
1. LA COURBE DE LA POPULATION MONDIALE
C'est officiellement le 12 octobre 1999 que la population mondiale a franchi le cap des 6 milliards
d'habitants. Il n’aura donc fallu que 40 ans pour que la population mondiale double à partir des 3
milliards qu’elle comptait en 1960. Il y a de quoi être impressionné, voire angoissé par une telle
accélération. Elle concerne principalement les pays que l'on appellera par commodité le Sud. Le
Nord développé (Amérique du Nord, Japon, Europe, Australie et Nouvelle-Zélande) ne regroupe
en effet que 20 % de la population mondiale, et la contribution des pays du Sud à la croissance
démographique est évidemment décisive. Sur les années récentes, le rythme de croissance est de
1,3 % par an pour l’ensemble, de 1,6 % au Sud mais de 0,3 % seulement au Nord. Les pays les
moins avancés, pour reprendre la définition de la Banque mondiale, sont aussi ceux où, avec 2,4
% par an, la population augmente le plus rapidement.
La répartition de la population mondiale fait en premier lieu apparaître sa grande concentration
par pays. 38 % de la population du globe vit dans deux pays : la Chine (1267 millions d’habitants)
et l'Inde, qui vient de passer en 1999 le cap du milliard d’habitants. Viennent ensuite les Etats-
Unis (272 millions), l’Indonésie (212), le Brésil (168), la Russie (147), le Pakistan (146), le Japon
(127), le Bangladesh (126) et le Nigeria (114)
Avec 3450 millions d'êtres humains, l'Asie représente plus de la moitié de la population
mondiale. Le reste du Tiers Monde se répartit en trois zones relativement moins peuplées :
l'Afrique noire (600 millions d'habitants), l'Amérique latine (500 millions) et l'Afrique du Nord et
le Moyen-Orient (350 millions). A titre de comparaison, la population de l'Europe Occidentale
s'élève en 1999 à 421 millions d'habitants.
Le dynamisme de la population du Tiers Monde face au vieillissement du Nord conduit à une
« dérive des continents », autrement dit à un recul permanent du poids relatif de la population
des pays du Nord. Les projections à très long terme (à l’horizon 2150) sont évidemment chargées
d’incertitude mais elles ont au moins l’intérêt de montrer la logique des tendances repérables
aujourd’hui. Les pays du Nord représentent aujourd’hui 18 % de la population mondiale. Cette
proportion tomberait à 9,3 % en 2150. Le phénomène le plus impressionnant concerne l’Afrique
dont la population serait multipliée par 4 et passerait de 13 % à 26 % de la population mondiale.
Et pourtant elle ralentit
Le ralentissement est indéniable. C’est l’un de ces paradoxes de la démographie qu’il faut savoir
décrypter. Si le doublement observé entre 1960 et 1999 continuait, la population mondiale serait
par exemple multipliée par près de 6 au cours du prochain siècle. On arriverait ainsi à 34
milliards d’habitants en 2100 ! Ces chiffres donnent le vertige, mais ils sont absolument
trompeurs. L’inflexion a déjà eu lieu et le doublement des quarante dernières années recouvre un
freinage très net de la croissance mondiale. Qu’on en juge : 2 % par an entre 1970 et 1980 ; 1,7 %
entre 1980 et 1990 ; 1,6 % entre 1990 et 2000. Les projections de l’ONU tablent sur une
croissance de 1,06 % entre 2000 et 2025, puis de 0,48 % entre 2025 et 2050.
Le graphique 1, qui illustre cette trajectoire à partir des dernières projections de l’ONU, fait
apparaître les inflexions prévues. La prévision centrale, dite hypothèse moyenne, est encadrée
par une hypothèse haute et une hypothèse basse. Ces courbes d’évolution font clairement
apparaître le ralentissement de la croissance démographique, de telle sorte qu’on arriverait à 8,9
milliards d’habitants sur la Terre en 2050 : au lieu d’augmenter de 77 millions par an comme
aujourd’hui, la population mondiale ne progresserait que de 62 millions par an autour de 2020
puis de « seulement » 27 millions à partir de 2045.
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