PREPARER ENSEMBLE LE GRAND AGE
PRESENTATION par Mme AUGIER – responsable de la commission Retraités
Le Grand Age ! que faire de cette vie gagnée grâce aux progrès de la médecine ?
Quel sens pour la vieillesse ?
Il est fréquent d’entendre ces réflexions et ces questions autour de nous. Ce qui
nous interpelle : nous, nos proches, les soignants et les aidants.. qui écoutent et
accompagnent au quotidien les plus âgés d’entre nous, leur apportant simplement
une qualité de vie la plus digne.
Donner de la vie au temps ! Nous abordons une terre inconnue. C’est la première
fois, dans l’Histoire de l’Humanité, que 5 générations vont cohabiter de façon
significative.
Et si l’allongement de la vie était plutôt une bonne nouvelle ! L’Humanité ne serait-
elle pas tout simplement en train de grandir ? Le jeunisme proclamé de notre Société
serait une erreur fondamentale. Le point d’équilibre de l’Humanité ne serait-il pas
plutôt celui que nous allons connaître avec des êtres humains promis à une longévité
moyenne de 1 siècle ?
Nous pouvons nous demander si notre Société actuelle est suffisamment adaptée
pour répondre aux problèmes posés par cet allongement de la durée de vie. Cela
nécessitera sans doute encore de nombreuses évolutions.
Pour nous aider à réfléchir et à répondre à nos premières interrogations, nous avons
demandé leur concours à des professionnelles particulièrement qualifiées, dont nous
apprécions déjà l’action à leur grande valeur. Ce sont :
Madame GUIDOLLET , directrice du Service de Soins à Domicile (SSAD) du 6è.
Madame CREUZIL, assistante sociale à la Maison du Département (MDR) du 6è.
Madame DAUMUR, administrateur du Centre de Coordination médico-social
(CCMS)
Mme GUIDOLLET Au siècle dernier, le Grand Age était une histoire de solidarité
familiale. Actuellement, l’éclatement des familles, le travail des femmes, les
appartements plus petits.. disons tout simplement : la vie moderne, ont changé le
cours des choses. Le déferlement de la « vague grise » , dont on parle beaucoup, ne
fait que commencer. Il faut réagir vite. Et j’ai presque envie de dire : est-ce que ce
n’est pas déjà tard ? Au niveau national, on parle beaucoup du Plan Alzheimer.
Mais , quand commence le Grand Age ? On sait que l’espérance de vie augmente.
Au siècle dernier, on était « vieux » à 60 ans. Maintenant, moi qui suis dans la
gériatrie depuis bientôt 30 ans, je ne saurais répondre. On parle de 4è, voire de
âge.. Au niveau de mon Service, la moyenne d’âge est de 88 ans.
Mais comment bien vivre chez soi, en sécurité, en harmonie avec son
environnement ? Le maintien à domicile ? oui, mais : jusqu’où ? Il ne faut pas
diaboliser l’entrée en institution. Il faut la préparer, préparer le patient, préparer la
famille.
Pourquoi, comment rentre-t-on en institution ? A quel prix ? La personne qui devient
dépendante des autres, cela ne peut-il pas entraîner des maltraitances physiques,
psychologiques, aussi bien au domicile de la part de la famille, qu’en institution de la
part des soignants ?
A toutes ces interrogations, nous allons essayer de répondre.
Mme CREUZIL J’ai 58 ans. J’ai la maladie de Parkinson depuis 14 ans et je
continue à travailler...Nous sommes10 assistantes sociales à la MDR de Lyon, et 2
plus spécialisées pour les personnes âgées(PA)
Quelques éléments de démographie La population seniors, en France, compte
30% de plus de 50 ans. Les femmes représentent 55% de la population âgée de 60
à 75 ans, et 80% des plus de 85 ans. L’espérance de vie est de 83 ans pour les
femmes et de 75 ans pour les hommes.
Statistiques de 2002 Il y a, en France, environ 850.000 personnes de plus de 60
ans dépendantes dépendance psychique, physique, ou les deux. Elle augmente
avec l’âge. Mais on peut rester autonome au moins jusqu’à 80 ans.
Le logement - Jusqu’à 85 ans, 90% des personnes habitent à leur domicile, comme
80% de 85 à 90 ans , et 54% des plus de 90 ans. Donc tout le monde n’est pas
concerné par la vie en établissement. Il y a d’autres alternatives comme l’accueil de
jour, l’accueil familial, l’hébergement temporaire...
Dans le Rhône, toutes les Collectivités territoriales municipalités, département -
sont concernées par les EPAD (établissements pour PA dépendantes) . Le Conseil
Général est responsable de l’ADPA (allocation départementale personnalisée
d’autonomie) loi de juillet 2001, application au 1er janvier 2002 qui déclare :
« toute PA, résidant en France, qui se trouve dans l’incapacité d’assumer les
conséquences du manque ou de la perte d’autonomie liés à son état physique ou
mental, a droit à une allocation permettant une prise en charge adaptée à ses
besoins ».
Cette allocation est versée par le département, sous condition de dépendance et de
revenus. Le médecin traitant détermine le degré de dépendance, suivant une grille.
Les personnes peuvent avoir une allocation mensuelle qui varie de 509 euros à 1189
euros par mois pour payer une aide à domicile. Un barème tient compte des revenus.
Tout le monde peut prétendre à cette allocation. Cela permet le maintien à domicile
un certain temps dans de bonnes conditions.
En 2002, dans le Rhône, 14.000 personnes touchaient cette allocation. Actuellement,
il y en a 20.000. Sur le arr., au 31 Août, on comptait 352 allocataires à domicile,
404 en établissements.
Mme DAUMUR Je suis ancienne directrice d’école d’infirmières, en retraite. Tout
d’abord, la formation des infirmières et des aides-soignantes réserve, aujourd’hui,
une très large part aux P.A., compte-tenu de l’évolution des problèmes de santé.
Je vais parler d’une formule intermédiaire entre le domicile et la maison de retraite :
l’hébergement temporaire. Une maison des familles à Villeurbanne a été construite
par Habitat et Humanisme. Nous y avons, maintenant, une formule d’hébergement
temporaire.
L’hébergement temporaire est un lieu dans lequel on peut accueillir des personnes
de plus de 60 ans avec conditions particulières pour des gens qui seraient en
invalidité, à partir de 55 ans. Les conditions d’accès sont relativement souples ; cela
peut être un conjoint qui va se faire hospitaliser, qui est malade, alors que l’autre
conjoint ne peut plus répondre complètement à ses besoins ; on peut donc accueillir
2 conjoints ou 1 seul si l’autre est hospitalisé. Cela peut être : laisser souffler la
famille quand elle est fatiguée par une P.A. difficile, en train d’entrer dans la
dépendance, mais sur une période relativement courte ( été, vacances..). Cela peut
être la sortie de l’hôpital de quelqu’un qui est seul, avant son retour à son domicile,
qui n’est pas forcément passé par la maison de convalescence ; etc..
Ici, la durée de l’hébergement temporaire est très strict : 3 mois, renouvelables 1 fois.
On ne peut rester au-delà de 6 mois – ce qui donne, quand même, un peu de temps
aux familles pour s’organiser. Car l’objectif est bien le retour à domicile. Il est
assuré par des professionnels de santé (infirmières, aides soignantes, bénévoles)
car cette Maison reçoit d’autres types de patients. Ce qui implique de faire
provisoirement ce que les hébergés ne peuvent pas faire et faire avec eux tout ce
qu’ils savent faire pour retourner au domicile. Ce n’est donc pas une maison de
repos, ni une maison de retraite. L’objectif est bien de garder des habitudes en vue
du retour à la maison.
Un autre objectif : les attentes pour l’entrée en maisons pour P.A. sont souvent un
peu longues. L’hébergement temporaire peut être, provisoirement, une façon
d’attendre entre le domicile et l’EPAD.
D’autres Maisons, en particulier les EPAD, font de l’hébergement temporaire, avec
souvent peu de places. Aussi cette formule est assez demandée, parce qu’elle rend
service et qu’on peut répondre dans l’urgence, dans les 3 jours. Mais ne sont pas
concernés les gens de grande dépendance. L’ADPA est attribuée en fonction du
degré de dépendance. Les gens situés dans la Grille aux niveaux 1 et 2 ne peuvent
être reçus en hébergement temporaire, car l’offre de soins ne serait pas suffisante
pour eux, puisqu’on se situe dans les soins de la vie courante.
L’accueil de jour il existe de plus en plus. Ce lieu reçoit des personnes à la
journée. Elles sont prises en charge le matin et rentrent chez elles le soir. Cela
touche beaucoup de gens atteints de la maladie d’Alzheimer, mais pas seulement.
Cela soulage un peu la famille.
Les personnes accueillies dans chaque lieu ne sont pas très nombreuses - souvent
de 10 à 15 - ce qui permet des activités intellectuelles, ou gestuelles.. et cela permet
aussi de garder un lien social, avec, parfois, le partage du repas ou du goûter, ce qui
incite la PA à bien se situer en tant que PA, mais pas forcément dépendante.
Quand c’est bien organisé, il y a une prise en charge dès le matin en véhicule, et, le
soir, la PA est ramenée chez elle. Cette formule, très intéressante, aura besoin d’être
développée. Cela aide, parfois, à envisager l’hébergement temporaire ou définitif, en
ayant permis une petite adaptation à ce que peut être la vie en collectivité quand on
ne peut plus rester chez soi.
Mais une des difficultés de l’accueil de jour, c’est souvent le financement : qui paie ?
Mme C L’accueil de jour pour le arr. présente 3 possibilités qui se situent dans
le arr ; il faut donc se déplacer. Un est situé 7 cours Gambetta ; un nouveau rue
Guillou ; et un Centre de jour pour PA, situé au centre médico-psychologique, 236
cours Lafayette, avec prise en charge par la Sécurité Sociale , y compris le transport.
Dans le cadre de l’ADPA, on peut prendre en charge les transports.
Mme G On voit qu’avant l’entrée en maison de retraite, il y a d’autres alternatives.
car toutes les personnes souhaitent rester le plus longtemps possible chez elles.
Comme j’ai été DRH en maison de retraite médicalisée pendant 10 ans, en région
parisienne, j’ai connu les deux systèmes et, vraiment, il ne faut pas diaboliser le
placement en institution. Le domicile a ses limites , et il y a des maisons de retraite,
des institutions où il fait bon vivre.
Vieillir chez soi ce que l’on souhaite tous, c’est vivre à son domicile en sécurité,
en harmonie avec l’environnement extérieur. C’est en éprouver un certain bien-être,
malgré la vieillesse, peut-être la maladie, qui vont réduire peu à peu les capacités
motrices et intellectuelles. C’est accepter, (j’y insiste) avant que la dépendance ne
devienne trop importante, des aides des auxiliaires de vie, ou des Services de soins
à domicile, ou des infirmières libérales.
Il est important de comprendre qu’il faut mettre en place, à domicile, un préventif.
Pourquoi ? parce que des liens vont s’installer entre la PA, les aidants professionnels
et la famille. Un climat de confiance va s’installer ; alors on va pouvoir accompagner
le patient jusqu’au bout. J’hésite toujours, dans le Service que je dirige, à prendre en
charge une personne très dépendante, qui est déjà à la limite du domicile ; parce que
la famille est épuisée, on voit que cette personne ne pourra pas rester encore très
longtemps chez elle, qu'il faut préparer un placement rapidement. Une aide un peu
utopique de maintien à domicile se fait dans de mauvaises conditions.
Au domicile, l’aide-soignante entre dans l’intimité de la personne : on entre dans sa
maison, dans son histoire, à un moment de sa vie où elle devient vulnérable. Il faut
beaucoup de savoir-faire et de savoir-être. La bonne volonté ne suffit pas...J’insiste
sur l’importance des formations, des groupes de parole pour la famille, pour les
soignants, du travail en réseau avec les différents intervenants. A domicile, on est
nombreux à intervenir !
D’abord, il y a le médecin, puis l’infirmière, l’assistante sociale, le kiné, parfois
l’orthophoniste, les auxiliaires de vie, les aides-soignantes des services de soins, les
bénévoles, la télé-assistance, les magasins de matériel médical. Il faudra penser au
portage du repas, parfois au foyer-restaurant ..
Dans mon Service, j’ai 60 patients à domicile et beaucoup ont toutes ces personnes
qui interviennent chez elles ! C’est énorme.
Avec l’avancée de l’âge et de la solitude, les risques de ne plus pouvoir rester au
domicile augmentent au premier incident. Il faut bien en prendre conscience. Si les
personnes aspirent à vivre chez elles, encore faut-il leur donner les moyens de le
faire en toute sécurité. Les PA éprouvent un besoin de sécurité vis-à-vis des
risques, qui, à domicile, sont importants : les chutes, les malaises, le sentiment de
solitude – on le voit à la tombée de la nuit – et la peur des agressions. ..
Pour favoriser le maintien à domicile, il faut 2 choses essentielles : mobiliser
l’intérêt de la PA et maintenir les relations sociales. Lorsque les PA sont isolées,
elles subissent une atteinte morale qui influe sur le physique ; et, là, on voit arriver
des phénomènes de glissement . Il faut proposer à la PA et à la famille les services
présents dans leur arrondissement. Dans chaque arrondissement de Lyon, vous
avez la Mairie on vous donnera les renseignements nécessaires, et la MDR. En
cas de problème, si vous avez frappé à ces deux portes, des professionnels vous
seront indiqués qui pourront répondre à vos interrogations.
Vivre chez soi semble être l’idéal, mais cela peut être au détriment de la qualité
de la vie – j’y insiste. L’effort peut être trop important pour la PA ou pour les
possibilités d’aide familiales ou celle des professionnels ; on en arrive à ce que l’on
appelle, en psychologie, le burn out, c’est-à-dire qu’on n’en peut plus. C’est là les
familles et les aidants professionnels peuvent être entraînés vers de la maltraitance.
Celle-ci, ce ne sont pas forcément des coups, mais toute la maltraitance
psychologique : la personne qu’on laisse dans son coin ; à qui on ne donne plus ses
médicaments, ou à boire, ou à manger.. sur laquelle on fait une pression
permanente : on lui fait sentir qu’elle est de trop ; on lui prend son argent... Tout
cela, c’est de la maltraitance.
Quand on voit que, à domicile, la PA est trop dépendante pour rester chez elle, c’est
à nous, les professionnels, d’aider à prendre la décision. Il faut aider la famille et
aider le patient. Ce n’est pas toujours facile, et on y passe beaucoup de temps j’y
passe du temps, comme les aides-soignantes qui, tous les matins, vont faire des
soins. On essaie de préparer.
Pour les professionnels, quels sont les critères qui peuvent nous faire penser qu’un
maintien à domicile a atteint ses limites ? Ils sont nombreux, et un seul d’entre eux
peut aider à déterminer que la limite du maintien à domicile est atteinte. C’est :
- quand la sécurité à domicile est insuffisante quand le coût est trop élevé : avec
une auxiliaire de vie, 24hx24h, on arrive à 3 ou 4.000 euros par mois. Alors que, pour
les institutions les plus chères, c’est 100 euros par jour, avec une sécurité..
- quand la solitude est trop grande quand la PA ne s’alimente plus quand il y a
des risques sur le voisinage, avec les incendies, les fuites de gaz quand le patient
désorienté (type Alzheimer) fait des fugues répétées (c’est, hélas ! un problème
auquel on est de plus en plus souvent confronté)
quand l’entourage est épuisé dans sa bonne volonté et va devenir maltraitant ;
dans ce cas, c’est l’aidant qui va flancher avant le patient , qu’il s’agisse d’un enfant
ou d’un conjoint – quand il y a excès des aides, la multiplication des acteurs :
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