La Lettre de l’Infectiologue • Tome XXVI - n° 5 - septembre-octobre 2011 | 165
Résumé
Trente ans après le début de l’épidémie de sida, l’élaboration d’un vaccin efficace contre le VIH demeure
une priorité. Au fil des années, un nombre considérable de vaccins candidats ont été développés, mais
aucun ne s’est révélé suffisamment efficace durant les essais cliniques pour pouvoir être commercialisé
dans un avenir proche. Malgré cela, de nouvelles stratégies continuent d’être proposées et testées dans
les différents modèles animaux. Leur éventuelle efficacité chez l’homme devra être établie.
Mots-clés
Vaccin
VIH
Sida
Summary
After over 30 years of AIDS
epidemic, we still need to
find a safe and effective HIV
vaccine. An impressive number
of vaccine candidates have
been developed and many
went through clinical trials.
However, none of them elic-
ited a sufficient protection
to be commercialized within
a reasonable time frame.
Researchers continue to
develop new vaccines strate-
gies and assay their efficacy in
animal models. The efficacy of
these vaccination techniques in
humans remains to be deter-
mined.
Keywords
Vaccine
HIV
AIDS
immune permettraient d’expliquer l’absence d’anti-
corps dirigés contre ces épitopes de neutralisation
chez les sujets immunisés. Afin de contourner ces
obstacles, de nouvelles approches vaccinales ont
été proposées :
➤
emploi d’antigènes de gp120 ayant une structure
proche de celle des molécules d’enveloppe du virus
en conservant leur structure trimérique ;
➤
utilisation de protéines Env modifiées de telle
sorte qu’elles exposent leurs épitopes internes ;
➤
stabilisation des protéines Env sous forme
déployée par leur liaison artificielle à des analogues
du récepteur CD4.
Le lieu d’induction des anticorps doit également
être pris en compte. Les muqueuses sont la porte
d’entrée la plus fréquente du VIH, et l’induction
d’une immunité au site même de l’intrusion du
virus permet de lutter plus rapidement contre celui-
ci. Un article récent a montré qu’un vaccin dirigé
contre la partie transmembranaire de l’enveloppe
du VIH-1 pouvait induire des anticorps spécifiques
au niveau des muqueuses et permettre de protéger
des singes après plusieurs expositions vaginales (5).
Cette protection a été observée en l’absence d’anti-
corps neutralisants circulants dans le sang, ce qui
prouve l’importance d’agir au plus près de la zone
d’infection.
Immunité cellulaire
Un autre axe de recherche consiste à induire une
immunité cellulaire contre les virus, notamment
l’induction de lymphocytes T CD8 cytotoxiques. En
effet, chez l’individu infecté, l’intervention supplé-
mentaire des lymphocytes T CD8 permet d’éliminer
les cellules déjà infectées et de diminuer la multipli-
cation et la diffusion virale. L’action des lymphocytes
CD8+ est fondée sur la reconnaissance, au niveau
du récepteur du complexe majeur d’histocompa-
tibilité (CMH) de classe I, d’un peptide issu d’une
protéine virale exprimée dans une cellule infectée.
Parmi les séropositifs au VIH, un petit nombre de
patients développe un type atténué d’infection.
Ces individus, que l’on appelle non progresseurs à
long terme, restent asymptomatiques pendant de
nombreuses années, parfois jusqu’à 25 ans. L’étude
de leur réponse immunitaire a mis en évidence le rôle
essentiel de certains allèles des gènes CMH-I dans
le contrôle de la maladie, soulignant ainsi l’impor-
tance de la qualité de la réponse cellulaire dans leur
protection contre la maladie (6).
Modèles animaux
La recherche d’un modèle animal de la pathologie du
sida a commencé rapidement après la découverte du
VIH-1. Ce virus spécifiquement humain ne se réplique
pas dans la majorité des espèces animales testées,
y compris les modèles classiques de rongeurs. Des
efforts ont été réalisés pour modifier génétiquement
des souris afin qu’elles deviennent sensibles au VIH,
mais les résultats obtenus jusqu’à maintenant ne
sont pas suffisamment concluants puisque la réplica-
tion virale chez ces souris est limitée ou absente (7).
Le chimpanzé est le seul animal qui peut être infecté
par le VIH-1, mais il développe rarement un sida à la
suite de l’infection. Par ailleurs, le chimpanzé est un
modèle expérimental inutilisable en pratique parce
qu’il fait partie des espèces animales en danger, qu’il
coûte très cher et que son utilisation comme cobaye
soulève des problèmes éthiques liés à sa proximité
génétique avec l’homme. La grande majorité des
expériences animales a donc été réalisée sur des
macaques dont l’infection par un lentivirus proche du
VIH, le virus de l’immunodéficience simienne (VIS),
ressemble fortement au sida humain.
Trois espèces différentes de macaques sont utili-
sées dans les essais vaccinaux. Le modèle macaque
rhésus est le principal, puisqu’il figure dans 80 %
des essais précliniques. Le macaque cynomolgus
présente naturellement une plus forte résistance
à l’infection par le VIS, ce qui en fait un modèle
moins utilisé. Enfin, le macaque à queue de cochon
progresse très rapidement vers le sida après infec-
tion. Ce phénomène a été partiellement attribué à
une plus grande perméabilité intestinale et à une
activation immunitaire élevée. Les symptômes du
sida se déclarent entre 6 mois et 3 ans après l’infec-
tion, suivant l’espèce et la souche virale utilisée.
Dans un souci de standardisation des résultats, la
majorité des équipes utilise aujourd’hui des clones
moléculaires de virus comme celui du VISmac239.