Depuis l'affaire des lettres piégées à l'anthrax en
2001 aux États-Unis, le bioterrorisme est considéré comme
une menace réelle et la recherche de systèmes efficaces de
veille tant de maladies humaines qu'animales émergentes
ou ré-émergentes reste d'actualité en 2013 [10-16].
Définition du bioterrorisme
La définition du bioterrorisme a suivi de près cet
épisode, reprise par de nombreux auteurs : « Le bio-
terrorisme est l'utilisation intentionnelle ou la menace
d'emploi d'un microorganisme, d'une toxine, ou d'un
produit dérivé d'un organisme vivant, utilisés à des fins
hostiles, dans le but d'entraîner la mort ou des maladies
chez l'homme, les animaux, ou les plantes »[10, 17].
L'étude des agents biologiques du bioterrorisme et
leur classification constitue un enjeu important dans le
domaine de la santé publique. Le bioterrorisme est
devenu une préoccupation politique majeure pour la
plupart des États [3, 6-8].
La majorité des maladies utilisées à des fins bioterro-
ristes étant communes à l'homme et à l'animal avec des
possibilités thérapeutiques limitées [18], cela rend le suivi
sanitaire d'animaux sentinelles nécessaire dans le cadre
de la défense contre le bioterrorisme.
Cette synthèse bibliographique vise à rechercher les
perspectives qu'offre l'exploitation des animaux senti-
nelles dans le domaine de la prévention des effets du
bioterrorisme ainsi que ses limites.
Les liens : bioterrorisme
et animaux sentinelles
Reconnaître une action de bioterrorisme repose sur le
diagnostic rapide de toute pathologie inhabituelle ou
suspecte [17] comme indiqué dans l'encadré 1. On trouve
dans ces éléments de suspicion l'observation aussi bien
des humains que des animaux. On peut donc imaginer la
possibilité d'utiliser des animaux sentinelles commen-
saux de l'homme dans le cadre de la prévention d'actes
bioterroristes envers les populations humaines : les
animaux sont sensibles aux quatre principaux types
d'agents infectieux (agents d'affections vésiculeuses,
respiratoires, agents hémato- et neurotoxiques) [19].
En sus de ces deux fonctions « classiques » des
animaux sentinelles (indicateurs d'exposition, biomar-
queurs d'effet) apparaît une troisième fonction : animaux
propagateurs d'agents du bioterrorisme pour les espèces
migratrices ou les insectes vecteurs (tableau 2).
Puisque le bioterrorisme correspond à une volonté de
nuisance, l'agent est souvent choisi pour sa grande
virulence (faible dose infectante), l'occurrence d'une
morbidité et d'une mortalité maximale avec une forte
contagiosité, sa facilité d'obtention et de production en
grande quantité, et enfin sa facilité de transport, de mise
Encadré 1
Éléments de diagnostic
d'une action bioterroriste [17]
Les éléments de suspicion d'une action bioterroriste
sont les suivants :
–une répartition spatiale et/ou temporelle anor-
male de personnes ou d'animaux présentant des
signes cliniques suggérant une maladie infectieuse
émergente ;
–une répartition spatiale anormale de personnes ou
d'animaux présentant des signes cliniques suggérant
une maladie infectieuse habituellement non présente
dans la région impliquée ;
–une répartition temporelle anormale de personnes
ou d'animaux présentant des signes cliniques suggé-
rant une maladie infectieuse habituellement non
présente lors de la saison impliquée ;
–une distribution anormale par âge pour des
maladies infectieuses courantes.
Tableau 2. Les différents types d'espèces sentinelles [1-4].
Table 2. The different types of sentinel species.
Type de sentinelles Espèces concernées Caractéristiques
Espèce indicatrice
d'effet
Espèces sauvages ou domestiques Plus grande sensibilité à l'agent en cause
Période d'incubation plus courte
Exposition plus précoce ou plus intense
–Présente les symptômes d'une maladie avant l'homme
Espèce indicatrice
d'exposition
Espèces sauvages ou domestiques Surveillance des animaux (souvent par sérologies)
–Détecte la persistance d'un agent biologique
bioterroriste dans l'environnement
Espèce indicatrice
de propagation
Espèces sauvages surtout (oiseaux sauvages,
animaux susceptibles d'^
etre transportés
pour des échanges commerciaux
Surveillance des animaux (souvent par sérologies)
–Signale une éventuelle propagation en cours
492 Environ Risque Sante –Vol. 12, n86, novembre-décembre 2013
B. Enriquez, H. Dropsy
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