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énergétique. Les œuvres d’art en tant que vecteurs de l’énergie vitale participent à ce
cycle de vie. Pour un tableau, soit à l’exposition des œuvres d’art de l’Académie, c'est-
à-dire au Salon, soit sur scène, une composante émotionnelle joue un aussi grand rôle
qu’une composante scientifique. Le spectateur est absorbé par l’illusion et en même
temps il tâtonne les détails du tableau avec ses yeux.
Pour Lessing l’art signifie la représentation de quelque chose d’originel. Mais il avoue
que l’impression vive d’une œuvre d’art peut être intensifiée par le transport d’énergie
de l’œuvre sur celui qui la regarde. Ainsi, Lessing rend les limites du modèle de
représentation aussi élastiques que possible, mais finalement il refuse d’abandonner ce
modèle. Le théâtre, qui de par sa nature se trouve à la frontière entre la peinture et la
poésie, est poussé du côté de la poésie (muette). L’approfondissement psychologique en
poésie est lié au facteur temporel, l’action, à laquelle la peinture participe seulement par
« l’instant fructueux » (fruchtbarer Augenblick). L’action est le cadre intellectuellement
concevable, qui se réalise sous forme des motivations enchaînées des personnages
désignant l’avancement psychologique. L’action ne se rapporte pas directement à un
arrière-plan scientifique, mais rhétorique.
Et le théâtre du tableau et celui de l’action implique un but moral. Diderot préfère les
tableaux avec des personnages dont les corps se sont apparemment formés par leur
condition sociale et les évènements marquants de leur vie. Ainsi, le spectateur les relie à
son propre monde d’expérience. La sympathie pour les personnages bouleverse
profondément le spectateur. Deux systèmes correspondent, celui de l’art et celui de la
morale. Donc, si le personnage est une belle femme, elle peut directement inciter à une
vie vertueuse. Si elle est montrée dans un état pudique, il s’ensuit un effet ambigu. Par
sa réticence elle stimule l’imagination du spectateur masculin. Celui-ci entre dans
l’espace (intérieur) de l’autonomie. L’accès à l’ambivalence peut permettre de vivre le
sublime. L’art qui fait vivre le sublime ouvre l’accès à une énergie très originelle et
donne ainsi la possibilité d’une décision morale. L’effet moral des pièces de Diderot est
lié avant tout à une définition iconographique des personnages.
Lessing refuse l’effet ambivalent des tableaux en peinture. D’où il s’ensuit que chaque
représentation sur scène permettant cet effet devient problématique. Juste pour cette
raison Lessing doit rejeter un théâtre fondé sur les états dans le sens de Diderot. Les
personnages des pièces tardives de Lessing balancent entre caractère typique et
individualité. Ils sont directement liés à l’action, qui leur permet de s’individualiser de