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Le cycle des marées pourrait ampli er l’élévation
du niveau des mers liée au réchauffement climatique
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Fiche n°295 - Avril 2008
L’une des conséquen-
ces bien connue du
réchauffement climatique
est l’élévation du niveau
des mers liée à l’aug-
mentation de la tem-
pérature de l’océan, ce
dernier se dilatant sous
l’effet de la chaleur. Il est
toutefois dif cile de pré-
voir comment celle-ci se
répartira à l’échelle de la
Planète. D’autres phéno-
mènes naturels comme
la tectonique des pla-
ques peuvent favoriser
un soulèvement ponc-
tuel du plancher océani-
que, minimisant ainsi les
effets du réchauffement
climatique sur la dilata-
tion des océans. Dans un
laps de temps beaucoup
plus court, le cycle des
marées in uence égale-
ment la variation du ni-
veau des mers. A partir
d’images satellite des
côtes de la Guyane fran-
çaise, obtenues entre
1986 et 2006, une équipe
internationale1, impulsée
par l’IRD, a pu mesurer
l’implication, dans cette
hausse, d’un cycle bidé-
cennal2 des marées et en
déduire des scénarios
à l’échelle de la planète.
D’après leur analyse,
sur certaines côtes ré-
putées pour l’amplitude
spectaculaire de leurs
marées, comme la baie
du Mont Saint-Michel,
ce phénomène devrait,
au cours de la prochai-
ne décennie, contribuer
beaucoup plus à l’éléva-
tion du niveau des plei-
nes mers que le seul
ré-
chauffement climatique.
Lors de la seconde pha-
se du cycle, il pourrait
ensuite la compenser
de manière signi cative.
Les résultats de plusieurs études
scienti ques, menées depuis 1993,
con rment une augmentation de 3,2
centimètres du niveau des océans.
Même si cette variation peut sembler
négligeable, elle s’avère en réalité deux
fois plus importante que celle enregistrée
sur l’ensemble du siècle précédent. Cet-
te élévation du niveau des mers est une
conséquence du réchauffement climati-
que. Lorsque la température de l’océan
augmente, celui-ci se dilate et occupe
donc un volume plus important. Alors que
ce phénomène est désormais bien connu
des scienti ques, d’autres processus
moins étudiés, comme le cycle des ma-
rées, semblent contribuer tout autant, à
l’échelle de la planète, aux modi cations
du niveau des océans. En comparant
une série d’images satellite collectées à
intervalles réguliers sur une période de
20 ans, une équipe coordonnée par des
chercheurs de l’IRD a mesuré la contri-
bution du cycle bidécennal des marées
aux variations globales du niveau des
mers. Dans un premier temps, les scien-
ti ques se sont focalisés sur les 350 ki-
lomètres de côte de la Guyane française
qui s’avèrent très propices à l’observa-
tion du phénomène. Cette région est en
effet vierge de toute activité humaine
et apporte l’assurance que l’observa-
tion de la moindre modi cation du trait
de côte est d’origine naturelle. La zone
géographique est par ailleurs couverte
d’un écosystème de mangroves dont
la frange côtière réagit presque immé-
diatement aux uctuations océaniques.
A partir de 60 images prises par les sa-
tellites Spot, Landsat, ASAR et JERS,
l’étude a permis de suivre l’évolution de
la mangrove sur une période allant de
1986 à 2006, soit un cycle bidécennal
des marées complet. Parallèlement et
sur cette même période, des satellites
d’altimétrie (données Ssalto produites
par AVISO) ont permis de mesurer l’évo-
lution du niveau des mers. En croisant
les données issues de ces deux types
d’appareils, les scienti ques ont pu dé-
terminer l’implication du phénomène
dans la physionomie du littoral. D’après
leur analyse, l’augmentation de 3% de
l’amplitude des marées sur la côte de
la Guyane française, ainsi que sur l’en-
semble des 1500 km de côte du plateau
des Guyanes, a provoqué une érosion
du littoral de plus de 100 mètres pendant
© IRD / Nicolas Gratiot
La mangrove recouvre la quasi-totalité des côtes guyanaises.
Grégory Fléchet, coordinateur
Délégation à l’information et à la communication
Tél. : +33(0)1 48 03 76 07 - fax : +33(0)1 40 36 24 55 - [email protected]
Pour en savoir plus
Fiche n°295 - Avril 2008
RELATIONS AVEC LES
MÉDIAS :
GAËLLE COURCOUX
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INDIGO,
PHOTOTHÈQUE DE
L’IRD :
DAINA RECHNER
+33 (0)1 48 03 78 99
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les dix premières années du cycle. La di-
minution de 3% au cours de la deuxième
moitié du cycle a ensuite permis une ré-
génération de la mangrove synonyme
d’une avancée de la côte. L’étude révèle
également que 75 % de l’augmentation
du niveau des pleines mers enregistrée
pour cette zone côtière lors des dix pre-
mières années du cycle, serait directe-
ment imputable au cycle des marées.
Sur la côte du plateau des Guyanes, le
marnage, c’est-à-dire la différence de
hauteur d’eau entre la marée haute et
la marée basse, est relativement faible
puisqu’il s’établit en moyenne autour de
deux mètres. Dans ce contexte, il est pré-
vu que l’élévation du niveau des pleines
mers, directement liée au cycle bidécen-
nal, n’excède pas quelques centimètres
entre 2006 et 2015. Elle devrait donc être
du même ordre que la hausse du niveau
des mers liée à la dilatation de l’océan.
En extrapolant les résultats obtenus
pour la côte du plateau des Guyanes,
les scienti ques ont pu nalement es-
timer l’impact du cycle des marées sur
la montée des eaux à l’échelle de la
planète (voir carte). Il existe des zones
côtières où le marnage est d’ampleur
beaucoup plus spectaculaire que sur les
côtes guyanaises. Au Mont Saint-Michel,
il peut par exemple dépasser 12 mètres
et dans la baie d’Ungava, située sur la
côte Est du Canada, où l’on enregistre la
plus forte amplitude de marées au mon-
de, il atteint jusqu’à 20 mètres. Dans ces
régions, le cycle bidécennal des marées
pourrait, d’ici 2015, provoquer une éléva-
tion du niveau des pleines mers de plus
de 50 centimètres, soit vingt cinq fois
plus importante que la montée des eaux
liée à l’expansion thermique de l’océan
consécutive au réchauffement climati-
que global. Sur la période 2015-2025, la
deuxième phase de ce cycle contribuera
à une diminution régulière du niveau des
pleines mers. A l’échelle de la planète, il
pourrait alors compenser, en partie, les
effets de la montée des eaux consécu-
tive au réchauffement climatique. Grâce
à une meilleure prise de conscience du
phénomène cyclique des marées, qui est
probablement l’un des plus prévisibles
au monde, ces travaux devraient per-
mettre, au cours des deux prochaines
décennies, de mieux comprendre la
géomorphologie côtière et en particu-
lier le phénomène d’érosion du littoral.
Rédaction DIC – Grégory Fléchet
1. Ces travaux ont été menés
en collaboration avec l’Univer-
sité de Dunkerque, l’Institut na-
tional de recherche agronomi-
que (INRA) et le Virginia Institute
of Marine Science (Etats-Unis).
2. Il s’agit d’un cycle des marées
s’établissant exactement sur 18,6
ans au cours duquel le niveau
moyen des pleines mers augmente
de 3% par an pendant la première
moitié de ce cycle puis diminue
de 3% les 9 années suivantes.
CONTACT :
NICOLAS GRATIOT
Laboratoire d’étude
des transferts en
hydrologie et
environnement (LTHE)
Adresse : LTHE
1023-1025 rue de la
piscine
Domaine universitaire
BP 53
38041 Grenoble cedex 9
France
Tél : (+52-443) 322 27
77 (extension 42631)
RÉFÉRENCE :
N. GRATIOT, E. J. AN-
THONY, A. GARDEL, C.
GAUCHEREL, C. PROISY,
J. T. WELLS, Signi -
cant contribution of
the 18.6 year tidal cy-
cle to regional coas-
tal changes, Nature
Geoscience, volume 1,
mars 2008
Doi : 10.1038/ngeo127,
Letter
MOTS CLÉS :
Marée, réchauffement
climatique, Guyane,
érosion littorale
Augmentation, d’ici 2015, du niveau moyen des pleines mers liée au cycle bidécennal des marées.
© IRD / Nicolas Gratiot
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