
PRODUCTEUR PLUS
Les sols et l'agriculture, Gérard Millette Ph.D.
Chapitre 41
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naphtalène et du vinaigre, qui stimule tellement la croissance
des racines que la plante peut en mourir. On s’en sert donc
comme produit de base pour des herbicides.
D’autres hormones produites par les racines et exsudées
sont reprises par celles-ci puis circulent de nouveau dans la
plante. Ces hormones comprennent la cytokinine et la gibbé-
relline, qui stimulent énormément la croissance des radicelles
et des poils absorbants, jusqu’à l’éclatement des bourgeons
au printemps. La gibbérelline a un métabolisme très com-
plexe et une composition très diversifiée. On connaît présen-
tement 62 modèles différents de la molécule de gibbérelline.
Elle se situe partout dans la plante, y compris les racines. Elle
donne les signaux d’adaptation pour que la plante évolue
selon les saisons et les changements de conditions écolo-
giques, comme l’allongement des jours, les variations de tem-
pérature, les conditions d’humidité, etc.
MÉCANISMES D’ABSORPTION
La partie la plus active de la racine pour absorber les élé-
ments minéraux est celle des poils absorbants, située juste en
arrière de la zone de croissance qui pousse l’apex dans le sol.
En vieillissant, les racines s’entourent d’un cortex fabriqué
avec de la lignine et de la subérine, ce qui les rend imperméa-
bles à toute autre pénétration d’éléments à travers les tissus.
Cette enveloppe correspond à l’écorce qui enveloppe les
tiges. L’absorption des éléments nutritifs minéraux se fait de
deux façons. La première façon est par diffusion. La solution
nutritive, faite d’eau avec les éléments minéraux dissous, pé-
nètre directement par les espaces entre les cellules des poils
absorbants. La seconde façon est par l’absorption directe par
les cellules des poils absorbants, à travers leur membrane, où
le phénomène de l’osmose (40) est prédominant.
L’absorption des minéraux, en retour, augmente la de-
mande d’eau par la plante, toujours à cause de l’osmose. Ceci
crée une pression à l’intérieur des cellules, qui forme des
conduits. Grâce aux parois imperméables de la partie mature
des racines, l’eau contenant les éléments dissous ne peut pas
s’échapper à l’extérieur et est poussée vers le haut dans la
plante. Cette poussée s’ajoute au système de succion vers le
haut qu’exercent les cellules de la tige et des feuilles (40).
AUTRES EFFETS DES EXSUDATS
En plus d’influencer le métabolisme de la plante en fonc-
tion de toutes les conditions écologiques exigeantes, certains
exsudats agissent comme gardes du corps de cette plante.
Par exemple, les racines d’asperges exsudent des hydrocar-
bones toxiques qui tuent les nématodes du sol qui pourraient
attaquer les racines.
Le pyréthrum, connu sous le nom de rose d’Indes, pro-
duit un insecticide naturel appelé pyréthrine, mais ses racines
relâchent aussi des polythiéniles dans le sol, qui tuent les né-
matodes et autres sortes de vers qui pourraient les attaquer.
Les racines de diverses sortes de haricots relâchent aussi
des poisons dans le sol pour se protéger contre les vers gris.
Par contre, les plants de tomates n’ont pas cette protection
et les larves grises ou blanches les attaquent quand le sol est
frais et humide au printemps, au moment de la transplanta-
tion.
Les racines de lin sécrètent de l’acide cyanhydrique, ap-
pelé aussi acide prussique, qui est un poison violent autant
pour les insectes et les champignons que pour les humains.
Des associations de plantes antipathiques peuvent cau-
ser des ennuis de croissance. Certaines mauvaises herbes ont
des racines qui exsudent des composés qui empêchent les
autres plantes ensemencées d’absorber l’azote et le potas-
sium. C’est ainsi que le chiendent agit sur les racines de maïs.
Celui-ci montre alors des signes de déficiences, même s’il a
été fertilisé adéquatement. Le sorgho, par exemple peut di-
minuer de plus de 50 % les rendements de la culture qui le
suit, en dépit de toute fertilisation, sauf si cette plante est une
légumineuse. Les résidus de plants de sorgho, c’est-à-dire le
chaume plus les racines, appelés éteule, contiennent jusqu’à
2 000 ppm de sucrose à comparer à 2 ou 3 ppm pour l’éteule
de maïs. Or, les nodules des légumineuses recherchent les hy-
drocarbones, et y trouvent un festin. Il faut cependant une lé-
gumineuse qui fixe beaucoup d’azote. Ceci exclut le soya, qui
fixe environ 180 kg/ha d’azote, à comparer à 500 kg/ha pour
la luzerne.
Plusieurs autres espèces d’herbes empêchent la nitrifi-
cation de l’azote présent dans le sol, et réduisent ainsi la crois-
sance des autres plantes. Rappelons-nous que tout apport de
matière organique avec un rapport carbone/azote C/N élevé
(2, 32, 33) provoque ces réactions et peut même réduire la for-
mation de l’ammoniac et des nitrates. Si l’aération du sol (4)
est faible, des nitrites dommageables à la croissance des
plantes peuvent s’accumuler.
La pluie entraîne dans le sol les éléments minéraux
des feuilles et autres résidus de la nature. C’est ce
qu’on appelle la pollution atmosphérique. Sans celle-
ci, qui existe depuis toujours, nos forêts seraient à
toute fin pratique très peu productives.
Figure 41.4