File - L2 Bichat 2012-2013

publicité
Le 13 Novembre 2012
10h30-12h30
UE3 – Pharmacologie
Ronéotypeur : Cyrille Monin
Ronéolecteur : Pierre Delzongue
COURS N°11 :
Thérapeutique individualisée et nouveaux médicaments
La prof n'a pas voulu nous passer ses diapos, elle a promis d'en envoyer une version
épurée à une personne qui lui avait donné son mail (mais visiblement pas avant les
partiels ^^ ). Je n'ai donc pas pu vous mettre certains schémas.
1 / 14
Table des matières
I. Introduction ...................................................................................... 3
II. Les thérapies ciblant les tyrosines kinases. ............................... 3
1)
Généralités ................................................................................................... 3
2)
Premier exemple: le cancer du sein........................................................... 4
3)
Deuxième exemple: la leucémie myéloïde chronique. ............................. 4
4)
Autres utilisations de l'Imatinib. ................................................................ 6
III.
Les thérapies ciblant l'environnement de la tumeur. ........... 7
1)
L'angiogenèse tumorale ............................................................................. 7
2)
Les anti-angiogéniques .............................................................................. 8
IV.
Dernières thérapeutiques, limites, perspectives .................... 9
1)
Thérapies ciblées dans le mélanome. ....................................................... 9
2)
Le traitement personnalisé en France. .................................................... 10
3)
Limites des thérapies ciblées: les résistances. ...................................... 11
Conclusion: ......................................................................................... 13
2 / 14
I.
Introduction
Lorsqu'on parle de thérapie ciblée, il faut d'abord définir les différentes cibles possibles.
Il peut s'agir d'un tissu pathologique, ou de l'environnement de ce tissu (en particulier
dans les cancers). On peut également cibler un sous-groupe de la pathologie, (on verra
ainsi des traitements spécifiques de sous-catégories du cancer du sein) ou encore une
molécule altérée responsable d'une altération physiopathologique (on parle donc de
biomarqueur) et donc d'un ciblage thérapeutique.
On va beaucoup parler de tumeurs, il faut donc se rappeler des moyens de diagnostiquer
et caractériser un cancer: la taille de la tumeur, l'invasion métastatique, l'état du ganglion
sentinelle, l'ulcération, sont des critères cliniques et pathologiques. Aujourd'hui, on a
dépassé ce stade et on sait faire des caractérisations moléculaires: on fait des
cartographies d'ARN tumoral, via le screening, et on trouve ainsi les gènes sous et
surexprimés, les gènes mutés responsables ou marqueurs de la tumeur. De même, on
utilise l'immunohistochimie pour étudier l'expression des protéines.
II.
Les thérapies ciblant les tyrosines kinases.
1) Généralités
Les récepteurs membranaires à tyrosine kinase sont extrêmement variés. Ils sont altérés
dans de nombreuses pathologies (en particulier les cancers) et on va chercher à bloquer
ces altérations pour guérir le malade.
On prend l'exemple d'un récepteur EGFR constitutivement activé, et on remarque qu'il y
a de nombreuses cibles potentielles. On peut cibler le ligand, le récepteur lui-même en
bloquant son activité soit à l'extérieur soit à l'intérieur de la cellule. En intra-cellulaire, on
peut également bloquer un des médiateurs de la cascade induite par l'activation du
récepteur, ou même aller bloquer encore plus en aval et cibler directement au niveau du
noyau, des protéines et des biomarqueurs activés quand le récepteur l'est. On peut donc
tout cibler, du début à la fin de la chaine, tout en sachant que plus on sera proche de
l'altération, plus le traitement sera spécifique de la maladie (par exemple si on cible Ras,
activé via de très nombreux récepteurs, le traitement ne sera absolument pas
spécifique).
Concernant
les
traitements
ciblant
les
récepteurs, on peut en faire des spécifiques
(seul un récepteur est ciblé) ou polyvalents (on
touche toute une famille de récepteurs). Si on
regarde à nouveau les récepteurs à Tyrosine
kinase, on peut s'intéresser plus spécifiquement
à un type de récepteur, par exemple erb. On
3 / 14
remarque alors qu'il se divise en différents sous-types de récepteurs, et que les voies de
signalisation des différents récepteurs de cette famille erb sont très liées. Il est donc très
difficile de faire un traitement spécifique d'un récepteur, car il existe de nombreux
récepteurs dont la structure ressemble à la sienne et utilisant les mêmes médiateurs. On
voit ainsi que l'activation du récepteur à l'EGFR entraine l'activation de FAK, qui luimême active différentes voies, et que les autres récepteurs peuvent eux aussi interagir
avec cette cascade de signalisation. On a donc un enchevêtrement de réseaux de
signalisation, ce qui fait qu'il est très difficile de cibler une seule voie.
2) Premier exemple: le cancer du sein.
La protéine HER2 est surexprimée dans des cancers du sein. Elle ne le sera pas dans
tous les cancers du sein, mais seulement dans certains sous-types d'entre eux. Seul 15
à 20% des cancers du sein surexpriment HER2 (on le voit avec un marquage en
immunohistochimie). Au début, on a pensé que cette sous-population pourrait être traitée
par des traitements ciblés, bloquant ce récepteur présent en trop grande quantité.
Pour commencer, on a développé un anticorps monoclonal (donc la DCI du médicament
se termine par le suffixe -mab, pour monoclonal antibodie), le trastuzumab (nom
commercial: Herceptin), qui se fixe en extracellulaire aux récepteurs HER2 et empêche
leur dimérisation, ce qui bloque leur activation en intracellulaire. Ce médicament, seul, a
entrainé une réponse dans 15 à 20% des cancers du sein, et est actuellement utilisé en
première ligne, mais uniquement pour cette fraction des malades qui surexpriment HER2
(il est inefficace chez tous les autres). Aujourd'hui, on l'utilise toujours en première ligne,
combiné à une chimiothérapie.
3) Deuxième exemple: la leucémie myéloïde chronique.
Cette leucémie représente environ 20% de l'ensemble des leucémies, et chaque année
on observe 1 à 2 cas pour 100 000 personnes. Cette leucémie est liée à l'activation d'une
protéine de fusion qu'on appelle BCR-ABL (BCR- Abelson). Explication du
phénomène: le chromosome 9 porte au niveau de son bras long une protéine ABL,
tandis que le chromosome 22 porte une protéine BCR. Dans la LMC, une translocation
conduit à la fusion des deux brins libres de ces chromosomes, et on aboutit à une
protéine de fusion, associant les deux protéines ABL et BCR. BCR-ABL est une kinase,
constitutivement active, qui est responsable de cette leucémie, elle en signe le
diagnostic.
Etant constitutivement active, la kinase BCR-ABL va constamment phosphoryler sa cible,
GRB2, laquelle active Ras, ce qui va entrainer une prolifération de la cellule par les
mécanismes que l'on connait (la célèbre voie des MAPK), et on obtient une cellule qui va
se multiplier de façon permanente, incontrôlée. On a donc cherché à bloquer cette
protéine de fusion, et on a fait un développement clinique portant sur la protéine STI571,
4 / 14
ou plus particulièrement le Glivec, ce qui a
révolutionné le traitement de la LMC (concernant
les noms: la DCI du médicament est l'Imatinib,
commercialisée sous le nom de Glivec et encore
ATP
appelé parfois STI571). Cette protéine se place
dans une poche de BCR-ABL, où se fixe
Active form
normalement l'ATP qui sert à phosphoryler le
substrat. Le Glivec bloque donc l'accès de cette
poche à l'ATP, et ainsi l'activation de cette kinase.
Bcr-Abl
Bcr-Abl
Substrat
Substrat
STI571
P
P
P
Inactive form
Substrat
P
Effecteur
On nous présente ensuite les résultats de l'essai d'enregistrement de l'Imatinib. C'est
l'essai final qui a donné sa validation à la molécule pour être enregistrée par les
instances réglementaires, puis utilisée en clinique. On a donc comparé le traitement de
référence du moment (ici IFN-alpha + cytarabine) dans deux groupes de 553 patients
avec randomisation et double-aveugle. Au milieu de l'essai, on a procédé à un
crossover, c'est-à-dire que tous les patients ont été traités successivement par les deux
traitements, ils sont changés de groupe en cours d'étude. La majorité a d'abord été traité
par l'IFN, et on a inversé au milieu de l'étude.
Ça c'est ce que la prof a dit, mais bien
sûr ça ne correspond absolument pas au
graphique (on a 553 patients par groupe,
et pas 359 dans l'un et 14 dans l'autre).
Pour ceux qui aimeraient comprendre
cette diapo un rien obscure, voici une
petite explication d'après diverses
informations trouvées sur Internet: sur les
553 patients dans le groupe traité à
l'Imatinib, 14 sont passé dans l'autre
groupe, 364 ont poursuivi l'Imatinib
jusqu'au bout et 175 ont quitté l'étude (parce qu'ils sont morts de leur maladie ou qu'ils
n'ont pas supporté le traitement). Pour le groupe IFN, 13 ont poursuivi le traitement, 181
ont abandonné et les autres sont passés dans le groupe Imatinib pour pouvoir continuer
l'étude (on s'est douté qu'ils allaient mourir sinon...). Les résultats finaux s'intéressent
uniquement aux patients qui restent dans leur groupe ou qui abandonnent l'étude: 66%
restent avec l'Imatinib contre 2% pour l'IFN.
On a également observé les réponses cytogénétiques et
hématologique: est-ce qu'il reste encore de la protéine de
fusion chez les patients? On voit que 98%, 92 et 86% des
patients ont bien eu une réponse cytogénétique et biologique
là encore ce n'est pas tout à fait ça, un petit pourcentage
n'ayant qu'une réponse hématologique. Il est très rare d'obtenir
de telles courbes, en général les résultats sont moins bons.
5 / 14
Aujourd'hui, ce médicament est le traitement de référence pour la LMC, on le donne dès
qu'on a un test BCR-ABL positif. On a découvert, avec le recul, qu'il fallait poursuivre ce
traitement en continu, sans quoi la maladie reprenait. D'autre part, certains patients
résistent au traitement, car ils portent, au niveau de la protéine BCR-ABL, d'autres
mutations qui font que la kinase va rester active (à côté du site de liaison de l'ATP, au
niveau du site catalytique, etc.).
L'imatinib est le premier inhibiteur de BCRABL, on a ensuite développé d'autres
médicaments, des "petits frères". Il s'agit
d'autres inhibiteurs des récepteurs à
tyrosine kinase comme le Dasatinib, dont la
courbe survie montre un taux de survie bien
plus intéressant.
4) Autres utilisations de l'Imatinib.
L'imatinib a aussi été utilisé pour traiter une tumeur des tissus mous, plus rare et de très
mauvais pronostic (40% de survie à un an): GIST. La tumeur active le récepteur à
tyrosine kinase CKit, et l'imatinib bloque cette kinase. L'imatinib a obtenu de très bons
résultats chez les patients à CKit activé. On a également trouvé des marqueurs de
réponse: ainsi, la mutation de l'exon 11 du gène Kit est de bon pronostic, elle indique que
le malade répondra bien au traitement par imatinib.
La dermatofibrosarcome de Darrier et Ferrand (ou DFS) est également une tumeur des
tissus mous, c'est un sarcome sous-cutané très invalidant, qu'on doit traiter par chirurgie
car il résiste à la chimiothérapie mais surtout qui récidive très fréquemment localement.
Cette tumeur a là encore pour origine une protéine de fusion, Coll1-PDGF, qui est un
ligand récepteur à Tyrosine kinase PDGFR. Produit en permanence, Coll1-PDGF va
constamment activer PDGFR. On passe les détails, il faut juste savoir qu'aujourd'hui,
certains de ces patients répondent positivement à un traitement à l'imatinib, qui est une
piste de thérapeutique pour cette tumeur.
Maintenant qu'on a vu les aspects qui ont été développés jusqu'à maintenant pour traiter
les altérations moléculaires qu'on trouve dans la cellule tumorale, on va s'intéresser au
blocage de l'environnement de la cellule tumorale. En effet, il y a tout un environnement
de cellules immunitaires, endothéliales, de fibroblastes etc... qui vont être de véritables
acteurs dans le dialogue entre la tumeur et le stroma pour lui permettre de se développer
et de proliférer.
6 / 14
III.
Les thérapies ciblant l'environnement de la tumeur.
Au cœur de ces thérapies, on a la cellule endothéliale, qui est connue aujourd'hui comme
cellule facilitatrice du développement tumoral et surtout de l'invasion métastatique.
1) L'angiogenèse tumorale
On a eu des observations sur la vascularisation de la tumeur depuis la fin du XIX. En
1963, Judah Folkman propose l'hypothèse que la tumeur ne peut se développer dans un
environnement non vascularisé. En 1971, il émet l'idée de développer des
thérapeutiques bloquant l'environnement vasculaire de la tumeur pour tenter de bloquer
le développement tumoral. Selon lui, la cellule tumorale va proliférer jusqu'à une certaine
taille (2-3mm), avant d'arriver à une phase où elle va nécroser et mourir si elle ne reçoit
pas des nutriments de l'extérieur. La tumeur va donc produire des signaux à l'intention
des vaisseaux avoisinants pour qu'ils viennent l'irriguer et l'oxygéner. Il y a alors
développement de petits vaisseaux qui vont permettre un développement de la tumeur, à
présent vascularisée. Ces signaux ont été identifiés. Le premier est le BFGF (Basic
Fibroblast Growth Factor), puis le VPF (Vascular Permeability Factor) et finalement on a
identifié le plus important: le VEGF (Vascular Endothelial Growth Factor), qui est le
facteur clé de l'angiogenèse.
L'angiogenèse peut aussi se retrouver à l'état physiologique: lors de la réparation suite à
une plaie, lors du cycle menstruel, lors du développement embryonnaire. A l'état
physiologique, il y a une balance dynamique entre les activateurs et les inhibiteurs de
l'angiogenèse. Dans le développement tumoral, on ne connait pas encore le tout premier
facteur, mais on sait qu'à un moment il y a un swich angiogénique: à un moment, dans
ces cellules, la balance bascule en faveur de l'angiogenèse. On suppose que c'est
l'hypoxie des cellules tumorale qui entraine la production du VEGF, mais on n'est pas
certain qu'il n'existe pas d'autres facteurs qui vont déclencher la production par la tumeur
de VEGF.
La tumeur va produire un ensemble
de petits facteurs qui vont atteindre
les cellules endothéliales, activer les
récepteurs qu'elles portent, ce qui
entraine l'angiogenèse. Le swich
angiogénique, c'est la production de
ces facteurs. La tumeur devient
vascularisée, on a une croissance
tumorale importante, mais surtout les
cellules tumorales vont pouvoir entrer
dans les vaisseaux et atteindre
d'autres sites métastatiques. Ainsi, la
vascularisation de la tumeur permet
non seulement de lui fournir les
nutriments dont elle a besoin, mais aussi de faciliter la dissémination métastatique.
7 / 14
Le VEGF est une protéine présente dès le développement embryonnaire. Le gène code
pour plusieurs protéines; on a ainsi par exemple le VEGF 121, le 165...Ces protéines
vont différer par la taille, mais surtout par la diffusibilité. La cellule tumorale va d'abord
produire le 121, qui est le plus court et le plus diffusible, et qui va donc atteindre
rapidement les cellules endothéliales pour lancer l'angiogenèse. Puis la tumeur produit
les autres VEGF, moins diffusibles, qui vont donc se fixer à la matrice. Ils auront besoin
d'être libéré par des protéases pour atteindre les vaisseaux, ils vont ainsi agir plus
tardivement que le 121. Leur autre particularité est d'être beaucoup plus angiogéniques
que le VEGF 121, ils vont plus activer la cellule endothéliale.
On a ensuite découvert toute une famille de VEGF, le VEGFa, b, c etc (il s'agit d'une
autre classification des VEGF que la précédente: on aura des VEGF 121 dans ces
différents types de VEGF), qui ont comme particularité de se fixer sur des récepteurs
différents. Ainsi, non seulement la cellule endothéliale porte des récepteurs variés
(récepteur R1, R2,...) mais en plus ces récepteurs peuvent fixer de façon croisée les
différents VEGF, on a donc une intrication du dialogue entre la cellule endothéliale et les
VEGF. Le VEGF est surexprimé dans de nombreux types de cancer (colorectal par
exemple), cette surexpression étant un signe de mauvais pronostic.
Ainsi, le VEGF va être libéré suite à certains facteurs (dont l'hypoxie), puis se fixer sur
ses récepteurs, entrainer leur dimérisation et donc l'activation d'une cascade de
signalisation en intracellulaire, aboutissant à des phénomènes de prolifération, invasion,
perméabilité, survie et migration, qui correspondent au phénomène de l'angiogenèse. Le
vaisseau qui reçoit le signal va donc s'ouvrir, d'abord les cellules musculaires lisses
s'écartent, puis les cellules endothéliales prolifèrent, détruisent la matrice alentour à
l'aide d'enzymes et migrent pour former les nouveaux vaisseaux. Lors d'une
néovascularisation tumorale, les nouveaux vaisseaux sont bien moins organisés, et
bien plus perméables (ils laissent passer les nutriments, des cellules), ce qui permet à la
cellule tumorale de recevoir ce qu'elle voulait.
2) Les anti-angiogéniques
Le concept de Folkman (bloquer le stroma, les cellules endothéliales proches de la
cellule tumorale pour empêcher l'angiogenèse) a pu être prouvé en 2006 avec la
découverte de la cible, le VEGF, qu'on va pouvoir essayer de bloquer. On a cherché à
bloquer son effet au niveau des cellules endothéliales. Pourquoi? Parce que ces cellules
ne sont pas mutées, elles sont stables, ce qui a deux avantages. D'une part on peut
imaginer qu'il y aura moins de résistance: quelle que soit la mutation de la cellule
tumorale, si on bloque l'action du VEGF sur les cellules endothéliales, la tumeur ne
pourra pas induire d'angiogenèse (au contraire de l'exemple de BCR-ABL, où la mutation
de la protéine rendait le traitement qui la ciblait inefficace). D'autre part, ces cellules
endothéliales sont partout identiques, qu'elles soient à proximité du sein, du colon...On
imaginait donc pouvoir parvenir à un traitement universel du cancer.
8 / 14
Les différentes méthodes proposées étaient:



de bloquer le ligand (VEGF) par un Ac anti-VEGF ou un récepteur soluble
bloquer le VEGFR, avec des Ac par exemple
utiliser les inhibiteurs des récepteurs à Tyrosines kinases pour bloquer le
récepteur après fixation du ligand
Le seul but était de normaliser la néovascularisation afin de faciliter la diffusion des
médicaments qu'on va injecter en même temps que les anti-angiogéniques. Le
traitement le plus important est un Ac anti-VEGF, le bévacizumab (nom commercial:
avastin), qui est en partie humain et un tout petit peu murin: c'est un anticorps
humanisé. Il est utilisé en première ligne dans les cancers du rein métastatiques. On
l'a ensuite testé pour d'autres cancers, combiné à une chimiothérapie, et il a montré
une amélioration significative du pronostic vital par rapport à la chimiothérapie de
référence seule.
Malheureusement, ce traitement n'est ni universel ni inoffensif. On va voir apparaître
des résistances, la cellule tumorale parvenant à contourner le processus (comment?
la prof ne le précise pas...), ainsi que des effets secondaires: thromboembolie,
hypertension, et parfois des perforations intestinales.
Ces anti-angiogéniques, s'ils sont efficaces, ont aussi des limites. Aujourd'hui, le
concept est de les utiliser non pas combinés à une chimiothérapie seule, mais à
d'autres thérapies ciblées inhibant la voie de signalisation du VEGF un peu plus en
aval. Ainsi, on va par exemple bloquer le VEGF d'une part, et Rak d'autre part. On
peut combiner un anti-HER2 avec un autre anti-HER avec une autre spécificité.
IV.
Dernières thérapeutiques, limites, perspectives
1) Thérapies ciblées dans le mélanome.
Le mélanome est une maladie en forte expansion dans le monde. Elle est très
agressive, car résistante à tout type de chimio ainsi qu'à la radiothérapie. La
chimiothérapie de référence aujourd'hui est la dacarbazine (et ses dérivés), mais ce
sont des molécules avec des taux de réponse de quelques mois sur seulement 10%
des malades. On était donc en face d'une impasse thérapeutique jusqu'à comprendre
de manière détaillée quelles sont les altérations moléculaires dans le mélanome. On
connait aujourd'hui 5 cibles des mutations:



BRAF (dans 60% des cas), qui est une kinase activant la voie des MAPK,
entrainant donc prolifération et survie cellulaire
NRAS (dans 20% des cas) activant prolifération, croissance et survie
PTEN qui inhibe PI3K. Dans 10 à 15% des mélanomes, son gène est détruit
ou muté, entrainant croissance et développement métastatique
9 / 14


MITF, gène amplifié dans 10 à 20% des mélanomes, c'est le gène responsable
du développement normal des mélanocytes
CKIT (dont on a déjà parlé plus haut), en amont de NRAS
Ce sont des mutations exclusives, on a donc 5 types de mélanomes différents.
La première mutation ciblée par un médicament est celle de BRAF. C'est une
mutation au niveau de l'exon 15, au niveau du codon codant pour la Valine en
position 600 (c'est utile pour savoir qu'il faut tester la présence de la mutation V600),
la plus fréquente étant V600E (transformation en acide glutamique).
A partir du moment où on connait la mutation, on est capable de construire des
banques de molécules de synthèse capables de rentrer dans la poche de la
molécule mutée. On a donc testé cette banque sur toutes les kinases ayant une
activité proche de BRAF, et on a sélectionné la plus efficace et la plus spécifique:
PLX4032, qui peut se nicher dans la poche V600 mutée et bloquer la kinase. Testée
in vitro dans les mélanomes et les cancers du côlon, elle est capable de bloquer la
prolifération à des concentrations très faibles (forte sélectivité). Sur des lignées non
mutées, elle ne bloque pas la prolifération. Des essais précliniques sur l'animal
montrent une quasi-disparition des cellules tumorales en 15 jours, quand le cancer
prolifère dans l'autre groupe de souris cancéreuses traitées par placebo (les souris
saines traitées par PLX4032 ne subissent pas d'effet négatif). Ces résultats
encourageants ont permis de mener des essais cliniques. Lors de la phase III, les
résultats étaient très concluants par comparaison de PLX4032 (ou Vemurafenib)
avec le traitement de référence.
On a alors regardé si, BRAF étant boqué, on avait une inhibition de Mek et Erk en
aval: 15 jours après traitement, on observe une diminution spectaculaire de Erk. De
même, les marqueurs de la prolifération comme la cycline D1 diminuent. Suite à cela,
la molécule a été enregistrée en 2012 pour les seuls patients mutés BRAF V600E.
Ainsi, comme dans toutes les thérapies ciblées qu'on a étudiées, on rentre dans
l'association de la thérapie ciblée personnalisée et du test clinique qui l'accompagne.
C'est d'ailleurs une des recommandations actuelles des instances réglementaires:
toute nouvelle molécule développée devrait être accompagnée par un biomarqueur.
C'est le principe même des thérapies ciblées (un traitement spécifique d'un sousgroupe de la maladie nécessite de pouvoir déterminer si le patient appartient à la
population pouvant en bénéficier).
2) Le traitement personnalisé en France.
Comment le traitement personnalisé est-il pris en charge en France? C'est l'institut
national du cancer qui a organisé les thérapeutiques personnalisées en mettant en
place 28 plateformes de biologie moléculaire, qui doivent dispenser, à tous les
patients susceptibles de bénéficier de ces thérapies ciblées, un test moléculaire pour
10 / 14
identifier dans la tumeur du patient la présence ou non d'un biomarqueur qui pourrait
être ciblé. C'est un développement qui a porté sur différents types de cancers, et au
fur et à mesure que les développements thérapeutiques se sont fait, on a trouvé des
traitements contre différentes pathologies, d'abord pour la leucémie, puis
identification de la présence BCR-ABL pour donner le traitement cible de la LMC,
puis d'autres tests sont arrivés et le mélanome enfin est entré en lice.
Ce qui est important de souligner, car c'est une particularité française, c'est que nos
plateformes fonctionnent toutes avec un schéma multidisciplinaire: le clinicien
prescripteur, le pathologiste et le biologiste coopèrent dans la prise en charge des
patients susceptibles de bénéficier d'une thérapie ciblée. En pratique: on organise
une réunion interdisciplinaire, le clinicien prescrit un test biologique (exemple du
mélanome métastasique: test du BRAF V600), la demande est envoyée au
pathologiste qui va analyser la tumeur à partir d'une biopsie, envoie un prélèvement
à la plateforme de biologie moléculaire qui va déterminer s'il y a ou non cette
mutation, le résultat étant envoyé au clinicien et au pathologiste.
Lorsque le pathologiste sort son bloc pour étudier la tumeur, il détermine le
pourcentage de cellules tumorales présentes dans la pièce. C'est important, car les
recommandations sont d'utiliser des prélèvements avec au moins 50% de cellules
tumorales, étant donné que les tests utilisés par ces plateformes ne sont pas tous
très spécifiques. On utilise différentes techniques de sensibilités différentes: des
techniques de faible sensibilité (15-20%, ce qui reste très raisonnable), des
techniques intermédiaires (autour de 5%) et des techniques très sensibles (0,5 à
1%). L'avenir réside dans les techniques de séquençage à haut débit, qui seront de
plus en plus utilisées dans les années à venir, mais aujourd'hui seules quelques
plateformes sont dotées de séquenceurs assez performants. Ces techniques
permettent de séquencer de façon multiparamétrique, de regarder 10, 15, 20, 30
altération génétiques au sein d'un ou plusieurs gènes au cours de la même réaction
moléculaire. Ces plateformes se sont calées sur les développements thérapeutiques:
BCR-ABL est arrivé très tôt, puis il y a eu KIT, HER2 (amplifié dans les cancers
gastriques), Ki-RAS dans les cancers du côlon (son ciblage a révolutionné le
traitement des cancers du côlon) et enfin le ciblage de BRAF dans le mélanome.
Aujourd'hui, les tests de ces plateformes sont subventionnés par l'institut national du
cancer, en 2012 c'est le ministère de la santé qui donne directement aux plateformes
une ligne budgétaire pour cela. L'idée étant, au final, que ces tests soient pris en
charge par l'assurance maladie, car c'est comme cela qu'on va traiter tous les
patients à l'avenir.
3) Limites des thérapies ciblées: les résistances.
Malheureusement, il existe toujours des résistances aux thérapies ciblées. On va
parler des mutations importantes dans le développement des inhibiteurs de BRAF.
11 / 14
On a vu que ces traitements ont été enregistrés en 2012, et déjà un certain nombre
de patients y résistent. Ils résistent non pas à cause d'une mutation, mais suite à une
complexité de mutations qui sont acquises ou innées à ce traitement.
Au début on ne savait pas comment appréhender ces résistances parce qu'on n'avait
pas suffisamment de matériel tumoral des patients. Puis, on a pris des lignées
cellulaires qui étaient ou non résistantes aux anti-BRAF, et on les a rendues
résistantes ou on les a transfecté, c'est-à-dire qu'on a introduit dans ces lignées les
mutations de toutes les kinases impliquées dans les processus cellulaires. De cette
façon, on testait tous les éléments pouvant induire une résistance. On a observé que
seules les lignées transfectées pour la MAP3Kinase8 mutée ou le CRAF muté sont
capables de résister au traitement. Un autre mécanisme de résistance a été identifié:
lorsqu'on met l'inhibiteur, on a des "petits frères" de RAF dont on ne suspectait pas
l'expression (CRAF et ORAF) qui vont "shunter" l'inhibition, c'est-à-dire que ces
kinases vont tranquillement activer la voie des MAPK, contournant ainsi le blocage
de BRAF.
Par la suite, on a observé d'autres mécanismes de résistances, par exemple dans le
cas d'un jeune patient ayant très bien répondu au traitement, mais qui a rapidement
fait une rechute fatale. On a vu qu'il portait une mutation activatrice de Mek dès la
tumeur primitive, non détectée car très minoritaire. Or, avec le traitement, les autres
clones tumoraux ont été bloqués par le médicament, seuls les clones mutés pour
Mek ont continué de proliférer (c'est de la sélection naturelle), et sont ainsi devenus
majoritaires (NB: c'est la même idée que dans le dernier cours du professeur De
Thé: le traitement va toucher le clone dominant, mais quelques cellules y résistent et
vont devenir le nouveau clone dominant, etc). De même, on a découvert une
mutation de NRas en aval de BRAF, l'activation d'un récepteur à Tyrosine kinase
PDGFRbêta qui devient fortement exprimé à la résistance (alors qu'il ne l'est pas
avant traitement), ou encore l'activation de l'IGF1R. Enfin, on a remarqué que la
mutation de NRas permettait d'augmenter l'activation de BRAF, même s'il était
inhibé, ainsi que celle de ses "petits frères" qui sont ses isoformes.
On voit donc que le médicament va essayer de bloquer BRAF qui est muté dans plus
de 50% de ces cancers, mais au final ce sont des voies parallèles qui vont
contourner le problème et entrainer la prolifération et la survie cellulaire.
Bien sûr, il existe encore d'autres mutations pouvant induire des résistances: PI3K,
Akt, PTEN. Par ailleurs, le stroma dont on parlait tout à l'heure va être capable de
contourner le blocage de BRAF en activant d'autres voies dans la cellule.
12 / 14
Conclusion:
Ce qu'il faut absolument retenir concernant les résistances c'est cela: bloquer la
cellule tumorale, ça a marché et ça marche encore, ça a permis de sortir d'un certain
nombre d'impasses thérapeutiques. Mais le traitement de demain est de bloquer ce
dialogue dans le micro-environnement de la tumeur, qui va dialoguer avec la cellule
endothéliale, avec le système immunitaire (on n'en parle pas dans ce cours), avec le
macrophage, et avec le fibroblaste qui va pouvoir faire produire par la tumeur des
enzymes pour dégrader la matrice, et ainsi favoriser la prolifération et la
dissémination métastatique. Aujourd'hui, on combine les anti-angiogéniques avec
des anti-récepteurs à Tyrosine kinase, mais on est aussi en train de développer des
anti-immunomodulateurs pour que le système immunitaire coopère pour détruire les
cellules tumorales.
Donc, ce sont les traitements de coopération qui, dans un avenir proche vont
apporter la réponse la plus adaptée et la plus individualisée.
13 / 14
DES DICACES EN PAGAILLE
Cette ronéo est dédicacée:
à la team amphi 1 de Larib (bouh Bichat) qui a énormément aidé un pauvre petit
bizuth: Shirley top 50 (et ses questions sur lesquelles on pouvait passer des
heures); les super-pharmaciens Pierre et Jordan; Paul et Camille pour avoir réussi
à rester concentrés toute l'année (et pour les dragibus aussi!); Jeffrey (c'est un
panda!), parce qu'il a quand même réussi l'exploit de rendre muette Céliiiiine;
Maxime dont les avions atteignent toujours une cible (plafond ou P1); Florian (et
son dindon); Anthony et Clément/Chips pour leurs passages toujours
remarquables et remarqués en amphi (halloween!).
à Marina (Miaou!) qui fait quand même un peu peur parfois :D , Fatouuuuuuuu (et
l'alphabet de 11h11) qui ne me parle plus toutes les 5 minutes, Andréanne et sa
bonne humeur, Quentin et ses "c'est pas grave", Cyril, au prénom estropié et qui
se venge en me donnant des surnoms, Pauline qui m'a appris à utiliser les
équations sur Word, Yves (super binôme de physique!) Yoann et son euphonium,
Julien (le dormeur de l'extrême!) et Karine (un téléphone!!)
aux P1 qui vont passer: Nour, Jérôme (grand ami des lamas, des ornithorynques,
des périophtalmes et autres bestioles impossibles. Et des lamas), Guillaume (vasy fillot!), Violette et Meryl (Léonard forever!). Et aux autres qu'on aime quand
même (même quand ils sont en vacances et qu'on révise nos partiels)
à tous mes co-stagiaires de Chir Coloractale (la grande classe) à Beaujon:
Nicolas...et c'est tout :p A Florian, aussi à Beaujon grâce auquel j'ai supporté les
cours de la première semaine. A toute l'équipe du 9° pour leur accueil.
à tous mes co-stagiaires en sémio: Nelson, Coralie, Aurélie, Maxime, Salomé,
Laura et Elena. A Salam pour le petit tour au bloc.
à tous les courageux, les vrais, qui sont venus en cours tout au long du semestre!
au tuto qui m'a aidé étant bizuth et qui aide encore les petits P1. A Maxime (le
troisième!), mon parrain à moi. A Antoine (UE3 is the best!) et à toute la team
physique.
à ceux que j'oublie, et globalement à toute la promo parce que maintenant la
sélection c'est fini, on est tous unis contre P5. Aux vacances qu'on attend encore
aux serpents du monde entier. Parce que.
14 / 14
Téléchargement