Chapitre 8 – Les taux d’intérêt
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Contrairement au marché des taux à moyen/long terme, dit marché obligataire, où les prix
se forment par référence aux emprunts d’État, les prix sont le résultat de l’offre et la demande
sur instruments cash ou dérivés de prêts ou d’emprunts interbancaires. Compte tenu de la
faible durée des instruments traités, on est ici dans un univers où, fondamentalement, le risque
de crédit prime sur le risque de taux.
Pourquoi le marché monétaire peut se bloquer
Sur un marché, l’ajustement de l’offre à la demande s’effectue soit par les prix, soit par les quantités. Or
plus la durée d’un instrument est courte et plus il est difficile de procéder à un ajustement de grande
ampleur par les prix. Faute de pouvoir l’effectuer, les participants arrêtent de traiter les uns avec les
autres. C’est ce qui s’est passé à partir de l’été 2007, et qui a encore été aggravé par la faillite de
Lehman Brothers en septembre 2008.
En effet, supposons qu’il y ait une probabilité en apparence faible – 1 % – que la banque A dépose son
bilan demain. Pour qu’une autre banque, appelons-la B, accepte, sachant cela, de lui prêter 100 millions
d’euros sur un jour, il faudrait qu’elle puisse répercuter à A le coût du risque qu’elle prend. Or il est
considérable, car l’espérance mathématique de l’opération de prêt pour B est : 0,99 × 100 millions si
A survit + 0,01 × « rien du tout » si A est en faillite = 99 millions.
Il faudrait donc que B, pour s’en sortir, puisse facturer à A au moins 1 million d’euros d’intérêts pour
un jour, soit… plus de 360 % de taux d’intérêt annuel. Or, même si la réglementation ou le régulateur
le permettaient, cela n’est pas possible car, à ce taux-là, la banque A serait immédiatement asphyxiée.
Ainsi, dès qu’il existe ne serait-ce qu’un risque faible de faillite d’un établissement bancaire important,
le réflexe naturel des participants au marché monétaire est de ne plus accepter, comme contrepartie,
que la banque centrale, malgré les taux dissuasifs que celle-ci pratique, quitte à perdre de l’argent tous
les jours.
1.1. Les acteurs du marché
Les principaux acteurs du marché monétaire sont :
■tout d’abord les banques centrales, qui y jouent deux rôles bien différents mais essentiels :
– celui de régulateur du niveau des taux à court terme auxquels elles prêtent aux
banques commerciales et de l’alimentation en liquidités du circuit bancaire ;
– celui de prêteur de dernier ressort, qui est devenu prépondérant à partir du début de
la crise dite des subprimes à l’été 2007 ;
■les banques commerciales qui s’y refinancent, mais également qui y redistribuent leurs
éventuels excédents de trésorerie ;
■les grandes entreprises, qui y ont recours pour se refinancer à court terme ou, au contraire,
placer leurs éventuels excédents, sans passer par le bilan des banques, et donc à meilleur
compte ;
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