Dossier de licence 2 Histoire de l`art

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Dossier de Licence 2
Marie Sarraute
Année : 2011
Cours : patrimoine bordelais – XXe siècle
Professeur : Marc Saboya
1
SOMMAIRE
I. Historique……………………………………………………………………...3
1. L’ancien lycée………………………………………………………….3
2. Contexte de reconstruction……………………………………………..4
II. Un lycée dans son environnement……………………………………………4
1. Un lycée dans la ville…………………………………………………..4
2. Un édifice public……………………………………………………….5
3. L’intégration de la nature………………………………………………6
III. Un lycée ouvert et convivial…………………………………………………6
1. La répartition des fonction……………………………………………..6
2. Les espaces ouverts et vitrés : un jeu sur le vocabulaire architectural au
service de la convivialité………………………………………………….7
a. Le patio…………………………………………………………..7
b. Le hall d’entrée…………………………………………………..8
c. Le cloître…………………………………………………………9
d. Le CDI………………………………………………………….10
e. Le préau………………………………………………………...11
f. La cour………………………………………………………….11
g. L’amphithéâtre et le terrain de sport…………………………...11
h. L’atrium des arts appliqués…………………………………….12
g. Le traitement des façades………………………………………12
IV. Réception auprès des élèves………………………………………………..13
1. Enquête de satisfaction………………………………………………..13
2. La polémique des grilles………………………………………………13
Conclusion……………………………………………………………………...14
Bibliographie…………………………………………………………………...16
Annexe : plan du lycée…………………………………………………………17
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Construit en 1961, le lycée François Magendie, 10 rue des Treuils 33023
BORDEAUX, a été reconstruit de 1997 à 1998. Nous verrons dans cette étude comment les
architectes ont adapté l’architecture du nouveau lycée à deux principes directeurs :
l’intégration de la nature préexistante, et une plus grande convivialité au sein d’un
établissement scolaire.
Pour ce qui est de ma méthodologie, la direction du lycée n’ayant pas pu me recevoir,
je n’ai pas été en mesure d’aller prendre des photographies sur place. J’ai cependant retrouvé
quelques photos que j’avais prises lorsque moi-même j’étais lycéenne là-bas. La direction du
lycée m’avait cependant renvoyé vers une travail de maîtrise de Yann Chaigne, dirigé par
Marc Saboya, sur le lycée François Magendie, ce qui m’a permis de découvrir que la thèse de
cette personne traitait des lycées bordelais, mais ces mémoires n’étaient pas enregistrés à la
bibliothèque universitaire, je n’ai donc pas pu les consulter.
I. Historique.
1. L’ancien lycée.
Le lycée François Magendie a été construit en 1961 par l’équipe bordelaise CourtierLajus-Sallier et leur jeune collaborateur à l’époque, Michel Sadirac. C’est une période qui
connait une forte croissance démographique en France, après la Seconde Guerre Mondiale. Il
faut donc construire vite et bon marché des lycées modernes. C’est pourquoi le système de la
préfabrication est souvent utilisé à l’époque, comme à Magendie.
Le lycée est donc une barre longue et étroite (112 x 9 m) de cinq niveaux en
construction préfabriquée à ossature métallique et panneaux d’Héraclit. Cette barre est
disposée le long d’une des limites de la parcelle et est orientée sud-est par rapport à la rue des
Treuils. Les poteaux métalliques suivent une trame constructive de 1,75 m. Elle accueille
l’ensemble des salles de cours. Des pavillons carrés ou rectangulaires accueillent le reste des
fonctions du lycée. Michel Sadirac dessine les espaces verts en plus du tapis de gazon qui
recouvre le toit du garage à vélos semi-enterré.
Ainsi, par le fonctionnalisme, le traitement différencié des espaces et le refus du décor
appliqué, le lycée renvoie au Style international.
image-parcours.linternaute.com : 1966
photo-de-classe.com : 1977-78
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2. Contexte de reconstruction.
Lycée moderne à sa construction, il devient cependant assez vite obsolète – de même
que le Style international subit un déclassement dans les dernières décennies du XX ème siècle.
Dans les années 1990, il ne correspond plus à la nouvelle pédagogie souhaitée par le ministère
de l’Education Nationale : une pédagogie plus conviviale.
De plus, le lycée commence à tomber en ruines. D’après le témoignage d’une élève de
l’époque, il y avait des trous dans les murs à travers lesquels on pouvait faire passer sa jambe.
Cependant, le rectorat ne souhaite pas reconstruire entièrement le lycée et ce ne sont que
quelques rénovations qui sont tout d’abord décidées.
Mais pendant les vacances de Noël 1995, un pan du lycée s’effondre. Après des
vacances prolongées de deux semaines, les élèves sont disséminés dans trois lycées bordelais
selon leur section, ce qui pose vite des problèmes au niveau de la restauration des lycéens et
de l’accès aux fonds bibliothécaires.
Le lycée ferme donc en 1996 et un concours est ouvert pour reconstruire un lycée
devant accueillir 1200 élèves et 140 adultes (enseignants, encadrement et administration). Il
réunit 53 candidats. Sur les quatre projets retenus, c’est celui de Michel Dupuy de Cazères,
Michel Sadirac-Nadine Gardiola et l’agence d’Olivier Brochet, Emmanuel Lajus et Christine
Pueyo qui est choisi. C’est le conseil régional d’Aquitaine qui a la maîtrise d’ouvrage et le
chef de projet est Jean-Christophe Masnada. L’étude dure d’août 1996 à février 1997 et les
travaux de juin 1997 à juin 1998. Le lycée rouvre à la rentrée de septembre 1998.
II. Un lycée dans son environnement.
1. Un lycée intégré dans la ville.
Le lycée s’étend sur une parcelle de 11811m² dans un tissu urbain peu dense, proche
du centre-ville. Cette parcelle est trapézoïdale et bordée par des habitations, ne dépassant pas
trois niveaux d’élévation et des jardins privés. Avec la volonté de construire un lycée plus
convivial, on souhaite également qu’il s’intègre parfaitement au quartier. C’est pourquoi il
n’est construit que sur trois niveaux afin de se caler sur l’échelle des habitations alentours.
Contrairement à l’ancien lycée qui n’était construit que le long d’une limite de la
parcelle, les limites du nouveau lycée suivent celles de la parcelle. On parle ainsi de l’îlot du
lycée, qui s’intègre ainsi totalement dans le tissu urbain du quartier, sans créer de dépression.
C’est un « bâtiment-nappe » qui s’étend sur toute la parcelle, et percé d’espaces ouverts
encadrés par les bâtiments.
Terrains de sport.
Entrée. Parvis.
La « nappe » du lycée. Techniques et architectures, n°444
De plus, les architectes ont su tirer profit du dénivelé du terrain pour créer une sorte
d’amphithéâtre en emmarchement, menant aux terrains de sport. Ainsi, le bâtiments qui
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renferme les installations sportives se retrouvent sous le foyer des élèves – qui est au rez-dechaussée – mais son tout de même au même niveau que les terrains extérieurs. De même, la
salle des maquettes, ainsi que l’infirmerie et le garage à vélo sont installés dans le sous-sol du
bâtiment accueillant au rez-de-chaussée le réfectoire, mais sont au même niveau que les
terrains de sport.
Cour
Foyer des élèves
Réfectoire
Salles de sport
Amphithéâtre
Salle des
maquettes
Terrain de sport. L’Empreinte, n°43
2. Un édifice public.
Cependant, le lycée reste un édifice public qui doit être identifié comme tel au sein du
quartier. C’est pourquoi les architectes réalisent une entrée qui expriment les différentes
attentes de ce lycée : une façade monumentale pour le côté officiel, un parvis sans grilles pour
l’intégration au quartier.
Façade et parvis. Techniques et architectures, n°444
La façade monumentale réinterprète une forme antique : la façade à portique. Neuf
mâts métalliques remplis de béton font office de colonnes et portent un mince toit de béton
devant une façade dont la partie gauche est un grand espace vitré et la partie droite une façade
de béton percée de petits hublots carrés vitrés. Les matériaux sont simples, le traitement
relativement épuré, donnant ainsi une monumentalité qui signale la fonction publique de
l’édifice, tout en montrant l’échelle de l’établissement et en offrant une dimension d’accueil.
Elle annonce également les trois niveaux d’élévation du lycée par sa hauteur (un premier
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espace sur deux niveaux d’élévation, et un étage en retrait, façade du deuxième étage où ont
lieu des travaux pratiques de sciences).
Le parvis est un grand espace pavé, en partie protégé par le toit de béton. Grand
espace ouvert sur la rue, il n’est pas enclos par des grilles. Il réalise ainsi une transition en
douceur entre l’espace de la rue, du quartier, et l’espace du lycée, participant ainsi au
programme d’intégration du lycée dans le quartier. Une simple ligne de plots signale la limite
ville-lycée.
3. L’intégration de la nature.
C’est Michel Sadirac qui avait dessiné les espaces verts du premier lycée et il
éprouvait une tendresse particulière envers ces espaces. Le projet pour le nouveau lycée a
donc été conçu à partir de la conservation de cette végétation. D’après Olivier Brochet, c’est
de la disposition des arbres qu’est née l’architecture du nouveau lycée. Mais contrairement à
l’ancienne solution, à savoir, les bâtiments sur un côté, des espaces végétaux en extérieur sur
le reste de la parcelle, les architectes ont mis en œuvre une réflexion autour des espaces
ouverts afin d’intégrer la nature dans l’édifice, plutôt que de les confronter, face à face l’un de
l’autre, sans établir de communication entre eux. C’est ainsi que les architectes ont dégagé
différents espaces autour des arbres qui étaient en place : un patio, un cloître, une cour. Ces
espaces percent l’enveloppe orthogonale du lycée, ce qui lui permet de respirer de l’intérieur.
A cet égard, la façade du lycée affiche et résume la volonté créatrice qui a dirigé la
construction du lycée, avec l’intégration, dans la façade même, d’un patio vitré dans lequel se
dresse un pin maritime, qui adoucit la façade minérale.
Façade avec patio. AMC, n°94
Cloître autour d’un arbre. Techniques et
architectures, n° 444
III. Un lycée ouvert et convivial.
1. La répartition des fonctions.
Comme nous l’avons vu, le nouveau mot d’ordre au niveau pédagogique est :
convivialité. Ainsi, les architectes se sont servi des différents corps de bâtiments nés de la
volonté d’entourer les îlots de nature pour y affecter les différentes disciplines, afin que les
élèves puissent plus facilement se côtoyer entre personne appartenant à la même section. 5400
m² sont occupés par les lieux d’enseignement, 1800 m² par des locaux communs, 1000 m² par
le réfectoire et ses annexes de service, et 500 m² à l’administration.
Dans l’aile longeant la limite nord, une partie du rez-de-chaussée, tout le premier étage
et une partie du deuxième étage sont occupés par les salles d’enseignement général. L’aile sud
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est occupée au rez-de-chaussée par le réfectoire et la vie scolaire (le sous-sol est occupé par la
salle des maquettes, comme on l’a déjà mentionné), et les deux étages supérieurs sont
principalement occupés par les salles de la section des arts appliqués, organisées autour d’un
atrium. Les laboratoires scientifiques se trouvent dans la partie ouest du deuxième étage des
ailes nord et sud, et sont reliées par une passerelle vitrée surplombant le patio d’un côté et le
cloître de l’autre. Le deuxième étage du bâtiment sur pilotis (sur un côté du cloître) contient
ainsi des salles d’enseignement scientifique. Ainsi, tout le contour du cloître au deuxième
étage est réservé à l’enseignement scientifique. L’administration se trouve dans l’aile sud, et
on y accède directement par le hall d’entrée.
2. Les espaces ouverts et vitrés : un jeu sur le vocabulaire architectural au service de la
convivialité.
La façade du lycée annonce, là encore, le programme intérieur à cet égard. En effet,
elle met côte à côte une façade en béton, une façade vitrée et le patio fermé par des vitres. Le
lycée sera donc une succession de jeu sur les matériaux, les volumes et les ouvertures. De
plus, cette façade vitrée ouvre une perspective ininterrompue. En effet, en entrant dans le
lycée, on franchit la façade vitrée, puis son pendant identique de l’autre côté du hall, le cloître,
relié à la cour par un préau formé par un bâtiment transversal sur pilotis, la cour, le terrain de
sport, et depuis ce terrain, on voit les jardins voisins avec leur arbres. Ainsi, cet axe de
circulation ne rencontre aucun obstacle opaque, la vue est donc théoriquement dégagée de la
façade à l’autre extrémité du terrain, et cela révèle la profondeur de la parcelle.
Nous allons maintenant étudier plusieurs espaces en détail.
a. Le patio.
Un des quatre « murs » du patio constitue une partie de la façade du lycée, mais c’est
en fait un mur de verre. Le patio est ainsi entouré de trois murs de verre, qui jouent sur
différents degrés d’ouverture.
Couloir vitré entre
le patio et le cloître
Vitre donnant
sur le hall
Cloître
Espace vide au dessus
de la vitre
Vitre donnant
sur le hall
Vitre donnant sur
le parvis
7
Vue du patio depuis le
hall
Techniques et architectures, n°444
Le mur ouest du patio est donc un espace ouvert. Seule une vitre à hauteur
relativement humaine délimite l’espace et le rend inaccessible depuis le parvis. La mur est est
constitué d’un couloir vitré donnant de l’autre côté sur un autre espace ouvert, le cloître. Le
couloir est de plein pied, il est donc surplombé d’un espace vide, lui-même surplombé par une
passerelle entièrement vitrée, comme le couloir. Le mur sud est un mur de béton dans lequel
est percée par une baie vitrée, par seule ouverture par laquelle on peut pénétrer dans ce patio.
Enfin, le mur nord est constitué de vitres camouflées derrière des pare-soleil en bois. Ainsi,
les quatre murs expérimentent une façon différente de traiter l’ouverture : l’ouverture totale,
mais qui ne permet pas la pénétration à l’ouest et à l’est, la fermeture totale au nord, mais qui
rappelle l’élément naturel du bois, et la fermeture partielle au sud, qui est pourtant la seule
ouverture, dans le sens de passage.
Ainsi, l’arbre est ici prétexte à un jeu sur le vocabulaire architectural, afin de créer une
ambiance aux facettes multiples : l’alliance de la nature et d’un cadre minéral, le jeu sur les
ombres projetées par l’arbre aux différentes heures de la journée, un certain mystère quant aux
voies d’accès limitées vers un espace pourtant si ouvert en apparences. De plus, étant visible
sur trois côtés, il structure l’espace de circulation qui le contourne, créant ainsi comme un
parcours. Cependant, cet espace n’est jamais fréquenté, et des expositions temporaires
masquent souvent son entrée dans le hall.
b. Le hall d’entrée.
Le hall est une grande pièce, très haute de plafond, puisqu’elle s’élève sur deux
niveaux. Les murs ouest et est sont entièrement vitrés – les vitres de la façade sont blindées,
par sécurité envers les projectiles, les œufs du Père Cent par exemple. Les murs sud et nord
sont en béton. Côté nord, une baie vitrée donne sur le patio, et côté sud, la loge du concierge,
baptisée « aquarium » par les élèves se font pendant.
Escalier menant à l’administration
Loge
Cloître
Image personnelle.
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Le sentiment d’ouverture est renforcé par le fait que les deux murs vitrés ouvrent sur le
parvis et le cloître, deux espaces eux-mêmes très ouverts. Un escalier qui s’avance comme
suspendu au milieu du hall met en scène le lieu d’administration du lycée.
Le hall est un grand espace ouvert qui permet aux élèves de se retrouver le matin avant
les cours, ou encore d’afficher les nombreuses expositions organisées par les élèves sur des
thèmes aussi divers que leurs voyages à l’étranger, des thèmes culturels, artistiques, etc…
c. Le cloître.
Le cloître succède directement au hall. C’est un espace pavé, agrémenté de tables et de
bancs entourant les arbres. C’est un espace agréable pour se détendre pendant les pauses et il
n’est pas boudé des élèves. De plus, l’espace est surplombé sur trois côtés par des bâtiments
de deux étages, d’où il est visible à travers les pare-soleil en bois.
Passerelle
Hall
CDI
Vue depuis le hall
AMC, n°94
Vue sur le cloître depuis le deuxième
étage du bâtiment sur pilotis
Couloir éclairé par le
cloître
Techniques et architectures, n°444
CDI
CDI
www.magendie.net
9
http://farm4.static.flickr.com
Ici encore, on peut est en présence d’un jeu sur le vocabulaire architectural. En effet,
les architectes ont ici construit un cloître, qui, dans les abbayes, constituait un espace ouvert
au sein du groupe fermé au monde qu’était l’abbaye. C’était donc le seul espace ouvert du lieu
de vie, mais il était enserré au cœur même de l’ensemble, bordé de chaque côté par des
bâtiments de pierre. Il était donc, d’une certaine manière, à la fois l’espace le moins fermé,
puisqu’il était à ciel ouvert, mais symboliquement, l’espace le plus au cœur du groupe fermé.
Or, ici, les quatre murs enserrant le cloître sont soit de grandes baies vitrées, soit quelques
pilotis libérant un espace totalement libre communiquant avec la cour. C’est donc un cloître,
dans ce sens qu’il est au cœur de l’édifice et qu’il est tout de même enserré entre les façades
des deux étages supérieurs, mais il se veut totalement ouvert, un espace de communication qui
fait office de pivot articulant les autres espaces. On peut également noter qu’autour de ce
cloître, on trouve le CDI et l’espace d’attente du réfectoire, ce qui renforce le jeu sur le
vocabulaire du cloître, puisque ce sont là des salles (bibliothèque, réfectoire) qui pouvaient se
trouver autour d’un cloître d’abbaye.
Les architectes renversent donc ici le vocabulaire architectural afin de renforcer la
nouvelle ligne pédagogique – la convivialité – en transformant une forme symbolisant
l’enfermement en un lieux totalement ouvert, faisant passer le lycée de l’état de prison à
lycéen à lieu d’étude agréable et stimulant, où le jeu intellectuel sur l’architecture côtoie la
simplicité de la nature.
d. Le CDI.
Le CDI donne donc d’un côté sur le cloître, renversant encore une fois le statut de la
bibliothèque, qui passe d’un lieu d’enfermement pour l’étude à un lieu d’étude ouvert sur le
monde intellectuel et sur la nature. Le CDI est éclairé par une verrière zénithale et son sol est
en imitation de parquet, ce qui renforce cette alliance entre étude, nature et ouverture. De plus,
des salles d’études à accès libre sont aménagées à l’intérieur. Ces salles donnent sur le CDI
par de grandes baies vitrées, mais qui peuvent être fermées par des stores.
CDI
Salle d’étude
Image personnelle.
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e. Le préau.
Le préau est une forme architecturale classique dans le monde de l’éducation. Ici,
cependant, il ne se trouve pas à l’entrée de l’établissement, mais au centre. Il est ainsi utilisé
afin de ne pas couper l’axe principal, comme on l’a vu plus haut. Ainsi, les architectes ont
décidé de monter le bâtiment transversal qui ferme le cloître sur pilotis afin d’unifier l’espace
extérieur au sol, sans perdre trop de place pour les espaces d’enseignement.
Le préau est donc un lieu de passage. C’est aussi un abri en cas de pluie sans avoir
besoin d’investir massivement les bâtiments du lycée pendant les pauses.
f. La cour.
La cour se trouve donc dans la continuité du préau et donne elle-même sur le terrain de
sport. Elle est construite autour d’arbres, plus où moins massifs, qui projettent leurs ombres et
leurs branches basses sur l’espace au sol.
Image personnelle.
Des bancs en bois bordent le mur nord et des tables sont installées entre les arbres. De
plus, les coins de terre entourant les arbres ont, pendant plusieurs années, servi de jardin au
club jardinage du lycée. Ainsi, ces espaces verts qui ont structuré le lycée participent-ils
directement à la vie du lycée.
g. L’amphithéâtre et le terrain de sport.
Techniques et architectures, n°444
Image personnelle.
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La cour donne sur le terrain de sport par un emmarchement formant une sorte
d’amphithéâtre de béton. Cela permet d’intégrer le terrain de sport à l’espace de la cour.
Ainsi, pendant les pauses, il n’est pas rare de voir quelques élèves jouer au basket alors que
d’autres prennent le soleil – en faisant leurs devoirs, bien sûr – sur les marches. La cour de
« récréation » est ainsi prolongée jusqu’au bout du terrain, mais présente une déclinaison
d’espaces de détente différents. Le terrain de sport fait aussi le lien avec le quartier, puisqu’on
y voit les jardins voisins – ils sont donc visibles depuis la cour et l’emmarchement, ce qui
renforce le sentiment d’ouverture du lycée.
De plus, l’amphithéâtre peut être un lieu de représentation, pour regarder des matchs
sportifs, par exemple. C’est également là que se déroulent parfois la cérémonie des « big
brothers and sisters » réunissant la section internationale américain et la section européenne
anglais afin de nommer un mentor à chaque nouvel élève des deux sections. Ainsi, encore une
fois, un jeu sur le vocabulaire architectural – un amphithéâtre moderne – et une réflexion sur
les liens entre les espaces favorisent un climat de convivialité et de bien-être au sein du lycée.
h. L’atrium des arts appliqués.
Le bâtiment des arts appliqués présente une singularité par rapport aux autres
bâtiments de cours : il s’organise autour d’un atrium sur deux niveaux.
Image personnelle.
Encore une fois, on a là une réinterprétation du vocabulaire architectural antique. C’est
un espace ouvert et convivial qui permet la circulation et donne un grand espace d’exposition
pour les élèves qui y travaillent. Il est d’ailleurs utilisé pour les photos de classe.
De plus, le bâtiment des arts appliqués dispose d’une terrasse en caillebotis, ce qui
permet au élèves de s’aérer l’esprit pendant la pause sans quitter totalement leur espace
créatif. Le lieu est en effet entièrement dédié à la création artistique, comme en témoignent les
façades sérigraphiées dessinées par un élève, Mathieu Chévara, en collaboration avec les
architectes.
3. Le traitement des façades.
Enfin, la « convivialité » de mise transparait également sur les façades. En effet, les
architectes ont utilisé le traitement des façades pour briser la monotonie et créer un cadre
d’étude agréable. Ils jouent sur la répétitivité et de subtiles variations.
Ainsi, on trouve les éléments de façade suivants : mur-rideau, vitrage, stores, paresoleil orientables en lamelles d’ipé. De plus, les architectes jouent sur l’épaisseur des murs
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avec des éléments placés à nu ou en retrait avec une variation de 25 cm qui crée des jeux
d’ombre et de lumière.
Le traitement des murs intérieurs varie également. Ainsi, les circulations intérieures se
retrouvent animées par la lumière dans les persiennes, des contre-jour sérigraphiés, des murs
de béton percés de pavés de verre carrés. On peut enfin noter que certains couloirs et un mur
de l’escalier principal sont peints en rouge, ce qui semble être une sorte de signature de
l’agence Brochet-Lajus-Pueyo, et qui ajoute une touche d’animation et de chaleur à la
circulation.
IV. Réception auprès des élèves.
Il m’a enfin semblé intéressant de recueillir les avis des lycéens sur leur cadre d’étude,
puisque c’est majoritairement à eux qu’il est destiné.
1. Enquête de satisfaction.
J’ai effectué une enquête de satisfaction auprès de lycéens et anciens lycéens via
internet. Douze personnes ont répondu à mon enquête.
L’avis général est mitigé. Plusieurs soulignent la modernité du lycée et trouvent
agréable les espaces ouvert, mais beaucoup trouvent les couloirs trop étroits. En effet, lors des
interclasses, il est assez difficile de se frayer un chemin au milieu des classes attendant des
deux côtés leur prochain cours. Enfin, plusieurs n’apprécient pas du tout l’architecture de
béton. Plusieurs trouvent ce lieu stimulant pour les études, même s’ils soulignent le manque
d’espaces pour travailler en dehors des heures de cours.
Au niveau de l’intégration de la nature, les lycéens ne semblent pas remarquer l’effort
de Michel Sadirac car la plupart la trouvent très insuffisante. Malgré cela, une élève pourtant
réputée comme étant particulièrement écologiste souligne qu’il est déjà bien d’avoir autant de
verdure dans un lycée proche du centre-ville. Cependant, la plupart sont très satisfaits par les
espaces ouverts, qu’ils trouvent nécessaires afin de se détendre.
La plupart des élèves interrogés aiment beaucoup le parvis et soulignent son rôle
important comme lieu de socialisation, mais beaucoup regrettent que comme, avant
l’installation des grilles, c’était le seul espace fumeur du lycée – ce qui constituait
normalement déjà une violation de la loi Grévin – il était difficile pour les non-fumeurs d’y
aller car il était particulièrement enfumé, et les élèves s’y entassaient pour fumer.
L’atrium des arts appliqués est apprécié par certains, mais laisse globalement les
élèves indifférents du fait qu’ils ne le fréquentent pas. Certains regrettent d’ailleurs ce qu’ils
appellent une « sectarisation » d’un espace réservé à un certain groupe. Ainsi, il est possible
que l’affectation des salles par disciplines d’un côté ou de l’autre du lycée permette, certes, un
plus grand échange au sein du groupe concerné, mais permette moins d’échanges entre les
différents groupes du lycée.
Enfin, le sujet sur lequel ils tombent tous d’accord est l’importance des espaces vitrés
qui leur permettent de ne pas se sentir enfermés dans le lycée – qui est un endroit où ils
passent trois ans de leur vie.
2. La polémique des grilles.
Comme on l’a vu, les architectes n’avaient pas prévu de grilles pour séparer l’espace
de la ville de celui du lycée, préférant simplement marquer la limite par une rangée de petits
plots. Mais en 2005, la direction du lycée décide d’installer malgré tout des grilles. Les
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raisons sont multiples : il s’agit d’une mesure avant tout de sécurité, afin de mieux gérer le
flux d’élèves – et de drogue… De plus, le parvis, grande place ouverte en ville, était un lieu
de rassemblement la nuit, ce qui provoquait du tapage nocturne qu’il était important de faire
disparaître, pour la vie du quartier et le temps de sommeil des concierges, qui habitent contre
ce parvis.
Cependant, cette décision a rencontré une forte opposition de la part des élèves, qui
ont été jusqu’à organiser un sitting sur ledit parvis en signe de protestation. Ce qui est
intéressant ici, c’est qu’au-delà des revendications de garder un lycée ouvert – ce qui montre
tout de même qu’ils étaient sensibles au projet des architectes – certains lycéens ont souligné
le fait que les architectes eux-mêmes n’avaient pas souhaité mettre de grilles et qu’il fallait
donc respecter leur choix artistique. La direction du lycée a cependant malgré tout installé les
grilles, qui sont en fait une succession de poteaux métalliques.
http://assets2.qypecdn.net
S’il y a un sujet autre que les espaces vitrés sur lequel à peu près tous les lycéens
interrogés tombent d’accord, c’est bien sur le fait qu’ils n’aiment pas du tout ces grilles, qu’ils
trouvent profondément inesthétiques, et qui leur donnent un sentiment d’enfermement.
Certains signalent également leur incompréhension vis-à-vis des trois nains qui ont été
accolés au bas de trois des poteaux. Il est vrai que ces nains semblent enchainés aux grilles, ce
qui renforce le sentiment d’enfermement, et va totalement à l’encontre du projet original qui
souhaitait créer un lycée ouvert.
De plus, comme la direction du lycée en a profité pour faire appliquer entièrement la
loi Grévin, les fumeurs se sont retrouvés repoussés sur le trottoir devant les grilles. Certes, ce
trottoir s’élargit pour former une petite place devant l’entrée, mais cela n’est peut-être pas une
solution très sécurisée pour les élèves fumeurs.
Conclusion.
Nous avons donc essayé de présenter ce lycée récent, qui a été conçu afin d’intégrer la
nature – c’est même d’après les emplacements de ladite nature qu’il a été pensé – et de
permettre une plus grande convivialité dans ce lieu d’étude. Les architectes ont donc laissé
aller leur imagination en jouant, voire renversant, le vocabulaire architectural, afin de créer
une architecture moderne à partir de formes anciennes. Il est cependant difficile de savoir où
s’arrête le jeu. Par exemple, la passerelle vitrée reliant les laboratoires de physique-chimie et
de SVT et surplombant le cloître d’un côté, et surtout le patio de l’autre, peut être interprétée
comme étant une passerelle entre les sciences en harmonie avec la nature, autrement dit, une
interdisciplinarité totale des sciences placées sous le signe de l’éthique. Cela ferait du lycée un
espace plus que moderne, complètement tourné vers le futur.
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On peut comparer cet édifice avec une autre œuvre de l’agence Brochet-Lajus-Pueyo,
toujours dans le domaine de l’éducation, l’annexe de la faculté de droit Bordeaux 4
Montesquieu. En effet, les deux édifices ont été basés sur les deux mêmes principes :
s’intégrer aux constructions déjà existantes et intégrer la nature. Ainsi, les deux ont été conçus
avec un étage à demi enterré afin de ne pas dépasser en élévation les bâtiments préexistants.
Cependant, l’intégration de la nature n’a pas été pensée de la même manière dans ces
deux édifices mais cela tenait à la forme même de la nature en question. En effet, pour
l’annexe de la faculté de droit, il s’agissait de minimiser l’impact des bâtiments sur la nature
abondante et préservée à dessein sur le campus. Les architectes ont donc croisé cet objectif
avec celui de ne pas avoir une trop haute élévation afin de créer une sorte de jardin en pente
qui permet d’apporter de la lumière aux salles du sous-sol, tout en gardant un grand espace de
nature au milieu des bâtiments. On peut d’ailleurs noter que ces deux bâtiments sont reliés, au
niveau du sous-sol – ou sol du jardin – par en bâtiment vitré – comme le lycée Magendie – ce
qui permet de profiter du jardin, et sur lequel du gazon a été planté, ce qui minimise en effet
l’impact de l’architecture sur l’environnement naturel.
Annexe de la faculté de droit, images personnelles.
Au lycée Magendie, il s’agissait de trouver un compromis qui permette de garder des
espaces verts dans un lycée étroit en centre-ville. Les espaces ont donc été conçus pour
encadrer cette nature, bien que ce soit les arbres qui ont dirigé, en quelque sorte,
l’architecture. Ainsi, à Magendie, on a plutôt l’impression d’être dans un écrin architecturé
pour mettre en valeur la nature, alors qu’à l’annexe de Bordeaux 4, c’est plutôt la nature qui
sert d’écrin à des bâtiments qui tentent de se faire discrets.
Enfin, on peut également trouver d’autres points communs. Par exemple, dans les
deux établissements, le rez-de-chaussée est traité majoritairement avec des baies vitrées, alors
que les deux étages supérieurs sont traités avec des matériaux plus opaques. De plus, on
retrouve les murs rouges, sorte de signature, semble-t-il, de l’agence.
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BIBLIOGRAPHIE
Ouvrages.
Marc SABOYA, Ordre et désordre, fragments d’architecture contemporaine à Bordeaux,
Bordeaux, Le Festin, 2008, pp. 40-41
Robert COUSTET, Marc SABOYA, Bordeaux, la conquête de la modernité : architecture et
urbanisme à Bordeaux et dans l’agglomération de 1920 à 2003, Bordeaux, Mollat, 2005, pp.
317-319
Articles. (accessibles sur le site de l’agence Brochet-Lajus-Pueyo)
« Trame subtile », Techniques & Architectures, n°444, 1999
« Lycée », AMC le moniteur architecture, n°94, décembre 2008
Christine DESMOULINS, « Lycée-jardin », L’Empreinte, n°43, décembre 1998
Webographie.
http://www.archi-guide.com/
http://www.brochet-lajus-pueyo.fr/
www.magendie.net/
[images]
http://assets2.qypecdn.net
http://farm4.static.flickr.com
http://image-parcours.linternaute.com/
http://photo-de-classe.com/
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ANNEXE : PLAN DU LYCEE
Deuxième étage
Rez-de-chaussée (et
terrain de sport)
Techniques et architectures, n°444
On visualise bien l’axe dégagé qui traverse tout le terrain.
Le bâtiment transversal (7) sur pilotis permet de créer une continuité des espaces ouverts au
sol, tandis que dans les étages, il crée une cloison supplémentaire, complétant la fermeture du
cloître.
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