Lettre d’investissement 2 0 1 5 26 janvier 2015 Les t e n dan ces défl a ti on ni s tes de vr ai e nt s e rés o ud re da ns u ne no uv el l e va g ue d’i nfl a ti o n . L ’économie mondiale a poursuivi son expliquent la performance économique des expansion l’exercice. Etats-Unis et notamment le boom l’exploitation Cependant, derrière cette apparente des hydrocarbures de schiste, qui a relevé au cours de stabilité, de nouvelles forces accentuent les fortement tensions sur les marchés financiers. américains intensifs en énergie. La reprise de l’activité se confirme aux Etats- La Zone euro demeure à la traine. Unis. la compétitivité des secteurs En Zone euro, la croissance a été extrêmement La croissance américaine s’est accélérée en ténue, à cause de la faiblesse de la demande 2014. Les bilans des ménages se sont assainis, la interne et des exportations. Les politiques de production industrielle augmente, le chômage contraction budgétaire et de renforcement des continue de reculer, le solde primaire se fonds propres des acteurs financiers ont redresse. Ces bons résultats illustrent dans une aggravé les problèmes de bilans légués par la large mesure le pragmatisme des autorités crise. En l’absence de de prêteur en dernier américaines, qui ont adopté une hiérarchie des ressort, des pays-clés de la zone euro se sont objectifs de politique économique inverse de la retrouvés dans une situation analogue à celle de Zone euro. Cependant, au-delà des choix de pays émergents ayant lié leur sort à une devise politique publique, d’autres facteurs endogènes étrangère. 1 L’impact économique de politiques de rachat apparaît très élevé pour un pays ayant un d’actifs décidées par la banque centrale développement européenne le culture de marché limitée et une faible remarquait récemment l’économiste en chef de accumulation de richesses. Les dirigeants la les chinois doivent ainsi éviter une dégradation comportements liés à la survenance de la crise trop rapide de leurs avantages compétitifs, tout risquent de perdurer, alors même que les causes en veillant à la contraction des surcapacités qui en sont à l’origine auront cessé de produire générées par le boom d’investissement des leurs effets : plus longue sera la crise, plus dernières années. Le chemin est étroit et expose profondes les conséquences. A la différence des les autres pays avancés, où la croissance s’affermit, turbulences, les économies de la Zone euro sont loin d’être considérablement amplifiés par la dégradation tirées d’affaire. des conditions de liquidité liée à la hausse des BCE, reste par un incertain. effet Comme d’hystérèse, marchés économique financiers ces à chocs récent, de une nouvelles pouvant être opérations à effet de levier. P La contraction des écarts de crédit en Zone euro ne saurait donc être interprétée comme un retour au statu quo ante des années 2000 2010. Placés dans une situation de taux d’intérêt et d’inflation artificiellement réprimée, les Etats ar ses interventions, monétaire règlement la américaine a politique évité désordonné un des déséquilibres. Mais, avec l’appréciation du de la Zone euro les plus fragiles ne sont pas à dollar, les équilibres sont en train de se modifier. l’abri d’une réévaluation rapide des primes de Depuis la fin du système de Bretton Woods, les risque, la force du consensus politique en faveur Etats-Unis entretenaient un déficit courant avec de l’euro, l’intérêt bien compris de l’Allemagne, le reste du monde, de sorte que les pays excluant toutefois à court terme toute remise en excédentaires cause du système. finançaient la croissance américaine. C’est le sens du fameux « déficit Les pays émergents font face à de nouvelles sans pleurs », selon l’expression bien connue de difficultés. Rueff. Le ralentissement de l’activité économique Cependant le dollar est tout autant une charge mondiale, conjugué au renchérissement du qu’un privilège. Par leurs achats et leurs dollar et à la chute de certains produits de base, investissements à l’étranger, les américains a constituent aussi la principale source de continué d’affecter en profondeur les économies émergentes. financement des économies émergentes et de la Chine en particulier. Les interventions La situation économique chinoise requiert une d’ampleur inégalée du Fed depuis 2008, pour attention particulière. Depuis son adhésion à critiquables qu’elles soient du point de vue d’un l’Organisation mondiale du commerce en 2001, libéralisme la Chine a connu une expansion rapide, accompagnée d’une progression vraisemblablement très l’économie, partie significative est portée par des sociétés d’endettement de un ainsi assèchement qui aurait plongé les pays émergents et le monde développé dans une financières offshore qui se financent en dollars. niveau évité ont généralisé des sources de financement de importante des encours de crédit, dont une Le classique, l’économie 2 crise économique profonde, analogue à celle de en faisant porter à chaque institut d’émission 1929. La dépression mondiale a donc été évitée. l’essentiel du risque de défaut, elle consacre la fragmentation financière de la zone euro, sans Toutefois, on ne peut être aujourd’hui que déçu de l’effet des politiques garantir la relance du crédit. En revanche, elle monétaires est de nature à accentuer la pression sur les quantitatives : depuis la chute de Lehman marchés de la dette souveraine d’Europe du Brothers, les interventions du Fed, de la Banque centrale européenne, de la Sud, au fur et à mesure que les opérateurs de Banque marché prendront conscience des déséquilibres d’Angleterre, de la Banque du Japon sur les sous-jacents en Zone euro. marchés n’ont pas cessé. En sept ans, le bilan de la Réserve fédérale américaine a été multiplié La hausse du dollar oblige la croissance par 6 ! Cependant, le monde développé est au mondiale à trouver de nouvelles sources de bord de la déflation. Comment expliquer ce financement. paradoxe ? Comme indiqué précédemment, les Etats-Unis L’action des banques centrales ne suffit pas à ont connu pendant plusieurs décennies une endiguer les pressions désinflationnistes. balance des paiements déficitaire. Ce phénomène est en train de s’inverser : malgré la Cette contradiction apparente a été résolue par bonne santé de l’économie américaine, le déficit les partisans de l’Ecole monétariste américaine, courant américain est à un niveau proche de qui pointent l’écart entre la monnaie créée par celui observé lors de la récession de 2009 et, la banque centrale et la monnaie d’origine rapporté privée créée par le système bancaire, via le au PIB, il est revenu approximativement au pallier du début des truchement du multiplicateur de crédit. La années 1990. monnaie « banque centrale », remarquait récemment H. Lepage, ne représente qu’une Comme le remarque notamment R. Nappier, faible part des liquidités fabriquées par le cette évolution s’appuie sur des tendances de système bancaire. C’est pourquoi, malgré long terme : l’exploitation à grande échelle des l’ampleur apparente des mesures d’achats hydrocarbures de schiste, la hausse de la d’actifs, la masse monétaire au sens le plus large compétitivité industrielle et l’arrivée à l’âge de (M3) ne progresse que très lentement et se la retraite des cohortes issues des générations contracte dans les pays les plus touchés par la d’après-guerre. Les américains envoient donc crise. moins de dollars à l’extérieur. De nature structurelle, ces facteurs devraient faire sentir Aux prises avec les forces déflationnistes, les leurs effets pendant plusieurs années. banques centrales ont donc adopté une politique finalement plutôt restrictive. C’est en Les conséquences de cette hausse du dollar particulier le cas de la Banque centrale sont encore mal intégrées par les professionnels européenne, qui les de l’investissement. Comme indiqué ci-dessus, contraintes du consensus politique. L’annonce le financement de la croissance mondiale au depuis la fin du système de Bretton Woods a été début de est handicapée l’année 2015 par d’un vaste programme de rachat d’obligations souveraines largement à hauteur de 60 milliards d’euros par mois américain. Avec l’appréciation du dollar, le n’infirme pas cette analyse, dans la mesure où, 3 assuré par le déficit courant mouvement est aujourd’hui en train de se Japon, la Banque d’Angleterre, se sont libérées renverser. de leurs chaines monétaires. Même la Banque centrale européenne s’est engagée dans un Face à cette évolution, les pays avec un programme de rachat de titres. Les tendances endettement extérieur en dollar faible, comme déflationnistes qui se manifestent partout dans la Chine, vont vraisemblablement dévaluer leur le monde pourraient donc se résoudre en une monnaie ; ceux qui entretiennent de forts nouvelle vague d’inflation. Dans cette logique, déficits courants avec la Zone dollar n’auront les actifs réels, l’immobilier, les obligations pas d’autre choix que de contracter leur indexées sur l’inflation, les actions, l’or, enfin, demande interne. sont les meilleurs vecteurs d’investissement et A long terme, la reprise de l’inflation semble de réserve de valeur à long terme pour les toujours inéluctable. investisseurs, sous réserve qu’ils disposent de En situation de changes fixes ou d’étalon-or, la passifs suffisamment longs pour supporter les contraction de la balance des paiements risques de liquidité et de marché à court terme. américaine exposerait l’économie mondiale à une nouvelle vague déflationniste. Le monde Emmanuel Sales développé serait alors dans une situation similaire à celle qu’il a connue dans l’entre-deux guerres, lorsque toutes les Président, Financière de la Cité économies Achevé de rédiger le 26 janvier 2015 occidentales, qui avaient lié leur monnaie au dollar et à la livre sterling (eux-mêmes définis [email protected] par référence à un certain poids d’or), avaient lutté pour défendre leurs parités monétaires lors de la crise de 1929, aggravant ainsi la contraction de leur économie. Toutefois, la situation actuelle des économies occidentales n’est pas celle des années Trente. La Banque populaire de Chine, la Banque du Ce document est remis à titre d’information et ne saurait constituer une offre de souscription ou d’achat de fonds d’investissement. Les performances passées ne préjugent pas des résultats futurs. Le Prospectus de l’OPCVM doit être impérativement remis au souscripteur potentiel préalablement à toute souscription. 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