Francia-Recensio 2016/3
19. 21. Jahrhundert Époque contemporaine‒ ‒
Stefan Ihrig, Atatürk in the Nazi Imagination, Cambridge, MA (The Belknap
Press of Harvard University Press) 2014, 312 p., ISBN 978-0-674-36837-8,
USD 29,95.
rezensiert von/compte rendu rédigé par
Alexandre Toumarkine, Istanboul
Le livre de Stefan Ihrig est une contribution importante et très novatrice, qui vient enrichir
considérablement les travaux sur les relations turco-allemandes1 ou plutôt sur la perception allemande
de la Turquie dans l’entre-deux-guerres. L’ouvrage se conclut sur un court chapitre sur la Seconde
Guerre mondiale. Il existe des travaux sur les relations turco-allemandes pendant la période2, sur la
perception turque de l’Allemagne nazie3 et sur la séduction ou l’empreinte exercée par celle-ci dans la
Turquie kémaliste ainsi que sur la comparaison entre les deux régimes. L’accueil en Turquie, au milieu
des années 1930, des professeurs allemands fuyant le régime nazi et leur rôle dans la restructuration
de l’université turque; l’influence allemande sur le développement de l’antisémitisme et, de manière
générale, des politiques de stigmatisation et de répression des minorités en Turquie; l’héritage de la
conception allemande de la »nation en armes« dans le kémalisme4 ou encore les relations entre les
milieux pantouranistes et l’Allemagne nazie: autant de sujets spécifiques traités qui ont donné lieu à
des débats historiographiques animés, plus particulièrement en Turquie.
La qualité initiale du travail de Ihrig est d’avoir su limiter son objet, très largement inédit, sans
s’interdire d’éclairer des points connexes figurant dans les thématiques susmentionnées. En outre,
l’auteur a choisi un angle original. Le propos n’est pas de se livrer à une comparaison des deux
régimes politiques, nazisme et kémalisme; il n’est pas non plus une simple étude de perception d’un
régime ou d’un pays par un autre, mais une réflexion profonde sur la manière dont une référence à un
autre État, à son histoire, à son peuple et à son leader, vient nourrir un imaginaire politique. »Atatürk
in the Nazi Imagination« ne se contente pas d’être un complément aux recherches sur les relations
entre Turquie kémaliste et Allemagne nazie, il défend, d’une manière extrêmement convaincante, une
1 Il existe bien sûr aussi une riche littérature sur l’influence allemande, militaire en particulier, dans l’Empire
ottoman finissant pour le règne d’Habdul-Hamid (1876–1908) et pour la période jeune turque (1908–1918).
2 En turc, l’ouvrage classique est celui de Cemil Koçak, Türk Alman ilişkileri (1923–1939). İki Dünya Savaşı
arasındaki dönemde siyasal, kültürel, askeri ve ekonomik ilişkiler (Les relations turco-allemandes [1923–1939].
Relations politiques, culturelles, militaires et économiques pendant la période de l’entre-deux-guerres), Ankara
1991.
3 Ahmet Asker, Kemalist Türkiye’den Nazi Almanyası’na karşılaştırmalı bakışlar ve algılar (1929–1939) (regards
croisés et perceptions de la Turquie kémaliste vers l’Allemagne nazie), Istanboul 2014. Sorti la même année que
le livre d’Ihrig, il est en fait essentiellement consacré à la perception turque de l’Allemagne nazie, le court chapitre
sur la perception nazie, écrite avant la sortie du livre d’Ihrig, ne tire donc pas profit de celui-ci.
4 La question renvoie bien sûr au rôle de Colmar von der Goltz – »Goltz-Pacha« – et à la diffusion des idées
véhiculées par son célèbre »Das Volk in Waffen. Ein Buch über Heerwesen und Kriegführung unserer Zeit«, paru
en 1883.
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