Mini-revue
mt Médecine de la Reproduction, Gynécologie Endocrinologie 2012 ; 14 (suppl´
ement 1) : 51-62
Chimiothérapie
des récidives des cancers de l’ovaire
Chemotherapy in recurrent ovarian cancer
Frédéric Selle
Domnita Burcoveanu
Annie Cortez
Roman Rouzier
Marc Bazot
Coraline Dubot
AP-HP,
Alliance pour la recherche en
cancérologie (APREC),
hôpital Tenon,
service d’oncologie médicale,
4, rue de la Chine,
75020 Paris,
France
Résumé. Les patientes atteintes d’un cancer de l’ovaire de stade avancé, malgré un traitement
de première ligne bien conduit (chirurgie complète et chimiothérapie), présentent fréquem-
ment une rechute et le plus souvent vont décéder de cette pathologie. Cependant, la survie
globale de ces patientes ne cesse d’augmenter en partie grâce aux progrès des chimiothérapies,
notamment à la rechute. Le pronostic des patientes présentant une rechute moins de six mois
après le traitement de première ligne est mauvais à court terme et le standard de traitement reste
la monochimiothérapie non sel de platine. Pour celles présentant une rechute platine-sensible,
on peut espérer une survie beaucoup plus longue et le meilleur traitement est une combinai-
son de chimiothérapie à base de platine. `
A côté du standard habituel paclitaxel-carboplatine,
d’autres combinaisons avec platine et sans paclitaxel tout aussi efficaces sont possibles. Une
polychimiothérapie sans platine (doxorubicine liposomale pégylée-trabectédine) paraît parti-
culièrement pertinente, notamment chez les patientes partiellement sensibles (6 à 12 mois).
Enfin, il faut souligner l’arrivée remarquée du bevacizumab en situation de rechute pour son
efficacité en association à la chimiothérapie suivie d’un traitement de maintenance, concept
qui avait jusqu’ici échoué avec la prolongation de la chimiothérapie. D’autres thérapeutiques
ciblées sont en cours d’évaluation avec des résultats encourageants qui devront être confirmés
en phase III.
Mots clés : cancer de l’ovaire, rechute, chimiothérapie
Abstract. Patients with advanced stage ovarian cancer, in spite of a successfully implemented
first-line treatment (complete surgery and platinum chemotherapy) frequently undergo recur-
rence, amended by fatal evolution in most cases. However, the overall survival rate for such
patients constantly increases. This observation could be substantially explained by chemothe-
rapy improvements, particularly in the relapse subset. The prognosis of patients experiencing
a relapse less than six months after the first-line treatment is bleak. In such cases, defined
as platinum-resistant disease, the standard treatment remains a mono-chemotherapy, exclu-
ding platinum. Patients with a platinum-sensitive disease are expected to have higher survival
rates and the best treatment, in such cases, is a combination of platinum-based chemothe-
rapy. Besides the usual standard (paclitaxel-carboplatin combination), other platinum-based
drug combinations, excluding paclitaxel, also demonstrated efficacy. A platinum-deprived
poly-chemotherapy (pegylated liposomal doxorubicin-trabectedin) seems to be particularly
effective for partially sensible patients (six to 12 months). Maintenance therapy, which had
previously failed in cases of chemotherapy extension, has recently showed remarked efficacy
using combination of bevacizumab with chemotherapy followed by bevacizumab mainte-
nance therapy. Others targeted therapies are currently being assessed in different trials, with
encouraging results that will have to be confirmed in phase III trials.
Key words: ovarian cancer, relapse, chemotherapy
Le diagnostic de cancer épithélial
de l’ovaire est porté tardivement
dans 70 % des cas. De ce fait, le
pronostic notamment de ces formes
avancées est redoutable et la survie
à cinq ans n’excède pas 40 %. Le
cancer épithélial de l’ovaire reste le
cancer gynécologique le plus mortel
et représente la troisième cause de
mortalité par cancer de la femme en
France (après les cancers du sein et du
côlon) [1]. Son incidence en France
est de 4 500 nouveaux cas par an avec
2 500 rechutes par an et 3 500 décès
par an. Le traitement de première
ligne repose sur une chirurgie réa-
lisée par des équipes chirurgicales
entraînées dont l’objectif est l’exérèse
macroscopique complète des lésions
et la chimiothérapie. Le standard de
chimiothérapie première des cancers
épithéliaux de l’ovaire est depuis
1996 l’association d’un sel de pla-
tine (cisplatine ou carboplatine) avec
doi:10.1684/mte.2012.0415
médecine thérapeutique
Médecine
de la Reproduction
Gynécologie
Endocrinologie
Tirés à part : F. Selle
51
Pour citer cet article : Selle F, Burcoveanu D, Cortez A, Rouzier R, Bazot M, Dubot C. Chimiothérapie des récidives des cancers de l’ovaire. mt Médecine de la
Reproduction, Gynécologie Endocrinologie 2012 ; 14 (suppl´
ement 1) : 51-62 doi:10.1684/mte.2012.0415
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Mini-revue
le paclitaxel (Taxol®) [2]. Quatre-vingts pour cent des
patientes atteintes d’un cancer épithélial de l’ovaire
répondent à la chimiothérapie de première ligne avec 20 à
30 % de réponse complète histologique à la laparotomie
de second look, lesquelles vont, malgré tout dans 50 à
60 % des cas, rechuter dans un délai de deux ans (ICON3)
[3]. La rechute des cancers épithéliaux de l’ovaire est donc
une situation très fréquente. Cependant, la survie globale
des patientes atteintes d’un cancer épithélial de l’ovaire
ne cesse d’augmenter depuis les deux dernières décen-
nies probablement en raison d’une meilleure qualité de la
prise en charge initiale notamment chirurgicale mais aussi
grâce aux chimiothérapies et leurs nouvelles combinai-
sons, à l’arrivée de nouveaux cytotoxiques et enfin grâce
à l’arrivée des biothérapies avec actuellement au premier
plan les anti-angiogéniques.
Facteur pronostique-clé : intervalle
libre sans traitement ou platine
L’élément pronostique majeur au moment de la
rechute est le délai entre la fin de la chimiothérapie ini-
tiale et la rechute avec une valeur seuil à six mois. Plusieurs
auteurs ont individualisé plusieurs groupes de patientes en
fonction de leur délai de rechute : entre 0 et 6 mois (réfrac-
taires et/ou résistantes), entre 6 et 12 mois (partiellement
sensibles), entre 13 et 18 mois (sensibles) ou au-delà de
18 mois (très sensibles). La sensibilité aux sels de platine
passe de moins de 10 % pour les rechutes de moins de six
mois, à 25 à 30 % pour les rechutes de6à12mois et à 30 à
60 % pour les rechutes de plus de 12 mois [4-6]. Une autre
analyse du groupe GINECO, portant sur 600 patientes en
rechute d’un cancer de l’ovaire, a montré une progres-
sion continue du taux de réponse à la chimiothérapie, de
la survie sans progression (SSP) et de la survie globale,
en fonction de la longueur de l’intervalle libre sans trai-
tement [7]. Les patientes qui progressent sous-traitement
de chimiothérapie (groupe 0-3 mois/progression) ont un
taux de réponse de 9 %, un temps médian jusqu’à pro-
gression de 90 jours et une survie médiane de 217 jours.
À l’inverse, les patientes qui rechutent avec un intervalle
libre sans traitement d’au moins 18 mois ont une sensibi-
lité au traitement (taux de réponse de 60 %), une médiane
de SSP (339 jours) et une médiane de survie (957 jours) très
proches des patientes vierges de tout traitement. Dans la
mesure où la chimiothérapie de première ligne de cancer
de l’ovaire comporte systématiquement un sel de platine,
l’intervalle libre sans platine est donc le plus souvent assi-
milé à l’intervalle libre sans traitement. Il est classique
de séparer les patientes en deux groupes selon qu’elles
rechutent avant ou après six mois après le dernier cycle
de traitement à base de platine, mais ce seuil est en par-
tie arbitraire car il existe un continuum selon lequel la
sensibilité au traitement à base de platine et le pronos-
tic s’améliorent avec la longueur de l’intervalle libre sans
platine.
Quand initier
une chimiothérapie à la rechute ?
Une rechute symptomatique et/ou radiologique est
une indication à débuter un traitement sans retard de prise
en charge. La décision de traitement est plus débattue
dans le cadre d’une élévation isolée asymptomatique du
CA 125. La question de savoir s’il faut traiter ces patientes
précocement par chimiothérapie sur la seule élévation du
CA 125 a été évaluée dans l’essai du MRC et de l’EORTC
[8]. Cinq cent vingt-neuf patientes présentant une éléva-
tion confirmée de leur taux de CA 125 ont été randomisées
en deux bras : un bras de traitement précoce où le clini-
cien et la patiente étaient informés du taux de CA 125 et un
bras de traitement retardé où ni le clinicien ni la patiente
n’étaient informés de l’élévation. Il n’a pas été retrouvé de
différence de survie globale entre les deux bras (hazard
ratio [HR] = 1,01 ; IC 95 % = [0,82-1,25] ; p= 0,91) et il n’a
pas été noté non plus d’amélioration de la qualité de vie
qui a été même détériorée dans le bras de traitement pré-
coce. En outre, l’initiation du traitement de troisième ligne
n’est pas retardée chez les patientes traitées précocement
comparativement à celles traitées à l’apparition d’une ano-
malie clinique ou radiologique. Cet essai a démontré qu’il
n’y a aucun intérêt à traiter précocement par chimiothéra-
pie les patientes en rechute sur une élévation du isolée
asymptomatique CA 125. Les critiques apportées à cet
essai ont porté essentiellement sur le peu d’information
concernant le traitement donné au moment de la rechute
et le nombre important de monochimiothérapies propo-
sées à la rechute y compris chez des patientes en rechute
platine sensible. Par ailleurs, dans cet essai, la place de
la chirurgie n’est pas évaluée, alors même que des don-
nées de la littérature suggèrent un impact positif sur la
survie pour des patientes présentant une rechute platine-
sensible localisée. Cette dernière question non tranchée
est en cours d’évaluation dans une étude de phase III en
cours actuellement (DESKTOP III).
Chimiothérapie des rechutes précoces
(moins de six mois)
Les rechutes précoces concernent les tumeurs résis-
tantes ou réfractaires au platine regroupant des situations
cliniques différentes : progression d’emblée sous platine
(tumeurs réfractaires), absence totale de réponse (tumeurs
résistantes), réponse fugace et progression, réponse tumo-
rale suivie d’une rechute dans un délai de moins de six
52 mt Médecine de la Reproduction, Gynécologie Endocrinologie, vol. 14, suppl´
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mois. Il s’agit donc d’une population de patientes très hété-
rogène sur le plan tumoral mais l’ensemble des données
de la littérature retrouve en moyenne chez ces patientes
des taux de réponses au traitement de l’ordre de 10 %,
une médiane de SSP de trois à quatre mois et une survie
globale de9à12mois [9]. Le traitement de ces rechutes
précoces fait appel à des molécules sans résistance croisée
avec les sels de platine. Plusieurs molécules ont trouvé leur
place dans cette indication avec une efficacité équivalente
et réduite, et des profils de toxicités différents : topotécan,
doxorubicine liposomale pégylée (DLP), paclitaxel heb-
domadaire, gemcitabine. La DLP, du fait d’un profil de
toxicité non croisé avec celui de la première ligne (non
alopéciant et non neurotoxique), reste souvent la molé-
cule la plus utilisée dans cette situation. Les études de
phase III ayant comparé les différentes monochimiothé-
rapies entre elles sont synthétisées dans le tableau 1.La
polychimiothérapie a été comparée à la monochimiothé-
rapie dans plusieurs essais randomisés et n’a pas démontré
sa supériorité en termes de survie mais a toujours été
plus toxique (tableau 2) [15-18]. En effet, les taux de
réponses sont le plus souvent supérieurs à ceux d’une
monochimiothérapie mais ne se traduisent pas en une
augmentation des taux de survie. La notion de bénéfice
clinique n’est, en général, pas rapportée dans les études
et la qualité de vie n’est pas meilleure sous polychimio-
Tableau 1. Équivalence des différentes monochimiothérapies évaluées en phase III.
Auteurs / Études Bras A Bras comparé Nombre de
patientes
% platine-
sensible
Survie sans
progression
Survie globale
Huinink, 2004 /ITSG [10] Paclitaxel Topotécan 226 50 % NS NS
Piccart, 2000 [11] Paclitaxel Oxaliplatine 86 25 % NS NS
Gordon, 2004 [12] /Doxil
30-49
Topotécan Doxorubicine
pégylée
474 46 % NS 1,23 [1,01-1,50]
p= 0,038
Meier, 2004 [13] /AGO Topotécan Tréosulfan 357 65 % p<0,01 NS
O’Byrne, 2002 [14] Paclitaxel Doxorubicine
pégylée
214 40 % NS NS
NS : non significatif.
Tableau 2. Comparaison des différentes études portant sur la chimiothérapie des rechutes platine-sensibles
ou platine-résistantes.
Auteurs / Études Bras A Bras comparé Nombre de
patients
% patients
sensibles
Survie sans
progression
Survie globale
Population platine-sensible
Parmar et al., 2003
[19] / ICON4/AGO
Paclitaxel-
platine
Platine 802 100 % 0,76 [0,66-0,89]
p= 0,000 4
0,82 [0,69-0,97]
p= 0,02
Pfisterer, 2006b
[20]/OV15
Carboplatine Carboplatine-
gemcitabine
356 100 % 0,72 [0,58-0,90]
p<0,01
NS
Pujade-Laurraine, 2010
[23] / CALYPSO
Carboplatine-
paclitaxel
DLP-carboplatine 976 100 % 0,82 [0,72-0,94]
p<0,001
NS
Monck et al., 2010
[18] / OVA-301
DLP Trabectédine-DLP 417 Sous-
groupe
0,73 [0,56-0,95]
p= 0,017
0,59 [0,42-0,82]
p= 0,001 5
Population platine-résistante
Torri, 2000 [15] Paclitaxel Paclitaxel-doxorubicine 234 <50 % NS NS
Buda, 2004
[16] / GONO/IOR
Paclitaxel Paclitaxel-épirubicine 212 25 % NS NS
Bolis et al., 1999 [17] Paclitaxel Paclitaxel-épirubicine 81 0 % NS NS
Monck et al., 2010
[18] / OVA-301
DLP Trabectédine-DLP 235 Sous-
groupe
NS NS
DLP : doxorubicine liposomale pégylée ; CAP : cisplatine-adriamycine-cyclophosphamide ; NS : non significatif.
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Mini-revue
thérapie ; en revanche, la toxicité est plus importante. La
monochimiothérapie est donc actuellement le standard
des rechutes précoces «platine-résistante »des cancers de
l’ovaire. Plus récemment, l’étude de phase III OVA-301 a
comparé l’association trabectédine-DLP à la DLP seule
chez 672 patientes dont 35 % étaient en rechute platine-
résistante. Chez ces dernières, l’association n’apporte
aucun gain de survie comme toutes les autres associations
de cytotoxiques dans cette situation [18].
Chimiothérapie des rechutes tardives
(plus de six mois)
Les rechutes tardives sont les rechutes dites «platine-
sensible », mais il est classique de distinguer les rechutes
«platine partiellement sensibles »(6 à 12 mois) où la sur-
vie est habituellement de 12 mois (donc guère meilleure
que celle des «platine-résistantes »qui est de l’ordre
de 9 mois), des rechutes «platine-sensibles »(plus de
12 mois) dont la médiane de survie globale est de trois
ans. En effet, les patientes présentant une rechute au-delà
de 12 mois ont de grandes chances de répondre à nou-
veau à un traitement à base de platine avec des taux de
réponse objective de l’ordre de 50 à 70 %.
Deux essais de phase III ont démontré la supério-
rité en termes de survie d’une combinaison de platine
versus un sel de platine en monothérapie. Le premier
essai ICON4-OVAR2.2 a comparé de fac¸on randomisée
chez 804 patientes sensibles au platine un traitement
conventionnel à base d’un sel de platine (71 % ont
rec¸u du carboplatine monothérapie et 17 % une associa-
tion cisplatine-adriamycine-cyclophosphamide [CAP]) à
un traitement associant sel de platine et paclitaxel (le sel de
platine utilisé a été dans 80 % du carboplatine et 10 % du
cisplatine) [19]. Les résultats sont en faveur de l’association
paclitaxel-carboplatine avec un HR de 0,76 pour la SSP
(p= 0,0004 ; IC 95 % = [0,66-0,89]) et de 0,82 pour la
survie globale (p= 0,02 ; IC 95 % = [0,69-0,97]), ce qui
correspond à une augmentation de la médiane de survie
globale de 5 mois (29 mois versus 24 mois). Il n’y a pas,
en revanche, de données sur la population des patientes
dites en rechute «partiellement platine-sensible »(6 à
12 mois). Le gain de survie se fait au prix d’une neuro-
toxicité supérieure (20 % versus 1 %) et d’une alopécie
plus importante (86 % versus 25 %) pour les patientes
traitées par cette association. Afin d’éviter ces toxicités,
d’autres molécules ont été testées dans cette indication
incluant la gemcitabine et la DLP. Le second essai mené
par le GCIG a comparé le carboplatine seul à une asso-
ciation carboplatine-gemcitabine sur 356 patientes dites
sensibles au platine (plus de six mois) [20]. Les résultats
ont été là aussi en faveur de la polychimiothérapie avec un
HR de 0,72 pour la SSP (p<0,01 ; IC 95 % = [0,58-0,90]),
avec une neurotoxicité et une alopécie faibles dans les
deux bras mais une toxicité hématologique (thrombopé-
nie, anémie et neutropénie) significativement plus élevée
dans le bras carboplatine-gemcitabine. Le gain d’efficacité
a été aussi constaté dans la population des rechutes par-
tiellement sensibles. En revanche, il n’y a pas eu de gain de
cette association en termes de survie globale, toutefois les
effectifs n’ont pas été calculés pour détecter un bénéfice
de survie globale.
Récemment, de nouvelles associations sans paclitaxel
peuvent prétendre aujourd’hui au statut de réelles alter-
natives au standard paclitaxel carboplatine. La DLP a
également été évaluée dans le cadre d’une association [22]
à un platine chez les patientes platine-sensibles. Après
un essai randomisé où elle s’est montrée supérieure en
monothérapie au topotécan dans cette population [21],
l’étude PACA a validé en phase II l’intérêt de cette molé-
cule en association au carboplatine en termes de tolérance
et d’efficacité [22]. Cet essai a été basé sur l’efficacité de la
DLP et son relatif bon profil de tolérance (pas d’alopécie,
ni de neuropathie) pour évaluer l’efficacité et la tolérance
de l’association DLP-carboplatine en situation de rechute
platine-sensible. Les résultats favorables en termes de
tolérance et d’efficacité ont justifié de comparer cette asso-
ciation en phase III au standard carboplatine-paclitaxel.
L’étude CALYPSO présentée lors de l’ASCO 2009 a été
publiée en 2010 [23]. Cette étude internationale de
phase III a été menée chez 976 patientes en deuxième ou
troisième ligne de traitement pour un cancer de l’ovaire
et ayant préalablement rec¸u un taxane. Cette étude a
comparé le standard carboplatine AUC 5 et paclitaxel
175 mg/m2administrés au jour 1 sur un cycle de trois
semaines à un traitement à base de carboplatine AUC 5 et
DLP 30 mg/m2à J1, toutes les quatre semaines, pendant six
cycles ou jusqu’à progression de la maladie. Cette étude
a apporté la preuve de la faisabilité de ce schéma thé-
rapeutique avec une dose-intensité relative de 99 % et
une tolérance hématologique acceptable dominée par une
thrombopénie de grade 3/4 plus fréquente dans le bras à
base de DLP avec 16 % versus 6 % d’événements dans le
bras paclitaxel. La tolérance extra-hématologique a révélé
un avantage net pour l’association DLP-carboplatine en
ce qui concerne la survenue d’une alopécie (7 % versus
84%;p<0,001) et la toxicité neurologique de3à5
(1 % versus 4%;p<0,01). Enfin, un fait notable, les cas
d’hypersensibilité au carboplatine ont été moindres avec
la chimiothérapie à base d’anthracycline (effet immuno-
suppresseur ?). En termes d’efficacité, l’objectif principal
a été atteint avec une médiane de SSP de 11,3 et de
9,4 mois, et un avantage en faveur de la chimiothérapie
DLP-carboplatine avec une réduction de 18 % du risque
de récidive, HR : 0,82 ; p<0,000 1 (non-infériorité) et
p= 0,005 (supériorité) (figure 1). L’analyse multivariée à
la recherche de facteurs prédictifs de survie sans rechute
a retrouvé les facteurs classiques tels que l’intervalle libre
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sans platine, le taux du CA 125, l’existence d’une mala-
die mesurable (ou non) et le type de traitement (en faveur
du traitement sans paclitaxel). Avec un index thérapeu-
tique favorable, le schéma carboplatine-DLP représente
une alternative thérapeutique efficace et crédible chez
les patientes en rechute «platine-sensible »d’un can-
cer de l’ovaire en leur offrant un schéma bien toléré
administré toutes les quatre semaines, ne provoquant
que peu d’alopécie, une moindre neurotoxicité, moins
d’allergie et une SSP au moins équivalente à celle du
bras standard. Les données de survie globale dévoilées
à l’ASCO 2011 ne montrent pas de différence significative
[24]. De nombreuses équipes l’ont déjà adopté comme
une de leur référence en situation d’échec sensible. Plu-
sieurs études ancillaires à cette étude ont été présentées à
l’ASCO 2010 et publiées récemment. Une analyse de la
population âgée de plus de 70 ans (157 patientes) incluse
dans l’étude a révélé une efficacité similaire entre les
deux bras de traitement dans cette population : 11,6 mois
dans le bras carboplatine-DLP et 10,3 mois dans le bras
carboplatine-paclitaxel [25]. Les avantages en termes de
tolérance en faveur du bras carboplatine-DLP ont été
identiques à ceux de la population générale de l’essai.
Certaines observations sont intéressantes et méritent d’être
mentionnées : les patientes jeunes ont eu plus de phé-
nomènes d’allergie au carboplatine que les femmes plus
âgées ; ces dernières ont présenté plus souvent des neu-
ropathies. Cette neuropathie n’a cependant pas grevé
la qualité de vie des patientes traitées par le schéma
carboplatine-DLP alors que cela a été plutôt le cas chez
les patientes du bras à base de paclitaxel.
Il est aussi intéressant de souligner qu’un nouvel agent
cytotoxique a obtenu son AMM dans le cancer de l’ovaire
en rechute : il s’agit de la trabectédine, molécule anti-
cancéreuse synthétique dérivée d’un tunicier des fonds
marins. La trabectédine se lie au petit sillon de l’ADN
inclinant ainsi l’hélice vers le grand sillon. Cette fixa-
tion à l’ADN déclenche une cascade d’événements qui
affectent plusieurs facteurs de transcription, des protéines
fixant l’ADN et les voies de réparation de l’ADN, per-
turbant ainsi le cycle cellulaire. Trois études de phase II
portant sur la trabectédine ont montré son efficacité avec
un taux de réponse objective de 37 % (IC 95 % = [29,6 % ;
43,8 %]) et un schéma de dose retenu de 1,3 mg/m2par
21 jours sur trois heures [26-28]. Une étude de phase I
d’association de la trabectédine à la DLP a permis d’établir
le schéma et les doses de l’association (trabectédine
1,1 mg/m2+ DLP 30 mg/m2tous les 21 jours) [29]. Son
efficacité, suggérée par différents essais de phase II, ran-
domisés ou non, a été à l’origine d’une phase III (OVA-301)
récemment publiée qui a définitivement apporté la preuve
de sa légitimité chez des patientes avec un cancer de
l’ovaire en rechute au-delà de six mois [18]. Ce grand
essai de phase III a comparé chez 672 patientes présen-
tant un cancer de l’ovaire en rechute (dont 35 % des
patientes avec une rechute platine-résistante), une mono-
CD CP
CD
CP
Médiane SSP, mois 11.3 9.4
HR (95% CI) 0.82 (0.72, 0.94)
Log-rank p-valeur (supériorité) 0.005
Valeur p (non-infériorité) <0.001
Mois depuis randomisation
1.0
0.8
0.6
0.4
0.2
0.0 06
467
509
397
405
188
152
60
45
20
10
4
2
12 18 24 30
Proportion de patientes "non progressives"
Nombre à risque
CD
CP
Figure 1. Survie sans progression [SSP] (en intention de traiter). Étude CALYPSO (d’après Pujade-Lauraine E. [22], ASCO 2009).
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