L’ exception
Images en Dermatologie • Vol. III • n° 3 • juillet-août-septembre 2010
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Cas clinique
L’étiologie du PO n’est pas parfaitement connue et plusieurs explications ont été formu-
lées. D. Engel évoque le rôle des enzymes lysosomales relarguées par les chondrocytes
qui seraient responsables d’une destruction progressive du cartilage avec formation de
cavités
(1)
. Mais des études ultérieures n’ont pas montré d’augmentation de l’activité
lysosomale dans le liquide d’aspiration ni d’augmentation du nombre de lysosomes dans
les chondrocytes. Une autre théorie suspecte une dysplasie congénitale du cartilage
de l’oreille liée à une anomalie de maturation lors de l’embryogenèse.
Il semblerait que des traumatismes minimes et répétés (même s’il n’est pas toujours
facile de les objectiver à l’interrogatoire) pourraient constituer un facteur précipitant
(4)
.
Ces traumatismes (oreillers très durs, écouteurs, casque de moto, port de charges
sur les épaules…) induiraient, par des phénomènes ischémiques, une dégénérescence
hyaline du cartilage responsable d’abord de microkystes, puis, par coalescence, de
larges cavités. Un autre argument en faveur d’une origine traumatique est la présence
d’hémosidérine dans le liquide de ponction et d’un taux élevé de LDH. Les hypothèses
de chondrite inflammatoire ou auto-immune paraissent moins probables.
Le traitement est habituellement chirurgical mais les modalités précises font l’objet
de controverses compte tenu de la fréquence des récidives
(5)
. La simple aspiration à
l’aiguille ou le drainage sans compression sont associés à un taux élevé de récidives.
La décortication chirurgicale qui consiste à exciser le cartilage dystrophique par voie
antérieure et à effectuer un curetage du mur postérieur suivi d’une compression est
préférable, même si l’on estime la récidive à environ 40 %. Cette compression peut
être assurée par des pansements ou des bandages compressifs, ou mieux – car plus
esthétiques et constants – par des bourdonnets compressifs (certains utilisent des
boutons de chemise !) devant et derrière l’oreille, qui sont laissés en place pendant
1 semaine environ. Des instillations de minocyclines (1 mg/ml), de corticoïdes retard
(10 mg/ml), de tétradécyl sulfate de sodium (Thrombovar®) ou de colle biologique ont
été proposées, avec plus ou moins de succès ; or, elles sont parfois responsables de
séquelles dystrophiques définitives et doivent donc être évitées.
Conclusion
L’association d’un pseudokyste de l’oreille à une dermatite atopique (DA) ne semble
pas fortuite : sur 60 publications de PO, 8 observations sont associées à une DA et
surviennent beaucoup plus précocement chez des patients âgés de 4 à 28 ans
(6)
.
On estime que 1 % des atopiques, surtout ceux qui ont une histoire assez longue de
DA résistante et touchant le visage et le cou, pourraient présenter un PO avec une
régression spontanée possible. Les frottements et le grattage répétés secondaires au
prurit sont donc susceptibles de précipiter cette affection. Deux cas de PO ont égale-
ment été décrits chez des patients qui présentaient un prurit intense contemporain
d’un lymphome ayant régressé sans traitement local sous chimiothérapie.
II
Références bibliographiques
1.
Engel D. Pseudocysts of the auricle in Chinese. Arch Otolaryngol 1966;83:197-202.
2.
Zhu LX, Wang XY. New technique for treating pseudocyst of the auricle. J Laryngol Otol
1990;104:31-2.
3.
Lim CM, Goh YH, Chao SS, Lynne L. Pseudocyst of the auricle. Laryngoscope 2002;112:2033-6.
4.
Tan BY, Hsu PP. Auricular pseudocyst in the tropics: a multi-racial Singapore experience.
J Laryngol Otol 2004;118:185-8.
5.
Kanotra SP, Lateef M. Pseudocyst of pinna: a recurrence-free approach. Am J Otolaryngol
2009;30:73-9.
6.
Ng W, Kikuchi Y, Chen X, Hira K, Ogawa H, Ikeda S. Pseudocysts of the auricle in a young adult with
facial and ear atopic dermatitis. J Am Acad Dermatol 2007;56:858-61.