Rev. Int. Sc. Méd. Vol. 8, n°2, 2006, pp. 32-35
© EDUCI 2006
DOUMBIA M., KOUASSI L., KOUAMÉ-ASSOUAN A.-E., DOUAYOUA- SONAN T.H., BOA-YAPO F.
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MALADIE DE FAHR REVELEE PAR DES TROUBLES
DE LA MARCHE ET DE LA PAROLE
DOUMBIA M.1, KOUASSI L., KOUAMÉ-ASSOUAN A.-E.2,
DOUAYOUA- SONAN T.H.1, BOA-YAPO F.1
1- Service de Neurologie, CHU de Yopougon, 21 BP 632 Abidjan 21
2- Service de Neurologie CHU de Cocody
Correspondance : DOUMBIA Mariam, Service de Neurologie, CHU de Yopougon
21 BP 632 Abidjan 21E-mail : [email protected]
Tél : (225) 20 32 20 04 Fax : (225) 20 32 25 09
RESUME
Les auteurs rapportent un cas de maladie de Fahr
découverte chez un patient de 52 ans, à l’occasion de troubles
de la marche et de la parole. L’examen clinique a objectivé
un syndrome pyramidal des membres inférieurs et des
signes psychiatriques.
Le diagnostic a été établi sur l’examen
tomodensitométrique crânio-encéphalique qui montrait de
volumineuses hyperdensités calciques spontanées
bilatérales et symétriques des étages sus et sous-tentoriels.
Il n’y avait pas d’anomalie phosphocalcique.
La revue de la littérature montre la diversité des
manifestations cliniques de cette affection. Les autres causes
de calcifications intra-cérébrales sont rappelées.
MOTS-CLÉS : MALADIE DE FAHR, ASPECTS CLINIQUES,
CALCIFICATIONS DES NOYAUX GRIS.
SUMMARY
The authors report a case of Fahr’s disease in 52-years-old
man with progressive talking and walking disorders. The clinical
features were a pyramidal syndrome, a spatial disorientation and
anxiety. CT scan showed considerable symmetrical calcifications
in the central grey nuclei at the base of the brain, the sub cortical
regions and the posterior cranial fossa. There was no trouble of the
phosphocalcic metabolism.
The review of the literature shows the clinical polymorphism
of the disease. The authors recall the main conditions in which
such cerebral calcifications are observed
KEY WORDS : FAHRS DISEASE, CLINICAL FEATURES,
CENTRAL GREY NUCLEI CALCIFICATIONS.
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Maladie de fahr revelée par des troubles de la marche et de la parole.
Rev. Int. Sc. Méd. Vol. 8, n°2, 2006, pp. 32-35
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INTRODUCTION
La maladie de Fahr est définie par la présence
de calcifications vasculaires et périvasculaires
bilatérales et symétriques des noyaux gris de la
base du cerveau pouvant s’étendre aux noyaux
dentelés du cervelet en l’absence de toute lésion
d’artériosclérose3,5. Les manifestations cliniques
de la maladie ne correspondent à aucun tableau
spécifique.
Nous rapportons une observation de maladie
de Fahr révélée par des troubles de la marche et
de la parole.
I- OBSERVATION
D. M sujet de sexe masculin âgé de 52 ans,
ivoirien, ouvrier, droitier, sans antécédent
notable a été hospitalisé le 23/07/2003, dans le
service de Neurologie du CHU de Yopougon à
Abidjan en Côte d’Ivoire. Il présentait des troubles
de la marche apparus progressivement sur 6
mois, à type de fatigabilité des membres
inférieurs, d’instabilité à la station debout et la
marche, associés à des troubles de la parole à
type de dysarthrie avec des accès de bre-
douillement.
L’examen clinique a objectivé un syndrome
pyramidal des membres inférieurs, une
désorientation spatiale, une anxiété importante
et une insomnie. Il n’y avait ni crise épileptique,
ni syndrome cérébelleux, ni syndrome extra-
pyramidal.
L’examen tomodensitométrique crânioen-
céphalique a mis en évidence de volumineuses
hyperdensités calciques spontanées bilatérales et
symétriques des noyaux dentelés, de tous les
noyaux gris centraux, du centre semi-ovale et de
la substance blanche périven-triculaire, sans effet
de masse sur les structures adjacentes et sans
prise de contraste (figures 1 à 3).
Figure 1 : Clcifications cérébelleuses
Figure 2 : Calcifications des noyaux gris centraux
Figure 3 : Calcifications de la substance blanche
Rev. Int. Sc. Méd. Vol. 8, n°2, 2006, pp. 32-35
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Le bilan biologique a révélé une perturbation
modérée del’ionogramme sanguin avec une
hyponatrémie (130 mEq/l), une hypokaliémie
(3,4 mEq/l), et une hypochlorémie (93 mEq/l).
La phosphorémie et la calcémie étaient
normales. L’hémogramme, la glycémie, la
recherche d’anticorps anti VIH1 et anti VIH2
étaient sans particularité. Le bilan thyroïdien :
ADH (2.9 ñg/ml), la PTH (15 ng/l), T3 (3,3 ñg/ml)
et T4 libres (1,18 ng/dl), TSH ultrasensible (1,187
µU.I/ml) étaient normaux. L’examen ophtal-
mologique était normal. Le liquide cérébro-spinal
(LCS) était normal.
Le patient n’a bénéficié d’aucun traitement.
II- DISCUSSION
La maladie de Fahr atteint des patients d’âge
moyen ou très jeunes, des 2 sexes dans les mêmes
proportions1. Les manifestations cliniques sont
diverses et variées et la maladie est généralement
difficile à suspecter cliniquement4,5,6.
Les troubles psychiques sont présents dans
45% des cas, à type de détérioration intellectuelle,
de débilité mentale, de troubles caractériels,
parfois même d’épisodes délirants6,7.
Les troubles neurologiques, souvent discrets
par rapport à l’étendue des lésions anatomo-
radiologiques, sont assez fréquents : crises
épileptiques, syndrome pyramidal, syndrome
akinéto-hypertonique, syndrome cérébelleux
généralement discret, troubles sphinctériens,
mouvements choréo-athétosiques, dysarthrie
vraie ou parole bredouillante. L’atteinte des nerfs
crâniens et les accès d’hypertension intra-
crânienne bénigne sont rares
8,9.
Les signes métaboliques sont inconstants et en
relation avec l’hypoparathyroïdie (tétanie, signe de
Chvostek) ou avec d’autres endocrinopathies
comme le diabète et l’insuffisance testiculaire ou
thyroïdienne9.
La maladie peut être totalement asymp-
tomatique et n’être révélée que par des examens
complémentaires. L’étude du métabolisme
phosphocalcique et la recherche d’une hypopa-
rathyroïdie sont systématiques. Le LCS est
habituellement normal. L’électroencépha-
logramme est souvent normal ou montre un
ralentissement et /ou des grapho-éléments de
comitialité9. La radiographie du crâne et les
tomographies frontales ou sagittales montrent
des calcifications bilatérales et symétriques sous
forme de petites opacités ponctuées, peu denses,
disséminées et plus ou moins confluentes3.
La tomodensitométrie crâniocérébrale permet
actuellement de reconnaître la maladie 13,14 sous
forme de calcifications bilatérales et symétriques
des noyaux gris centraux et des noyaux dentelés
du cervelet qui réalisent au début de petites
opacités régulières et symétriques de la tête des
noyaux caudés. La capsule interne est
respectée1.
Ces aspects doivent faire discuter d’autres
causes de calcifications intracérébrales1,8,9. La
recherche d’une hypoparathyroïdie est classique5.
Les calcifications des hyperparathyroïdies
s’accompagnent de perturbations du bilan
phosphocalcique1. Dans notre contexte de travail,
les calcifications parasitaires sont systéma-
tiquement évoquées mais elles ont des sièges
et des aspects différents. Les calcifications
toxoplasmiques sont bilatérales, disséminées
dans toute la substance cérébrale et regroupées
dans les régions périventriculaires et corticales;
celles de la cysticercose sont multiples,
punctiformes, disséminées et asymétriques;
dans l’hydatidose, elles prennent plutôt un aspect
kystique et dans la trichinose, elles se
présentent sous forme de multiples petites
tâches ovoïdes disséminées3,9.
Les calcifications physiologiques de la
sénescence surviennent chez des sujets de plus
de 60 ans. Elles sont généralement asymp-
tomatiques, plus arrondies, non homogènes et
prédominent exclusivement au niveau des globes
pâles9. Les calcifications cérébrales post-anoxiques
après intoxication oxycarbonée, sont bipallidales.
Les calcifications post-radiothérapiques ou post-
chimiothérapiques peuvent être aussi évoquées1,8.
Le mécanisme physiopathologique de
l’affection est encore inconnu. La plupart des
auteurs évoquent cependant un trouble
métabolique des cellules oligogliales avec dépôts
de mucopolysaccarides et apparition secondaire
de lésions vasculaires, périvasculaires et
d’incrustations calcaires4. Les troubles para-
thyroïdiens accompagnent très souvent la
maladie1,10,12,15. Dans de nombreux cas sans trouble
parathyroïdien, on évoque une hypothèse neurogène
diencéphalique dans le cadre des associations aux
polyendocrinopathies, ou une exagération d’un
processus normal de dépôts calciques ou ferreux
au niveau des noyaux gris centraux et dentelés au
cours de la sénescence 2,3,9.
Chez notre patient, en l’absence de parasitose
et d’anomalie phosphocalcique nous avons
évoqué une maladie de Fahr idiopathique mais
une enquête familiale devrait compléter la
recherche étiologique car des formes familiales
ont été décrites4,9,10,11.
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CONCLUSION
La maladie de Fahr est une entité essen-
tiellement radiologique qui regroupe proba-
blement différentes affections congénitales ou
métaboliques jusqu’à ce jour non définies. La
fréquence de découverte de cette maladie devrait
s’accroître en Afrique avec l’avènement de la
tomodensitométrie.
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