
Adresse postale : BP 12585 Casablanca 20052 Maroc Rue du Corail, Ain Diab/Anfa
principe de précaution (PP) ne peut être mis en œuvre que dans un environnement où les
responsabilités sont bien définies et assumées et où les structures sont organisées de manière à être
capable d’instaurer un système de veille permanent dans les différents secteurs notamment
technologique, agroalimentaire et sanitaire.
Les questions fondamentales posées sont :
- Le PP est-il compatible avec les systèmes de gouvernance existants dans les pays du sud
notamment au Maroc ?
- Les pays du sud ont-ils les moyens de courir des risques évalués théoriquement lors de
l’application des nouvelles découvertes et surtout on-ils les moyens de déceler ces risques
juste au moment de son apparition
- Les responsables des pays du sud impliqués dans la gouvernance acceptent-ils la
responsabilité de mettre en œuvre le concept de PP ?
Pour répondre à ces questions, il est utile de relater au préalable quelques expériences phares vécues
au Maroc.
- Histoire du traitement de la leucémie : 2 enfants leucémiques qui devaient recevoir une
chimiothérapie aplasiante, nécessitaient pour leur guérison une hétérogreffe de la moelle osseuse
provenant de la fratrie. Les médecins spécialistes et le plateau technique pour cette opération étaient
disponibles. Aucune thérapeutique similaire n’a jamais été effectuée auparavant dans le pays. Le
risque d’une telle intervention était évalué à l’étranger. Une autorisation a été demandée au ministère
de la santé pour entamer ce protocole thérapeutique. Le ministère de la justice a été également sollicité
pour autoriser l’hétérogreffe entre donneur et receveur. Aucun de ces 2 départements n’a fourni de
réponse à ces demandes d’autorisation. Le ministère de la santé a demandé un avis du comité
d’éthique auto formé et non encadré par une réglementation. Ce dernier a statué par avis favorable. Le
ministère a mis en avant l’avis de ce comité pour octroyer l’autorisation.
- Traitement de l’hémophilie : un médecin chercheur a déposé auprès du ministère l’autorisation de
mener un essai clinique sur l’efficacité et la tolérance d’un bio-médicament : facteur 8 anti-
hémophilique chez des enfants hémophiles. Le comité d’éthique avait donné un avis favorable ; le
ministère s’était abstenu de donner une réponse. L’essai thérapeutique ne s’était pas réalisé au Maroc.
Dix ans plus tard le médicament en question a été commercialisé. L’absence de la réalisation de
l’essai a donc fait perdre aux enfants hémophiles les bénéfices d’une thérapeutique innovante et a
privé les praticiens de prendre connaissance précocement l’expérience d’une nouvelle thérapeutique.
-Vaccination antigrippale N1H1 : face à la pression médiatique internationale au sujet du danger
encouru par la grippe N1H1, les responsables au Maroc ont fait « du suivisme » et se sont mobilisés
pour acquérir de grandes quantités de vaccins et de traitement oral antigrippal. Cette quantité n’a pas
été utilisée en sa totalité, il n’y a pas eu d’épidémie de grippe N1H1 au Maroc et une grande ressource
financière a été dépensée en dehors de toute efficience.
- Suspension de la recherche biomédicale en 2010 : le ministre de la santé entre 2008 et 2011 a décidé
d’une manière unilatérale de suspendre en février 2010 toute recherche biomédicale qui s’effectuait
normalement auparavant. Le motif avancé était le vide juridique. Le ministère a cependant élaboré sur
une période de 5 ans un texte de loi assurant la protection des personnes dans le domaine de la
recherche biomédicale. Ce texte n’est pas encore promulgué en 2011.Le ministre de l’époque juriste
de formation n’a pas pris la mesure de cette décision qui prive les patients des nouvelles avancées
technologiques et biomédicale, prive des chercheurs d’un transfert de technologie et freine la
recherche biomédicale de tout un pays !(NB le nouveau Ministre de la santé installé en décembre
2011, professeur de médecine vient de ré autoriser la recherche biomédicale en mars 2012 en éditant
une circulaire l’encadrant et en attendant que la loi élaborée soit validée par les instances
parlementaires et gouvernementales.
On constate donc d’ après ces expériences qu’on a souvent recours au comité d’éthique pour les
recherches ou des procédés innovants mais sans donner toujours une réponse favorable à la mise en
place de nouveaux concepts. On constate également que les responsables de santé au Maroc de
l’époque (jusqu’en 2011) pratiquent souvent un suivisme des décisions de l’Etat français concernant
les nouveaux procédés et les nouveaux produits de santé. On peut être tenté de traduire cette attitude