Les Gens bien n`osent plus sortir le soir Jean

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DOSSIER PEDAGOGIQUE
Les Gens bien n’osent plus sortir le soir
Jean-Claude Grumberg
Distribution
Mise en scène : Eric De Staercke
Avec
Caroline Lambert,
Corentin Lobet,
Dominique Rongvaux et
Stéphanie Van Vyve
Une coproduction de la Fabuleuse Troupe, du Théâtre Loyal du Trac et des Riches-Claires.
Dates : du 27 au 30 novembre 2012
Lieu : Théâtre Jean Vilar
Durée du spectacle : 1h30 sans entracte
Réservations : 0800/25 325
Contact écoles : Adrienne Gérard - 010/47.07.11 – [email protected]
• N’oubliez pas de distribuer les tickets avant d’arriver au Théâtre
• Soyez présents au moins 15 minutes avant le début de la
représentation, le placement de tous les groupes ne peut se faire en 5
minutes !
N.B : - les places sont numérotées, nous insistons pour que
chacun occupe la place dont le numéro figure sur le billet.
- la salle est organisée avec un côté pair et impair (B5 n’est
pas à côté de B6 mais de B7), tenez-en éventuellement compte lors de
la distribution des billets.
• En salle, nous demandons aux professeurs d’avoir l’amabilité de se
disperser dans leur groupe de manière à encadrer leurs élèves et à
assurer le bon déroulement de la représentation.
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L’auteur, Jean-Claude Grumberg
Jean-Claude Grumberg est né en 1939. Avant de se lancer dans l’écriture, il exerce
plusieurs métiers, dont celui de tailleur, milieu qu'il prend pour cadre de sa pièce L'Atelier. Il
devient écrivain en signant en 1968 Demain, une fenêtre sur rue, puis des textes courts,
comme Rixe, qui sera joué à la Comédie-Française. Toute son œuvre est marquée par la
mort de son père dans les camps nazis.
Auteur de théâtre, de littérature de jeunesse et scénariste, Jean-Claude Grumberg se voit
récompensé à plusieurs reprises. En 1991, il reçoit le Grand Prix de l’Académie française et,
en 1999, le Grand Prix de la SACD pour l’ensemble de son œuvre. Le Molière du Meilleur
auteur dramatique lui est décerné en 1991 pour Zone libre et en 1999 pour L’Atelier. Dix ans
plus tard, il obtient le Molière de l’Auteur francophone vivant et le Prix du Syndicat de la
critique pour Vers Toi Terre promise.
En 1989, il se lance dans l’écriture de pièces pour enfants. Lors de la première du Petit
violon, il découvre un public d’enfants de toutes les nationalités. « Le monde était
représenté. Je me suis senti utile » assure l’auteur. « Il y a une grande liberté dans cette
écriture. Je n’ai pas peur des critiques. Les enfants jouent ces pièces, je vais les voir dans
les écoles. Je suis devenu un auteur un peu gaga… »
Au cinéma, il travaille avec François Truffaut (Le Dernier Métro), Marcel Bluwal (Le Plus
Beau Pays du monde) ou Pierre Boutron (Les Années sandwiches). A trois reprises, il
collabore avec le réalisateur Costa-Gavras : en 1993, il écrit les dialogues de La Petite
Apocalypse ; en 2003, il reçoit le César du Meilleur scénariste pour Amen et en 2005, il est
coscénariste du film Le Couperet.
Pour la télévision, il écrit les scénarios de Thérèse Humbert et Music Hall de Marcel Bluwal ;
Les Lendemains qui chantent de Jacques Fansten et Julien l'apprenti de Jacques
Otmezguine.
Le théâtre reste sa passion première. Ses textes sont montés à la Comédie-Française. Il est
l'un des rares auteurs dramatiques français vivants à être étudié à l'école.
C’est donc au fil de la petite Histoire, celle du quotidien avec ses vicissitudes, ses peines et
ses joies, souvent dérisoires au regard du destin du monde, que Grumberg nous raconte la
grande Histoire, partant du particulier pour arriver au général et de l’individu pour analyser la
conduite de tout un peuple. Cette démarche a l’avantage de restituer au théâtre la vie et le
souffle qui lui manquaient. Ce ne sont pas des zombies ou des schémas qui nous sont
présentés. Mais de vrais personnages qui vibrent, avec leurs angoisses, leurs doutes, leurs
petitesses et leur grandeur, leur médiocrité et leur errance, leur égoïsme et leurs peurs. Des
gens de tous les jours qui font l’Histoire tout en la subissant. C’est ce qui fait le prix des
pièces de Grumberg, outre une rigueur de construction et d’analyse d’autant plus étonnante
qu’elle n’exclut jamais l’émotion ni l’humour. Il possède, à sa manière, la « patte » de
Tchékhov, cette façon de pénétrer l’âme humaine et son ambiguïté et, à travers plusieurs
personnages complémentaires, de nous donner un état, sur les plans à la fois collectif et
individuel, de toute une société. C’est certainement ce qu’il y a de plus difficile à faire et
Grumberg le fait magnifiquement.
Alain Leblanc in Théâtre-Revue programme N°11, 1981, Centre Dramatique national de Reims.
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L’urgence de monter du Grumberg
« Il n'est passion contagieuse comme celle de la peur. » (Montaigne)
La question de la peur, centrale dans de l’œuvre de Grumberg, se pose aujourd’hui à nos
démocraties avec une acuité renouvelée. Nous vivons la deuxième crise de la
mondialisation. Comme lors de la première, dans les années 1890-1900, les principes
réactionnaires se renforcent, le nationalisme, le protectionnisme, la xénophobie.
« Le vieux monde se meurt, le nouveau monde tarde à paraître,
et dans ce clair-obscur les monstres surgissent. » (Antonio Gramsci)
Les monstres sont aujourd’hui la montée des logiques autoritaires, les phénomènes de
sauve-qui-peut, ce que Wilhelm Reich appelait1 la montée de la peste émotionnelle.
Depuis Hiroshima, l’humanité sait qu’elle a la capacité à s’autodétruire. Il est temps
aujourd’hui que l’humanité croie à nouveau en elle-même, il est temps que nous puissions
croire à nouveau en l’humanité de chacun de nous. Pour cela, comme le dit l’historien Pierre
Rosanvallon, il faut nous réapproprier le monde, c’est-à-dire le rendre plus lisible, être plus
lucide, mieux le comprendre, en parler, l’analyser.
Que peut le théâtre ?
« Face à la peur, quelle est l’autre grande émotion ? La joie de vivre. » (Spinoza)
Avec Les Autres de Jean-Claude Grumberg, nous plongeons au cœur de cette question de
la peur. La bêtise et la méchanceté sont autour de nous, voire en nous. Comment lutter ?
Comment faire changer les choses ? Le théâtre est-il capable de cela ?
Le théâtre peut faire franchir la première marche, aider à la première étape du changement :
la prise de conscience. Le théâtre peut nous dire : voilà ce que nous sommes, voilà ce que
nous risquons de devenir, ou de redevenir. Le théâtre peut engueuler, fustiger, exhorter. Il
peut également faire rire, de soi-même d’abord.
Jean-Claude Grumberg, tout en évitant de donner des leçons, dénonce des situations où des
personnages faibles et parfois monstrueux se débattent avec leurs peurs. Leur faiblesse est
justement le point de rattachement à l’humanité. Grumberg écrit des pièces audacieuses, qui
font effet de miroir à peine déformant.
Avec Les Autres, nous sommes pris au piège. On rit, gênés parfois, ou inquiets, on croit
reconnaître des gens, et puis très vite, on s’interroge sur nous-mêmes. Qui sont ces autres ?
Qui peut prétendre être à l’abri d’un acte ou d’un propos raciste, que la peur de l’autre et de
soi peut révéler ?
Stéphanie Van Vyve et Dominique Rongvaux
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dans son livre « La psychologie de masse du fascisme »
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Quelles pièces, quels thèmes, quel but ?
Les gens bien n’osent plus sortir le soir est un montage de différents textes de Jean-Claude
Grumberg. Le spectacle s’articule donc en morceaux brefs, denses, en un rythme rapide et
d’une efficacité comique redoutable. La démultiplication des situations à jouer (6 courtes
pièces et 4 à 7 extraits de Ça va ?) permet l’écho, la confrontation des points de vue, la
réflexion et la mise en abyme.
Les thèmes récurrents de l’œuvre de Grumberg sont l’aveuglement, le repli sur soi, la peur
de l’autre, la cruauté, l’absurde, la banalité du mal. La forme courte des textes Les Autres
(recueil de différents textes), Ça va et Sortie de théâtre, permet d’aborder tous ces sujets en
allant à l’essentiel.
Le spectacle questionne les raisons de ces peurs génératrices de xénophobie, de lâcheté et
de bêtise, en décortique les mécanismes et explore la misère et le désespoir des
personnages.
Pour mettre cela en exergue, la sphère choisie est celle de la cellule familiale. Grumberg fait
le choix de petits faits intimistes, confidentiels pour représenter des événements historiques
comme les génocides, l’apartheid, …
D’une situation quotidienne, familiale, le propos se fait l’écho des « fléaux de ce siècle », tout
en permettant une « indentification ».
3.1 Les Autres2
Les Autres, publié auparavant sous le titre Les Courtes est un recueil des pièces suivantes
LES GNOUFS, LES ROUQUINS, RIXE, MICHU, LES VACANCES.
•
LES GNOUFS (1985)
Un couple organise une soirée à thème. Les musiciens engagés n’ont pas le « type »
attendu. Le couple s’emploie à les modeler. Débordements et déshumanisation des faibles
comme des forts.
•
LES ROUQUINS (1984)
La persécution d’une minorité pour ses caractères physiques vrais ou supposés. Face à la
montée des tracasseries policières, chacun songe d’abord à sauver sa peau, en se
réjouissant de ne pas correspondre aux critères fatals. On pense à ce poème écrit à Dachau:
Lorsqu’ils sont venus chercher les communistes
Je me suis tu, je n’étais pas communiste.
Lorsqu’ils sont venus chercher les syndicalistes
Je me suis tu, je n’étais pas syndicaliste.
Lorsqu’ils sont venus chercher les sociaux-démocrates
Je me suis tu, je n’étais pas social-démocrate.
Lorsqu’ils sont venus chercher les Juifs
Je me suis tu, je n’étais pas Juif.
Puis ils sont venus me chercher
Et il ne restait plus personne pour protester
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Les Autres, Ed. Actes Sud, 1992, Coll. Actes Sud Papiers, ISBN-10: 2869430140
4
•
RIXE (1967)
Suite à une altercation, un homme se croit poursuivi par un « bougnoul » qu’il suppose
vouloir l’égorger. Racisme, paranoïa et auto-conviction. C’est de cette pièce qu’est extrait le
titre Les Gens bien n’osent plus sortir le soir.
•
MICHU (1966)
Le regard des autres. Un personnage va de surprises en surprises. Comme il trouve son
chef de bureau plutôt bel homme, son collègue Michu lui révèle qu’il est pédéraste. Comme il
a pitié d’un mendiant, le même Michu lui apprend qu’il est communiste. Comme il offre du
chocolat à Schmoll, le sous-chef de bureau, Michu conclut : « C’est normal entre juifs »
•
LES VACANCES (1980)
Une famille en vacances à l’étranger. Leur sentiment de supériorité et leur mépris pour les
natifs. Leur crainte permanente d’être floués, victimes de la supposée malice de leurs hôtes.
Ou comment la méconnaissance de l’autre, le refus d’apprendre à le connaître créent de
celui-ci une image tronquée qui le fait craindre et mépriser. Image tronquée dont ne peuvent
venir à bout même les faits objectifs qui la contredisent. Le mépris et la haine jouent
également à l’intérieur de la famille, du mari vers sa femme, du père vers ses fils. L’un des
fils, différent, est écrasé.
Texte d’une extrême cruauté. Le personnage du père, qui est le pire de tous, est également
celui qui a le plus de verve.
LE PERE. -Je veux qu’il ait un métier, je veux qu’il fasse quelque chose de bien de sa
vie…
LA MERE. -Si tout est bouché, c’est pas de sa faute…
LE PERE. -Comment font les autres ?
LA MERE. -Justement, ils y arrivent pas non plus…
LE PERE. -Alors on se fait tout petit, on apprend à fermer sa gueule, à recevoir des coups
de pied au cul et à dire merci… Comment j’ai fait moi, comment j’ai fait ?
3.2 Sortie de théâtre, un soir de pluie (2000)3
Les répliques de la pièces ont été glanées par l’auteur en écoutant les spectateurs sortant du
Vieux-Colombier après avoir assisté — à leur corps défendant, semble-t-il — à une
représentation de « Maman revient pauvre orphelin ».
Ce texte clora le spectacle par une mise en perspective.
Qui sont les personnages de Michu, Rixe ou les Gnoufs? Où sont-ils ? ne sont-ils que des
personnages incarnés sur une scène, le temps d’un spectacle divertissant ? Ne seraient-ils
pas plutôt ici, dans la salle ? En train de regarder le spectacle ?
3.3 Ça va (2008) 4
Minimalistes, les dialogues sont à peine extrapolés du quotidien dans lequel ils nous
replongent. Ces saynètes tirées d’un trottoir, entre deux personnes asexuées fixent des
moments anodins et les changent en événements. C’est presque du Beckett.
-Ca va?
-Pas des masses, figure-toi que...
-Stop attention, je te signale que tu t'apprêtes à franchir la ligne jaune.
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Sortie de théâtre, Ed. Actes Sud, 2000, Coll. Actes Sud Papiers, ISBN-10: 2742725547
Ça va ?, Ed. Actes Sud, 2008, Coll. Un endroit où aller, ISBN-10: 27427-7520-0
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-Quelle ligne jaune?
-Je te dis en passant "ça va" , et toi, au lieu de me dire "pas mal et toi?", tu t'arrêtes et tu
t'apprêtes à me raconter ta vie.
-Je m'apprête à répondre à ta question oui.
-Je ne t'ai pas posé de question, je t'ai dit "ça va", comme j'aurais pu dire "bonjour".
Les extraits de Ça va serviront de fil conducteur, où les personnages-acteurs se cherchent.
Paumés comme les figures de Grumberg, ils cherchent un sens, du sens. Comme il s’agit de
personnages sans nom, sans identité, on imagine qu’ils figurent les personnages-matériaux
qui se cherchent, en dehors des rôles. Un personnage en quête de rôle, qui s’interroge sur la
pertinence d’être là.
En plus d’être pivot narratif, ils ont une fonction scénographique : ils permettent aux
comédiens de transiter d’une pièce à l’autre, d’un espace à l’autre, d’un costume à l’autre.
Enfin, ils mettent en jeu la question de l’autre et du personnage lui-même.
-Ca va ?
-Non, j’en ai marre.
-T’en as marre de quoi ?
-De ne pas être un personnage.
-Tu n’es pas un personnage ?
-Toi non plus.
-On n’est pas des personnages ?
-Non.
-On est quoi alors ?
-Des silhouettes (…)
-Bon, qu’est-ce qu’on fait ?
-On se tire.
-Pour aller où ?
-Nulle part.
-On est où là ?
-Nulle part.
-Comment s’en sortir ?
-Exigeons qu’il fasse de nous des
personnages.
3.4 Le trajet du spectateur dirigé par l’ordre des pièces
L’ordre des pièces a été articulé pour un trajet d’un espace ouvert, accessible à l’étranger à
un espace de plus en plus intime, sphère dans laquelle les personnages se réfugient.
-
Les vacances : on part d’un espace ouvert à l’étranger ; ce qui aurait pu être source
de découverte donne un cadre à un comportement de repli sur soi ;
C’est sûr, c’est pas comme à la maison, dit la mère.
-
Michu : on passe en alternance du bureau à la sphère intime du foyer;
-
Les Rouquins : on pénètre la sphère intime familiale ;
-
Les Gnoufs : on intègre l’étranger dans la sphère intime ;
-
Rixe : on se replie et se réfugie dans la sphère intime ;
-
Sortie de théâtre, un soir de pluie : pour rouvrir le propos, on se mêle au public.
3.5 La scénographie pour construire « les tableaux »
L’enchaînement des pièces exige un espace rapidement transformable pour montrer la
multiplicité des lieux tout en respectant la dynamique générale du spectacle.
L’éclairage et le son jouent donc un rôle important dans la scénographie. Par sa disposition,
un mobilier réduit et modulable (deux tables, six chaises, deux portes sur roulettes, une
fenêtre sur roulettes) participe à la suggestion des lieux et des situations.
Les deux tables, une grande et une petite, peuvent n’en former qu’une, servant ainsi de
table de restaurant dans Les vacances.
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Mises face à face dans une géométrie décalée, elles font effet de miroir : d’un côté de
bureau, de l’autre de table de cuisine dans Michu.
Enfin, utilisées séparément, elles occupent le centre des Rouquins (grande table, effet
d’espace, intérieur riche) et de Rixe (petite table, espace étriqué, intérieur modeste).
La fenêtre, élément clé car c’est l’expression de cette peur de l’étranger, du monde extérieur
résumé dans notre titre, est utilisée dans la plupart des pièces et se mue en meublé télé
dans les Rouquins.
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Lexique
Quelques définitions pour utiliser les termes exacts5
Peur (nom féminin, du latin pavor, -oris)
Sentiment d'angoisse éprouvé en présence ou à la pensée d'un danger, réel ou
supposé, d'une menace (souvent dans avoir, faire peur) ; cette émotion éprouvée
dans certaines situations : Trembler de peur.
Appréhension, crainte devant un danger, qui pousse à fuir ou à éviter cette situation :
La peur du ridicule.
Crainte du jugement, des réactions de quelqu'un, qui fait qu'on adapte son
comportement, qu'on obéit à certaines consignes : Elle a plus peur de son grand frère
que de son père.
Angoisse (nom féminin, du latin angustia, resserrement)
Grande inquiétude, anxiété profonde née du sentiment d'une menace imminente
mais vague : Passer une nuit d'angoisse.
Préjugé (nom masculin, de préjuger)
Jugement sur quelqu'un, quelque chose, qui est formé à l'avance selon certains
critères personnels et qui oriente en bien ou en mal les dispositions d'esprit à l'égard
de cette personne, de cette chose : Avoir un préjugé contre quelqu'un.
Opinion adoptée sans examen, souvent imposée par le milieu, l'éducation : Avoir les
préjugés de sa caste.
Racisme (nom masculin)
Idéologie fondée sur la croyance qu'il existe une hiérarchie entre les groupes
humains, les « races » ; comportement inspiré par cette idéologie.
Attitude d'hostilité systématique à l'égard d'une catégorie déterminée de personnes :
Racisme antijeunes.
Xénophobie (nom féminin)
Hostilité systématique manifestée à l'égard des étrangers. (→ racisme.)
Etranger, étrangère (adjectif)
Qui n'appartient pas à la nation où on vit ou par rapport à laquelle on se place :
Langue étrangère.
Qui n'est pas de la nature propre de quelque chose, qui est un élément rapporté : Un
développement étranger au sujet.
Qui est inconnu à quelqu'un ou peu familier : Son visage ne m'est pas étranger.
Qui ne touche pas, ne concerne pas quelqu'un ; en quoi il ne se reconnaît pas du
tout ; à quoi il est indifférent : Rien de ce qui est humain ne m'est étranger.
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5
Migrations humaines et racisme ordinaire
Etranger6 : « Qui n'appartient pas à la nation où on vit ou par rapport à laquelle on se
place ».
Le fait d’être « étranger » est donc lié à un déplacement géographique.
Lors de nos voyages privés ou professionnels, pour une raison ou l’autre, il nous arrivera
tous un jour d’être « l’étranger ».
L’image de l’« étranger » en appelle à deux lots de constructions mentales:
- le concept de racisme: les stéréotypes liés au pays ou à la culture d’origine :
- plus globalement, le concept d’immigration7, qui fait l’objet de beaucoup de considérations
et « récupérations » politiques.
5.1 Le racisme ordinaire
§ Quel est-il et qui en sont les victimes ? 8
Il est difficile de trouver une définition exacte du racisme ordinaire mais non pas de
l’expliquer.
Le racisme est le fait de croire à la supériorité d’une race sur une autre : donc de considérer
que tous les individus ne sont pas égaux entre eux. Le racisme ordinaire correspond aux
différents comportements racistes observables dans la vie quotidienne : en résumé c’est le
racisme de tous les jours.
§
Les victimes du racisme ordinaire
Le racisme au quotidien stigmatise d’une manière générale la différence : différence de race
(xénophobie) bien sûr, mais aussi de conviction religieuse, de comportement et même de
sexe (inégalité envers les femmes ou homophobie).
D’une manière générale il touche tout simplement ceux qui sont différents. Par exemple, les
personnes présentant un handicap physique ou mental et étant de ce fait « différentes » sont
victimes du racisme également.
On peut aussi noter le racisme intergénérationnel qui peut se faire à l’égard des plus vieux,
mais aussi dans une société vieillissante, à l’encontre des jeunes de la part des plus âgés
qui supportent moins bien le bruit et les perturbations que l’excès de vitalité peut entraîner
chez la jeunesse.
Enfin le sexe peut entraîner également des formes de discrimination : on peut dire que les
femmes selon l’endroit géographique où elles vivent sont plus ou moins victimes de racisme.
La parité homme/femme au niveau des salaires ou de la représentativité dans les
organismes de décision est loin d’être appliquée.
Dans notre société, si les personnes touchées par le racisme sont nombreuses, les actes
dont elles sont victimes sont également très variés.
§
Les manifestations du racisme
Le racisme ordinaire se traduit par quantité d’actes plus ou moins graves. Ces actes
touchent aussi bien moralement que physiquement la personne concernée. Ils l’atteignent
également socialement.
Les atteintes morales se traduisent par le tutoiement à l’égard d’une personne qu’on ne
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Installation dans un pays d'un individu ou d'un groupe d'individus originaires d'un autre pays. www.larousse.fr
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destinationifsi.forumactif.com
7
9
connaît pas, c’est un tutoiement qui montre le mépris ; les surnoms, les appellations
méprisantes, les insultes, les gestes vulgaires ; le harcèlement moral : le fait de rabaisser
systématiquement la personne ; les actes d’intimidation (par exemple le fait de dégrader un
bien de la personne : sa voiture, sa porte d’entrée…).
Les atteintes physiques vont de la simple bousculade aux coups et même à l’homicide.
Enfin le racisme peut atteindre la vie sociale de la victime et se traduit par le refus de louer
un logement ; le refus de recrutement, de stage dans les entreprises, un salaire inférieur ; le
refus de laisser entrer dans une discothèque, un club privé ; le fait de soupçonner
directement en cas d’acte de délinquance ; les dégradations de lieux de culte ou de
cimetières (profanation).
§
Législation9
En Belgique, en 1981, La loi Moureaux est ratifiée contre les discriminations dont les
étrangers sont victimes à cause de leur race. Suite à cette loi, « Le Centre pour l’égalité
des chances et la lutte contre le racisme » est créée en 1993 afin d’étudier ce genre de
discrimination et de recevoir les plaintes des victimes.
Le Centre est compétent pour les discriminations des types suivants : la nationalité, la
prétendue race, la couleur de peau, l’ascendance, l’origine nationale ou ethnique,
l'orientation sexuelle, l'état civil, la naissance, la fortune, l'âge, la conviction religieuse ou
philosophique, l'état de santé actuel ou futur, le handicap, la conviction politique, la
caractéristique physique ou génétique ou l'origine sociale.
Le Centre s’occupe également de ce qu’on appelle les cas de « racisme inversé » soit le cas
où les belges (autochtones) portent plainte pour avoir été traités de racistes, sans motivation,
dans l’exercice de leur fonction.
Pour le Mrax, Mouvement contre le racisme, l’antisémitisme et la xénophobie, tous les
indicateurs montrent une recrudescence :
des discriminations dans l’emploi, le logement, l’école, la santé, la vie en société ;
des actes antisémites, islamophobes, à l’encontre des Noirs et des Tziganes ;
du populisme et de l’extrême droite ;
des négationnismes et des atteintes à la mémoire (colonisation, traite négrière, etc.) ;
de la xénophobie et des régressions en matière de droit des étrangers.
Des outils pédagogiques du Mrax sont disponibles via ces lien :
http://www.mrax.be/outils/liens.php
9
www.diversite.be (le site du Centre d’égalité des chances)
10
5.2 L’immigration
Qu’est-ce que l’immigration ? A-t-elle toujours existée ? Quelles en sont les raisons et
conséquences ? (source : www.wikipedia.org)
5.2.1 Définition
L'immigration désigne aujourd'hui l'entrée, dans un pays, de personnes étrangères qui y
viennent pour y séjourner ou s'y installer. Le mot immigration vient du latin migratio qui
signifie « passage d'un lieu à l'autre ». Elle correspond, vue du côté du pays de départ, à
l'émigration. Dans le cas des frontaliers, les migrations peuvent être quotidiennes.
5.2.2 Premières migrations humaines
o
L’origine de l’homme
L’homme moderne est d’origine africaine. L'histoire des migrations humaines commence
avec les déplacements d'Homo erectus hors de l'Afrique à travers l'Eurasie10 il y a environ un
million d'années. Homo sapiens semble avoir colonisé toute l'Afrique il y a quelque 150 000
ans. Il commence à sortir d'Afrique il y 80 000 ans. Il y a 40 000 ans, il s'est répandu à
travers l'Eurasie et l'Australie.
o
Avant l’ère industrielle
Avant l'apparition des moyens de locomotion mécaniques modernes (train, voiture, avion,
etc.) les migrations furent essentiellement régionales11. Le mode de vie sédentaire impose
généralement un espace de vie d'un rayon de 7 km : jusqu'au début du XIXe siècle pour une
grande partie de la population, ayant pour seul mode de transport la marche, la vie se
déroulait entièrement dans cet espace. À la fin du XVIIIe siècle, le découpage du territoire
français en communes se fait sur la base de la distance parcourue à pied en une journée. À
l'époque, on parlait même d'immigré quand une personne venait du village voisin le plus
proche, les mariages inter-villages étant alors mal vus !
o
De nos jours
-
D'après le rapport du Secrétaire Général de l'Organisation des Nations Unies (O.N.U )
sur les migrations internationales et le développement, remis en 2006, le monde
compterait près de 200 millions de migrants soit 2,8%. En 1965, le nombre de migrants
internationaux s'élevait à 75 millions soit 2,3 %. Ce pourcentage a d'abord diminué
durant la première décennie pour ensuite augmenter du fait du ralentissement de la
croissance démographique. En 2050, les démographes prévoient 230 millions de
migrants pour une population totale de neuf milliards soit 2,5%. L’évolution des
mouvements de migrations restes donc relativement stable dans le temps.
-
48,6 % des migrants sont des femmes.
-
63 % des migrants résident dans les pays développés et 34 % dans les pays en
développement.
10
11
“Continent” formé par l’Europe et l’Asie
Hormis les modes de vie “nomade”
11
-
L'Amérique du Nord et l'Océanie comptent plus de 10 % de migrants. Alors qu'en
Afrique, Amérique latine et Asie les migrants représentent moins de 2 % de la population
totale de chaque région. Dans certains pays, les migrants représentent plus de 60 % de
la population, c'est le cas d'Andorre, Émirats Arabes unis, Guam, Macao, Monaco, Qatar
et le Vatican.
-
Aujourd'hui, les flux de migrations sont orientés aussi bien des pays en développement
vers les pays développés que d'un pays développé vers un autre que d'un pays en
développement vers un autre pays en développement (Sud-Sud). Les plus forts taux de
travailleurs immigrés dans la population active se retrouvent dans les pays du Golfe
Persique : 90 % aux Émirats arabes unis, 86 % au Qatar, 82 % au Koweït.
-
La migration est concentrée sur un nombre restreint de pays d'accueil (55). 75 % des
migrants internationaux sont dans 12 % des pays du monde.
-
Les statistiques montrent que les très grandes vagues migratoires ont récemment
diminué, au profit d'une tendance à l'immigration choisie favorable à la fuite des cerveaux
et compétences des pays pauvres, au détriment de ces derniers. Les caractéristiques du
phénomène migratoire actuel sont la diversification des pays de provenance et de
destination, ainsi que les formes prises par la migration.
On estime que l'argent injecté dans les pays d'origine en provenance des pays d'accueil
est au moins égal si ce n'est très supérieur à la quantité d'aides financières apportées
par les pays dits « riches » aux pays plus pauvres. Les démographes considèrent que
les migrations seront une importante variable d'ajustement d'ici 2050, échéance à
laquelle 2 ou 3 milliards d'individus supplémentaires sont attendus sur la planète, alors
que les effets des modifications climatiques se feront probablement déjà sentir et que
certaines zones ne pourront plus nourrir une population supplémentaire.
5.2.3 Les raisons de l’immigration
Pour le migrant, l'immigration peut avoir une ou plusieurs raisons :
•
•
•
•
•
•
•
Professionnelle (mission de longue durée à l'étranger) et études ;
Politique (réfugié politique fuyant les persécutions) ;
Sécuritaire, notamment en cas de guerre dans le pays d'origine ;
Économique (habitant de pays pauvres cherchant un meilleur niveau de vie dans les
pays riches, éventuellement temporairement) ;
Personnelle (volonté de s'installer dans un pays par goût, par exemple si l'on se
reconnaît dans ses valeurs) ;
Familiale (rejoindre le conjoint, l'enfant déjà installé).
Fiscale (l'installation dans un pays offrant un niveau d'imposition moins élevé)
Pour les États, l'immigration peut permettre de faire face à :
•
une quantité ou qualité de main-d'œuvre suffisante. Par exemple, entre les années
1920 et 1930, ce sont quelque 170 000 étrangers qui débarquent en Belgique, dont
une majorité d’Italiens répondant l’appel du gouvernement belge pour remporter « la
bataille du charbon ».
•
un déficit des naissances ou l’exode rural. Un exemple récent est celui de la
commune italienne de Riace qui, depuis 1998, a adopté politique volontariste
d'accueil de l'immigration visant à entretenir leur démographie et la vie économique
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locale. En 2011, L'Osservatore Romano (le quotidien du Vatican) a cité cette
bourgade comme un exemple à suivre vis-à-vis des immigrés.
5.2.4 L’exemple de Riace plus en détails
En juillet 1998, les habitants ouvrent leurs portes et le village à 300 Kurdes d'une
embarcation échouée sur leur côte, Domenico Lucano, l'actuel maire, tente de faire revivre le
village, fortement affecté par l'exode rural (la population du village était passée de 2500 à
quelques centaines), en intégrant les demandeurs d'asile. Ce projet s'appelle Città futura.
Plus de 200 réfugiés vivent désormais à Riace. L'école qui avait fermé en 2000 a maintenant
rouvert. L'état italien donne 20 euros par jour pour les réfugiés, ce qui lui revient moins cher
que des centres de rétention.
Une association identifie les logements vides et les restaure pour y accueillir des réfugiés.
Les subventions aux demandeurs d'asile tardent toujours, aussi la commune a-t-elle créé
une monnaie locale (à l'effigie de Gandhi, Luther King ou Che Guevara) qui est librement
utilisée dans le village, et quand l'argent arrive, les magasins sont réglés directement par la
mairie. Six mille réfugiés sont passés par le village au fil des années.
En 2011, dans le contexte du Printemps arabe, de nombreux Tunisiens ont débarqué à
Lampedusa où ils sont rejetés. La commune de Riace dite « le village des migrants » a
annoncé au gouvernement être prête à en accueillir une partie. Une quarantaine d'autres
villages ou villes des alentours se sont également proposées.
Toutefois, l’immigration illégale va au-delà des souhaits des pays d’arrivée.
Un migrant peut ne pas être en règle au regard de la législation sur l'immigration en vigueur
dans le pays de destination. Chaque pays adopte ses propres normes pour identifier les
immigrés et les compter. Ceci affecte directement la quantité et la proportion d'immigrés.
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ANNEXE : Pistes envisagées en fonction des disciplines scolaires
Discipline
Morale / religion
Proposition d’activité
Sous forme de jeu, partir de l’expérience personnelle et concrète pour
progressivement faire des liens avec des situations sociales d’actualité.
Exemple : à deux, avec son voisin de banc. Prendre 2 minutes, en
silence, pour s’observer. Sans parler, rédiger un petit portrait en
quelques traits : « comment je perçois mon/ma voisin(e), comment puisje le/la décrire ? ». Puis rédiger 3 questions à poser à ce(tte) partenaire.
Enfin, poser les questions puis se lire mutuellement le portrait rédigé au
préalable. Comparer « ce que je pensais » à « ce que tu m’apprends de
toi ».
En duo, préparer une mise en commun devant la classe avec l’idée de
révéler un ‘secret en or’ sur le/la partenaire (importance d’encadrer cet
exercice pour mettre en valeur une qualité cachée)
Histoire
Objectif : Prendre conscience que l’ignorance et la méconnaissance des
personnes qui nous entourent génèrent des idées préconçues et sont le
fruit de notre imagination. Souvent, cette attitude engendre le rejet ou la
peur.
En fonction de la matière vue, relever les événements historiques dont
l’origine est la différence ethnique et raciale.
Diriger une réflexion sur la terminologie « race, ethnie… » et considérer
en quoi elle stigmatise les comportements de peur et de rejet à l’origine
de drames comme la Shoa, les génocides, les hiérarchies
discriminatoires…
Conclure avec un aperçu de l’application de la Charte des Droits de
l’Homme et rappeler à cette occasion les circonstances de sa rédaction.
français
Artistique (soit dessin,
soit théâtre)
Objectif : mettre en relief les comportements humains à l’origine des
grands mouvements (événements) politiques, sociaux qui ont marqué
l’Histoire et repérer dans ceux-ci les schémas récurrents.
- Jeux sur le vocabulaire comme vecteur de racisme
- En petits groupes, inventer et rédiger un nouveau dialogue sur le
mode « ça va ? ». Observer les parallèles avec l’esthétique de
l’absurde et en comprendre les raisons.
Objectif : comprendre l’impact de la langue dans les comportements
humains.
D’abord, choisir une des pièces et en extraire le canevas (synopsis), la
trame.
Elaborer ensuite une mini bande-dessinée ou un roman-photo à partir de
canevas. Utiliser des procédés de caricature : grossir le trait.
Objectif : Comprendre ainsi le mécanisme de la peur et le processus de
repli sur soi et de la haine de l’autre mais aussi analyser le phénomène
de grossissement (comique) propre à l’écriture de Grumberg.
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