C. Monney
A. Schnegg
B. Favrat
V. Amstutz
Testicular pain, a diagnostic challenge ?
Scrotal pain is frequently encountered in
practice, as it affects 4 men in 1000, with a peak
of incidence between the ages of 45 and 50.
After excluding an urological or gastrointestinal
cause, referred pain of musculoskeletal origin
should be considered, even in the absence of
back pain. Described by Dr. Robert Maigne,
this referred pain originates from a minor in-
tervertebral dysfunction of the thoracolumbar
junction. Imaging of the spine is not helpful.
Rather, the diagnosis is made by seeking pain
triggered by the mobilization of the lumbar
vertebrae ; the pinch and roll skin manoeuvre
will highlight this referred pain.
Treatment is symptomatic, though manual the-
rapies by spine specialists are also recom-
mended.
Rev Med Suisse 2013 ; 9 : 2218-23
La douleur scrotale est fréquemment rencontrée en pratique,
la prévalence serait de quatre hommes sur 1000 avec un pic
d’incidence à l’âge de 45-50 ans. Après exclusion d’une cause
urologique ou digestive, une douleur référée d’origine ostéo-
articulaire doit être évoquée, même en l’absence de douleur
au niveau du rachis. Décrite par le Dr Robert Maigne, cette
douleur référée aurait pour origine un dérangement interver-
tébral mineur situé sur la jonction dorso-lombaire. L’imagerie
du rachis est peu contributive. C’est l’examen clinique par la
recherche d’une douleur déclenchée à la mobilisation des ver-
tèbres dorso-lombaires, et par la manœuvre du pincé-roulé
de la peau, qui permettra de mettre en évidence cette dou-
leur projetée.
Le traitement est avant tout symptomatique, les thérapies ma-
nuelles du rachis par les spécialistes sont également recom-
mandées.
Douleur testiculaire, un défi
diagnostique ?
le point sur…
2218 Revue Médicale Suisse
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27 novembre 2013
Drs Christophe Monney,
Annatina Schnegg, Bernard Favrat
et Vincent Amstutz
PMU, 1011 Lausanne
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introduction
La douleur testiculaire est souvent rencontrée en médecine de
premier recours. Même si un problème d’ordre urologique ou
digestif en est souvent la cause principale, il ne faut pas oublier
la douleur ostéo-articulaire. Le présent article a pour but de
sensibiliser les médecins de premier recours à l’existence d’une
douleur scrotale d’origine référée, de leur fournir une aide pour
la démarche diagnostique et pour la prise en charge thérapeu-
tique.
vignette clinique
Un homme de 31 ans, sans antécédents médicaux, consulte pour des douleurs
du testicule gauche avec impression de brûlures mictionnelles intermittentes,
sans hématurie, ni pollakiurie, depuis deux mois. On ne note pas de relation
sexuelle à risque, d’état fébrile ni de frisson. L’examen clinique reproduit les
douleurs à la palpation du testicule gauche et de l’épididyme gauche. L’examen
du pénis et le toucher rectal sont sans particularité et il n’y a pas de masse tes-
ticulaire palpée. Le stix urinaire est normal, une recherche d’infection sexuelle-
ment transmissible (IST) est effectuée, ainsi qu’une culture d’urine. Une écho-
graphie testiculaire s’avère strictement normale. Le patient est mis empirique-
ment au bénéfice d’une antibiothérapie contre
Chlamydia
et gonocoque, ainsi que
d’une antalgie simple. Par la suite, la recherche d’une maladie infectieuse
s’avère négative. Une dizaine de jours plus tard, la douleur testiculaire persiste,
avec irradiation vers le bas-ventre. Le status est superposable. Au vu du bilan
infectieux normal (pas d’IST), le traitement symptomatique est renforcé. Le pa-
tient est revu un mois plus tard, la douleur testiculaire est toujours présente. De
plus, on note l’apparition de douleurs modérées en région lombaire, sans irra-
diation. Le status à ce moment montre une hyperesthésie du scrotum gauche
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épidémiologie
Selon une étude urologique suisse1 publiée en 2005, la
prévalence du syndrome de douleur scrotale chronique
(définie comme une douleur intermittente ou constante de
plus de trois mois) serait de quatre hommes sur 1000 avec
un pic d’incidence à l’âge de 45-50 ans. Dans cette étude, la
plupart des urologues ont estimé que l’étiologie des dou-
leurs chroniques était infectieuse ou postinfectieuse et,
comme dans notre cas, les patients ont été traités par une
antibiothérapie empirique.
syndrome de la charnière
dorso-lombaire ou syndrome de maigne 5
L’origine ostéo-articulaire des douleurs scrotales est sou-
vent ignorée en pratique, car il s’agit de douleurs référées
ou projetées, à distance de la colonne vertébrale. A noter
qu’une revue de la littérature sur ce thème a été effectuée
et publiée dans un article récent.6 La douleur référée d’ori-
gine dorso-lombaire est un diagnostic d’exclusion, décrit
sous différentes appellations : syndrome de la charnière
dorso-lombaire, syndrome de Maigne, syndrome du déran-
gement intervertébral mineur et syndrome du rameau dorso-
lombaire.4-7 Il se caractérise par des douleurs à distance
de la colonne dorso-lombaire, et ceci généralement en l’ab-
sence de douleur au niveau du rachis. C’est un orthopé-
diste français, le Dr Robert Maigne, qui a créé le concept de
«dysfonction intervertébrale mineure»5,6,8-11 permettant
d’expliquer l’ori gine ostéo-articulaire de ces douleurs réfé-
rées. Cette dysfonction est située sur l’articulation verté-
brale postérieure, le plus souvent sur le segment T12-L1.
Habituellement, les examens radiologiques ne sont pas
con tributifs, car les lésions dégénératives de cette région
sont plutôt rares. Par fois, la dysfonction peut être associée
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à la palpation, le reste de l’examen clinique n’est pas con-
tributif. Vu la persistance des symptômes sous antalgie
simple et la douleur au niveau lombaire, le patient bé-
néficie d’une IRM lombaire qui s’avère sans particularité
(pas d’hernie discale ni de masse visible). Le traitement
antalgique est maximalisé, ce qui permet un amende-
ment presque complet de la symptomatologie doulou-
reuse. Une douleur référée est fortement suspectée.
diagnostic différentiel1-4
Cette situation clinique de douleurs testiculaires illustre
bien l’importance de garder à l’esprit un diagnostic diffé-
rentiel large. Notre patient se plaint d’une douleur du tes-
ticule qui est en fait une douleur du scrotum. L’origine de
la douleur scrotale peut être liée à une pathologie urolo-
gique (post-traumatique, torsion, épididymite chronique,
prostatite chronique, postvasectomie, tumeur…), une pa-
thologie d’autre origine (douleur référée, neuropathie dia-
bétique, postchirurgicale…) ou même idiopathique. L’exa-
men clinique par le médecin de premier recours permettra
initialement de bien localiser la douleur, il comprendra
l’examen des organes génitaux externes, le toucher rectal
et la recherche d’une hernie inguinale. En plus de l’examen
clinique, un examen des urines avec une éventuelle cul-
ture, ainsi qu’une échographie testiculaire seront effectués ;
selon les résultats un avis auprès d’un urologue sera de-
mandé.
Pour notre patient, les investigations urologiques se sont
avérées normales. Qu’en est-il alors de l’étiologie de ses
douleurs scrotales ? Vu l’absence de pistes urologiques et
digestives, nous évoquons alors des douleurs référées ou
projetées dont l’origine est ostéo-articulaire.
Figure 1. Vues dorsale et ventrale des nerfs rachidiens issus de la charnière dorso-lombaire (T12-L1) et leur
dermatome respectif (en rouge)
1. branche postérieure ; 2. branche antérieure et 3. rameau perforant latéral cutané, de la branche antérieure. Le cercle bleu indique l’emplacement des
points de crête.
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à une arthrose postérieure et plus rarement liée à une pa-
thologie discale.
La plainte la plus fréquente est une lombalgie basse, qui
évoque à tort une origine lombo-sacrée ou sacro-iliaque.
Plus rarement, le patient signalera des douleurs abdomi-
nales basses prédominant dans la région inguino-pubo-
scrotale, ou alors des douleurs de la face latérale de la
cuisse en région trochantérienne, ceci en fonction du rameau
nerveux touché.
Pour rappel, l’articulation vertébrale T12-L1 fait la tran-
sition entre la colonne dorsale qui permet des mouvements
de rotation, et la colonne lombaire où la rotation est pres-
que impossible, car les articulations interapophysaires y sont
orientées différemment.5,9 La vertèbre T12 est une vertè-
bre de transition qui possède sur sa face supérieure les ca-
ractéristiques des vertèbres dorsales et sur sa face infé-
rieure celles des vertèbres lombaires. T12 possède donc
les caractéristiques des deux segments du rachis cervico-
dorsal et lombo-sacré. Mécaniquement, ce niveau vertébral
est soumis à des contraintes importantes, et c’est pourquoi
cette vertèbre est fréquemment le siège de fracture-tasse-
ment lors de traumatisme. Toutefois, contrairement à la ré-
gion lombaire, les lésions dégénératives y sont moins fré-
quentes.5,6
Les nerfs rachidiens T12 et L1 émergent au niveau de
cette charnière thoraco-lombaire.7 Les douleurs référées vont
se situer sur les dermatomes des trois branches de ces deux
nerfs (figure 1, tableau 1).
Chez la femme, l’atteinte de la branche antérieure va se
manifester par des douleurs touchant l’aine et les grandes
lèvres. Une dyspareunie peut accompagner ce tableau cli-
nique.8
approche diagnostique
L’attitude diagnostique se base essentiellement sur l’exa-
men clinique, qui permet la mise en évidence d’un segment
douloureux au niveau du rachis. L’examen clinique doit
d’abord porter sur le rachis et en particulier sur les vertè-
bres de la région dorso-lombaire, puis sur la zone cutanée
douloureuse par la pratique du pincé-roulé.4-11
Pour bien examiner le rachis du patient, ce dernier doit
être couché sur le ventre sur le lit d’examen. Il faut mobili-
ser chaque segment vertébral de T11 à L2, afin de tenter de
déclencher une douleur, et de ce fait mettre en évidence
l’atteinte d’un segment vertébral, le plus souvent T12-L1.
Pour rechercher l’étage vertébral, source des symptômes
(figure 2), on mobilise chaque apophyse épineuse juste à
côté de la ligne médiane, en effectuant des mouvements de
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Branches des Localisation de Diagnostics différentiels
nerfs rachidiens la douleur
T12 et L1
1. Branche Région lombaire Pathologie musculo-
postérieure inférieure et partie squelettique de la région
supérieure des fesses lombaire
2. Branche Aine, scrotum Coxarthrose, hernie
antérieure et grandes lèvres inguinale, pathologie
digestive, gynécologique
ou urologique
3. Rameau perforant Région Pathologie musculo-
latéral cutané, issu trochantérienne, face tendineuse ou articulaire
de la branche latérale de la cuisse du bassin, du fémur ou de
antérieure l’articulation coxo-fémorale
Tableau 1. Branches nerveuses concernées, locali-
sation de la douleur et diagnostics différentiels
Figure 2. Recherche de l’étage vertébral source des symptômes
Mobilisation des apophyses épineuses par pression horizontale (illustration de gauche) et recherche du point articulaire postérieur par palpation longitu-
dinale des massifs articulaires (illustration de droite).
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pression horizontaux de chaque côté de la ligne médiane.
L’endroit où une douleur est déclenchée lors de cette ma-
nœuvre indique l’étage vertébral responsable des symp-
tômes. Par la suite, on va rechercher le point articulaire
postérieur par la palpation longitudinale des massifs arti-
culaires. Pour ce faire, on appuie avec un doigt sur la région
para-épineuse à un centimètre de la ligne médiane tout en
faisant des mouvements de friction. Le déclenchement
d’une douleur signe également le niveau vertébral atteint.
Après l’examen des vertèbres, on recherche les manifes-
tations douloureuses au niveau des dermatomes des nerfs
rachidiens concernés. Le tableau 1 et la figure 1 montrent
les trois branches nerveuses issues de la charnière dorso-
lombaire, leur dermatome respectif siège de la douleur,
ainsi que les diagnostics différentiels correspondant à cha-
cun des territoires.
C’est la manœuvre du pincé-roulé de la peau (figure 3)
qui permet de différencier une douleur superficielle d’une
douleur profonde. Le déclenchement d’une douleur par le
pincé-roulé, normalement indolore, parle pour une atteinte
du nerf rachidien et de la branche nerveuse du territoire
examiné. La peau de cette zone peut être épaissie et mon-
trer un aspect de peau d’orange.
En présence de douleurs lombaires basses ou de la ré-
gion trochantérienne, on peut palper la crête iliaque laté-
ralement afin de mettre en évidence le «point de crête»5
(figure 1). Ce dernier se situe à l’endroit où la douleur est
déclenchée, et signe le croisement des rameaux nerveux
avec la crête iliaque. On le trouve à 7-8 cm de la ligne mé-
diane pour les douleurs lombaires basses et latéralement
au-dessus du trochanter pour les douleurs de la région tro-
chantérienne.
En cas d’incertitude, il est encore possible d’effectuer
comme test diagnostique, une infiltration de xylocaïne au
niveau du point articulaire postérieur à un centimètre de la
ligne médiane. L’anesthésiant doit permettre un amende-
ment des symptômes douloureux du patient, lors du pincé-
roulé de la peau du dermatome correspondant et à la pal-
pation du point de crête.
traitement 4,5,7
Le traitement du syndrome de la charnière dorso-lom-
baire, en plus du traitement antalgique, consiste principa-
lement à redonner une bonne mobilité segmentaire. Diffé-
rentes approches par différents thérapeutes sont possibles
(mobilisation, automobilisation, manipulation…). Si la ré-
ponse aux thérapies manuelles n’est pas suffisante ou con-
tre-indiquée, une éventuelle infiltration de l’articulation
vertébrale postérieure responsable des douleurs, par des
stéroïdes, peut être pratiquée. En dernier recours, dans les
rares cas où un syndrome canalaire de la branche posté-
rieure ou du rameau perforant latéral est suspecté, une
chirurgie libératrice peut être pratiquée.
conclusion
La localisation d’une douleur n’est pas toujours corrélée
avec l’organe atteint.
Ce cas clinique permet bien d’illustrer la présence de
douleurs référées pseudo-viscérales et l’importance d’un
examen clinique attentif. La manœuvre du pincé-roulé est
souvent méconnue par le praticien ; toutefois, en clinique,
elle est importante pour différencier une douleur d’origine
cutanée d’une douleur d’origine viscérale.
Pour notre patient, les douleurs scrotales ont récidivé
dès le retrait des antalgiques ; actuellement, elles répondent
bien à une antalgie simple combinée à la pratique de la
médecine manuelle.
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Figure 3. Manœuvre du pincé-roulé
Les auteurs n’ont déclaré aucun conflit d’intérêt en relation avec
cet article.
Implications pratiques
Les douleurs référées sont fréquemment sous-diagnostiquées,
elles peuvent occasionner des investigations superflues et
une baisse de la qualité de vie
C’est un diagnostic d’exclusion, pour lequel le médecin devra
d’abord écarter des causes urologiques, gynécologiques et
digestives
Cliniquement, le diagnostic de douleurs référées est basé
principalement sur l’examen minutieux du rachis et la manœu-
vre du pincé-roulé du dermatome atteint. Cette manœuvre
permet de différencier une douleur d’origine cutanée d’une
douleur d’origine viscérale. L’imagerie est peu contributive
Les antalgiques et les thérapies manuelles par le spécialiste
sont la clé du traitement
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