obtenir la libération de ce dernier auprès du roi d’Angleterre, mais n’eut aucun succès.
Robert Courteheuse mourut captif en 1134.
Après avoir rendu hommage à la mémoire de Gérard Louise, qui fut président du Pays
Bas-Normand, un fin connaisseur des sources médiévales normandes et un spécialiste
des espaces de frontière, Véronique Gazeau a souligné l’intérêt porté par les historiens
aux espaces de frontière auxquels Tinchebray appartient. Ces territoires à la
soumission fluctuante étaient souvent les lieux d’événements marquants. Henri Ier, qui
s’était attaché à la conservation de Domfront dans son patrimoine, semble en avoir
mesuré les enjeux stratégiques.
Hélie de la Flèche, comte du Maine, était un personnage de ces marches dont la prise de
position en faveur d’Henri fut décisive dans l’issu du conflit entre les deux fils de
Guillaume le Conquérant. L’une des contributions du colloque tend à montrer que les
relations d’affinité entre ces deux hommes furent déterminantes dans la prise de
position d’Hélie. L’affinité et plus généralement les réseaux de sociabilité constituent un
champ d’exploration ouvert pour de nouvelles recherches.
Les actes du colloque de Tinchebray permettent également de mieux connaître Robert
Courteheuse. Auréolé d’un immense prestige, le duc de Normandie fut acclamé à Rouen
et à Caen lors de son retour de la croisade en 1100. Pourtant Ordéric Vital justifie la
défaite du duc de Normandie à Tinchebray en le décrivant comme un mauvais chevalier.
Des hypothèses nouvelles tentent d’expliquer ce changement de perception. Ayant gagné
son salut et manifesté sa bravoure en Terre sainte, Robert aurait pu perdre le goût du
gouvernement d’une petite principauté comme la Normandie.
Cette analyse met en avant la personnalité du duc et interroge les conditions qui l’ont
développée, en particulier l’influence de la place des enfants dans les fratries. Malgré,
ou peut-être à cause, de sa position d’aîné, Robert fut marqué dans sa jeunesse par la
frustration de pouvoir et l’impossibilité de se préparer à son destin en raison de la
poigne de fer du Conquérant, peu enclin à partager son autorité. Ni l’inclination à la
bienveillance de Mathilde envers son fils aîné, ni les plaintes de Robert auprès du roi
Philippe Ier ne permirent d’apaiser des relations exécrables entre Guillaume et son fils,
allant même jusqu’à un affrontement direct en 1078-1079.
La conférence de Véronique Gazeau a ainsi mis en lumière les difficultés du travail de
l’historien qui, face à des sources partiales et lacunaires, peine à construire des
certitudes. Ce bilan du colloque tenu à Tinchebray en 2006 témoigne également de
l’intérêt des rencontres entre spécialistes pour stimuler la recherche et invite à se
plonger dans la nouvelle livraison du Pays Bas-Normand.
Maxime Guilmin - relu par VG