(t) = i
2β(t)ei(ω0+ω)t+ei(ω0ω)t(14)
d
dtβ(t) = i
2α(t)ei(ω0+ω)t+ei(ω0ω)t(15)
Nous avons donc un système de 2 équations différentielles couplés qui contient 2 fréquences d’oscillation :
(ω0+ω)et (ω0ω). Celle à fréquence rapide (ω0+ω)pourra être négligée. En effet regardons comment évolue
le système au tout début de l’interaction. Par exemple à t= 0 nous sommes dans l’état |fi.Alors après un
temps très court tde telle sorte que le système a très peu évolué on peut écrire :
d
dtα(t)'0
d
dtβ(t) = i
2ei(ω0+ω)t+ei(ω0ω)t
=β(t) = 1
2ei(ω0+ω)t
ω0+ω+ei(ω0ω)t
ω0ω(16)
Le coefficient β(t)contient 2 termes de module 1
ω0+ωet 1
ω0ω.Lorsque la fréquence du champ appliqué ω
se rapproche de la fréquence de résonance atomique ω0le deuxième terme devient très largement prépondérant.
Par exemple dans une horloge à césium ω01010 et ω0ωreste toujours de l’ordre de 1 : 10 ordres de grandeur
sépare donc la contribution des 2 termes. Nous pouvons donc négliger la première contribution dans l’évolution
de la fonction d’onde. Donc on peut négliger le terme en eiωt dans βet de même pour αon peut négliger le
terme et.
Posons δω =ωω0, il reste donc :
d
dtα(t) = i
2β(t)eωt (17)
d
dtβ(t) = i
2α(t)eωt (18)
Résolution analytique
Les équations ci-dessus se résolvent simplement (TD). Avec α(0) = 1 et β(0) = 0 nous trouvons que la
probabilité de trouver la fonction d’onde dans l’état |fi, égale à |α|2s’écrit:
|α|2=δω2
2+δω2sin21
2pδω2+ Ω2t+ cos21
2pδω2+ Ω2t(19)
=
δω2+ Ω2cos21
2δω2+ Ω2t
2+δω2(20)
20
et la probabilité de trouver la fonction d’onde dans l’état |ei, égale à |β|2:
|β|2=2
2+δω2sin21
2pδω2+ Ω2t(21)
et cela vérifie |α|2+|β|2= 1.
A résonance, δω = 0,l’expression de |β|2se ramène à sin21
2t. La probabilité de transition évolue à la
fréquence de Rabi ,P=1
2(1 cos Ωt)avec Ω = 1
2~µBB(gI+gJ)pour l’interaction dipolaire magnétique.
Elle atteint un premier maximum pour t=π.
P= 1 lorsque t= (2k+ 1)π(22)
En pratique, on adapte la valeur de (donc B) pour que τ=πτest le temps d’interaction.
Autre donnée importante est la largeur du signal de résonance ω:
ω'2π
τ.(23)
En fréquence (Hz) la largeur totale ν=1
τ
Pour asservir la fréquence de l’oscillateur, sa fréquence moyenne sera placée à mi-hauteur de telle sorte
qu’une fluctuation de fréquence se traduise en une fluctuation de la probabilité de transition (à mi-hauteur la
pente de la résonance est la plus forte et est inversement proportionnelle à ν).
Interprétation géométrique
Pour faciliter l’interprétation d’une interaction entre 2 niveaux nous allons utiliser la représentation par le
vecteur de Bloch (valable pour tous les systèmes à 2 niveaux et qu’on référence en général au spin (spin fictif) :
pour un spin l’interprétation géométrique a une signification physique claire).
Nous considérons un cas plus général avec B=B0f(t) cos(ωt). Ici f(t)représente la possibilité d’allumer et
d’éteindre le champ magnétique dans le temps.
Le hamiltonien peut aussi se mettre aussi sous la forme suivante en prenant l’origine des énergies à ~ω0
2et
en négligeant les termes d’oscillation rapide :
H(t) = ~ω0
2(|eihe|−|fihf|) + ~
2f(t)|eihf|eiωt +|fihe|eiωt(24)
et donc :
id
dtα(t) = ω0
2α(t) +
2f(t)etβ(t)(25)
id
dtβ(t) = ω0
2β(t) +
2f(t)etα(t)(26)
Ces relations sont identiques à un spin plongé dans un champ magnétique statique selon z l’axe de quantifi-
cation et un champ magnétique oscillant aligné sur un axe perpendiculaire. C’est pourquoi on peut interpréter
ces interactions dans un système à 2 niveaux comme un spin fictif.
Pour simplifier l’expression on passe dans un référentiel tournant avec le changement de variable suivant :
a(t) = α(t)et/2b(t) = β(t)eiωt/2(27)
d’où
id
dtα(t) = ω0ω
2α(t) +
2f(t)β(t)(28)
id
dtβ(t) = ω0ω
2β(t) +
2f(t)α(t)(29)
soit
id
dtα(t) = δω
2α(t) +
2f(t)β(t)(30)
id
dtβ(t) = δω
2β(t) +
2f(t)α(t)(31)
21
Réécrivons cette expression en faisant apparaître les 3 composantes du vecteur de Bloch. On pose :
u=1
2(αβ+αβ)terme en phase avec le champ (32)
v=1
2i(αβαβ)terme en quadrature (33)
w=1
2(|β|2− |α|2)proportionnel à la différence de population (34)
alors
du
dt =1
2(
dt β+α
dt +
dt β+α
dt )(35)
du
dt =1
2i(δω
2αβ+
2f(t)ββαβδω
2
2f(t)αα+δω
2αβ(36)
2f(t)ββ+αδω
2β+
2f(t)αα)(37)
du
dt =1
2i(αβαβ)δω =δωv (38)
dv
dt =1
2(δω
2αβ+
2f(t)ββαβδω
2
2f(t)αα(39)
δω
2αβ+
2f(t)ββαδω
2β
2f(t)αα)(40)
dv
dt = +1
2δω(αβ+αβ)1
2(β2α2)Ωf(t) = δωu w(41)
dw
dt =1
2β
dt +β
dt α
dt α
dt (42)
=β
2i(δω
2β+
2f(t)α) + β
2i(δω
2β+
2f(t)α)(43)
+α
2iδω
2α+
2f(t)βα
2iδω
2α+
2f(t)β(44)
dw
dt =β
2i
2f(t)α+β
2i
2f(t)α+α
2i
2f(t)βα
2i
2f(t)β(45)
dw
dt =1
2i(αβαβ) Ωf(t)=Ωf(t)v(46)
donc
du
dt =δωv (47)
dv
dt =δωu f(t)w(48)
dw
dt = Ωf(t)v(49)
si ~
Sest le vecteur de coordonnées (u, v, w)alors l’équation ci-dessus se résume à :
d~
S
dt =~
×~
S(50)
~
a pour coordonnées (f(t),0, δω).On a donc une précession du vecteur ~
Sautour de la rotation
instantanée donnée par ~
.
L’interaction de Rabi correspond à une rotation du vecteur ~
Spar un angle πautour du vecteur constant ~
(f(t)=1). On parle d’une « impulsion π».
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