Le message douloureux (nociceptif) Une observation: l'Analgésie congénitale. Ecrit pas Marie-Claire Garnier et Michèle Ternaux, Lycée F. Joliot-Curie, Aubagne Relu par Constance Hammond, U29, INSERM Les cas d'analgésie congénitale sont rares. Les personnes atteintes de cette affection témoignent de combien la douleur est un facteur important pour la survie de l'individu. Elles subissent des brûlures intenses, se mordent la langue fréquemment en mangeant sans s'en rendre compte. Elles ont des problèmes d'inflammation des articulations car elles se tiennent debout longtemps, n'ont pas le réflexe de se tourner pendant leur sommeil. Elles ont donc beaucoup de mal à apprendre à ne pas se blesser. De plus, lors de maladies, elles ne sont pas averties non plus par la douleur de la gravité de leur état. Elles meurent à un âge précoce. Les causes de ce déficit pourraient être multiples. Dans certains cas il semble que ce soit une absence de fibres C. Le magazine de FR3 " Comment ça va " du vendredi 1 mars 1996 avait pour titre « La douleur ». Voici un extrait de l’article publié à ce propos dans le journal TéléObs. “ La douleur signal d’alarme, est tout simplement indispensable à la vie. Si ni le froid, ni le chaud, ni les chocs, ni les blessures ne sont plus ressenties par l’organisme, la vie devient aussitôt un enfer, indolore certes, mais effroyablement invalidant et dangereux. La preuve en est apportée par Typhaine, jeune bretonne de 15 ans affligée d’une maladie génétique rarissime, qui lui a toujours interdit depuis sa naissance, de ressentir la moindre douleur. A priori, on aurait tendance à se dire que c’est une bénédiction. Or c’est l’horreur : son enfance n’est qu’une longue suite de brûlures, coupures, mutilations, fractures toujours diagnostiquées trop tard bien sûr, puisque indolores.” page 1 1°) La nociception met en jeu des neurones spécialisés : démonstration expérimentale (d’après Fields, 1987) Des travaux réalisés chez l’homme et chez l’animal ont démontré que les fibres à conduction rapide participant à la sensibilité somatique ne sont pas impliquées dans la transmission de la douleur. La nociception met en jeu des neurones spécialisés et donc des récepteurs spécialisés (les nocicepteurs) et pas seulement une décharge excessive. Protocole expérimental Résultats expérimentaux : enregistrements au niveau des afférences somatique et nociceptive suite à la stimulation thermique Le stimulus, c'est l'enregistrement à l'aide d'un oscilloscope l'axe horizontal correspond au temps, la largeur de chaque marche correspond donc à la durée de la stimulation. L'axe vertical est proportionnel à la différence de potentiel et représente donc l'intensité de la stimulation. La réponse: chaque petit trait vertical correspond à un potentiel d'action. Pour une faible stimulation le nocicepteur n'a pas de réponse, pour les fortes stimulations le nocicepteur a une réponse. le nombre de potentiels d'actions augmente avec l'intensité de la stimulation 1 PA, puis 5 PA, puis 8 PA Le thermorécepteur a une réponse dès la première stimulation, et la fréquence des potentiels d'action augmente quand l'intensité de la stimulation augmente. On dit que le message nerveux est codé en fréquence ( nb de PA / temps) page 2 Série 1 : réponse d'une afférence issue d'un récepteur somatique Série 2 : réponse d'une afférence issue d'un nocicepteur Analyse des expériences. : Cette expérience montre que les fibres responsables de la douleur (fibres nociceptives) sont différentes de celles qui sont responsables des sensations tactiles. page 3 Principaux récepteurs cutanés. Les fibres C (non myélinisées) et Ad (peu myélinisées), responsables des sensations thermoalgiques, sont connectées à des terminaisons libres. Les fibres Ab (très myélinisées), responsables des sensations tactiles, sont connectées à des récepteurs bien différenciés sur le plan histologique comme les corpuscules de Meissner qui répondent aux faibles pressions appliquées sur la peau, les corpuscules de Ruffini qui répondent aux vibrations de basse fréquence (50 Hz), les disques de Merkel qui répondent aux indentations de la peau, les récepteurs des follicules pileux dont il existe plusieurs types mais qui tous répondent aux mouvements du follicule et les corpuscules de Pacini qui répondent aux vibrations de haute fréquence (300 Hz). Ces fibres se regroupent pour former les nerfs et leurs corps cellulaires sont situés dans le ganglion rachidien. Confirmation: au niveau de la peau, les récepteurs de la douleur = nocicepteurs (terminaisons libres) sont séparés des récepteurs tactiles. page 4 Les fibres qui conduisent les messages douloureux sont également différentes des autres fibres nerveuses: elles sont soit sans myéline, soit peu myélinisées. La vitesse de conduction du message douloureux est lente page 5 2°) Les voies nerveuses de la douleur. Au niveau du cerveau : les fibres nociceptives ascendantes effectuent un dernier relais avec les neurones dont les corps cellulaires sont situés dans des noyaux gris localisés à la base du cerveau. Les axones de ces neurones se terminent dans le cortex cérébral, lieu ou s’élabore la sensation douloureuse. Dans la ME, les fibres nociceptives afférentes entrent en contact synaptiques avec d’autres neurones nociceptifs dont le corps cellulaire est situé dans la corne dorsale de la substance grise et dont les axones remontent par la substance blanche de la ME en direction du cerveau. fibres nociceptives afférentes, qui conduisent les messages des récepteurs vers la moelle, sont des fibres nerveuses dépourvues de myéline nommées fibres de type C. Ces fibres sont des prolongements de neurones dont le corps cellulaire est localisé dans les ganglions rachidiens. Elles pénètrent toutes dans la ME en empruntant les racines dorsales des nerfs rachidiens. page 6 Somatotopie des voies afférentes C'est au niveau du thalamus que l'on trouve la dernière synapse. Le corps cellulaire du dernier neurone a son axone qui se prolonge jusqu'au cortex. C'est au niveau du cortex cérébral qu'a lieu la sensation ou conscience de la douleur. L'intensité de la douleur ressentie varie en fonction de facteurs objectifs ( par exemple l'intensité du stimulus) et subjectifs ( état émotionnel du sujet). 3°) Modulation du message nerveux : enképhalines et récepteurs opioïdes. a) Expérience : Action d’une injection de morphine. A la suite d’une stimulation du nerf rachidien, il y a une réponse de 6 PA au niveau de la fibre A et un peu plus tard de 11 PA au niveau de la fibre C nociceptive. On peut en déduire que les fibres C conduisent le message nerveux avec une vitesse plus lente que les fibres A. A la suite d’une stimulation des nerfs rachidiens et après injection de morphine, il n’y a plus que 3 PA au niveau des fibres C, on peut en déduire que la morphine inhibe les neurones nociceptifs de la corne de la moelle épinière ? page 7 La morphine en se fixant sur les récepteurs opioïdes (à enképhaline) localisés au niveau des neurones nociceptifs de la corne dorsale de la moelle , est à l’origine d’une puissante activité analgésique ( supprime la douleur) qui n’entraîne pas une dépendance. Après injection de Nolaxone , l’injection de morphine n’empèche pas d’obtenir un message douloureux de 11 PA. Donc la nolaxone empêche l’action de la morphine. La nolaxone a une structure spatiale proche de celle des enképhaline, elle se fixe sur les récepteurs opioïdes et empêche la fixation de la morphine, la nolaxone est un antagoniste de la morphine. b) Modulation des messages nerveux par les substances endogènes. page 8 3°) La transmission des messages nerveux au niveau des synapses. Au niveau des synapses la transmission du message se fait par voie chimique (neurotransmetteur) est unidirectionnelle (seule l'arborisation terminale de l'axone possède des vésicules de neurotransmetteurs), il est donc possible de définir une cellule présynaptique et une cellule post synaptique. est relativement lente il faut environ 0,5 ms à 1 ms pour franchir une synapse(vitesse de 0,1 mm/s) Certaines synapses ont tendance à faire naître un nouveau message ( ou à amplifier sa fréquence)dans le neurone postsynaptique: elles sont dites excitatrices. D'autres en revanche empêchent ou diminuent la fréquence du message postsynaptique: elles sont dites inhibitrices. Le long des voies nerveuses, les messages sont donc codés en modulation de fréquence (trains de potentiels d'action transmis par les fibres nerveuses.) en variation de concentration de neurotransmetteur (au niveau des synapses) page 9