Dr Jean-Claude Lemaire
Bon à savoir
Le 25 novembre 2015, Peter Meredith décédait soudainement à l'âge de 65 ans. Il s'agissait d'une
figure respectée dans le domaine de l'hypertension artérielle dont il avait exploré les multiples
aspects. Il s'était en particulier intéressé à ce que l'on nommait joliment à l'époque les "vacances
thérapeutiques", c'est-à-dire en clair le fait de ne pas prendre un traitement chronique de façon
régulière.
Les temps changent et l'on parle désormais de compliance, d'observance ou encore d'adhésion
thérapeutique, mais malheureusement le constat reste le même, une proportion substantielle de
sujets atteints de maladies chroniques justifiant un traitement tout aussi chronique et continu ne
prend pas régulièrement les médicaments prescrits. Quelques exemples.
Un travail mené en Allemagne chez des hypertendus nouvellement mis sous traitement
antihypertenseur (1 seul comprimé par jour) montre sur une période de 2 ans que près de 80% ont
eu des périodes de vacances thérapeutiques équivalentes à plus de la moitié du temps effectivement
traité et que plus de la moitié prenaient moins de 80% du traitement prévu. Cette constatation
explique sans doute que tous les manuels précisent que la non-observance doit toujours être
évoquée devant une hypertension apparemment réfractaire au traitement, car il est clair que pour
qu'un médicament soit efficace, il faut d'abord qu'il soit pris.
Ce fléau bien connu dans le domaine de l'hypertension est également préoccupant dans d'autres
maladies cardiovasculaires, ce qui justifie pleinement son choix comme thème de La Semaine du
Cœur de cette année 2016. En effet, ces vacances thérapeutiques, qu'elles soient le fruit d'une
décision volontaire ou d'un oubli des malades sont loin d'être sans conséquence.
Une récente étude menée en Finlande a ainsi montré sur plus de 58.000 sujets devant prendre des
statines en raison d'un cholestérol trop élevé que moins des deux tiers (hommes 58% et femmes
60%) avaient renouvelé leurs prescriptions de façon à permettre au minimum un traitement de 9
mois sur 12, ce qui est déjà loin d'une adhésion thérapeutique optimale.
Et lorsque l'on compare le risque de décès par attaque cérébrale des sujets considérés comme
ayant une adhésion thérapeutique acceptable (> 80%) et de ceux dont l'adhésion thérapeutique est
de faible niveau (30%), l'on constate que la probabilité de décès est deux fois plus élevée pour ces
derniers.
Pire encore, parmi ces sujets avec cholestérol élevé, 68% étaient en plus hypertendus et lorsqu'ils
n'adhéraient pas non plus de façon acceptable à leur traitement antihypertenseur leur risque de
décès était alors sept fois plus élevé.
Ces sujets sont à l'origine de 85% des 532 décès consécutifs à une attaque cérébrale qui ont été
enregistrés dans cette étude.
Aux Etats-Unis, un travail mené chez des sujets mis sous anticoagulants en raison d'une arythmie
cardiaque a montré que moins de la moitié ont pris leur traitement pendant au moins 80% de la
période étudiée. Or chez les sujets le plus à risque de complications cérébrales en raison de leur
trouble du rythme, la probabilité d'attaque cérébrale était doublée quand le traitement était oublié
pendant 1 à 3 mois et presque quadruplé quand l'oubli dépassait 6 mois.
A bon entendeur… Faites mentir les statistiques, prenez régulièrement et scrupuleusement vos
médicaments pour ne pas mettre votre vie en péril.
Pour qu'un médicament soit efficace, il faut d'abord qu'il soit pris, ne l'oubliez pas, cela vous aidera à
ne pas oublier vos médicaments.
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L'ADHÉRENCE
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JOURNAL DE LA LIGUE CARDIOLOGIQUE BELGE
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