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Notre attention fut aussitôt attirée par des dizaines d’inscriptions, sur la tapisserie
parfois déchirée, ou bien gravées dans le plâtre ; elles ne laissaient aucun doute : des
prisonniers avaient ainsi manifesté leur détresse, leurs souffrances :
« Je me souviendrai de mon passage ici »
« Enfin, le cinquième jour, on nous a donné un peu de nourriture »
« Souffrir »
« Priez ça vous soulage »
Beaucoup d’inscriptions étaient illisibles ; un certain nombre comportaient des séries
de jours, qui s’écoulaient trop lentement sans doute. La plupart étaient à hauteur d’homme ;
d’autres, à 40 centimètres du plancher, manifestement tracées par des prisonniers allongés
ou attachés au sol. Dans un réduit attenant à la pièce (sans doute une espèce de cachot),
gravée dans le plâtre, cette inscription émouvante dans sa sobriété :
« 4 jours sans manger, les oreilles me bourdonnent. »
En 2007, lors d’une nouvelle visite des lieux, nous avons pu constater que les
inscriptions, dans l’ensemble, n’avaient pas été dégradées. Mais ces 7 années écoulées
depuis 2000 n’avaient pas permis la moindre mesure de conservation de la part des
autorités du département pourtant alertées.
Au début 2008, le Conseil Général prend 2 mesures de sauvegarde :
- Un photographe est chargé de prendre les clichés des inscriptions ; 58 photos grand format
sont ainsi disponibles, et visibles aux salons du livre auxquels nous participons dans le
département. La mémoire douloureuse des victimes de la gestapo a commencé à franchir les
murs de « la villa Lauquié ».
- Les 2 volets de bois et la porte d’entrée de la pièce du 2ème étage sont transportés au
musée de la Déportation et de l’Internement de Varilhes ; les visiteurs leur portent une
attention particulière.
Et les jeunes s’en mêlent : voici le texte de la lettre rédigée en avril 2008 par les
élèves de 3ème du collège Victor-Hugo de Lavelanet :
« Objet : demande de dépôt d’une plaque commémorative
Monsieur le Président du Conseil Général,
Le collège Victor-Hugo de Lavelanet, comme bien d’autres établissements scolaires
de l’Ariège, a participé cette année encore au concours de la Résistance.
Nos recherches nous ont conduits à rencontrer les témoins de cette période mais
aussi à recenser les nombreuses stèles et plaques commémoratives.
Nous sommes à ce propos très étonnés de constater que la villa Lauquié, siège de la
gestapo pendant cette période, ne présente aucune plaque rappelant les exactions
commises en ce lieu.
Avec l’assentiment des associations de Déportés et de Résistants, la jeunesse qui ne
veut pas oublier s’adresse à vous afin de savoir s’il est envisageable d’installer une plaque
sur la façade de cette villa.
Souhaitant que notre requête obtienne satisfaction, veuillez recevoir, Monsieur le
Président du Conseil Général, nos salutations distinguées.
Ont été conviés à signer cette demande :
- Présidents de l’UNADIF, de l’ANACR, de la FNDIRP, des Evadés de France, de l’association
nationale des anciens Guerilleros des FFI de l’Ariège. »