M. Benabbas

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ABORD
COMPORTEMENTAL DE LA
DOULEUR CHRONIQUE
M. BENABBAS.
O. BENELMOULOUD
INTRODUCTION.
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D’après l’IASP (International Association for the Study of
Pain), « la douleur est une expérience sensorielle et
émotionnelle désagréable, liée à une lésion tissulaire réelle ou
potentielle, ou décrite en termes d'une telle lésion»
L'évaluation et le diagnostic de la douleur étant complexe,
l'IASP précise bien, notamment en ce qui concerne la douleur
chez l'enfant, que « L'incapacité à communiquer verbalement
n'infirme pas la possibilité que l'individu éprouve de la douleur
et nécessite un traitements approprié pour soulager la
douleur. La douleur est toujours subjective ...
La prise en charge des syndromes douloureux chroniques est
également un enjeu.
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En effet en raison des comorbidités, en terme économique
puisque le rapport NICE publié en 1999 chiffre l'importance
pour la population générale et la santé publique l'ampleur de
la douleur chronique et notamment au regard du marqueur
QUALY ou point de qualité de vie de la population.
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Ce rapport souligne l'impact sur la qualité de vie de la
population qui présente des douleurs chroniques.
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Dans l’expérience de la douleur, douleur et angoisse sont difficiles à
distinguer, dans la mesure ou la douleur a une certaine valeur de
survie: elle représente véritablement un avertissement que la mort
peut survenir d’un moment à l’autre, elle entraîne de ce fait une
réaction très anxiogène en cas de douleur aiguë, et une véritable
situation de « stress » en cas de douleur chronique.
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Dans la douleur chronique, le patient la repère comme une menace
pour sa survie et pour son intégrité, percevant qu’il n’a aucun moyen
pour résoudre cette menace, les facteurs psychologiques et
émotionnels vont prendre une place de premier plan dans l’expérience
douloureuse avec une connotation essentiellement dépressive.
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Pour les comportementalistes la maladie sera considérée comme un
comportement individuel qui aboutit à un rôle psychosocial, celui de
malade, mais qui a des antécédents et des conséquences
psychologiques, sociales et biologiques ( Cottraux).
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En ce qui concerne la douleur, elle sera considérée comme un
comportement et en tant que tel, soumis aux lois de l’apprentissage
que celles qui gèrent d’autres comportements.
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La question qui reste à poser est de spécifier l’interaction qui se joue
entre la personne douloureuse et son environnement.
TYPES DE DOULEURS
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Un comportement répondant apparaît en réponse à un stimulus
spécifique, ainsi une douleur répondante est une douleur qui apparaît
de manière automatique consécutivement à un stimulus douloureux,
comme pousser un cri après s’être cogner la tête.
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Un comportement opérant est produit par des stimuli spécifiques,
mais il est sensible à l’influence de facteurs survenant pendant et
consécutivement à la présentation du stimulus, selon que les
conséquences sont positives ( si l’on me montre de l’attention quand
je me fais mal ) ou négatives ( si l’on me rabroue quand je me plains
), et la probabilité d’apparition du comportement dans le futur sera
augmentée ou diminuée.
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Ainsi un comportement opérant peut être accru en intensité et
fréquence par les conséquences systématiquement positives
qui suivent son occurrence.
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Une douleur opérante est donc une douleur contrôlée par des
renforçateurs environnementaux et nous considérons que la
douleur chronique est de type opérant, et si un comportement
se maintient tel la DC, il faudra se poser la question de ses
sources de maintien et de renforcement.
TYPES DE RENFORCEMENT DE
LA D.C
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Parmis les facteurs de renforcement direct, on peut
souligner l’attention sélective de l’entourage, des marques
d’attention de tendresses qui apparaissent uniquement quand
la personne souffre, de même certaines personnes ont un
environnement social tellement limité que les seuls contacts
qui leurs restent sont des contacts avec le corps médical et
pour ne pas les perdre, le patient ne pourra se passer de sa
douleur.
Certains avantages financiers que certaines personnes
peuvent tirer d’un problème chronique ( indemnités
financière++) qui vont d’une certaine manière ne pas
encourager le patient à s’amélioré.
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Les facteurs de renforcement indirects, pour la douleur sont
qu’indirectement cette douleur peut permettre au patient d’éviter
certaines situations qui étaient anxieuses pour lui, cela peut être son
travail, des relations difficiles avec les autres, et le soulagement lié à
ce non affrontement des situations va donner une valeur toute
particulière à la douleur.
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Le non renforcement des comportements sains, dés que certains
patients s’engagent dans des activités positives pour eux ( essais de
marche, de faire des courses..) l’environnement familial leur fait très
vite remarquer « pour faire ceci tu n’est pas malade.. » ne laissant
au patient aucun autre choix que de recouvrer son statut de malade.
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L’importance du modeling ou d’imitation peut avoir un impact au
niveau de la DC, en effet les individus ont une tendance naturelle à
imiter un comportement qui aura des conséquences positives, donc
l’attitude de l’entourage face à la douleur aura forcement une
valeur éducative.
TRAITEMENT COGNITIVOCOMPORTEMENTAL
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La douleur sera considérée sous son aspect multidimensionnel avec
ses réalités organiques, physiologiques et subjectives et la prise en
charge cognitivo-comportemental s’adressera à l’aspect
subjectif et physiologique de la douleur ainsi qu’à son impact
sur l’environnement.
L’aspect subjectif de l’expérience douloureuse sera fonction de
l’expérience propre du sujet, de l’anxiété déclenchée par la
signification qu’il prête à cette douleur, et du « non » contrôle qu’il a
sur cette douleur, déclenchant par là un état de stress.
La traduction physiologique de cet état de stress que représente la
DC, se fera par l’augmentation des sensations douloureuses du fait
de l’état de tension du sujet.
Le but de la TCC est de permettre au patient de retrouver un contrôle
sur sa DC en repérant les mécanismes de déclenchements et de
maintien et en générant des réponses adéquates au niveau
comportemental et émotionnel. Il devrait s’en suivre une reprise
d’activités et une réduction progressive des médicaments.
EVALUATIONS
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L’évaluation de la douleur n’est pas chose aisée, car il s’agit
d’apprécier avec des méthodes objectives la sévérité d’une
expérience par définition subjective.
Les échelles unidimensionnelles ont des qualités indéniables (
facilité et rapidité de passation, bonne fidélité ), la plus utilisée
en recherche clinique est l’Echelle Visuelle Analogique qui se
présente sous la forme d’une ligne horizontale de 100mm et
les deux extrêmes de la lignes sont définis « absence de
douleur » « douleur plus forte ».
Echelle multidimensionnelle de type MPQ qui propose une
série d’adjectifs que le patient choisit pour caractériser sa
douleur, et destinée a apprécier les nuances sensorielles et
émotionnelles de la douleur, ainsi qu’à donner une mesure
quantitative et qualitative du phénomène.
ANALYSE
FONCTIONNELLE
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Permet de définir la topographie, l’intensité et la fréquence de la
douleur ainsi que les facteurs antecedants ou conséquents agissants
comme facteur de déclenchement, d’entretien et d’aggravation
du phénomène.
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Elle envisage les différentes modalités de la douleur: les facteurs
somatiques, psychologiques, comportementaux et
environnementaux et leur influence sur la douleur.
L’analyse fonctionnelle peut s’organiser autour de quelques
questions :
 La douleur a-t-elle débuté dans un contexte particulier mal
vécu par le patient ?
 Qu’est ce qui améliore la symptomatologie douloureuse ?
 Qu’est ce qui aggrave la symptomatologie douloureuse ?
 Quelles sont les conséquences de la DC sur le malade ?
 Quelles activités « saines » sont encore possible ?
 Comment le patient explique t-il cette douleur qui dure ?
 Quelles sont les attentes par rapport à un éventuel TRT ?
 Quelle est l’influence sur l’humeur du patient ?
INFORMATION
c’est l’étape la plus importante, en effet trop souvent le patient
douloureux néglige l’influence des facteurs psychologiques,
environnementaux et sociaux , pour se contenter voire se réfugier
derrière une explication organique si minime soit-elle.
Cette information va fournir des éléments de compréhension sur
l’étiologie, les manifestations et l’évolution possible de la maladie,
expliquer au patient comment une douleur peut se maintenir même
lorsque la cause de départ a disparu.
Cette étape est essentielle pour augmenter la compliance du
patient, son adhésion à un TRT qu’il soit somatique,
psychologique ou multidisciplinaire.
Les TCC peuvent s’envisager pour améliorer toutes les DC, le but n’est
pas nécessairement la faire disparaître, mais proposer au patient
des stratégies lui permettant de changer le vécu de la douleur.
TECHNIQUES DE
TRAITEMENTS
On présentera au patient ce schéma simple d’analyse du
comportement afin qu’il comprenne mieux comment nous
allons envisager la prise en charge de ce problème
douloureux..
S
O
R
C.
O : représente les éléments subjectifs ( pensées, images,
interprétations..).
C : conséquences de la réponse douloureuse.
La prise en charge thérapeutique nécessitera une intervention à
chacun de ces niveaux si l’on veut obtenir un résultat durable.
Il faudra travailler sur les éléments « déclencheurs » actuels de la
douleur, qu’il soient objectifs ( position debout…), ou
subjectifs ( anticipation anxieuse ) et sur ses conséquences.
Progressivement on recentrera le patient sur une liste des activités
actuelles, et en repérant ainsi mieux sa vie quotidienne et les
difficultés auxquelles il se trouve confronté, on essayera de la
recentrer petit à petit sur des activités de plus en plus positives en
tenant compte de ce qu’il aimait faire avant la « douleur ».
Tout engagement dans un comportement de plus en plus « non
malade » sera fortement renforcé par l ‘entourage médical et familial
et permettra progressivement au patient de sortir de son état
dépressif.
Ainsi le patient est décentré de son problème de « douleur » et
recentré sur des facteurs de tension, l’aspect dépressif est modifié
par l’engagement du patient dans des activités plaisantes.
Parallèlement à la reprise d’activités, on apprendra au patient
à résoudre les tensions musculaires associées à cette reprise
d’activité par un travail de relaxation.
Ce travail de relaxation permettra une réduction de la douleur
dans la mesure ou la tension musculaire augmente les
sensations douloureuses.
La relaxation apporte au patient une sensation de bien être
qui lui permettra de renouer une relation positive avec son
corps qui jusqu’à présent avait été essentiellement source de
souffrance.
Cette notion de souffrance plutôt que douleur sera abordée
sur le versant cognitif , en effet les pensées catastrophiques
associées à la douleur (« ce doit être grave ») ou les
interprétations dramatiques de la non guérison en ce qui
concerne la DC(« ils n’ont pas du faire le bon Dg ») ou les
images associées à la représentation de la douleur sont autant
d’éléments qui vont entretenir l’angoisse du patient.
Afin d’aider le patient a mieux contrôler ces éléments anxieux,
on lui apprendra des techniques de détournement d’attention,
càd apprendre a se concentrer rapidement sur une image, un
son, ou une sensation dés que survient une pensée négative.
Ainsi on aidera le patient à avoir une représentation imagée de sa
douleur différente et moins impliquante émotionnellement,
uniquement par un travail d’association d’idées: tel ce patient qui se
représente sa douleur comme un coup de poignard, et qui partant de
l’image de poignard va par association d’idées imaginer une épée,
associée elle même à la notion de chevalier, finalement il a pu se
représenter différemment cette douleur en l’associant à l’épée d’un
combattant qui cherche a terrasser le mal.
Le but de ce travail d’imagerie mentale dirigée sera d’associer la
sensation douloureuse à une représentation mentale moins
dramatiquement connotée et de réduire ainsi la réponse
physiologique associée à l’émotion ressentie, et par voie de
conséquence diminuer la douleur
Ainsi le traitement CC de la douleur devra tenir compte aussi
bien des facteurs cognitifs de l’anxiété et de la tension
musculaire associée à la douleur, des antecedants ou des «
déclencheurs » actuels de cette douleur qu’ils soient objectifs
ou subjectifs et de ses conséquences sur le plan personnel,
familial, social et professionnel.
Il est plus facile d’enseigner des techniques de relaxation et
des stratégies CC dans le cadre d’un groupe, les patients sont
encouragés par les progrès qu’ils observent chez d’autres et
se montrent ainsi davantage convaincus de l’efficacité des
méthodes que par les paroles prometteuses d’un thérapeute
en « bonne santé »
CONCLUSION
Le but du traitement sera d’aider le patient à
maîtriser sa douleur en prenant davantage
conscience des éléments qui la déclenchent et /
ou qui l’entretiennent, en apprenant un contrôle
physiologique par des méthodes de relaxation
et d’imagerie mentale dirigée, en assurant
progressivement le changement vers un
comportement sain, par une reprise nuancée
d’activités et une modification guidée des
interactions avec l’entourage familial social et
professionnel.
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