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Les deux dimensions du projet urbain
Le projet urbain comme projet de formes
La notion de projet urbain, telle qu’elle est portée par la maîtrise d’œuvre, semble
aujourd’hui faire consensus. Elle a pourtant dû faire l’objet d’élaborations conceptuelles
et de prises de positions résolues, tendant soit à l’affirmer dans le champ intellectuel,
soit à s’en prévaloir dans un contexte de renouvellement des références. Il s’agit d’une
notion dont les connotations furent donc polémiques à l’origine et dont la vocation a été
de redéfinir les rapports entre fonctions et formes, entre programmation et façonnement
du paysage urbain. Ainsi, une nouvelle génération d’architectes s’est rangée derrière
cette notion emblématique, entendant à la fois ne plus assumer l’urbanisme
fonctionnaliste et se démarquer des aménageurs technocrates (ingénieurs, planificateurs,
programmateurs).
Plus précisément, ces architectes entendaient faire ainsi valoir une culture urbaine de
longue durée, support de l’ appréhension et de la compréhension des formes urbaines.
De même, ils affirmaient que grâce au projet urbain il était possible d’obtenir de
meilleures conditions du débat démocratique portant sur des objets concrets et des
figures spatiales lisibles et plus compréhensibles, rompant en cela avec les abstractions
que constituaient les procédures, les ratios et les programmes. En d’autres termes, il
s’agissait de réhabiliter la dimension formelle, sensible et esthétique de l’espace urbain
en tant qu’objet principal du savoir des aménageurs contre la dimension techniciste,
analytique et quantitativiste qui prévalait dans l’urbanisme de plan.
De plus, selon cette acception, la notion de projet urbain porte en elle un nouveau
rapport de l’action au temps dans la mesure où il ne s’agit pas de concevoir a priori le
plan final d’un secteur aménagé mais plutôt d’esquisser des axes d’évolution possible et
souhaitable en fonction des caractéristiques du site et des acteurs locaux et qui se
réaliseront de manière différente suivant les opportunités se présentant.
Il apparaît donc qu’à l’origine le projet urbain, entendant faire retour à l’urbanisme
culturaliste, se concevait comme un travail de préservation et de reconstitution de la
forme urbaine de “ la ville européenne ”, dense, compacte, hiérarchisée. Par la suite,
avec la pensée postmoderne les références morphologiques se sont diversifiées, tout en
gardant un dénominateur commun : la primauté accordée à la composition urbaine.
Selon cette acception, le projet se comprend principalement à partir d’une appréhension
de la ville en tant que forme.
Le projet urbain comme démarche de conception, mobilisation collective
locale et moyen de valorisation territoriale
En ce sens, le projet urbain concerne moins la dimension architecturale voire
urbanistique, il est davantage compris comme une démarche partenariale visant la
définition et la mise en œuvre d’une action politique visant le développement socio-
économique d’une ville. Il s’agit de déterminer des stratégies d’aménagement futur
d’une ville ou d’un pôle de celle-ci en mobilisant des acteurs locaux selon une logique
entrepreneuriale.
Ainsi, le milieu local est considéré comme un acteur collectif autonome, doté d’une plus
grande capacité d’action que par le passé face aux enjeux postindustriels. Les relations
entre partenaires publics et privés et les rapports désormais déhiérarchisés entre
échelons des pouvoirs publics impliquent d’autres modes de gestion — “la
gouvernance” — tels qu’ils se pratiquent dans diverses métropoles européennes. Cette
liaison de l’urbanisme et de l’économie apparente le projet urbain à la planification
stratégique. Cette acception et ce mode de faire découlent de la nécessaire prise en