Origine et trajet des branches nerveuses destinées au sphincter urétral de l’homme K. AKITA, H. SAKAMOTO ET T. SATO Introduction Le sphincter strié de l’urètre de l’homme, aussi appelé rhabdosphincter, contribue de façon importante à la pression de clôture de l’urètre. Ce muscle a été reconnu comme faisant partie du diaphragme uro-génital caudal de la prostate [2, 5, 9, 10, 14, 15, 21], cependant, ce muscle est censé se situer entre la base de la vessie et le diaphragme urogénital [21, 27, 28, 33]. Récemment, il a été décrit que les muscles du sphincter externe de l’urètre étaient indépendants des muscles du plancher pelvien, et les muscles du sphincter externe ont été divisés en une partie striée et une partie lisse [5, 6, 26]. Ces muscles ne sont pas identifiables macroscopiquement. C’est pourquoi dans ce travail, nous nommons la région où sont situés ces muscles « les muscles du sphincter urétral ». De nombreuses publications ont décrit l’innervation du sphincter strié. Certaines ont décrit que le muscle était innervé par des branches du nerf pudendal [4, 7, 8, 11, 25, 27, 29, 31], d’autres ont affirmé qu’il était innervé par des branches du plexus pelvien [16, 20]. Les études récentes rapportent majoritairement que ce muscle est innervé par des branches du nerf pudendal. [25, 27, 28]. Le sphincter strié reçoit une innervation somatique et les muscles lisses de l’urètre une innervation autonome. Cependant, dans certains cas de cette étude, il a été impossible d’observer que les branches du nerf pudendal atteignaient le sphincter de l’urètre, même en utilisant un microscope. Dans ces cas, il a été suggéré que des branches collatérales de l’innervation somatique circulent le long des branches du plexus pelvien et innervent ainsi le sphincter strié. Dans cette étude, des dissections détaillées des branches du plexus pudendal ont été réalisées pour déterminer l’origine et le trajet des branches destinées aux muscles du sphincter de l’urètre. Des connexions ont été observées entre les branches somatiques du nerf pudendal et celles du plexus pelvien autonome. De 1 plus, nous avons recherché la composition segmentaire des branches du plexus pelvien. Nous avons discuté les trajets possibles des branches innervant le sphincter strié de l’urètre de l’homme. Matériel et méthodes Pour déterminer la forme et la position du sphincter strié, des coupes transversales sériées ont été réalisées à partir de cadavres de Japonais, puis fixées dans le formol à 10%, inclus en paraffine pour être sectionnées tous les 7 mm de la partie distale de la prostate au diaphragme urogénital, enfin colorées à l'éosinehématoxyline. Les cadavres de Japonais utilisés pour cette étude étaient fixés dans le formol à 8% et conservés dans l'alcool à 30%. Pour l'analyse détaillée, 10 hémi-pelvis de cinq cadavres mâles ont été disséqués sous microscope. L'origine, le trajet et la distribution des branches destinées à la région du sphincter externe ont été examinés en détail, et les différents rameaux communicants parmi les branches du plexus pudendal ont été examinées. Dans cette étude, les éléments osseux (l’os coxal et une partie du sacrum) et le muscle obturateur interne ont été retirés avant l'examen des nerfs. Pour analyser l'origine et le trajet des branches destinées à la région des muscles du sphincter urétral, 88 hémi-pelvis provenant de 44 cadavres de Japonais ont été examinés en totalité. La conformation segmentaire des nerfs du plexus pudendal a été examinée (nerf pudendal, nerf du muscle élévateur de l’anus et nerf splanchnique pelvien). Résultats Branches destinées à la région des muscles du sphincter de l'urètre La région des muscles du sphincter de l'urètre a été localisée entre la partie distale de la prostate et le diaphragme urogénital. Le sphincter strié a été observé histologiquement comme étant une fine couche entourant l'urètre, en forme de fer 2 à cheval chez deux sujets et circulaire chez un sujet (fig. 1). Le nerf pudendal cheminait sur la face latérale du muscle élévateur de l’anus (fig. 2). De petites branches du nerf pudendal atteignaient la région des muscles du sphincter par sa face antéro-latérale (fig. 2A). Cependant, dans 4 hémi-pelvis sur 10, il a été impossible de retrouver ces branches, même sous microscope. Le plexus pelvien avait une situation médiale par rapport au muscle élévateur de l’anus (figs. 3, 4). Les branches du plexus pelvien innervaient principalement le rectum, la vessie et la prostate. Les branches crâniales innervaient la partie proximale du rectum, l'uretère et la partie crâniale de la vessie, et les branches caudales étaient distribuées à la partie distale du rectum et à la prostate (fig. 3). Les branches les plus basses du plexus pelvien, provenant des branches les plus caudales du nerf splanchnique pelvien, cheminaient sur l'insertion rectale du muscle élévateur de l’anus pour atteindre la face caudale de la prostate et la région des muscles du sphincter urétral. La racine la plus caudale du nerf splanchnique pelvien formait souvent un tronc commun avec le nerf du muscle élévateur de l’anus (figs. 3, 4). Chez quelques sujets, il a été observé des communications entre le nerf pudendal, le nerf du muscle élévateur de l’anus, les branches les plus caudales du nerf splanchnique et la région des muscles du sphincter de l'urètre. Une petite branche du nerf pudendal, traversant le muscle élévateur de l’anus et fusionnant avec une branche destinée au sphincter strié, a été observée dans 2 cas sur 10 (fig. 2B). Une branche du nerf du muscle élévateur de l’anus traversait le muscle élévateur de l’anus et fusionnait avec le nerf pudendal dans 3 cas sur 10 (figs. 2B, 3B), cette branche traversait le muscle élévateur de l’anus pour rejoindre une branche du plexus pelvien dans un cas (fig. 2B). Conformation segmentaire des branches de la région des muscles du sphincter de l'urètre Les branches destinées aux muscles du sphincter de l’urètre provenant du plexus pelvien ont été examinées sur 88 hémi-bassins. Ces branches provenaient constamment de la partie la plus basse du plexus pelvien et cheminaient sur 3 l’insertion rectale du muscle élévateur de l’anus. Ces branches étaient fréquemment issues de la racine la plus basse du nerf splanchnique pelvien. La composition segmentaire des nerfs et des branches du plexus pudendal a été examinée dans 88 hémi-bassins. Le nerf pudendal était en général formé par trois segments (S2 à S4, 84,1% ; S3 à S5, 2,3%), parfois par deux segments (S2 et S3, 9,1%) ou quatre segments (S2 à S5, 4,5%). Les racines du nerf du muscle élévateur de l’anus provenaient de la face ventrale des racines du nerf pudendal. (S3 à S4, 95,5% ; S2 à S4, 4,5%). Les nerfs splanchniques pelviens provenaient de deux ou trois segments (S3 et S4, 77,3% ; S2 à S4, 19,3% ; S2 et S3, 3,4%). Dans la plus part des cas (94,3%), les racines caudales du nerf splanchnique pelvien formaient un tronc commun avec les racines du nerf du muscle élévateur de l’anus, ce tronc se divisant en nerf splanchnique pelvien en direction ventromédiale et en nerf pour le muscle élévateur de l’anus en direction dorso-latérale. Dans la plus part des cas, les branches destinées au sphincter de l’urètre issues du plexus pelvien provenaient de S4 et elles formaient à leur origine un tronc commun avec le nerf du muscle élévateur de l’anus. Discussion Il est généralement admis que les fibres nerveuses autonomes provenant du plexus pelvien innervent les muscles lisses du sphincter de l’urètre, et les branches somatiques provenant du nerf pudendal innervent le sphincter strié de l’urètre [3, 27, 28, 32]. Cependant, selon cette étude, il n’est pas toujours observé de branches destinées aux muscles du sphincter de l’urètre provenant du nerf pudendal, même sous microscope. Cependant, bien que les fibres nerveuses du nerf pudendal puissent être observées au microscope, la région est, dans certains cas, principalement innervée par des branches du plexus pelvien. Comme le sphincter strié contribue significativement à la pression de clôture urétrale, il est suggéré que quelques trajets collatéraux de fibres nerveuses somatiques puissent être présents. Dans cette étude, il a parfois été observé que des branches du nerf pudendal traversent le muscle élévateur de l’anus pour fusionner avec les branches du plexus pelvien destinées aux muscles du sphincter de l’urètre. Les racines du nerf splanchnique pelvien donnant des branches pour le sphincter strié forment souvent un tronc commun avec le nerf du muscle élévateur de l’anus. Il est 4 suggéré que les fibres nerveuses somatiques provenant du nerf du muscle élévateur de l’anus et du nerf pudendal puissent cheminer le long des branches du plexus pelvien. Les branches du plexus pelvien destinées aux muscles du sphincter de l’urètre proviennent de la racine la plus caudale du nerf splanchnique pelvien. De plus, ces branches cheminent le long de la partie supérieure de l’insertion rectale des muscles élévateurs de l’anus. Selon la composition segmentaire, les branches destinées aux muscles du sphincter provenant du plexus pelvien naissent de S4. Ces branches provenant des branches les plus caudales du plexus pelvien, il est important de les préserver au cours de la chirurgie de la partie inférieure du rectum. La composition segmentaire que nous avons observée est identique à celle décrite dans la littérature [12, 18, 19, 22, 29, 30]. Le tronc commun de la racine du nerf destiné au muscle élévateur de l’anus et du nerf splanchnique a été observé dans 70% des cas dans la littérature [19, 19, 22], et dans 94,3% des cas dans notre étude. A partir des expériences réalisées sur des moutons, Strasser et al. [28] rapportent que l’innervation autonome innerve et régule de façon prédominante la partie supérieure de l’urètre, et que la stimulation du nerf pudendal entraîne des contractions de la partie inférieure de l’urètre. Selon des travaux réalisés sur des singes, le nerf splanchnique pelvien et le nerf homologue à celui du muscle élévateur de l’anus sont indépendants l’un de l’autre [1, 13, 23]. Sato [22] mentionne que les branches caudales du plexus pelvien innervent le muscle élévateur de l’anus par l’intérieur, dans une analyse détaillée de la distribution nerveuse intra-musculaire. Cependant, il est difficile de réaliser une comparaison de ces résultats expérimentaux entre l’Homme et l’animal. Selon les résultats de cette étude, les branches destinées au sphincter de l’urètre sont résumées à la fig. 5. Ces branches proviennent du plexus pelvien et du nerf pudendal. Il est généralement décrit que les trajets des branches nerveuses autonomes et somatiques sont clairement séparés [3, 27, 28, 32]. Cependant, dans cette étude, il a été observé des communications variables entre le plexus pelvien incluant le nerf splanchnique, celui du muscle élévateur de l’anus, et le nerf 5 pudendal. Dans beaucoup de branches du plexus pelvien, de telles communications n’ont été retrouvées que pour les branches du sphincter urétral. Les fibres nerveuses somatiques peuvent cheminer le long des branches du plexus pelvien. Il est difficile de décrire clairement que les fibres nerveuses autonomes innervent les muscles lisses du sphincter de l’urètre, et que les branches nerveuses somatiques provenant du nerf pudendal innervent le sphincter strié, comme précédemment décrit [3, 27, 28, 32]. Légendes des figures Fig. 1A-C. Coupe histologique transversale de l’urètre. A Sphincter strié en forme de fer a cheval. B, C Aspect microscopique de cellules du sphincter strié (flèches doubles) Fig. 2A, B. Branches du nerf pudendal dans le périnée après exérèse de l’os coxal. Vue latérale. A Branche destinée au sphincter de l’urètre provenant du nerf dorsal de la verge (point noir) et branche destinée aux muscles du plancher pelvien (étoile noire). B La branche destinée à cette région (point noir) est formée d’une branche du nerf splanchnique pelvien (carré noir) et d’une branche du nerf pudendal qui traverse le muscle élévateur de l’anus (double étoile). Une branche du muscle élévateur de l’anus traverse le muscle pour rejoindre le nerf pudendal. Bl, Vessie ; dp, nerf dorsal de la verge ; dtp, muscle transverse profond du périnée ; La, muscle élévateur de l’anus ; pd, nerf pudendal ; Pn, pénis ; Pr, prostate Fig. 3A, B. Branches du plexus pelvien et nerf du muscle élévateur de l’anus après ablation de l’os coxal et du muscle élévateur de l’anus. Vue latérale. Les branches des muscles du sphincter de l’urètre (point noir) naissent des racines caudales du nerf splanchnique (carré noir). Les nerfs du muscle élévateur de l’anus (triangle noir) et ceux du nerf splanchnique pelvien (carré noir) forment un tronc commun (astérisque noir). A Vue droite ; B Vue gauche. Une branche du muscle élévateur de l’anus (étoile noire) traverse le muscle élévateur de l’anus et fusionne avec le nerf pudendal. Bl, Vessie ; dp, nerf dorsal de la verge ; hg, nerf hypogastrique ; La, muscle élévateur de l’anus ; pd, nerf pudendal ; Pn, pénis ; Pr, prostate. ; px, plexus pelvien ; Rc, rectum ; Ur, uretère ; Si, nerf sciatique Fig. 4. Branches des plexus sacré, pudendal et pelvien, après ablation de l’os coxal. Vue droite. Vue antéro-latérale. La racine la plus caudale du nerf splanchnique pelvien (carré noir) et le nerf du muscle élévateur de l’anus (triangle) forment un tronc commun (astérisque). Bl, Vessie ; hg, nerf hypogastrique ; L, nerf lombaire ; La, muscle élévateur de l’anus ; pd, nerf pudendal ; pfc, nerf cutané postérieur fémoral ; px, plexus pelvien ; Rc, rectum ; S, nerf sacré ; Ur, uretère ; Si, nerf sciatique Fig. 5. Représentation schématique de la position relative entre les branches nerveuses du sphincter strié (point noir) et du muscle élévateur de l’anus, dans notre étude. Les branches nerveuses somatiques du sphincter strié peuvent avoir deux trajets pour atteindre le muscle (ligne pointillée) : un trajet venant du nerf pudendal, l’autre du plexus pelvien. Le nerf splanchnique (carré noir) forme un tronc commun (astérisque) avec le nerf du muscle élévateur de l’anus (triangle noir). On observe parfois un rameau communicant entre le nerf du muscle élévateur de l’anus et le nerf pudendal (étoile noire) et un rameau communicant entre le nerf pudendal et la 6 branche du plexus pelvien destinée au sphincter strié. dp, Nerf dorsal de la verge ; hg, nerf hypogastrique ; La, muscle élévateur de l’anus ; pd, nerf pudendal ; px, plexus pelvien ; Rc, rectum ; Rs, sphincter strié ; Ur, uretère Traduction G. Benoit 7