Compte-rendu des journées de sélection au concours iGem Regional Jamboree 2011 (Europe-Afrique) Amsterdam 1-2 Oct 2011 La compétition iGEM et la sélection d’Amsterdam : L’iGEM, ou International Genetically Engineered Machines (iGEM) est une compétition internationale de biologie synthétique, organisée par le Massachusetts Institute of Technology (MIT) où s’affrontent plusieurs groupes composés d’une dizaine d’étudiants de niveau « undergraduate » (Master), assistés de quelques enseignants. Le but de l’iGEM est de développer la conception et l’utilisation de briques de base, les « BioBricks » pour concevoir de nouvelles applications du génie génétique. Ces séquences génétiques sont standardisées pour pouvoir être facilement introduites et agencées dans la bactérie E. coli. Cette méthode élargit le champ d’action du génie génétique à la conception de systèmes complexes. Il est donc nécessaire de regrouper des étudiants de formations différentes pour explorer toute les facettes d’un projet (génétique, biochimie, modélisation, instrumentation). La compétition se déroule en plusieurs phases : - Janvier-Mars : définition des équipes et soumission du projet - Mai : Distribution des « BioBricks » par le MIT, nécessaires pour la réalisation du projet - Septembre : retour du projet (présentation, rapport, nouvelles BioBricks) - Octobre : compétition européenne et africaine à Amsterdam. Des compétitions parallèles sont organisées pour sélectionner les équipes d’amérique et d’asie. - Novembre : présentation au MIT des résultats des meilleurs équipes sélectionnées aux compétitions d’octobre et jury final. Les 500 participants de la compétition régionale (Europe et Afrique) d’iGEM ont été accueillis par la Vrije Universiteit d’Amsterdam, en collaboration avec la TU de Delft et l’université de Groningen. Dans le même bâtiment se tenaient conférences pléniaires et sessions thématiques. Les repas avaient lieu sur place, et deux réceptions ont été organisées le vendredi et le samedi soir. De nombreux volontaires assuraient l’accueil, les déplacements et le bon déroulement technique des présentations. Selon le projet proposé, les équipes étaient regroupées autour de thèmes : - Foundational advances: 12 équipes - Environment: 8 équipes - New application: 8 équipes - Manufacturing: 5 équipes - Information processing: 3 équipes - Software: 2 équipes - Energy food: 2 équipes L’équipe de Grenoble a concouru dans la catégorie « Environment », avec celles de Bilkent UNAM Turkey, Imperial College London, KU Leuven, LMU Munich, Lyon INSA/ENS, Metu Ankara et Valencia (Espagne). Les participants ont été jugés sur une présentation orale, un poster et un site web qui devait être terminé pour le 21 Octobre. Outre le projet scientifique, les équipes doivent évaluer la sécurité de leur projet pour l’homme et pour l’environnement et proposer une réflexion sur ses implications sociétales. Chaque équipe contribue également à enrichir la bibliothèque par de nouvelles des “Biobricks”, qui doivent être décrites et caractérisées. Celles-ci seront intégrées à l’ensemble et disponibles pour le concours 2012. Les 46 équipes participantes ont été examinées par une commission de 30 juges qui en ont sélectionné 18 pour la finale mondiale à Boston (US). Pour le concours européen, des prix ont été attribués pour le meilleur projet (Imperial College Londres), la meilleure Biobrick naturelle (Fatih Turkey) et artificielle (INSA/ENS Lyon), la meilleure modélisation (Edinburgh), la meilleure présentation (Paris-Bettencourt), le meilleur site web (Imperial College Londres), les meilleures mesures expérimentales (WITS CSIR South Africa), le meilleur poster (WITS CSIR South Africa) et le meilleur projet de « human practice ». Pendant la finale mondiale qui se tiendra du 5 au 7 novembre 2011 à Boston (USA), des prix seront décernés dans les mêmes catégories pour distinguer les meilleures équipes mondiales. De même qu’en Europe, seules certaines équipes seront sélectionnées pour participer à la finale, sur les 46 inscrites en Asie et les 60 inscrites en Amérique. Crédits photo iGEM et Roel ten Hagen. http://2011.igem.org/Jamborees Projets présentés par les autres équipes : Parmi les projets présentés, les suivants ont retenu notre attention. Plus d’information est disponible sur le site des équipes (voir le site : http://igem.org/Team_List?year=2011). Imperial College Londres : Auxin, ‘environment’ L’équipe a développé une bactérie capable de stimuler la croissance des racines pour aider les plantes à résister dans les zones désertifiées. Cette bactérie est capable de se déplacer vers les racines, d’y entrer et de synthétiser l’auxine, le facteur de croissance racinaire. Pour empêcher le transfert de gènes de cette bactérie à d’autres espèces, le plasmide est doté d’une activité toxique, pour laquelle seule la bactérie génétiquement modifiée possède l’antidote. Le projet, presque abouti, était remarquablement présenté sur le web et lors de la compétition. WITS CSIR South Africa : Biotweet, ‘new application’ Cette équipe de seulement 5 étudiants, a travaillé sur le contrôle du mouvement des bactéries en orientant les bactéries par des gradients de theophilline et d’atrazine. Ils ont utilisé et amélioré des « riboswitch » qui permettent de changer la direction de rotation des flagelles d’Escherichia coli. Ils proposent comme « biobrick », un riboswitch optimisé et entièrement caractérisé, associable à n’importe quel gène d’intérêt. Ceci est un système régulateur non encore disponible dans la bibliothèque. Paris-Bettencourt : Tube or not Tube ‘foundational advance’ Dans ce projet, l’équipe a utilisé la biologie synthétique pour étudier un problème scientifique : l’existence de nanotubes bactériens, permettant le transfer de molécules et la communication intra- et inter-espèces. Ils ont conçus différents systèmes génétiques pour détecter ces évènements rares, un « concentrateur » et un « amplificateur » et ont étudé le transfert de protéines ou d’acides nucléiques. Ils ont convaincu par la profondeur et la rigueur de leur démarche scientifique, et par une présentation originale et dynamique. KU Leuven : E.D.Frosti ‘environment’ Dans la nature, il existe des protéines de nucléation de la glace et des protéines anti-gel. L’équipe de Leuven a intégré ces protéines dans une bactérie, pour qu’elle puisse, à la demande, faire geler l’eau ou l’en empêcher. Pour éviter une possible catastrophe écologique, ils ont également intégré un gène suicide qui élimine la bactérie lorsque l’on n’a plus besoin d’elle. Leur présentation, sous forme d’une discussion, était originale et pertinente. INSA et ENS Lyon : Cobalt Buster ‘environment’ L’équipe a construit une bactérie capable de concentrer le cobalt et former des biofilms en sa présence. Il serait ainsi possible de récupérer le cobalt radioactif dans les circuits de refroidissement des réacteurs nucléaires. Ce serait une alternative aux résines d’échange d’ions, actuellement utilisées pour épurer ces liquides. L’avantage est le volume réduit des déchets radioactifs. Une de leurs biobriques, celle qui induit la formation de biofilms en réponse au cobalt, a été récompensée. Valencia : water colicin cleaner ‘environment’ Les colicines sont des protéines toxiques pour certaines bactéries, activées par un pH acide. Dans ce projet, l’équipe a associé des Escherichia coli qui sécrètent des colicines à des cyanobactéries qui acidifient réversiblement l’eau à traiter, sous le contrôle de la lumière. L’équipe a bâti un prototype, estimé les coûts et la faisabilité industrielle du traitement. DTU Danemark, équipe 2 : Plug’n Play ‘foundational advance’ Cette a équipe a proposé un système d’assemblage standardisé de fragments d’ADN, qui pourrait rapidement supplanter les systèmes classiques utilisant enzymes de restriction et ligase, ou ceux basés sur la recombinaison. Jusqu’à dix fragments d’ADN peuvent être assemblés d’un coup. Les fragments sont générés par PCR, avec une mutation T U dans le primer. Une enzyme clive l’ADN au niveau du U et une deuxième génère une extrémité cohésive. Des extrémités cohésives longues (10 nucléotides) peuvent être obtenues, ce qui garantit un assemblage précis. Les bactéries sont transformées avec l’ensemble des fragments, et l’activité de ligase cellulaire suffit à générer le plasmide complet. Des collections de fragments d’intérêt pour les cellules eucaryotes ont déjà été générées. Un plasmide permettant l’expression d’un gène rapporteur dans un compartiment d’une cellule eucaryote a été généré rapidement par cette méthode. Par cette technique nouvelle et efficace, ils ont levé un point bloquant pour le développement de la biologie synthétique. Crédit site web de l’équipe : http://2011.igem.org/Team:DTU-Denmark-2/ Postdam Bioware: cyclic peptides for therapy ‘health’ Dans ce projet, les bactéries sont utilisées pour synthétiser des peptides cycliques, dont la séquence peut être soit définie, soit générée au hasard. Les peptides cycliques naturels sont des inhibiteurs de protéases, le plus souvent. Ce sont donc de bons candidats pour la thérapie de plusieurs maladies impliquant des protéases. Leur construction génétique comprend le peptide à synthétiser, les deux enzymes qui permettent de le cycliser, et le transporteur qui est nécessaire à sa sécrétion. Ils ont développé aussi un système de « phage-display » pour sélectionner les peptides actifs sur une protéase d’intérêt. Ces projets, et tous ceux que nous n’avons pas pu commenter, par souci de concision, montrent la richesse de la biologie synthétique et le vaste champ de ses applications. Projet présenté par l’équipe iGem de Grenoble : L’équipe de Grenoble est constituée des étudiants suivants : Geoffrey Bouchage, Grenoble INP Phelma Felix Ciceron, UJF Biologie Marion Cristea, Grenoble INP Phelma Morgane DeGasperi, UJF Biologie Eric Durandeau, UJF Biologie Maxime Huet, Grenoble INP Phelma Jean-Baptiste Lugagne, Grenoble INP Phelma Clément Masson, UJF Biologie Feriel Melaine, UJF NanoBiologie Samia Menad, UJF NanoBiologie Robin Pinilla, UJF Biologie Stéphane Pinhal (advisor), étudiant en thèse épaulés par les « instructors » Hans Geiselmann, UJF Biologie Franz Bruckert, Marianne Weidenhaupt, Grenoble INP Phelma, Hidde de Jong, Delphine Ropers INRIA Ont participé au Jamboree d’Amsterdam l’ensemble des étudiants, Franz Bruckert, Marianne Weidenhaupt et Delphine Ropers. Notre projet est (http://2011.igem.org/Team:Grenoble). intitulé Mercuro-coli Mercuro-coli : un biosenseur innovant pour quantifier les métaux lourds Nous avons inventé un biocapteur facile à utiliser, transportable et capable de quantifier la concentration de mercure dans un échantillon aqueux. Il est basé sur la comparaison d’une concentration de mercure inconnue avec une concentration connue d’IPTG. Un gradient d’IPTG est présent sur une bandelette contenant des bactéries génétiquement modifiées. Lorsque la solution de mercure est appliquée, le réseau génétique induit la différentiation de bactéries soit dans un état émetteur, soit dans un état récepteur selon la concentration relative d’IPTG et de mercure. Les bactéries soumises à une concentration prédominante de mercure, deviennent émettrices et sécrètent une molécule de signalisation (quorum sensing) qui active les bactéries receptrices, soumises à une concentration prédominante d’IPTG. Cette activation conduit à la synthèse d’un pigment rouge à la fontière entre bactéries émettrices et réceptrices. De cette manière, une bande rouge apparaît le long du gradient d’IPTG à une position qui permet d’en déduire la concentration de mercure inconnue. Crédit : http://2011.igem.org/Team:Grenoble A : différentiation de bactéries « émettrices » et « réceptrices » selon la concentration relative d’IPTG et de mercure. B : coloration à l’interface entre les deux populations de bactéries. Nous avons concouru dans la catégorie « environnement » et pour la meilleure modélisation et le meileur projet « human practice ». Notre concept de biocapteur a été apprécié car quantification en plus de la détection de molécules. Les déterministe et stochastique ont permis d’orienter les d’ajouter des modules au réseau génétique et de définir les du capteur. il permet la modélisations expériences, performances D’ici Boston, il reste à terminer et à tester dans sa totalité le circuit génétique, à améliorer notre site web et à perfectionner nos présentations pour la finale. Du travail en perspective et l’occasion de montrer le meilleur de l’équipe Grenobloise 2011 ! Marianne Weidenhaupt & Franz Bruckert