1
L'intérêt des haies en viticulture
Comme vous avez pu le lire dans racines N° 9, notre équipe de recherche à l'ENITA de Bordeaux
développe depuis l'année 2000 une expérimentation sur le rôle possible des haies pour la viticulture.
Arbres et Paysages en Gironde m'a demandé de vous faire un petit bilan des principaux résultats.
Ce travail, mené dans le cadre d'une collaboration entre l'ENITA de Bordeaux et l'INRA dans une
'Unité Mixte de Recherche 'santé végétale' commence à donner des résultats forts intéressants, même
si on ne peut pas encore conclure sur l'efficacité réelle d'un tel dispositif.
L’objectif de ce travail est de voir si la présence de haies peut avoir une influence positive sur les
populations d'auxiliaires au sein d'un vignoble. Il ne s'agit donc pas de faire des lâchers d'auxiliaires
mais de stimuler les insectes utiles déjà présents pour qu'ils arrivent à maîtriser les insectes ravageurs.
Cette approche de 'lutte biologique par conservation' a déjà montré son efficacité pour le contrôle des
acariens phytophages, si on choisit bien les produits phytosanitaires pour qu'ils ne tuent pas les
acariens prédateurs (typhlodromes). Ceux-ci maîtrisent parfaitement les acariens rouges. Acariens
rouges et typhlodromes co-habitent toute l'année dans le vignoble sans qu'on observe des dégâts.
Pour les insectes ravageurs
l'histoire semble bien plus
compliquée. D'abord nous avons pu
constater que les insectes ravageurs
ne posent pas systématiquement de
problèmes dans chaque vignoble, ni
chaque année. Dans certaines
régions comme l'entre deux-mers
peu de traitements insecticides sont
nécessaires (malheureusement
beaucoup de viticulteurs en font
quand même). Nous avons donc
commencé à étudier un vignoble
dans l'appellation Côtes de
Castillon qui n'a pas de problèmes
de dépassements de seuils
d'intervention de ravageurs, afin de
voir quels sont les auxiliaires
présents dans ces vignobles, et nous avons aussi aménagé un site expérimental sur le domaine du
Luchey (PESSAC-LEOGNAN) en 2001/2002 avec 25 essences différentes. Cette haie se développe
assez bien, et les premières observations ont commencé en 2003.
Très vite il nous est apparu qu'il manquait déjà beaucoup de connaissances sur la biologie des insectes
ravageurs. Leur développement dans le vignoble est peut-être connu mais ils ont souvent d'autres
plantes hôtes sur lesquelles ils se développent en dehors du vignoble. Pour un bon choix de plantes
pour une haie il faudrait évidemment éviter de choisir ces autres plantes hôtes. Notre premier souci
était donc de mieux comprendre la biologie des ravageurs, et plus particulièrement la cicadelle des
grillures.
Cette cicadelle a un cycle de vie caractérisé par des migrations importantes entre le vignoble et ses
environs. D'abord elle hiverne sur des résineux (surtout le genévrier) et certaines plantes comme les
ronces qui gardent leurs feuilles en hiver. Ces plantes à feuillage persistant sont donc à éviter dans la
plantation d'une haie. Cette cicadelle utilise au printemps beaucoup de plantes à démarrage précoce
(prunus, ronce) pour y séjourner environ un mois avant d'immigrer vers le vignoble. Pour l'instant
nous n'avons pas trouvé de preuves pour une multiplication importante sur ces plantes. Une fois migré
vers le vignoble on assiste à une première génération de larves, souvent peu importante, et ensuite un
deuxième vol en mi-juin. Ce qui est étonnant est le fait que ce vol de juin est parfois très important,