Quelles solutions à la crise financière ?
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Quelles solutions à la crise financière ?
Actes du colloque
La crise financière, l’économie américaine
et la sécurité internationale sous la nouvelle administration américaine
Organisé par
Economists for Peace and Security,
Fondation Charles Leopold Mayer,
Initiative Internationale pour Repenser l’Economie,
Levy Economics Institute of Bard College
Traduit de l’anglais (Etats-Unis) par Laurent Bury et revu par Emmanuel Fournier
Schwartz Center for Economic Policy Analysis, New School for Social Research, New York, 14 novembre 2008
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Initiée et soutenue par la Fondation Charles Léopold Mayer, l’IRE - Initiative
Internationale pour Repenser l’Economie - a pour mission de favoriser l’émergence de
nouvelles propositions dans le domaine économique. Notre travail consiste à identifier des
thématiques et des propositions qui nécessitent un effort d’innovation, dont l’impact sur la vie
des sociétés est considérable et qui se prêtent à des applications pratiques.
Située au croisement des problèmes sociaux et environnementaux très concrets et des
questions internes à la science économique, l’IRE a choisi de se focaliser sur cinq grands
thèmes : la monnaie et la finance, les agencements institutionnels, la régulation des biens et
des services, le rôle des territoires et l’organisation des échanges. Dans tous ces domaines,
l’IRE veut favoriser la réflexion et le débat susceptibles de faire émerger de nouvelles
propositions. Pour ce faire, l’IRE a été conçue comme un lieu ouvert à la diversité
idéologique, disciplinaire et culturelle, un lieu d’échange entre ceux qui pensent, ceux qui
agissent et ceux qui innovent dans le domaine de l’économie.
L’IRE met en place un centre documentaire en ligne afin de recueillir et de donner à
voir les réflexions innovantes. Elle organise et soutient l’organisation de séminaires et
colloques, prépare un concours international et publie des ouvrages économiques.
www.i-r-e.org
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Avant-propos
La crise financière mondiale à laquelle nous assistons depuis l’été 2007 marque un
tournant dans l’histoire récente de la mondialisation. La vague de dérégulations et l’expansion
sans précédent du secteur financier, qui ont démarré au début des années 1980, semblent
toucher à leur fin et nous en voyons partout les conséquences. Chercheurs, régulateurs et
hommes politiques du monde entier cherchent des solutions et se demandent comment
réformer le système. Le débat ne fait que commencer, mais il semble clair que les problèmes
ne seront pas surmontés par quelques ajustements spontanés du marché ou par de mineures
interventions de régulation. Nous avons besoin d’une nouvelle architecture financière, fondée
sur de nouvelles politiques et de nouvelles régulations.
L’Initiative internationale pour repenser l’économie s’inscrit dans cette réflexion.
Depuis juin 2008, nous accueillons un séminaire international sur cette question, qui réunit un
groupe d’éminents spécialistes de la finance et de la régulation financière, chercheurs ou
hommes de terrain. Les membres de ce groupe viennent principalement d’Amérique du nord,
bien que d’autres parties du monde, comme l’Europe, la Chine et le Brésil, soient également
représentées. Ce n’est pas un hasard : nous pensons que les Etats-Unis ont toujours un rôle
primordial à jouer dans la recherche d’une nouvelle architecture financière ; néanmoins, les
problèmes que nous affrontons sont d’ordre planétaire, et les efforts à prodiguer doivent donc
l’être eux aussi.
Notre espoir est que les propositions politiques supplantent peu à peu les diagnostics
établis. Une avancée a été faite en ce sens en novembre dernier, lorsque nous avons organisé
un colloque international à New York, au Bernard Schwartz Center for Economic Policy
Analysis, en collaboration avec Economists for Peace and Security, le Levy Economics
Institute et la Fondation Charles Léopold Mayer.
Le document que vous tenez entre les mains présente les discussions qui ont eu lieu à
cette occasion. Notre dessein n’était pas tant de proposer des mesures que d’identifier les
problèmes essentiels sur lesquels nous voudrions nous concentrer par la suite. Et nous
pensons les avoir clairement identifiés.
Nous aimerions exprimer notre gratitude envers tous ceux sans qui cet événement
n’aurait pas été possible, en particulier Pierre Calame, directeur de la Fondation Charles
Léopold Mayer, le professeur James K. Galbraith, président d’Economists for Peace and
Security, Thea Harvey, directrice d’Economists for Peace and Security, et Gilles Raveaud,
maître de conférences à l’université Paris VIII.
Aurore Lalucq, responsable du programme IRE
Wojtek Kalinowski, responsable éditorial
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Levy Economics Institute (Bard College)
Fondé en 1986, le Levy Economics Institute est un organisme de recherche sur les
politiques publiques. C’est une institution autonome, non partisane et à but non lucratif,
ouverte à l’examen de divers points de vue et vouée au service de l’intérêt public. La
conviction qui anime ses responsables est que la recherche en économie peut améliorer les
conditions de vie de l’homme. Son objectif est de susciter des mesures concrètes et efficaces
face aux principaux problèmes économiques. L’institut s’intéresse particulièrement aux
questions qui affectent en profondeur la qualité de vie aux Etats-Unis, dans d’autres pays
industrialisés et dans les pays en voie de développement.
www.levy.org
Economists for Peace and Security (EPS)
EPS est un réseau international de treize organisations affiliées qui encourage
l’analyse économique et promeut la paix, la sécurité et l’économie mondiale. Il travaille à
l’échelle locale, régionale et internationale pour réduire l’effort militaire et introduire des
changements de politique capables de construire un avenir plus juste et de garantir la paix.
www.epsusa.org
Schwartz Center for Economic Policy Analysis (SCEPA)
Rendu possible grâce à la générosité d’Irene et Bernard L. Schwartz, le SCEPA est le
centre de recherche en politique économique du département d’économie de la New School
for Social Research. Nous nous focalisons sur l’économie des Etats-Unis, sans jamais perdre
de vue le contexte mondial des développements économiques américains. Notre recherche se
concentre sur la croissance et le développement économiques, l’équité, le niveau de vie et
l’emploi. Nos activités incluent l’animation d’ateliers sur la politique économique, la
publication d’ouvrages et l’organisation de colloques et de conférences.
www.newschool.edu/cepa
La Fondation Charles Léopold Mayer pour le Progrès de l’Homme
Fondée en 1982, la Fondation Charles Léopold Mayer pour le Progrès de l’Homme est
une fondation suisse indépendante. Sa mission est d’encourager l’émergence d’une
communauté mondiale et de contribuer à trois mutations majeures : une révolution de la
gouvernance pour gérer la nouvelle interdépendance entre êtres humains, entre sociétés, entre
l’humanité et la biosphère ; la recherche d’une éthique universelle de responsabilité ;
l’émergence d’une société durable.
www.fph.ch
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Introduction
par James Galbraith
Pour commencer, je voudrais vous rappeler brièvement comment nous est venue l’idée
de ce colloque. Tout a démarré au début de l’année 2008, par un échange que j’ai eu avec
Aurore Lalucq, et auquel Pierre Calame a été étroitement associé. Nous pensions que
personne n’avait encore pleinement pris la mesure des difficultés du secteur financier, qui
avaient commencé à se manifester très clairement en août-septembre 2007, ni de leurs
conséquences pour l’économie américaine et plus généralement pour l’économie mondiale. Il
nous semblait utile de réunir pendant quelques jours un groupe d’économistes pour examiner
la situation et, dans la mesure du possible, développer une réflexion commune et parvenir à
une meilleure compréhension des problèmes qui allaient probablement se poser. Nous
n’avons pas eu de difficultés à convaincre quelques personnalités parmi les plus éminentes et
les plus compétentes de nous consacrer quelques jours. Nous les avons réunies à Paris, en juin
2008, grâce au soutien de la Fondation Charles-Léopold Mayer et de l’Initiative Internationale
pour Repenser l’Economie.
A la suite de cette rencontre, j’ai rédigé un long rapport qui a dans un premier temps
été diffusé dans certains cercles politiques aux Etats-Unis, avant d’être publié dans Challenge
Magazine. Ce rapport a été rédigé à un moment la crise financière ne faisait pas encore la
une des journaux du monde entier, elle n’était pas la question centrale de la campagne
présidentielle américaine. Nous y affirmions néanmoins qu’elle avait de grandes chances
d’être au cœur des préoccupations de la future administration.
De notre point de vue, le système financier des Etats-Unis, et plus largement celui du
monde occidental, se trouvait dans une situation que nous n’avions encore jamais connue au
cours de notre carrière : il rencontrait une série de difficultés qui ne pourraient être rapidement
surmontées ni par les processus ordinaires d’ajustement du marché, ni par des interventions
régulatrices mineures. Et nous pensions que les conséquences de ce phénomène allaient
rapidement devenir le problème économique du moment. Je dois l’avouer, nous n’avions pas
prévu que les choses iraient aussi vite. Je pensais pouvoir conserver ma réputation de prophète
si je publiais mon texte en novembre 2008, et que les événements ne se produisaient qu’après
l’élection. Mais la crise s’est brusquement accélérée, et des problèmes insurmontables sont
apparus dès la mi-septembre.
Nous faisions face à toute une série de phénomènes en gestation depuis près d’une
décennie : l’érosion programmée des normes de régulation et de supervision dans le
financement de l’immobilier ; la pratique croissante de la titrisation des subprimes et de tous
les prêts Alt-A1, réunis sous l’appellation de ortgage-backed securities (titres garantis par des
crédits immobiliers) ; la multiplication des obligations de type CDO (collateralized debt
obligations), que l’on avait pris l’habitude de sécuriser au moyen de contrats d’échange de
risque de défaut (credit default swaps). Tout cela avait créé une situation de « blocage des
marchés », pour reprendre l’expression de John Eatwell : le système financier avait perdu sa
capacité à évaluer les actifs échangés, mais également sa confiance dans la valeur des
portefeuilles, ainsi que la volonté de jouer le rôle de moteur de l’économie.
Qu’avons-nous vu depuis ? La disparition des banques d’investissement, soit parce
qu’elles ont connu une fusion, soit, comme dans le cas de Lehman Brothers, parce qu’elles
ont fait faillite. Après avoir essayé de gérer les problèmes au cas par cas, l’administration
1Les prêts Alt-A se situent entre les plus risqués subprimes ») et ceux considérés comme plus sûrs
primes »).
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