Lettre d`information n° 4, février/mars 2014 Editorial Interaction

Réseau Philosophie-Economie Lettre d’information n° 4 (février/mars 2014) 1/9
Lettre d’information n° 4, février/mars 2014
Sommaire :
Editorial : Interaction « Philosophie-Economie » et HPE : des rapports à préciser p. 1
Actualité : La vie du réseau p. 4
Centre précurseur : Chaire Hoover (Université Catholique de Louvain) p. 5
Centre prometteur : Witten Institute for Institutional Change (WIIC) p. 8
Editorial
Interaction « Philosophie-Economie » et HPE,
des rapports à préciser
En près de quinze mois de fonctionnement du réseau, l‟expérience accumulée nous
incite à consacrer cet éditorial à une question à laquelle nous sommes régulièrement
confrontés : la question des rapports entre « philosophie économique » au sens nous
l‟entendons et « histoire de la pensée économique » (HPE), axe de recherche classique des
économistes. Si les spécialités à partir desquelles on peut concevoir les interactions entre
philosophie et économie sont multiples, nous avions recensé dès la lettre du lancement du
réseau (novembre 2012) trois axes majeurs d‟interactions entre philosophie et économie :
(a) philosophie morale et économie normative, (b) philosophie des sciences et méthodologie
économique, (c) histoire de la philosophie et histoire de la pensée économique.
Notre souci constant dans la gestion du réseau est donc de signaler sur le site les textes
ou manifestations, dans lesquelles les deux disciplines sont manifestement présentes, qu‟elles
le soient de manière équilibrée ou que l‟une soit la discipline « majeure » et l‟autre y joue un
rôle plus « secondaire ». Indépendamment de la perspective retenue (éthique, épistémologique
ou historique), c‟est donc la coexistence des deux disciplines qui est, à notre sens, la condition
nécessaire pour susciter des interactions entre elles, afin que des économistes, quelle que soit
leur spécialité (macro- et micro-économie, économie internationale, finance, économie
publique, etc.), tentent de dialoguer avec des philosophes, dès lors que ceux-ci reconnaissent,
de leur côté, l‟économie comme champ de réflexion pertinent et acceptent de s‟y intéresser.
Ce souci d‟ouverture maximale à toutes les spécialités de l‟économie ne nous empêche
pas d‟admettre une évidence, à savoir que les économistes spécialisés dans l‟HPE ont une
sensibilité particulière à l‟égard des interactions entre philosophie et économie, comme
l‟atteste par exemple l‟ouverture à la philosophie économique de nombreuses revues d‟HPE.
Cependant, cette sensibilité particulière n‟exonère pas l‟HPE du critère d‟interaction
mentionné plus haut. Autrement dit, pour relever de la philosophie économique, les
recherches en HPE doivent, selon nous, pouvoir aussi intéresser, voire impliquer des
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philosophes ou des historiens de la philosophie. Comme les recherches propres à d‟autres
spécialités de l‟économie, des travaux purs d‟HPE ne relèvent donc pas en soi de l‟interaction
philosophie-économie et n‟ont pas à être systématiquement relayés sur le réseau. D‟autant
plus que certains travaux d‟HPE revendiquent, comme dans d‟autres spécialités de
l‟économie, leur autonomie complète vis-à-vis de la philosophie1.
Tel est le sens de la réponse faite il y a quelques semaines à un de nos membres pour
lui expliquer pourquoi nous ne pouvions pas relayer l‟information sur la publication
d‟ouvrages d‟HPE dans une collection intitulé « Naissance de l‟économie politique ». Même
si, à l‟époque concernée (avant le 19ème siècle), la distinction entre économie et philosophie
était largement poreuse, il nous est difficile de considérer que les auteurs concernés puissent
relever de l‟interaction entre philosophie et économie au sens nous l‟entendons
aujourd‟hui, avec une histoire de la philosophie désormais bien distincte de l‟histoire de la
pensée économique. L‟avantage de notre position est aussi d‟éviter la solution artificielle qui
consisterait à transformer notre réseau en « trou noir » des sciences sociales : en étendant le
champ déjà vaste de l‟interaction « philo-éco », toute réflexion de sciences sociales, au-delà
de la seule histoire des idées, aurait sa place sur notre réseau, dès lors qu‟une dimension
philosophique ou économique y affleurerait (cf. lettre d‟information n° 2 où cette dérive
potentielle était déjà repérée).
Ceux que cette réflexion très importante intéresse trouveront ci-dessous l‟argumentaire
détaillé que le secrétariat du réseau a envoyé à notre collègue. Au-delà du cas d‟espèce
considéré, cet argumentaire s‟applique en effet à bien d‟autres cas auxquels nous avons été
confrontés et nous le soumettons bien volontiers à discussion (vos commentaires à adresser à :
Extrait de notre réponse
« Si nous avons choisi de ne pas mentionner la jeune collection « Naissance de
l‟économie politique », c'est parce qu'elle nous semble relever de l‟histoire de la pensée
économique et pas de la philosophie économique. Il y a un parti-pris (qui en tant que tel
peut, et même doit, être discuté) concernant la définition du champ de la philosophie
économique. Derrière le débat (qui a été organisé sur le site du réseau, mais n‟a pas donné lieu
à autant de réponses que nous l‟espérions) portant sur le nom à donner au champ disciplinaire
appelé selon les cas « philosophie économique », « philosophie de l'économie » ou
« épistémologie économique » se trouve évidemment la question de la définition de ce champ
de recherche. Dans notre idée, le Réseau Philosophie-Economie n'est pas un réseau
d‟historiens de la pensée et son principal objectif est de diffuser et de favoriser les interactions
entre philosophie et économie sur des problématiques contemporaines.
Disons les choses comme elles sont et sans détour : nous sommes totalement
convaincus de l‟importance de l'étude de l‟histoire de la pensée (de l‟histoire de la pensée
économique, mais bien entendu de lhistoire de la pensée en général) pour comprendre le
monde et les problématiques contemporains. Il est bien difficile de comprendre l‟on se
trouve (et même l‟on va), si l'on ignore d‟où l‟on vient. Notre savoir et nos disciplines
dépendent de beaucoup trop de choix théoriques passés pour que l‟on puisse faire l‟économie
de se tourner vers le passé. Et prétendre faire de la philosophie économique sans jamais se
1. A l‟image de Joseph Schumpeter qui, dans sa célèbre et influente Histoire de l’analyse économique,
affirme : « Je considère que le voile de la philosophie peut s‟enlever également dans le cas de l‟économie »
[(1954), réédition française de 1983, p. 60]. Citation récemment reprise et commentée dans une autre perspective
par Mardellat « Qu‟est-ce que la philosophie économique ? », Cahiers d’économie politique, 2013 (65), p. 10.
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référer à l‟histoire de la pensée ne serait pas seulement une erreur méthodologique, ce serait
une totale absurdité. Cela explique en partie le fait qu‟un nombre non négligeable de nos
membres se définiraient probablement eux-mêmes comme faisant de l‟histoire de la pensée
économique.
Il est donc indiscutable que les travaux de philosophie économique impliquent très
souvent de faire de l'histoire de la pensée, mais, d'une part, ce n‟est pas le cas de toute
démarche de philosophie économique, d‟autre part, tout ce qui relève de l‟histoire de la
pensée n‟est pas immédiatement et par là-même de la philosophie économique au sens
nous l‟entendons. A titre personnel, nous avons un fort intérêt pour et des affinités certaines
avec l‟histoire de la pensée économique, mais nous avons aussi la conviction que la
philosophie économique n‟est pas soluble dans ce sous-champ disciplinaire. Par ailleurs, nous
n‟avons eu la volonté de créer le Réseau Philosophie-Economie ni pour faire concurrence, au
niveau national, à lAssociation Charles Gide qui promeut (et fort bien) l‟étude de l‟histoire
de la pensée économique en France depuis plus de 25 ans, ni, au niveau européen, à
lEuropean Society for the History of Economic Thought qui fait la même chose au niveau
international depuis 1996. Vous pourriez me répondre que diffuser une information ne
constitue certes pas une forme de « concurrence », mais l‟augmentation du nombre de
messages postés sur le site de notre réseau (39 au mois de novembre) et le fait de savoir qu‟il
existe des vecteurs de diffusion des informations concernant l‟histoire de la pensée
économique, nous conduisent à penser que nos membres seront informés de l‟existence de la
collection « Naissance de l‟économie politique » et à nous concentrer, sur le site du réseau,
sur des informations relevant de l‟interaction entre économie et philosophie - qui seraient pour
leur part très peu ou pas du tout relayées sans notre réseau.
Si l‟on ne peut certes pas lancer un réseau sans avoir des lignes directrices en tête, il
est évident que nous ne possédons pas la vérité sur ce qu‟est (doit être ?) la philosophie
économique et que nous en défendons une conception particulière - il existe forcément des
conceptions différentes de ce champ. Nous pensons que le Réseau Philosophie-Economie
(avec ses 370 membres à ce jour) a atteint une taille suffisante pour que cette question de la
définition de la philosophie économique soit posée et discutée en son sein. Nous allons
réfléchir à la meilleure façon de lancer cette discussion - notre premier débat ayant eu, comme
je vous le disais, des retours très inférieurs à nos espérances. Nous serions très intéressés
d‟avoir votre avis tant sur le fond de cette question que sur les possibles modalités de mise en
place d‟une telle discussion. »
Claude Gamel (AMSE-GREQAM, Université d‟Aix-Marseille)
Jean-Sébastien Gharbi (AMSE-GREQAM, Université d‟Aix-Marseille)
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Actualité
La vie du réseau
Informations diverses à l’attention des membres du réseau :
- Le nombre de membres du Réseau Philosophie-Economie continue d‟augmenter (bien que
plus lentement que durant les derniers mois. Le 1er mars 2014, le Réseau comptait 387
membres avec une proportion de membres non francophones proche de 44 %.
- Nous sommes partenaires du Deuxième colloque international « Philosophie économique »
(Strasbourg, 9-10 octobre 2014). Selon l‟information communiquée par le comité local
d‟organisation, l‟appel à communications du colloque, clos le 31 janvier dernier, a permis
d‟enregistrer 172 propositions de communication. La notification aux auteurs sur
l‟acceptation ou non de leur projet est prévue pour le 31 mars prochain.
- Le site du Réseau (http://philo-eco.eu) s‟est enrichi d‟une nouvelle « catégorie » (à droite sur
la page d‟accueil) intitulée « Programmes de master ». L‟objectif de cette nouvelle catégorie
n‟est bien sûr pas de constituer à court terme un fichier exhaustif de tous les programmes de
master existant à ce jour en Europe et relevant de l‟interaction « philosophie-économie » (type
PPE « Philosophy, Politics and Economics »). Comme pour les autres catégories présentes sur
le site, il s‟agira de diffuser les informations sur les créations et les évolutions de ces
programmes, que les membres du réseau voudront bien nous transmettre (secretariat@philo-
eco.eu) ou que nous trouverons nous-mêmes.
- Toujours sur le site du Réseau, un deuxième thème de discussion (« Débat 2 ») sur les
« critères de la philosophie économique » a été récemment proposé dans l‟onglet « Débats ».
Le point de départ de ce débat est un texte (en anglais) de Wolf Dieter Enkelmann (Institut für
Wirtschaftgestaltung, Munich). Vos commentaires peuvent être laissés en français ou en
anglais sur le site du réseau, dans la rubrique « Débat n°2 ».
- Dans notre troisième lettre d‟information (fin octobre, rubrique « actualités ») avait été posé
le problème d‟une organisation plus structurée du réseau à moyen terme, dont les solutions
devaient être examinées plus en détails dans la présente lettre. Cet examen est prématuré, car
les trois solutions envisagées, tout en restant plausibles, demeurent toujours aussi incertaines.
Nous nous engageons à ce que le Réseau continue sous sa forme actuelle (interactivité et
bénévolat) au moins jusqu‟au Colloque de Strasbourg, l‟automne prochain. Nous espérons
qu‟à cette occasion, les échanges et les rencontres avec ceux d‟entre vous qui seront présents
permettront de faire le point sur les soutiens et les collaborations possibles et de dégager ainsi
des solutions plus durables.
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Centre précurseur
La Chaire Hoover d'éthique économique et sociale
Université de Louvain (Belgique)
Nous reprenons ici la rubrique « Centre précurseur » apparue dès le 1 de notre
lettre d’information. S’il est un endroit en Europe qui a beaucoup contribué dans les
dernières décennies à l’approfondissement de l’interaction « philosophie-économie », c’est
bien la Chaire Hoover de l’université de Louvain. A noter ici le rôle clé des bourses de séjour
de cette chaire (fellowships), dont ont bénéficié des universitaires de nombreux pays depuis
plus de vingt ans ; après leur séjour à Louvain, ils ont souvent été par la suite des relais
précieux pour diffuser le goût de la réflexion sur les questions d’éthique économique et
sociale. Un grand merci à Philippe Van Parijs, responsable de la chaire Hoover, de nous
avoir fourni le texte de présentation2 ci-dessous.
« Créée en 1991 à l'initiative du recteur Pierre Macq et grâce à une dotation de la
Fondation Hoover pour le développement de l'Université catholique de Louvain3, la Chaire
Hoover d'éthique économique et sociale s‟est vu confier deux missions. D'une part, stimuler
une réflexion éthique au sein de la Faculté des sciences économiques, sociales et politiques de
l'UCL et y promouvoir une recherche et un enseignement qui fassent place à une telle
réflexion. D'autre part, contribuer à un débat public clair et informé sur les questions éthiques
qui se posent à notre société dans les domaines relevant des disciplines de la Faculté.
Au service de ces objectifs, la Chaire Hoover s'est progressivement dotée d'un certain
nombre d'instruments qui se renforcent mutuellement. Dès le départ, ses orientations ont été
déterminées par un Comité permanent incluant, outre le responsable de la Chaire, le doyen de
la Faculté des sciences économiques, sociales et politiques et un représentant de chacun de ses
départements et de la Faculté de philosophie. Ce comité a ultérieurement été élargi aux
représentants de l‟ensemble des Facultés de l‟université et aux autres membres permanents de
la Chaire Hoover qui, au fil des ans, sont venus en renforcer le noyau.
Dès le départ également, les activités de la Chaire ont été annoncées et relayées dans un
bulletin d'information imprimé paraissant au début de chaque semestre, ultérieurement couplé
à un site web (www.uclouvain.be/chaire-hoover), puis remplacé par une newsletter
électronique qui paraît une quinzaine de fois par an (le Hoover-Info, auquel il est possible de
s‟abonner sur simple demande auprès de [email protected]).
2. Ce texte est une version mise à jour de la présentation de la Chaire Hoover inclue dans le volume
publié à l‟occasion du 575e anniversaire de l‟Université de Louvain (« L‟éthique comme engagement », in Une
aventure universitaire, G. Ringlet ed., Bruxelles : Racine, 2000).
3. En 1914, bien avant de devenir président des Etats-Unis, Herbert Hoover est un homme d'affaires
résidant à Londres. Dès le déclenchement de la 1ère guerre mondiale, il prend à cœur le sort de la population
belge menacée de famine par l'effet de l'occupation allemande et du blocus des alliés. Avec le financier belge
Emile Francqui, il entreprend d‟acheminer (et de vendre) dans la zone occupée les aliments qui y font faut. A
la fin de la guerre, des profits substantiels subsistent. Hoover et Francqui décident de les affecter à la promotion
de l'enseignement supérieur et de la recherche scientifique en Belgique. C'est le patrimoine ainsi constitué qui est
à l‟origine de la Fondation Hoover, et également de la Fondation Francqui, de la Fondation universitaire et de la
Belgian Amercican Educational Foundation.
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