DOMAINE : Géométrie AUTEUR : Louis NEBOUT
NIVEAU : Avancé STAGE : Montpellier 2013
CONTENU : Cours et exercices
Inversions
Le but de cette séance est de vous présenter une transformation géométrique
très puissante, et potentiellement utile pour la résolution de problèmes olympiques :
l’inversion.
Dans toute cette partie, tous les angles sont orientés et considérés modulo
2π.
-Inversion : définition et action sur les angles -
Soit Ele plan euclidien usuel.
Définition 1. Soit Oun point du plan E, et pun réel non nul. On appelle inver-
sion de pôle Oet de puissance pla transformation de E\{O}dans lui-même en-
voyant le point Msur le point M0de (OM)tel que OM0·OM =p. (Autrement
dit, M0est le point de (OM)tel que
OM0=p
OM2
OM). Nous la noterons IO,p.
Remarques 2.
Clairement, IO,p(IO,p(M)) = M: l’inversion est une involution. En partic-
ulier, elle est bijective.
Soit rla racine carrée de |p|. Notons CO,rle cercle de centre Oet de rayon r.
Alors IO,péchange intérieur et extérieur de CO,r, agit comme la symétrie
de centre Osur CO,rsi pest négatif, et stabilise CO,rsi pest positif. On
appelle souvent IO,r2l’inversion de cercle CO,r.
Soit Pun point non fixé par IO,p. Alors la puissance de Opar rapport à un
cercle passant par Pet P0est p, la puissance de l’inversion considérée.
Proposition 3. Soient Pet Qdans E\{O}, et P0et Q0leurs images par IO,p. Alors
OPQ et OQ0P0sont inversement semblables.
Démonstration. Clairement, d
POQ =
d
P0OQ0. De plus, OP
OQ0=|p|
OP0·OQ
|p|=OQ
OP0.
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Remarques 4. On en déduit deux propriétés importantes :
une formule bien pratique sur l’effet de l’inversion sur les distances :
P0Q0=OQ0
OP ·PQ =|p|
OP ·OQ ·PQ,
l’effet de l’inversion sur les angles issus du pôle : d
OPQ = −
d
OQ0P0. En
particulier, P,P0,Qet Q0sont cocycliques.
Cela nous permet de déduire l’effet d’une inversion sur des angles plus
généraux :
Proposition 5. Soient A,Bet Cdes points distincts du pôle. On a alors d
ABC =
d
C0B0A0+
d
A0OC0.
Démonstration.
O
A
BC
A0
B0
C0
On a
d
ABC =
d
ABO +
d
OBC
=
d
OA0B0+
d
B0C0O
=2π+
d
A0OB0+
d
OB0A0+
d
C0B0O+
d
B0OC0
=
d
C0B0A0+
d
A0OC0.
Que se passe-t-il si Aet Csont très proches de B? Et bien, par continuité de
l’inversion l’angle d
A0OC0est très petit, et donc d
C0B0A0est très proche de d
ABC.
On dit que l’inversion renverse localement les angles. Voici un autre point de
vue : considérons deux courbes suffisamment régulières s’intersectant en B.
On les paramètre par deux fonctions φet ψde Rdans Evalant Ben 0. Quand
test très petit, l’angle d
φ(t)(t)tend vers l’angle entre les tangentes en Bdes
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deux courbes, qui par définition est l’angle entre les deux courbes. De même,
l’angle d
φ(t)0B0ψ(t)0tend vers l’angle entre les images de nos deux courbes
par l’inversion. Enfin, l’angle d
φ(t)0(t)0tend vers 0. Nous avons montré que
l’inversion inverse les angles entre courbes. Par exemple, les images de deux
droites orthogonales par notre inversion seront deux courbes orthogonales.
-Images des droites et des cercles -
Cette section est justement dédiée à l’étude de l’image de certaines courbes
par une inversion.
Proposition 6. L’inversion IO,plaisse globalement stable toute droite passant
par O.
Proposition 7. L’inversion IO,penvoi un cercle ne passant pas par Osur un
autre cercle ne passant pas par O.
Démonstration. On pourrait raisonner en regardant l’effet de l’inversion sur le
théorème de l’angle inscrit, mais je préfère donner une preuve inspirée des
remarques suivantes :
L’inversion IO,plaisse globalement invariant tout cercle tel que Oait pour
puissance ppar rapport à ce cercle.
Notons hO,λl’homothétie de centre Oet de rapport λ. Alors hO,λIO,p=
IO,λp.
Considérons donc Cun cercle ne passant pas par O. Notons p0la puissance de
Opar rapport à ce cercle (qui est non nulle). Alors IO,p(C) = hO,p
p0
IO,p0(C)
donc IO,p(C) = hO,p
p0(C)qui est de toute évidence un cercle ne passant pas par
O.
Notons que, par symétrie du problème par rapport à la droite reliant pôle
et centre du cercle, le centre du cercle de départ, le centre de son image et le
pôle sont alignés, un fait souvent bien utile. Autre fait utile que l’on pourrait
déduire de cette preuve : si Cet C0sont deux cercles et Oun point, il existe
une inversion centrée en Oenvoyant Csur C0si et seulement s’il existe une
homothétie centrée en Oenvoyant Csur C0.
Proposition 8. L’inversion IO,penvoie une droite ne passant pas par Osur
un cercle passant par Oet envoie un cercle passant par Osur une droite ne
passant pas par O.
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Démonstration. Soit Dune droite ne passant pas par O. Soit Ple projété orthog-
onal de Osur D. Soit Qsur D. L’angle d
OPQ est droit, donc l’angle d
OQ0P0est
droit, donc Q0appartient au cercle de diamètre OP0.
O
Q
P
P0
Q0
Réciproquement, soit Cun cercle passant par O,Ple point de Cdiamétrale-
ment opposé á O. Soit Qsur C. L’angle d
OQP est droit, donc l’angle d
OP0Q0est
droit, donc Q0est sur la droite orthogonale à OP0passant par P0.
O
P
Q
Q0
P0
Voici une autre façon de formuler ces résultats. Rajoutons au plan un point
à l’infini, que nous appelons . Étendons l’inversion IO,pen une application
de E{}dans lui-même, en décretant que le pôle est envoyé à l’infini et que
le point à l’infini est envoyé sur le pôle. La nouvelle inversion est elle aussi in-
volutive. Disons enfin que, par convention, les droites sont les cercles passant
par le point à l’infini. Alors les résultats de cette partie disent simplement que
l’inversion envoie cercles sur cercles.
-L’inversion en pratique -
Maintenant, nous allons voir comment se servir de l’inversion pour ré-
soudre des problèmes de type olympique. L’idée de base est la suivante :
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choisir une inversion, puis à l’aide des propriétés des inversions traduire les
propriétés de la figure de départ en propriétés de la figure inversée. Si l’inver-
sion est judicieuse, la figure inversée sera facile à étudier, on démontre donc
des résultats sur cette figure inversée, puis on applique à nouveau l’inversion
pour voir ce que ces résultats nous disent sur la figure de départ. Le point
important est bien sûr le choix de l’inversion.
Une des forces de cette technique est qu’elle permet de se débarasser des
cercles (en inversant par rapport à un des points du cercle), ce qui permet par
exemple de transformer des problémes pénibles de tangences ou d’orthogo-
nalité de cercles en des problèmes plus simples faisant intervenir des droites.
Exercice 1 Soit Pun point, C1,C2,C3et C4quatre cercles tels que C1et C3soient
extérieurement tangents en P, et que C2et C4soient extérieurement tangents
en P. Supposons que C1et C2,C2et C3,C3et C4et C4et C1s’intersectent en des
points A,B,Cet Ddistincts de P. Prouver que
AB ·BC
AD ·DC =PB2
PD2.
Solution de l’exercice 1 Appliquons une inversion de centre Pet de puissance
pquelconque. Cette inversion transforme C1,C2,C3et C4en quatre droites
D1,D2,D3et D4passant par P, telles que D1et D3soient parallèles, et D2et
D4soient parallèles (en effet P, l’unique point d’intersection de C1et C3, est
envoyé à l’infini par l’inversion).
P
A
B
C
D
D1
D2
D3
D4
A0
B0
C0
D0
Ainsi, A0,B0,C0et D0sont les sommets d’un parallélogramme, donc A0B0=
C0D0et B0C0=D0A0.
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