Approche descriptive du rayonnement thermique

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Lycée CHAPTAL – PC*
E. FREMONT
Physique quantique – Chapitre 1
Approche descriptive du rayonnement thermique
…Comment le programme officiel de PC définit ce chapitre…
Notions et contenus
Capacités exigibles
Approche descriptive du rayonnement du corps noir :
loi de Wien, loi de Stefan.
Utiliser les expressions fournies des lois de Wien et de
Stefan pour expliquer qualitativement l’effet de serre.
…Le contenu…
L’expérience montre que tout corps suffisamment condensé, porté à une température T , émet un
rayonnement électromagnétique dont le spectre est continu. Ce rayonnement électromagnétique, qualifié de
« rayonnement thermique », est l’un des trois modes possibles de transfert d’énergie thermique entre deux
corps. Comparativement aux deux autres modes (la diffusion et la convection…), c’est le seul qui peut s’opérer
dans le vide et c’est également le plus rapide. Il explique notamment le phénomène d’échauffement que nous
ressentons (quasi-instantanément) lorsque nous nous exposons au Soleil ou lorsque nous nous plaçons près d’un
feu de cheminée.
Remarque :
L’étude et la compréhension du rayonnement thermique produit par un corps n’est pas un problème de
physique quantique à proprement parler (il s’agit plutôt d’un problème de thermodynamique et de physique
statistique). Cela étant, c’est dans le cadre de l’étude de ce problème que Max Planck a été amené à introduire
la constante h qui porte son nom et qui est LA constante fondamentale de la mécanique quantique !
A. Condensé historique : Du fer porté au rouge à la constante de Planck
# Contexte
Il n’y a pas besoin d’être forgeron pour
savoir qu’un objet en métal se met à briller d’un
éclat rouge lorsqu’on le plonge dans le feu. Si on
l’y laisse suffisamment longtemps, sa couleur
devient même jaune-orangé, puis blanche. En 1792,
Josiah WEDGWOOD, un industriel britannique dans
le domaine de la poterie, constate que tous les corps
chauffés deviennent rouges à la même température.
A partir de la moitié du 19ème siècle, le
physicien allemand Gustav KIRCHHOFF cherche à
comprendre l’observation de WEDGWOOD.
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# Le concept de corps noir
En 1859, pour simplifier le problème posé précédemment, KIRCHHOFF introduit le concept de corps noir.
Un corps noir est un corps capable d’absorber intégralement tout rayonnement incident, quelle que
soit sa fréquence.
Il s’agit d’un émetteur thermique « idéal » dans le sens où celui-ci ne réfléchit pas (ni ne transmet) le
rayonnement qu’il reçoit de la part de son environnement : ainsi, quand on observe un corps noir, on observe
uniquement le rayonnement thermique qu’il produit.
Dans la pratique, il n’existe aucun matériau se comportant comme un corps noir sur tout le spectre
électromagnétique. Certains matériaux absorbent grossièrement la totalité du rayonnement dans un intervalle de
longueur d’onde :
•
une plaque recouverte de noir de fumée pour le rayonnement visible ;
•
la brique pour le domaine infrarouge ;
•
les oxydes réfractaires pour le domaine [ 6 µm, 8 µm ] …
La meilleure réalisation pratique d’un corps noir est ainsi constituée par une enceinte « vide » (i.e. ne
contenant que de l’air), dont les parois sont maintenues à une température T fixe et dans laquelle on réalise une
ouverture O de faible dimension. Tout rayonnement incident arrivant de l’extérieur entrant dans l’enceinte subit
un très grand nombre de réflexions sur les parois de l’enceinte. Du fait de l’absorption partielle par les parois à
chaque réflexion, il paraît raisonnable de considérer que le rayonnement incident aura été totalement absorbé
avant de pouvoir ressortir de la cavité. L’ouverture O approche donc de très près le corps noir idéal de
température T .
# Et ensuite ?
Dès 1859, KIRCHHOFF montre par un raisonnement thermodynamique que le spectre du rayonnement
thermique émis par un corps noir ne dépend que de sa température T (en particulier, le matériau, la forme
et la taille sont sans influence sur le rayonnement). Il confie alors aux expérimentateurs la charge de mesurer la
répartition spectrale de l’énergie rayonnée par le corps noir, puis de trouver une équation permettant de
modéliser cette répartition à n’importe quelle température.
A cause des difficultés expérimentales posées, le problème n’avance quasiment pas pendant une vingtaine
d’années. Il devient un axe de recherche prioritaire lorsque les industriels allemands tentent d’élaborer des
ampoules et des lampes plus efficaces que leurs concurrents britanniques et américains.
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En 1896, Wilhelm WIEN propose une modélisation qui convient bien aux données expérimentales à
hautes fréquences. Un peu plus tard, en juin 1900, les travaux de RAYLEIGH et de JEANS conduisent à la
formulation d’une loi qui décrit correctement le rayonnement à basses fréquences.
Au début du mois d’octobre 1900, Max PLANCK procède à une interpolation entre les lois de WIEN et de
RAYLEIGH-JEANS, en suivant une argumentation précise de thermodynamique classique. Six semaines plus tard,
le 14 décembre 1900, il propose la loi du rayonnement connue désormais sous le nom de loi de PLANCK (cf.
partie B), dans laquelle figure une nouvelle constante de la physique :
h = 6, 62.10−34 J.s
constante de PLANCK
B. Loi de Planck et principales caractéristiques du rayonnement du corps noir
1. Définition des grandeurs d’intérêt
# Densité spectrale d’énergie du rayonnement thermique
Comme tout champ électromagnétique, le rayonnement thermique peut être caractérisé par la densité
volumique d’énergie électromagnétique uem définie dans le cours d’électromagnétisme. Le spectre du
rayonnement thermique étant continu, on caractérise l’importance des différentes fréquences dans le
rayonnement par la densité spectrale en fréquence d’énergie wυ (υ , T ) . La densité volumique d’énergie
associée aux fréquences comprises dans l’intervalle [υ , υ + dυ ] est alors donnée par :
duem = wυ (υ , T ) dυ
Ainsi, la densité volumique d’énergie pour l’ensemble du spectre s’obtient par la relation :
uem =
∫
+∞
0
wυ (υ , T ) dυ
# Puissance surfacique spectrale
Soit d 2 Φ la puissance électromagnétique rayonnée à travers une surface élémentaire dS associée
uniquement aux composantes spectrales de l’intervalle [υ , υ + dυ ] . On appelle puissance surfacique spectrale
en fréquence, et on note ϕυ (υ , T ) , la grandeur telle que :
d 2 Φ = ϕυ (υ , T ) dυ dS
# Lien entre densité spectrale d’énergie et puissance surfacique spectrale
Le rayonnement thermique produit par un corps noir est isotrope et il se propage à la célérité c dans le
vide. Il est alors possible de montrer que la densité spectrale d’énergie et la puissance surfacique spectrale sont
liées par :
c
4
ϕυ (υ , T ) = wυ (υ , T )
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# Exercice
Il est également possible de caractériser la répartition des différentes composantes spectrales en fonction
de leur longueur d’onde. On peut ainsi définir la densité spectrale d’énergie en longueur d’onde, notée wλ , de
sorte que duem = wλ ( λ , T ) d λ pour l’intervalle [ λ , λ + d λ ] .
Quelle est la dimension de wλ ? de wυ ?
Etablir la relation de correspondance entre wλ et wυ .
2. Loi de PLANCK
# Enoncé
La densité spectrale d’énergie du rayonnement d’équilibre thermique de température T est donnée par :
wυ (υ , T ) =
8π h
c3
υ3
 hυ 
exp 
 −1
 k BT 
où c est la célérité de la lumière dans le vide, k B la constante de BOLTZMANN et h la constante de PLANCK.
Sur le graphe ci-dessous, on représente la densité spectrale d’énergie wλ en longueur d’onde en fonction de
la longueur d’onde pour 5 valeurs différentes de la température.
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# Exercice
Proposer une forme simplifiée de la loi de Planck à hautes fréquences (loi de Wien).
Proposer une forme simplifiée de la loi de Planck à basses fréquences (loi de Rayleigh-Jeans). Selon vous,
pourquoi cette loi pose-t-elle un problème physique, qualifié de « catastrophe ultraviolette » par Paul
EHRENFEST ?
3. Loi du déplacement de WIEN – Loi de STEFAN
# Loi du déplacement de WIEN
On constate sur les graphes précédents que, pour une température T donnée, la densité spectrale
d’énergie wλ ( λ , T ) passe par un maximum pour une longueur d’onde λm . Cette longueur d’onde est reliée à la
température T par la loi du déplacement de WIEN :
λmT = 2898 µm.K
Elle a été trouvée expérimentalement par Wien en 1893. On pourra par ailleurs noter que 98 % de l’énergie du
rayonnement est émise dans l’intervalle [ 0,5 λm ,8 λm ] .
# Exercice
On donne ci-après le graphe de la fonction f ( u ) =
u5
eu − 1
. Montrer que la loi de PLANCK permet de
retrouver la loi du déplacement de WIEN.
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# Exercice
Pourquoi un corps noir présente-t-il une apparence noire à température ambiante ?
A partir de quelle température un corps noir apparaît-il coloré ?
# Loi de STEFAN
En 1879, le physicien autrichien STEFAN établit expérimentalement que la densité volumique d’énergie
rayonnée par un corps noir de température T , obtenue en sommant toutes les contributions spectrales, est
proportionnelle à T 4 :
uem =
∫
+∞
0
wυ (υ , T ) dυ = σ B T 4
avec
σ B = 0, 76.10−15 J.m −3 .K −4
La constante σ B porte le nom de constante de STEFAN-BOLTZMANN.
Remarque :
La loi de STEFAN peut évidemment être retrouvée à partir de la loi de PLANCK.
# Exercice
On recouvre notre chimiste préféré de noir de fumée avant de l’enfermer dans une enceinte réfrigérée
maintenue à 0°C, dont on admet qu’elle se comporte comme un corps noir.
Dans quel domaine du spectre électromagnétique notre cobaye rayonne-t-il principalement ?
Estimer la puissance radiative totale Prad échangée par le chimiste avec son environnement.
Comparer cette puissance à celle perdue par convection. Le coefficient d’échange conducto-convectif entre
le chimiste et l’air ambiant est de l’ordre de 5 W.m −2 .K −1 .
4. Extension au rayonnement d’un corps réel
Le rayonnement thermique d’un corps réel se déduit de celui du corps noir, de même température T , à
l’aide d’un facteur multiplicatif ε appelé émissivité du corps ( 0 ≤ ε ≤ 1 ). On a ainsi :
wυréel (υ , T ) = ε (υ , T ) × wυCN (υ , T )
et
ϕυréel (υ , T ) = ε (υ , T ) × ϕυCN (υ , T )
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C. Quelques applications des lois de WIEN et de STEFAN
1. Rayonnement solaire à la surface de la Terre
# Caractéristiques générales
Le Soleil émet un rayonnement thermique qui peut être modélisé par celui d’un corps noir de température
T ≈ 5800 K . Le maximum d’émission se situe ainsi dans le vert ( λm ≈ 500 nm ). Du point de vue énergétique,
environ la moitié du rayonnement se situe dans le domaine visible, l’autre moitié étant dans l'infrarouge (la part
des d'ultraviolets est d’environ 1 %). Une partie du rayonnement est absorbée par l’atmosphère terrestre.
# Exercice
Le rayon du Soleil mesure environ 7,0.105 km . La distance moyenne Terre-Soleil est d’environ
1,5.108 km . Evaluer la puissance surfacique rayonnée par le Soleil au sommet de l’atmosphère.
2. Lampe à incandescence
# Principe physique
Les lampes à incandescence sont constituées d’une ampoule de
verre qui emprisonne un filament métallique. Le passage d’un courant
électrique dans le métal dissipe, par effet Joule, suffisamment de
puissance pour élever la température du filament et provoquer ainsi une
émission dont une partie se trouve dans le domaine visible.
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# Exercice
On donne ci-après les températures de fusion (en °C) de différents métaux. Lequel vous paraît le plus
adapté pour la réalisation d’ampoules ?
Métal
Al
Ag
Cu
Fe
Pt
W
Température de fusion
660
962
1085
1538
1768
3422
On considère une lampe à incandescence consommant une puissance P = 100 W lorsqu’elle est alimentée
par une tension efficace Veff = 220 V . Cette lampe est constituée d’un filament de tungstène, de section
circulaire, placé au centre d’une ampoule de verre. La résistivité électrique du tungstène est ρ = 9, 0.10−7 Ω.m .
On suppose que le filament se comporte comme un corps noir à l’équilibre thermique, de température
T = 2500 K . On néglige l’énergie absorbée en provenance de l’environnement par rayonnement.
Calculer les dimensions du filament (longueur
ℓ et rayon a ).
Calculer la puissance Pvis rayonnée par la lampe dans le visible et en déduire le rendement de la lampe.
On donne
∫
+∞
0
x3
π4
dx =
exp ( x ) − 1
15
et
∫
x2
x1
(
)
x3
dx = x13 + x23 exp ( − x1 )
exp ( x ) − 1
pour x1 ≫ 1 et
x2 ≥ 2 x1 .
La masse volumique du tungstène est µ = 19,3 g.cm −3 et sa capacité thermique massique est
c pm = 0,132 kJ.kg −1.K −1 . Estimer le temps nécessaire pour que le filament revienne à température ambiante
après extinction de la lampe.
3. Effet de serre
# Présentation du principe
Imaginons que l’on soumette une plaque noircie, assimilable à
un corps noir, au rayonnement solaire à la surface de la Terre. On note
ϕ s le flux surfacique associé au rayonnement solaire à la surface de la
Terre ( ϕ s ≈ 1 kW.m −2 ) et ϕCN
le flux surfacique associé au
rayonnement thermique de la plaque.
A l’équilibre thermique, toute la puissance reçue (et donc absorbée)
par la plaque est réémise par rayonnement. On a donc ϕ s = ϕCN .
Or, d’après la loi de Stefan écrite en terme de puissance surfacique, ϕCN est relié à la température T p de la
c
plaque par ϕCN = σ T p4 , avec σ = σ B = 5, 67.10−8 W.m −2 .K −4 . Dans ces conditions, la température
4
d’équilibre de la plaque est donc donnée par :
14
ϕ 
Tp =  s 
σ 
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≈ 90 °C
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Imaginons maintenant que l’on interpose une vitre entre le Soleil et la plaque. Le verre peut être considéré
comme totalement transparent au rayonnement solaire. En revanche, il est totalement absorbant vis-à-vis du
rayonnement infrarouge émis par la plaque. On note ϕ1 le flux surfacique rayonné par une face de la vitre.
L’équilibre radiatif de la vitre et de la plaque est traduit par le système suivant :
ϕCN = ϕ s + ϕ1

 2ϕ1 = ϕCN
On en déduit immédiatement que ϕCN = 2ϕ s , ce qui conduit à la nouvelle température d’équilibre de la plaque
14
 2ϕ 
T p′ =  s 
 σ 
≈ 160 °C
La présence de la vitre contribue donc à augmenter la température de la plaque : c’est l’effet de serre.
# Application à l’effet de serre dû à l’atmosphère terrestre
Observer l’animation présentée à l’adresse suivante :
http://www.educapoles.org/fr/multimedia/animation_detail/leffet_de_serre
Proposer un modèle simple permettant de retrouver les valeurs numériques annoncées dans cette
animation pour la température de surface de la Terre.
Pourquoi est-il important de limiter la production des gaz à effet de serre ?
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