"Des inégalités écologiques parmi les hommes"
distribution inégale des biens, de maux environnementaux et de droits à polluer. La question du droit à polluer pose le problème
des compensations. La dette écologique a cinq composantes : le pillage des ressources naturelles, l'utilisation des milieux les plus
fertiles, l'exportation vers les pays du Sud des déchets toxiques, d'activités à risque et polluantes, l'appropriation de l'espace
environnemental planétaire et des capacités d'auto-épuration de la planète et enfin la biopiraterie par l'agro-industrie
pharmaceutique, la brevetisation de savoirs traditionnels. Il ne faut pas oublier la dette carbone des pays industrialisés. La dette
extérieure des pays pauvres et la dette écologique sont liées : pour rembourser leur dette, ces pays bradent leurs ressources
naturelles et s'appauvrissent un peu plus. Les populations des pays pauvres sont plus vulnérables face aux dégradations et aux
risques écologiques. La dette écologique implique aussi la question de la légitimité des modes de vie occidentaux.
Les obstacles de fond à l'articulation des questions sociale et écologique sont ensuite abordés. L'activité scientifique ignore
également largement les questions écologiques pour différentes raisons évoquées par l'auteur.
Mei Mei Evans pose le problème de justice environnementale, propre à la culture anglo-saxonne avec sa représentation de la
nature comme un lieu d'invention de soi-même. A travers la mise en scène de la nature dans trois romans américains, le concept
hégémonique de nature en Amérique du Nord est une construction sociale masculinisée, hétérosexuelle et raciste. Donc selon ce
concept, certains groupes de personnes méritent moins que les autres d'accéder à la nature, mais aussi d'habiter, de travailler dans
un environnement sans pollution. Dans un essai autobiographique, White met l'accent sur l'exclusion des noirs et surtout des
femmes afro-américaines des espaces naturels. Eddy Harris suit le même chemin dans son livre pour les hommes noirs. Harris et
White insistent sur leur droit légitime de résider dans le wilderness au sein des Etats-Unis même dans une zone où les droits et
les libertés des hommes de couleur ne sont pas encore respectés. William Haywood Henderson, dans Native, montre que les
homosexuels des milieux ruraux du Wyoming, peuvent être victimes de violence et d'exclusion sociale.
Lionel Charles tente une interprétation interculturelle des inégalités écologiques : la question écologique est marquée par le
partage inégal des ressources et des dispositifs aux mains des Etats et des sociétés pour y faire face : le mouvement pour la
justice environnementale est né aux Etats-Unis suite au constat des inégalités environnementales subies par communautés
ethniques défavorisées. En France, cette question a été introduite il y a seulement quelques années. La France est caractérisée par
l'omniprésence du poids institutionnel de l'Etat et par un processus de rééfication avec la mise en vedette d'un homme (Nicolas
Hulot), qui apparaît comme son chevalier blanc. L'Etat ne peut assumer seul la charge multiforme et pluriscalaire de
l'environnement. En 2002 est institué le ministère de l'écologie et du développement durable devenu avec le gouvernement Fillon
le ministère de l'Ecologie, de l'Aménagement et du développement durable. Il y a un enjeu de communication derrière le choix
d'utiliser le terme écologie plutôt qu'environnement. Celui-ci tend à mettre de côté la dimension anthropique qui est au coeur de
l'environnement. La notion de développement durable a été élaborée pour répondre à la question des inégalités
environnementales avec le partage inégal des ressources, des risques ou des moyens économiques, scientifiques, techniques et
sanitaires dont disposent les Etats et les sociétés pour y faire face. Aujourd'hui le changement climatique est un impératif plus
contraignant que le développement durable. La question de l'effort qui doit être envisagé par les différents pays ne peut se faire
sans l'analyse de leur part historique dans les émissions. Un autre aspect du développement durable est la mise en oeuvre de
techniques ou de produits éco-favorables, mais loin d'être accessibles à tous comme les produits bios plus chers ne pouvant être
achetés que par une clientèle aisée.
Jacklyn Cock discute les articulations entre nature, pouvoir et justice en Afrique du Sud. Il présente le mouvement pour la justice
environnementale encore embryonnaire dans ce pays. Il est disparate et s'est investi dans le Forum social mondial et s'inscrit dans
les dynamiques mondiales d'un mouvement pour la justice globale. La justice environnementale implique une transformation
sociale générale prenant en compte les besoins et les droits élémentaires des personnes. Les pauvres sont la force la plus
pertinente de ce mouvement de justice environnementale. Beaucoup de militants sont des jeunes et des femmes. Leur
militantisme vient de leur fonction sociale traditionnelle d'administratrice du foyer. La principale stratégie de mobilisation est de
transformer des besoins en droits.
Bernard Gagnon, Nathalie Lewis et Sylvie Ferrari tentent de recentrer et de redéfinir le concept de justice pour lui conférer une
portée écologique. Le premier problème est l'écart entre la justice et l'idéal. Assurer la survie de la biosphère peut impliquer de
violer certaines règles de justice. S'il faut faire un rapprochement entre justice et éthique environnementale, il ne faut pas sacrifier
l'un à l'autre. Au nom de l'égalité des chances, chaque individu devrait bénéficier des conditions suffisantes pour entreprendre des
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