5
sur le fait que l’entreprise établie développe plus facilement des innovations incrémentales qui
consistent à perfectionner les couples produits/marchés existants.
Cependant, il existe tout un courant de la littérature qui s’est intéressé aux formes
organisationnelles qui permettraient aux grandes entreprises établies de développer des
innovations de rupture. Ces travaux relèvent de deux approches différentes.
La première renvoie au modèle de l’équilibre ponctué de Romanelli et Tushman (1994), selon
lequel les organisations alternent de longues périodes de stabilité caractérisées par le
déploiement d’innovations incrémentales interrompues par de courtes périodes de
changements radicaux caractérisées par des innovations de rupture qui établissent les
nouvelles bases de l’activité pour la période de stabilité suivante. Les premières périodes se
caractérisent par des fonctionnements stabilisés dans des organisations formalisées alors que
les secondes se caractérisent par des fonctionnements plus informels avec des rôles et des
missions plus floues.
Une seconde approche insiste sur la simultanéité du développement des innovations
incrémentales et radicales dans la firme. Cette simultanéité est associée au modèle ambidextre
de Duncan (1976), qui reprend la distinction entre exploration et exploitation introduite par
March (1991). Cette ambidextrie peut être obtenue au moins de trois manières :
structurellement par la création d’entités différenciées respectivement en charge du
développement des innovations radicales ou incrémentales (Tushman et O’Reilly 1997). Les
entités d’exploitation, au fonctionnement routinier, laissent principalement place à des
innovations incrémentales alors que, les entités d’exploration, autonomes, moins finalisées et
formalisées que les précédentes, sont davantage susceptibles de développer des innovations de
rupture. Le second mode est celui de l’ambidextrie de réseau (Mc Namara et Baden-Fuller
1999) dans lequel l’exploration est menée en externe par des entreprises de petite taille et
situées dans le réseau des grandes entreprises établies. Le résultat de l’exploration est ensuite
intégrée (participations en capital, achats de licences, etc) au sein des grandes entreprises.
L’exploitation et l’exploration sont ainsi conduites par des entreprises différentes et
complémentaires. Enfin le dernier mode correspond à l’ambidextrie contextuelle dans
lequelles individus alternent des comportements d’exploration ou d’exploitation selon les
situations qui se présentent à eux (Gibson & Birkinshaw 2004). S’il favorise le comportement
exploratoire, un tel contexte ne garantit cependant pas que les ressources ne soient pas
accaparées par l’exploitation (Dhifallah, Chanal, Defélix, 2008).
Ces différents modèles soulignent la nécessité de protéger des dynamiques d’exploration
parallèlement aux dynamiques d’exploitation naturellement privilégiées par l’entreprise