Revue française de socio-économie Les pays post

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REVUE FRANÇAISE
DE SOCIO-ÉCONOMIE
Revue française de socio-économie
Appel à contribution
Les pays post-communistes en mal de développement
Les réflexions sur le développement ont été mises à rude épreuve par les évolutions ayant
ponctué les dernières décennies du XXe siècle : émergence de nouvelles puissances
économiques, crises financières en Asie du Sud-est, quasi-échec des politiques d’ajustement
structurels, stagnation économique dans de nombreux pays d’Afrique subsaharienne et
d’Amérique latine, etc. Mais c’est sans aucun doute l’effondrement de l’Empire soviétique et
de ses pays satellites qui constitue le défi le plus marquant pour ceux qui s’interrogent sur le
développement : le passage de ces pays à l’économie de marché n’a pas été anticipé, la
théorisation des transformations en cours semble marquer le pas.
Les théories du développement sont arrivées à un tournant décisif. Avec la fin de la guerre
froide, l’opposition entre centre et périphérie perd de son sens, celle entre un Nord riche et un
Sud soucieux de sortir du « sous-développement » est remise en question. La globalisation,
elle, brouille encore davantage les repères et rend caduques les catégories d’analyse
traditionnelles. Des poches de pauvreté se créent dans les pays riches, tandis que des
opportunités d’enrichissement sans précédent émergent dans les pays pauvres. Les questions
posées par les théories du développement — dualisme, segmentation des marchés, pratiques
informelles, exclusion, etc. — sont d’actualité dans les pays dits riches, et elles le sont tout
autant, sinon plus, dans les pays post-communistes. Le développement n’est plus pensé en
termes de rattrapage où la croissance est supposée déterminante. Il renvoie, d’une part, à des
questions requérant des solutions globales, tels que les « maladies sans frontières », les
migrations, la pollution, le réchauffement climatique, etc. Il questionne, d’autre part et au
niveau local, des paramètres tels que les « capabilités » et la garantie des droits individuels
(de propriété notamment). Pour mesurer les avancées, les analyses tiennent de plus en plus
compte de la perception qu’ont les populations de leurs conditions de vie.
Or, dans les pays post-communistes, cette perception se situe en deçà des attentes que pouvait
éveiller l’effondrement de l’URSS. Certes, après les chocs multiples des années quatre-vingtdix, les « taux de croissance » sont souvent remarquables et des domaines tels que
l’éducation, la santé, la protection sociale, le logement ont pu connaître certaines
améliorations. Mais le développement — dans le sens d’une réduction des inégalités et d’un
mieux-aller pour toutes les couches sociales, notamment grâce à des créations d’emplois
« décents » — semble en panne. Indépendamment de la divergence des trajectoires nationales,
se perpétuent des comportements consistant à réinterpréter des pratiques ayant fait leurs
preuves sous le régime précédent. Patrimonialisation, clientélisme, logiques rentières,
agissements en marge de la légalité, en sont les traits saillants, rappelant que pratiques
économiques et sociales sont étroitement imbriquées. Misant, à des degrés variables, sur le
marché et l’intégration de l’économie dans des réseaux globalisés, promouvant pour cela des
normes qui se veulent universelles, les décideurs semblent avoir sous-estimé la difficulté de
mener de front le passage à l’économie de marché et l’introduction de principes
démocratiques.
Dans les contributions attendues, il s’agira d’interroger le développement à l’aune des
événements qui se sont produits, dans les pays post-communistes, au cours des deux dernières
décennies. Les analyses concerneront les pays de la Communauté des Etats indépendants et
ceux de l’Europe du Sud-est (dont la Bulgarie et la Roumanie). Sont exclus les pays d’Europe
centrale et les pays baltes.
Plusieurs entrées peuvent être envisagées :
On peut s’interroger tout d’abord sur la manière avec laquelle les décideurs nationaux
modulent les réformes néo-libérales en fonction des spécificités de leur pays, en tenant
compte des aspirations des populations, ou en en faisant fi, au risque de déclencher des
mouvements de contestation. Comment s’articulent et sont dosés réformes néo-libérales et
processus de démocratisation ?
Cette première entrée, macro-économique, sera complétée par une approche au niveau micro,
qui examinera la manière dont les acteurs — individus, familles — s’adaptent à la nouvelle
donne de l’économie de marché. Quelles stratégies déploient-ils pour reproduire la cellule
familiale et pour lutter contre le déclassement social, comment résistent-ils à des normes
largement allogènes auxquelles ils ne sont pas toujours préparés, comment composent-ils
avec elles ? Quels liens sont mobilisés pour arriver à des compromis acceptables ? Quelles
résistances les acteurs opposent-ils aux tendances autoritaires des pouvoirs publics, de
quelle manière font-ils valoir les droits qui leur sont concédés formellement ?
Une dernière entrée consistera en l’analyse des intermédiations, collectives ou individuelles,
entre les décideurs et les populations. Il s’agira de décrypter le rôle des « experts » dans la
transmission des normes nouvelles et l’adaptation de celles-ci au contexte local, de
s’interroger sur la portée des organisations professionnelles, des syndicats et partis
politiques par rapport à ce nouveau « développement » dont les contours sont largement
conçus par l’extérieur et qui est susceptible d’engendrer des tensions lourdes de
conséquences.
Les contributions sont attendues pour le 25 janvier 2009.
Consignes aux auteurs : http://rfse.univ-lille1.fr/consignes/consignes.htm
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