Le mal hollandais, le sortilège des ressources et l`économie

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Le mal hollandais, le sortilège des
ressources et l’économie canadienne
Serge Coulombe
Département de science
économique
Université d’Ottawa
Présentation au colloque Le
boom économique dans l'ouest
canadien : le Québec en profitet-il?, ASDEQ, Hôtel , Holiday Inn
Select, Montréal, 7 décembre 2006
[email protected]
http://aix1.uottawa.ca/~scoulomb/
Les opinions exprimées dans cette présentation reflètent uniquement celles du présentateur.
Analyse en trois étapes
• Le mal hollandais: contraction du secteur de la
fabrication (Corden 1984)
• Le sortilège des ressources: effet négatif sur la
croissance à long terme
• Spécificités du cas canadien : distribution
régionale inégale des ressources, fédération
décentralisée, péréquation, ZMO
1) Le mal hollandais
Secteur des ressources
(SR)
Secteur des biens
et services non
échangeables (NE)
Secteur de la
fabrication
(SF)
• Synthèse du « modèle de base » selon Corden (1984)
• Le SR et le SF sont confrontés aux prix mondiaux
!!BOOM!!
Secteur des
ressources (SR)
1. Découverte
2. ? des prix*
3. Progrès technologique dans le SR*
* s’applique au Canada
Secteur des biens
et services non
échangeables (NE)
Secteur de la
fabrication
(SF)
• Le SR et le SF sont confrontés aux prix mondiaux
Effet des dépenses
!!BOOM!!
(SR)
Le revenu
supplémentaire généré
par le SR est consacré
aux NE par le secteur
public et/ou le secteur
privé
!!BOOM!!
Avec l’appréciation réelle,
les ressources passent du
SF et du SR aux NE
? Premier effet de la
désindustrialisation
? Demande de NE
? Prix des NE
(NE)
Appréciation réelle
• Le SR et le SF sont confrontés
aux prix mondiaux
(SF)
Le taux de change réel est le
ratio entre le prix des biens
et services NE et le prix des
biens échangés
!!BOOM!!
Secteur des
ressources (SR)
? Demande de main-d’œuvre
!!BOOM!!
Effet du
mouvement des
ressources
? Poursuite de la
désindustrialisation
Secteur des biens
et services non
échangeables (NE)
? Premier effet de la
désindustrialisation
Secteur de la
fabrication
(SF)
• Le boom du SR fait fléchir la compétitivité du SF
Analyse empirique récente à suivre
• Jean-Philippe Stijns (Thèse de doctorat,
Berkeley 2003) An Empirical Test of the Dutch
Disease Hypothesis Using a Gravity Model of
Trade
• Étude en coupe transversale de pays
• Une augmentation de 10 % du prix de l’énergie
entraîne une baisse de 5 % des exportations
manufacturières d’un pays exportateur net de
produits énergétiques.
2) Le sortilège des ressources
(The curse of Natural Resources)
Une relation empirique
• Relation empirique négative en coupe
transversale de pays (régressions de
croissance) entre le niveau initial de ressources
naturelles et la croissance subséquente
• Jeffrey Sachs et Andrew Warner (NBRE 1995,
EER 2001), Thorvaldur Gylfason (EER 2001)
• Relation négative robuste selon Sala-i-Martin
(AER 1997, l’article aux 2 millions de
régressions)
T.Gylfason. European Economic Review 45 (2001)
•
•
L’abondance en ressources naturelles est néfaste pour
la croissance.
Présence de 3 canaux de transmission
1.
Entraîne une surévaluation de la monnaie nationale
(mal hollandais).
2.
Favorise la recherche de rente, la corruption et les
politiques économiques de courte vue.
3.
Défavorise la formation de capital humain.
Source: http://www.pisa.gc.ca/brochur_f.pdf
Le sortilège des ressources : fondements
théoriques
• Paul Krugman, JDE, 1987
• Modèle d’avantages comparés dynamiques
• Courbe d’apprentissage par la pratique dans le secteur de la
fabrication
• Effet d’apprentissage externe à l’entreprise, interne à l’industrie
nationale
• Effet négatif à long terme d’un transfert externe (longue durée)
• Secteur de la fabrication plus intensif en R&D + externalité
3) Considérations canadiennes
• Hétérogénéité spatiale
– des dotations en ressources (Alberta, Terre-Neuve,
Saskatchewan)
– Des industries manufacturières (concentration dans le
corridor Québec/Windsor)
• Fédération très décentralisée
– Juridiction provinciale sur les ressources
– Imposition décentralisée
– Juridiction provinciale pour les dépenses en santé et
en éducation
Écarts de croissance nominale : 2002-2005
AB
.06
.04
NF
.02
SK
BC
.00
-.02
MB
NB
QC
ON
NS
PE
Écart entre les taux de croissance annuels moyens
du PIB nominal des provinces et de l'économie canadienne
Écarts de croissance réelle : 2002-2005
.06
.04
.02
AB
BC
SK
.00
MB ON QC
-.02
PE NF
NB
NS
Écart entre les taux de croissance annuels moyens
du PIB réel des provinces et de l'économie canadienne
Effet cumulatif de l'évolution des termes de l'échange (2003-2004-2005)
.20
AB
.16
NF
.12
.08
SK
.04
.00
NS
BC
NB
MB
QC
ON
PE
-.04
Approximation : dégonfleur du PIB - inflation IPC
Incidence du Boom albertain sur l’économie québécoise
• L’effet de richesse découlant de l’accroissement des
termes de l’échange est presque nul pour le Québec
(légèrement négatif pour l’Ontario).
• Le secteur des ressources connaît une bonne
croissance économique au Québec (bois d’œuvre
excepté)
• L’effet négatif au Québec est cependant fortement
ressenti dans le secteur de la fabrication.
• L’accroissement du commerce avec l’Alberta ne peut
contrebalancer l’effet négatif de l’appréciation du dollar
sur le secteur de la fabrication au Québec (modèle de
gravité).
Le Canada n’est pas une zone monétaire optimale
• Michel Beine et Serge Coulombe (JRS 2003)
– Les fluctuations du dollar canadien stabilisent
l’économie de l’Alberta tout en déstabilisant le secteur
de la fabrication.
– Solution théorique : l’Alberta devrait avoir sa propre
monnaie.
– Pas de solution politique car un dollar canadien
flottant est une condition nécessaire à la maîtrise de
l’inflation.
Fortes pressions sur le fédéralisme fiscal canadien
• Le gouvernement fédéral s’approprie une partie de
l’accroissement de l’assiette fiscale.
– Le gros demeure cependant dans les goussets des provinces
(surtout l’Alberta).
– Une partie de l’effet de richesse peut retourner au Québec par le
truchement du gouvernement fédéral.
– Péréquation : L’inclusion des ressources et la norme des dix
provinces (rapport du panel O’Brien) n’est pas une solution
compatible avec un prix du pétrole à 60 É.-U. le baril.
– Avec le système de péréquation brute actuel, l’Ontario paie le
gros de la facture de l’inclusion des ressources dans la
péréquation.
– Besoin d’un système de péréquation net (Australie)
Le Québec profite-t-il du boom économique dans l’Ouest
canadien? Les deux côtés de la médaille
• Pile - Non, car le taux de change du Québec est principalement
déterminé par la structure commerciale albertaine. Conséquence :
90,000 pertes d’emploi dans le secteur de la fabrication au Québec
depuis 2002.
• D’autres pertes d’emploi dans ce secteur à venir, caeteris paribus
• Pile découle du fait que le Québec n’a que les aspects négatifs du
mal hollandais sans avoir le magot.
• Face – Oui, car le boom albertain améliore la santé de l’économie
canadienne, les finances publiques d’Ottawa, le désendettement du
gouvernement fédéral, les liens économiques intranationaux.
• À mon avis, Pile domine Face. Donc, réponse : NON
Ne jamais conclure sur une note négative quand
(presque) tout va bien
• L’économie québécoise devrait continuer de
bien se porter (caeteris paribus, en dépit de
l’évolution chaotique du taux de change) pour
les raisons suivantes :
–
–
–
–
–
taux d’inflation faible,
équilibre budgétaire,
capital humain élevé,
excellente situation géographique,
secteur québécois des ressources non négligeable.
Question pour conclure:
• Quand une économie gagne à la loto,
son taux de change réel s’apprécie et
l’emploi dans le secteur des biens
échangeables baisse.
• La péréquation peut-elle entraîner un
mal hollandais? Comme l’aide
internationale aux pays pauvres.
Le mot d’ordre
• Quand on gagne à la loto, il faut investir
(capital humain, infrastructures, R&D)
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