quelqu’un à ouvrir un bureau de tabac, on peut lui dé li-
vrer un permis de port d’arme, etc. Cette autorisation est
conditionnelle : on délivre un permis si certaines con-
ditions réglementaires sont réunies. Mais il est possible
de concevoir une autorisation qui serait inconditionnelle.
Elle s’exprime ainsi : tu es autorisé, parce que c’est toi.
Une telle autorisation ne peut être qu’une grâce. Dans
cette parabole, le drame de l’homme est de n’avoir pas
su que l’accès lui était autorisé comme une grâce, c’est-
à-dire ouvert inconditionnellement et ouvert pour lui
seul. On peut songer à tous ceux qui sont passés à côté de
possibilités, simplement parce qu’ils ont cru qu’elles ne les
concernaient pas. Certains passent à côté de la musique,
de la littérature, des études, d’une spécialisation, d’une
aventure amoureuse, d’un mariage, parce qu’ils croient
que ces voies ne sont pas pour eux. Mais comment savoir ?
Comment l’homme aurait-il pu savoir que la porte lui
était ouverte, si précisément le portier lui en interdisait
constamment l’entrée ? Eh bien, il aurait dû être mis en
état de découvrir que la porte lui faisait signe. Quelqu’un,
quelque chose, aurait dû se présenter pour le conforter. Une
voix aurait dû se faire entendre.
La philosophie est cette voix qui autorise. En philoso-
phie, on est autorisé inconditionnellement, absolument. Ce
n’est pas l’impression que donnent beaucoup de livres et
de cours, qui paraissent interdire l’accès ou ne l’autoriser
qu’à certains prols intellectuels. Mais cette impression
est fallacieuse : en philosophie, un accès n’est ouvert que
pour moi et resterait ouvert pour rien si je ne l’empruntais