Situation du marche de lor - juillet 2013

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Situation et enjeux
du marché de l’or
Juillet 2013
Adrienne Horel-Pagès

Pour l’acheteur stratégique d’or à long terme, les
mouvements récents constituent indéniablement une
opportunité.

Le marché s’est assaini, alors que les facteurs
structurels de la demande d’or sont toujours
présents : poursuite des politiques publiques de
reflation ; inquiétude sur les risques du système de
crédit chinois ; course à la dévaluation entre les
grandes zones monétaires.

La détention d’or, soit sous forme d’or alloué, hors du
bilan des banques, soit au travers de mines d’or
soigneusement
sélectionnées,
demeure
une
protection stratégique à long terme.
+33(0)1 5393 3835
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Page |1
Sommaire
1.
La baisse du prix de l’or renforce le poids des facteurs structurels.
2.
La demande d’or demeure soutenue par des tendances lourdes.
3.
Un équilibre tendu entre la production et la demande.
4.
Un marché déconnecté des stocks d’or physique ?
5.
Comment investir en or.
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utilisation, d’une diffusion totale ou partielle de ce document non conforme à sa destination. Les règles
d’investissement et de fonctionnement des fonds sont décrites dans les Prospectus disponibles auprès de la
société de gestion.
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Introduction
L’or a enregistré au cours des derniers mois une forte baisse de son prix en
dollar, comme en euro. Les origines de cette correction sont par définition
difficiles à identifier : intervention de la Réserve fédérale visant à peser sur
le prix du métal jaune dans un contexte de politiques monétaires
expansionnistes, retournement des anticipations de marché, remontée des
taux d’intérêt réels, hausse du dollar, etc. Quelles que soient les causes de
cette correction, ces mouvements n’ont rien d’anormal. Sur un marché,
tous les biens s’échangent contre des valeurs. L’or n’échappe pas à la règle.
Dans ces conditions, pour l’acheteur stratégique d’or à long terme, les
mouvements récents constituent indéniablement une opportunité. Le
marché s’est assaini, alors que les facteurs structurels de la demande d’or
sont plus que jamais actifs : poursuite des politiques de reflation ; risques
pesant sur le système de crédit chinois ; course à la dévaluation entre les
grandes zones monétaires.
Dans cette perspective, cette note a pour objectif de présenter la situation
et les tendances du marché de l’or dans une logique de long terme. La
baisse du prix de l’or renforce le poids de facteurs structurels ; elle a
également mis au jour les risques d’une approche de court terme sur le
métal jaune : l’or n’est pas un investissement (il ne dégage aucun revenu),
c’est une réserve de valeur, un actif stratégique, qu’il faut détenir en tant
que tel et non au travers de produits financiers comportant un risque de
crédit.
1.
La baisse du prix de l’or renforce le poids des facteurs structurels.
1.1 La demande d’or physique reste soutenue.
La plupart des opérateurs de marché ont vu dans la baisse du prix de l’or la
confirmation des analyses de grandes banques d’investissement sur la fin
1
d’un cycle haussier . Notre interprétation est plus nuancée.
La baisse des cours a
été le fait de
dégagements
importants de la part
des ETF et des ETC.
Depuis la fin de l’année 2012, les cours de l’or ont largement corrigé du fait
de la sortie d’investisseurs financiers. Près de 75% de ce reflux provient du
marché américain et plus particulièrement des gestionnaires de fonds et de
2
hedge funds qui investissent au travers de produits indexés (ETF, ETC) .
Cependant, la chute des cours sur les marchés financiers ne s’est pas
accompagnée d’une contraction de la demande d’or physique, bien au
contraire : en Europe et aux Etats-Unis, les délais de livraison et les primes
de conversion de l’or papier en or métal se sont tendus, alors qu’en Asie les
détaillants ont dû faire face à une forte baisse de leurs stocks. A la
différence de ce qui se passe sur les actifs financiers, la baisse des cours de
1
Cf. Notamment la note de la Société Générale d’avril 2013, « The end of the gold era ».
Les ETC (Exchange Traded Commodities) sont des titres de dette indexés sur le prix de l’or. Les ETF (Exchange Traded Fund)
sont des organismes de placement cotés exposés au marché de l’or au travers d’une position en or physique gérée par un trust.
Ces deux produits comportent directement ou indirectement un risque de crédit par rapport à la détention d’or physique. Ils
gèrent leur exposition en or par des achats fermes de métal ou des opérations de prêt-emprunt auprès des banques centrales.
Page |3
2
A la différence de ce
qui se passe sur les
actifs financiers, la
chute du prix de l’or
a plutôt été perçue
comme une
opportunité par les
acheteurs structurels
à long terme.
l’or a plutôt été perçue par les épargnants comme une opportunité,
notamment en Chine et en Inde, qui représentent 31% et 30% de la
3
demande mondiale en 2012 . De même, les banques centrales émergentes
ont poursuivi leurs achats à un rythme soutenu, tandis que la Bundesbank
prenait la décision de rapatrier son or en dépôt à la réserve fédérale de
New York et à Paris.
Ce contraste entre la chute du cours de l’or et le maintien d’une demande
structurelle de long terme a donné lieu à de nombreuses interprétations. La
progression des emprunts d’or physique auprès des banques centrales a
relancé les interrogations sur l’adossement des produits indexés et les
risques d’engorgement (run) résultant d’une forte augmentation des
demandes de livraison d’or physique sur certains opérateurs d’importance
systémique. Dans ce contexte, les banques centrales ont été suspectées
d’intervenir pour peser sur les cours et faciliter l’alimentation des
demandes de rachat d’ETF-ETC.
Ces mouvements illustrent la dichotomie qui règne sur le marché de l’or,
entre une demande spéculative et une demande d’épargne de long terme.
Avec l’accélération de la hausse des cours, certains intervenants ont acheté
des ETF-ETC pour suivre la tendance, sans réflexion fondamentale sur la
place de l’or dans une allocation d’actifs. En sens inverse, ce sont eux qui
ont également contribué à la chute des prix. Cependant, le marché
bénéficie toujours du support structurel des acheteurs de long terme, qui
sont soutenus par des tendances de fond. Ainsi l’accroissement de la
volatilité induite par la présence de positions tactiques sur les ETF, ne remet
pas en cause la trajectoire à long terme du métal jaune.
1.2 Les sociétés aurifères font face à une recomposition du secteur.
Les entreprises
aurifères sont
contraintes de revoir
leurs capacités de
production à la
baisse.
La baisse du prix de l’or accélère la recomposition du secteur des sociétés
aurifères. Les producteurs ayant des coûts d’exploitation élevés ou engagés
dans des stratégies de croissance mal maîtrisées devront différer leurs
investissements, fermer des sites d’extraction ou vendre certains pans
d’activité. Les acteurs les plus flexibles bénéficieront d’un avantage
compétitif déterminant pour répondre à la demande.
1.2.1 Les producteurs ajustent leur stratégie à la baisse du métal.
La plupart des sociétés minières ne sont pas affectées par la baisse des
cours de l’or, dans la mesure où leur coût moyen de production demeure
inférieur au prix de l’or (Tableau 1). Cependant les coûts marginaux
d’extraction, qui intègrent les frais d’exploration et les nouveaux
investissements, sont nettement plus élevés.
De ce fait, si les cours de l’or devaient se maintenir durablement aux
niveaux actuels, certains producteurs seront obligés de redimensionner à
la baisse leur appareil de production. Les coûts opérationnels étant
3
Source : World Gold Council
Page |4
Les sociétés minières
diffèrent leurs
investissements et
révisent leurs projets
d’expansion.
difficilement compressibles, on devrait assister à un report des projets
d’investissement pour 2014 de la part des producteurs enregistrant les
coûts marginaux les plus élevés. Dans cette logique, un certain nombre de
sociétés minières ont ajusté leur politique de communication financière aux
attentes des analystes : Agnico Eagle-Mines a par exemple annoncé que
60% des projets d’investissement pour 2014 n’étaient pas encore acceptés.
De son côté, Goldcorp conditionne la poursuite de ses projets au maintien
des cours dans différentes fourchettes de prix.
La baisse du prix de l’or va également pénaliser les acteurs qui s’étaient
engagés dans des stratégies de croissance mal maîtrisées, financées par
endettement. Le report ou l’annulation des projets d’expansion n’allège pas
la pression sur des bilans fortement endettés. Pour certaines sociétés ayant
des ratios dette/EBITDA élevés, cette situation apparaît difficilement
durable et devrait entraîner une recomposition du secteur.
Tableau 1 : Production et coûts de production
Société
Top 3 mondial
Barrick
Newmont Mining
Anglo Gold Ashanti
Production Coûts totaux
en Moz
cash en $/oz*
7,4
5,0
3,9
Autres sociétés de taille importante
Goldcorp
2,4
Kinross Gold
2,6
Goldfileds
1,8
Harmony
1,3
IamGold
0,8
Sustaining
cash costs en CA 2012 en M$
$/oz*
EBITDA 2012
EBIT 2012
Capitalisation
boursière en M$
au 12/07/13
584
636
862
945
1149
1280
14547
9868
6353
51%
42%
37%
39%
32%
24%
14957
13685
4932
530
706
860
1001
715
874
1105
nd
nd
nd
5435
4311
3530
1953
1670
51%
46%
49%
28%
43%
39%
30%
35%
15%
33%
20879
5534
3922
1509
1630
* Les coûts totaux cash sont la somme des coûts de production hors amortissement, coûts d'exploration, administratifs et de structure.
** Les sustaining cash cost sont les coûts totaux cash plus les coûts d'exploration, administratifs et de structure et les dépenses d'investissement.
Source : Bloomberg, rapports annuels
1.2.2 Certains acteurs vont tirer parti de la contraction en cours.
La contraction des
marges profite aux
sociétés peu
endettées et ayant
un coût de
production faible.
Un petit nombre d’acteurs spécialisés apparaît en mesure de profiter de la
baisse des prix, en continuant à écouler leur production tout en jouant le
rôle de consolidateurs dans l’industrie. C’est le cas notamment de sociétés
produisant de l’or à faible coût, peu endettées et ayant un outil de
production largement amorti. Beaucoup de sociétés aurifères restées à
l’écart de la vague de fusions-acquisitions qui a animé le secteur au cours
des dernières années, ont des bilans sains et sont en mesure de secréter
des flux de trésorerie nets réguliers même si l’or devait durablement rester
aux prix actuels. A long terme la contraction des marges va ainsi conduire à
une optimisation des processus de production qui profitera aux acteurs les
plus diversifiés et les plus flexibles. A court terme, en revanche, la
contraction de l’offre pourrait notamment annoncer des tensions sur les
prix, d’autant que les facteurs structurels de la demande sont toujours
actifs.
Page |5
2.
L’investissement en or demeure soutenu par des tendances lourdes.
2.1 Les grandes démocraties avancées durablement engagées dans des
politiques monétaires expansionnistes.
Les bénéfices à long
terme de la sortie des
politiques
expansionnistes
pèsent peu par
rapport aux gains
immédiats et
tangibles qu’elles
procurent.
Si la perspective d’une fin des mesures monétaires expansionnistes a
occupé l’actualité des marchés financiers au cours des dernières semaines,
les banques centrales et les autorités sont particulièrement attentives aux
dangers d’une sortie prématurée des politiques « non conventionnelles »,
en raison des risques qu’elle fait peser sur les marchés de taux et de
change. Dans les grandes démocraties d’opinion, les bénéfices à long
terme qu’entraînerait l’abandon des politiques de création monétaire
pèsent peu par rapport aux gains immédiats et tangibles qu’elles
procurent, même si l’efficacité marginale des décisions va décroissant.
Les grandes banques centrales demeurent ainsi durablement engagées
dans des programmes de soutien, adaptés à leur culture et à leur zone
monétaire. Dans les pays ayant connu une phase d’expansion financière et
une bulle immobilière (Etats-Unis, Grande-Bretagne, Japon des années
1990), elles poursuivent de vastes programmes d’achat de titres de dette à
long terme des secteurs public et privé, dans l’espoir de susciter une
stimulation de la consommation et une transmission du crédit à l’économie
réelle, tandis qu’en zone euro, la Banque Centrale Européenne (BCE) s’est
essentiellement consacrée à préserver la solvabilité des banques et à
soutenir la liquidité des marchés de la dette souveraine.
Une contraction
massive des effets de
levier n’est
envisageable que
dans des petites
économies.
Il est peu probable que les autorités monétaires procèdent à une révision
majeure de leurs politiques. Une contraction massive des effets de levier et
de la dette est envisageable dans des petites économies (Suède, Danemark
dans les années 1990) ou dans des grandes économies faiblement
endettées. Vu les niveaux actuels d’endettement public et privé, elle est
politiquement impossible aux Etats-Unis, en Grande-Bretagne ou en
France. Dans ces conditions, les politiques visant à alléger le poids de la
dette par l’inflation devraient se poursuivre, sous différentes formes
d’interventionnisme financier : suppression de l’indexation des pensions et
des barèmes, ancrage des taux administrés à un niveau inférieur à
l’inflation, incitation à la détention d’obligations d’Etat à taux fixe, fixation
d’objectif de PIB en valeur nominale, etc. D’autres pistes encore plus
radicales ont été évoquées, comme la monétisation de toutes les dettes
bancaires.
Cet environnement est particulièrement favorable à l’or. Dans une
collectivité où l’Etat obtient toutes ses ressources nécessaires par escompte
de bons du Trésor à l’institut d’émission, les apparences monétaires
prennent la place des réalités économiques. Inéluctablement, le
financement du déficit par la création monétaire conduit à l’inflation de la
dette : la monnaie perd de sa valeur par rapport aux autres devises et
toutes se déprécient par rapport à l’or, qui est la devise ultime, la seule
monnaie qui ne dépend d’aucun Etat, qui n’est portée par aucune opinion
publique.
Page |6
2.2 Les déséquilibres financiers se creusent.
Le risque de
nouvelles crises
bancaires ne peut
être écarté d’emblée,
entraînant une
contribution directe
des plus gros
déposants, suivant le
modèle du « bail-in »
imposé en zone euro.
Les actifs financiers
dont les prix ont été
gonflés par les
politiques
monétaires sont les
plus sensibles aux
retournements.
Les banques
centrales émergentes
poursuivent leurs
achats.
Les politiques d’achat de titres publics, couplés avec le maintien des taux
directeurs au plancher et le reflux des capitaux vers des places réputées
sûres, ont entraîné une forte appréciation des obligations, des actions et de
l’immobilier. Comme dans les années qui ont précédé la crise financière, les
grandes banques centrales ajustent leur politique de communication aux
attentes des marchés financiers. Le caractère autoréférentiel du système
conduit à une mauvaise allocation de capital vers certains actifs et une
nouvelle expansion de la titrisation, notamment sur le marché de
l’immobilier. En cas de retournement de la tendance, les actifs financiers
seront les plus vulnérables. Compte tenu des effets de levier accumulés
dans le système financier et de l’exposition des principaux acteurs à la
dette souveraine (particulièrement en Europe), le risque de nouvelles crises
bancaires ne peut être écarté d’emblée, entraînant une contribution directe
des plus gros déposants, suivant le modèle du « bail-in » imposé en zone
euro.
Dans cette situation, il convient d’avoir des actifs qui ne sont pas dans le
système bancaire, qui ne comportent aucun risque de crédit. L’or alloué,
conservé sous dossier hors du bilan des banques, constitue par nature le
seul actif financier qui remplit toutes ces qualités.
2.3 Les banques centrales émergentes diversifient leurs réserves.
Face aux politiques monétaires expansionnistes des grandes économies
avancées, les banques centrales des pays émergents poursuivent une
politique d’accumulation
Tableau 2 : réserves en or des banques centrales
de réserves pour lutter
Tonnes
% des réserves
contre l’appréciation de
1
Etats-Unis
8 133,5
76%
leur monnaie. Le total des
2
Allemagne
3 391,3
72%
réserves a atteint ainsi en
3
FMI
2 814,0
n.a.
décembre 2012 le niveau
4
Italie
2 451,8
72%
record de 7335 milliards
5
France
2435,4
70%
de dollars, soit 67% des
6
Chine
1 054,1
2%
réserves mondiales.
7
Suisse
1 040,1
10%
8
Russie
981,6
9
Japon
765,2
10
Pays-Bas
612,5
11
Inde
557,7
12
BCE
502,1
13
Taiwan
423,6
14
Turquie
408,9
15
Portugal
382,5
Source : World Gold Council
10%
3%
59%
10%
33%
5%
17%
90%
L’or ne représente encore
qu’une petite fraction des
réserves des banques
centrales émergentes, à
l’aune des quantités d’or
détenues par les banques
centrales
des
pays
développés.
Pour des raisons historiques, les banques centrales
émergentes, de création récente, ont en priorité constitué des réserves de
change en devises. Ce n’est que récemment qu’elles ont entrepris une
stratégie de diversification de leurs réserves. Les pays émergents ont ainsi
mis à profit la baisse récente de l’or pour réaliser de nouveaux achats.
Page |7
3.
Un équilibre tendu entre la production et la demande.
3.1 L’offre.
Une grande partie de
l’or est déjà en
circulation.
Le prix de l’or est
moins sensible à la
production minière
que d’autres types de
marchandises.
4
Depuis que l’or n’a plus de prix officiel , son prix se forme librement sur le
marché ou les possesseurs du métal cherchent à en tirer le meilleur parti
possible. Les variations de prix du métal jaune résultent ainsi de différents
facteurs : ses usages industriels, son usage monétaire et sa capacité à
constituer une réserve de pouvoir d’achat pour les agents économiques.
Dans la mesure où l’or est recherché par lui-même en tant qu’instrument
général d’acquisition et de réserve, l’analyse de l’offre doit prendre en
compte le fait qu’une grande partie de l’or existant est déjà en circulation,
essentiellement sous forme de barres ou de lingots. Du fait de son usage
monétaire et de sa capacité de constituer une réserve de pouvoir d’achat,
le prix de l’or est ainsi moins sensible que d’autres marchandises aux
mouvements qui affectent la production minière.
La quantité d'or extraite depuis les origines est estimée, fin 2010, à 166 kt,
ce qui correspond à un volume représenté par un cube d'environ vingt
mètres d'arête. En comparaison, les réserves minières estimées en 2012
(tableau 3) s'établissaient à 51 820 tonnes d’or.
Tableau 3 : réserves minières d'or par pays en tonnes
Pays
2012
en %
Australie
7 400
14%
Afrique du Sud
6 000
12%
Russie
5 000
10%
Chili
3 900
8%
Etats-Unis
L
Indonésie
e
s
Brésil
3 000
6%
3 000
6%
2 600
5%
Pérou
2 200
4%
d
Chine
1 900
4%
é
Ouzbékistan
1 700
3%
s
Ghana
1 600
3%
é
q
Mexique
1 400
3%
u
Papouasie-Nouvelle-Guinée
1 200
2%
i
Canada
920
2%
l
Autres
pays
10 000
19%
i
b
Total Monde
51 820
100%
r
e
s
Compte
tenu de la taille des réserves en or monétaire et de l’or thésaurisé
par les particuliers, la part de la production minière (tableau 4) dans la
f
formation
des prix de l’or doit être relativisée.
i
n
4
Sous le régime de Bretton-Woods,ajusqu’en août 1971, la stabilité de l’or résultait de sa convertibilité dollar.
n
c
i
e
r
s
Page |8
Tableau 4 : production minière d'or par pays en
tonnes
La production
minière a moins
d’incidence sur la
formation des prix
que par le passé.
Pays
2011
2012
en %
Chine
362
370
14%
Australie
258
250
9%
Etats-Unis
234
230
9%
Russie
200
205
8%
Afrique du Sud
181
170
6%
Pérou
164
165
6%
Canada
97
102
4%
Indonésie
96
95
4%
Ouzbékistan
91
90
3%
Ghana
80
89
3%
Mexique
84
87
3%
Papouasie-NouvelleGuinée
66
60
2%
Brésil
62
56
2%
Chili
45
45
2%
Autres pays
640
645
24%
2 660
2 659
5%
Total Monde
Longtemps premier producteur
mondial d'or, l'Afrique du Sud a
été détrônée en 2007 par la
Chine, qui conforte depuis lors
sa première place par la
découverte de filons
importants, assurant 14 % de la
production mondiale en 2012,
devant l'Australie, les ÉtatsUnis, la Russie, l’Afrique du Sud
et le Pérou.
Source : USGS
Même si la production minière représente une part importante de l’offre, à
côté du recyclage (tableau 5), elle a aujourd’hui peu d’impact sur la
5
formation des prix .
Tableau 5 : offre d'or en tonnes
Production minière
2011
2 849
2012
2 817
en % du total 2012
64%
Or recyclé
Total offre
1 649
4 498
1 591
4 408
36%
100%
Source : World Gold Council. Les chiffres du World Gold Council diffèrent de ceux de l’USGS sur le niveau de la production minière.
3.2 La demande.
La demande d’or
investissement
demeure minoritaire.
L’analyse de la demande d’or, telle qu’elle ressort des chiffres officiels,
apporte également peu d’informations sur les facteurs profonds du
marché : s’il existe une demande permanente de métal jaune pour ses
usages industriels, le principal soutien de la demande n’est pas la joaillerie,
la dentisterie ou l’électronique. A la différence des autres matières
premières l’or est une devise. Par ses qualités naturelles (acceptabilité
indéfinie dans l’espace, inaltérabilité dans le temps, fongibilité), il remplit
5
Il n’en a pas été de même dans le passé où les découvertes et l’exploitation de nouvelles mines ont influé profondément sur la
valeur de l’or. Ainsi, l’accroissement imprévu de la production d’or dans les mines de Californie (à partir de 1849) a conduit à la
généralisation de l’étalon – or au XIXème siècle. De même, l’exploitation des mines du Transvaal (à partir de 1890) a pallié les
effets de la baisse des prix mondiaux entre 1873 et 1895 et a conduit à une nouvelle phase d’extension de l’étalon-or. Les effets
des découvertes d’or sur les variations des prix et l’évolution des systèmes monétaires sont bien décrits dans le Précis des
Mécanismes Economiques Elémentaires de C. Rist.
Page |9
L
toutes les conditions d’un moyen de paiement en dernier recours. Partant,
l’analyse des chiffres de la demande d’or (tableau 6) offrent en soi un
intérêt limité, même si on remarque le poids important de la demande dite
« d’investissement », qui est vraisemblablement sous-estimé dans la
mesure où les emplois en bijouterie / joaillerie répondent également à des
soucis de protection financière.
Tableau 6 : demande d'or en tonnes
Secteurs
2011
2012
en % du total 2012
Bijouterie
1 975
1 895
43%
452
408
9%
- Electronique
320
285
7%
- Autre industrieL
89
84
2%
e
Investissement s
43
39
1%
1 699
1 526
35%
Technologie
- Dentisterie
- Demande total d'or en barres et en pièces
1 513
1 247
29%
- ETF et autres produits similaires
185
279
6%
Achats net des banques centrales
457
533
12%
4 582
4 362
100%
-84
46
4 498
4 408
.
Demande d'or
Investissements OTC et flow de stock*
Total demande
Source : USGS
Page |10
4. Un marché déconnecté des stocks d’or physique ?
4.1 Un marché concentré dans un petit nombre d’acteurs.
Comme au temps de l’étalon-or, Londres demeure la première place
financière pour le négoce du métal jaune. Trois acteurs jouent un rôle
déterminant dans l’organisation du marché : la London Bullion Market
Association (LBMA), les bullion banks, principales banques privées actives
sur le marché de l’or, et les banques centrales.
4.1.1 La LBMA.
Depuis le XIXème
siècle, la place de
Londres demeure le
centre des
transactions sur l’or.
La London Bullion Market Association est un organisme
professionnel chargé de représenter les intervenants du
marché de gros pour l’or. Créée en 1897 sous l’impulsion de
la Banque d’Angleterre, elle rassemble les principales
parties-prenantes:
banques,
fondeurs-affineurs,
transporteurs, courtiers, négociants. La LBMA édicte en
particulier les normes professionnelles suivant lesquelles l’or peut être
négocié sur le marché international (poids, teneur, volume, origine,
modalités de transport et de conservation des matières d’or). Elle établit
une liste des fondeurs-affineurs labellisés (good delivery list – GDL) et tient
à jour une sélection d’intermédiaires (banques, courtiers, conservateurs,
transporteurs de fonds), habilités à intervenir sur le marché de l’or. Le
marché physique fonctionne ainsi en vase clos : lorsqu’une barre sort de la
« chaine d’intégrité » constituée par les membres de la communauté LBMA
(en étant livrée par exemple à un particulier), elle perd l’accréditation «
good delivery » et se négocie à un prix inférieur au cours officiel. La barre
ne peut retourner sur le marché professionnel qu’à la condition de faire
l’objet d’une nouvelle procédure de certification, coûteuse, et à l’entière
charge du propriétaire.
6
Parmi les banques membres de la LBMA, un petit groupe compose la
London Gold Market Fixing, chargée de fixer quotidiennement le cours
officiel de l’or.
4.1.2 Les bullion banks.
Les bullion banks et
les banques centrales
ont un poids
déterminant.
Les bullion banks sont les principales banques actives sur le marché de gros
de l’or : Barclays Bank PLC, Scotia Bank, Deutsche Bank, HSBC, JP Morgan
Chase, UBS AG. Elles agissent comme intermédiaires et commercialisent
également des produits indexés sur le prix de l’or (ETF, ETC). HSBC Bank
(USA) et JP Morgan Chase assurent ainsi la garde et la gestion des plus
gros trackers de métaux précieux dans le monde (SPDR Gold Shares,
iShares Silver Trust).
Les bullion banks disposent de relations privilégiées avec les banques
centrales qui mettent à leur disposition leurs stocks d’or. Elles interviennent
6
Barclays Capital, Scotia Bank, HSBC, Deutsche Bank, SGCIB.
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sur le marché à terme du CME et entrent dans des contrats de swap avec
les banques commerciales en quête de sûretés pour obtenir de la liquidité
sur le marché.
4.1.3 Les banques centrales.
e manque de
transparence sur les
prêts d’or par les
banques centrales et
les conflits d’intérêt
auxquels sont
exposés les bullion
banks ont donné lieu
à de multiples
critiques.
Les banques centrales sont un acteur majeur du marché de l’or. Principaux
détenteurs des réserves d’or (et dépositaires d’or pour compte d’Etat tiers),
elles consentent des prêts d’or aux bullion banks dans le cadre de contrat
de prêts bilatéraux, en échange de garanties. Tout au long des années
1990, elles ont ainsi prêté leurs stocks d’or pour dégager du rendement et
couvrir les frais inhérents à la conservation du métal. Les banques
centrales, et en particulier le système fédéral de réserve américain,
disposent donc de puissants leviers pour participer indirectement à
l’élaboration des prix de marché et, en particulier, freiner une appréciation
trop rapide du prix de l’or en mettant leur stock de métal à la disposition
des bullion banks.
4.2 Un marché dirigé par les ordres.
Les transactions sur or se font de gré à gré (OTC) et se traitent en once d’or
7
fin, unité de poids historique du métal jaune . Le marché est dirigé par les
8
ordres et, en pratique, seule une très faible quantité des onces d’or
acquises donne lieu à une conversion en métal, sous la forme de barres ou
9
de lingots .
L’absence d’information sur les prêts d’or consentis par les banques
centrales, la relation privilégiée entre ces dernières et les bullion banks qui
cumulent des fonctions de garde, d’intermédiation et de commercialisation
(via les ETF) ont donné lieu à de nombreuses critiques portant sur le
manque de transparence du marché.
7
L'once de Troyes (symbole oz, troy ounce en anglais) est l’unité de mesure traditionnellement utilisée dans les pays anglosaxons pour les métaux précieux comme l'or ou l'argent, ou pour les pierres précieuses. Une once est équivalente à 31,1034768
grammes.
8
Les membres de la London Gold Market Fixing se réunissent deux fois par jour via une conférence téléphonique pour fixer le
cours de l’or. Au début de chaque fixation, le président annonce un prix. Les membres transmettent ce prix à leurs clients, et, sur
la base des ordres qu’ils reçoivent, doivent se déclarer acheteur ou vendeur. S’il y a des contreparties acheteuses et vendeuses
au prix indiqué, les clients doivent préciser le nombre de barres pour lesquelles ils se portent acquéreurs. Les clients peuvent
passer des ordres avant l’ouverture de la séance ou pendant la séance, durant laquelle ils sont tenus informés des évolutions du
cours et peuvent modifier leurs ordres en conséquence. Le cours varie au gré de la rencontre de l’offre et de la demande jusqu’à
ce que l’équilibre soit atteint. Le président déclare l’équilibre réalisé et la session close lorsque la différence entre les positions
acheteuses et les positions vendeuses qui se rencontrent est inférieure à 50 barres. Le prix convenu à l’équilibre devient le cours
officiel.
9
A côté des places traditionnelles du marché de l’or (Londres, New-York), il existe également une bourse spécialisée sur l’or à
Shanghai (Shanghai Gold Exhange, SGE). Le marché est dirigé par les prix, les transactions portent sur des barres ou des lingots
individualisé par leur teneur et leur poids et donnent fréquemment lieu à une livraison sous forme physique. Le prix de l’or à
Shanghai incorpore donc une prime de conversion (environ 1,5%) par rapport à l’or « notionnel » traité à Londres ou sur le
COMEX. Toutefois, le SGE ne représente que 4% (avril 2013) des volumes traités sur le COMEX.
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4.3 Un risque de dislocation entre l’or papier et l’or physique.
Sur les marchés de
gros, seule une petite
partie des onces sont
converties en or
physique livré sous
dossier.
L’évolution des taux
d’emprunt de l’or
physique auprès des
banques centrales
reflète une tension
sur le marché.
La détention directe
d’or alloué sous
dossier constitue la
solution la plus
protectrice pour
l’investisseur à long
terme.
Sur les grands marchés de gros, les onces d’or ne donnent que rarement
lieu à une opération de conversion en métal, sous formes de barres ou de
lingots. En pratique, seule une faible partie des transactions se traduit par
10
le transfert et la remise d’un stock d’or physique alloué sous dossier .
Comme dans le système de réserves fractionnaires, les bullion banks auprès
desquelles sont ouverts des comptes d’or non alloué n’ont pas l’obligation
de conserver dans leurs livres la quantité d’or fin correspondant aux dépôts
effectués dans les comptes non alloués. Il existe donc un risque que l’or
physique détenu en représentation des comptes non alloués ne soit pas
suffisant pour que les banques honorent leurs engagements.
Pour faire face à cette difficulté, les bullion banks peuvent emprunter des
stocks d’or auprès des banques centrales, dans le cadre de contrats de
11
prêts collatéralisés . Le nombre d’onces d’or traitées est ainsi
vraisemblablement très supérieur au stock d’or effectivement disponible
dans les bullion banks. En outre, le même stock d’or peut avoir été prêté
plusieurs fois et servir de base à l’émission de différentes promesses sous
forme de titres indexés.
Dans les périodes normales, ce décalage ne soulève pas de difficultés et les
bullion banks gèrent leurs positions en fonction des demandes probables
de conversion en or physique. Cependant, en cas de pic des demandes de
conversion, les bullion banks se retournent vers les banques centrales pour
obtenir les quantités additionnelles d’or physique, entraînant un effet
d’engorgement. Différents opérateurs de marché ont ainsi observé que les
taux d’emprunt de l’or auprès des banques centrales sont passés en
territoire négatif au cours de la période récente ce qui implique que les
bullion banks sont prêts à payer une prime pour obtenir de l’or physique.
Ces mécanismes de prêts, qui sont vraisemblablement régulièrement
renouvelés du fait du caractère systémique des bullion banks, nourrissent
également une inquiétude sur la réalité des stocks d’or physique des
banques centrales. Ainsi, le délai de trois ans fixé pour transférer 300
tonnes d’or de la Réserve fédérale de New-York aux coffres de la
Bundesbank à Francfort a donné lieu à de nombreuses interrogations.
L’importance des opérations ne donnant pas lieu au transfert effectif d’or
physique (ventes d’onces non allouées, prêts, swap, achats et ventes à
10
Les onces d’or peuvent s’acheter via des comptes alloué ou non-alloué. L’or non-alloué constitue une créance exigible sur le
bilan d’un tiers (généralement une banque), prenant la forme d’une écriture comptable suite à l’ouverture d’un compte.
L’investisseur n’est pas propriétaire d’or physique, mais titulaire d’une créance, reconnue par un solde créditeur dans les livres de
la banque. L’or non alloué comporte donc un risque de crédit sur le bilan de la banque. L’or alloué, ou sous dossier, se présente
sous la forme de barres identifiées ou de lingots dont la propriété effective est reconnue à l’investisseur. Lorsqu’il est inscrit sous
dossier en conservation dans une banque (comme c’est le cas général), cet or est exclu du bilan de la banque, selon le principe
de la ségrégation des avoirs. La détention d’or alloué sous dossier offre donc un niveau de protection supplémentaire par
rapport à la détention d’or non alloué ; elle implique également des frais supplémentaires (stockage, assurance, manutention),
qui se traduisent par une prime de conversion (environ 1 USD par once d’or).
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Les banques centrales prêtent leur or aux bullion banks en échange d’un dépôt sur lequel elles payent un intérêt aux bullions
banks, le Gold Forward Offered Rates (GOFO). La banque centrale prête sur le marché les liquidités reçues en garantie et dégage
généralement un profit égal au taux du marché, minoré du GOFO, le lease rate.
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terme) plaident donc fortement en faveur de la détention directe d’or
alloué sous dossier.
5.
Comment investir en or.
En pratique, il n’y a que deux façons d’avoir un droit de propriété sur un
stock d’or : acheter directement de l’or ou investir en sociétés aurifères.
Toutes les autres solutions (trackers, ETC, comptes d’or non alloué)
comportent un risque de liquidité et de crédit sur un émetteur bancaire.
5.1 La détention en direct.
Les particularités du marché de l’or plaident pour une détention en direct,
sous la forme de barres de bonne livraison au sens de la LBMA ou de
lingots dont les fondeurs – affineurs sont agréés par la LBMA. Pour garder
toute leur valeur de négociation, ces matières d’or devront être conservées
par des acteurs habilités, ce qui exclut en pratique leur maniement en
direct.
Au-delà de certains montants, il est opportun de passer par les marchés de
gros, où les coûts d’intermédiation sont plus faibles. L’intervention d’un
établissement dépositaire, responsable de la conservation et de la
restitution des avoirs, apparaît également indispensable.
5.2 L’investissement en actions aurifères.
Le placement en valeurs aurifères permet de disposer de la propriété de
réserves d’or, dans une logique d’investisseur à long terme, en étant
associé à une stratégie de management (recherche de gains de
productivité, croissance externe, politique financière, etc.).
Un tel investissement nécessite une expertise qualifiée. En plus des
problématiques financières, de l’analyse de la gestion de la société et de
ses choix stratégiques, viennent s’ajouter la compréhension de procédés
technologiques toujours plus complexes, de leur valeur ajoutée, des enjeux
géopolitiques et sociaux, de la demande pour ces matières à l’échelle
mondiale. L’investissement en actions nécessite un processus de gestion
rigoureux qui envisage toutes ces problématiques.
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