Les musulmans de France réagissent à la radicalisation de l’Islam en Europe.
«Nous avons constaté que les imams ne sont pas outillés pour faire face à ce nouveau
phénomène de radicalisation des jeunes», souligne Mohammed Moussaoui, aujourd'hui
président de l'Union des mosquées de France .
«C'est un fait aujourd'hui que ces jeunes qui basculent vers la radicalité sont en rupture
presque totale avec l'institution religieuse : il faut en chercher les causes»
, poursuit-il.
«On a fait un gros travail dans les mosquées, où le discours véhiculé est celui d'un islam
apaisé. Mais ce n'est pas ce que recherchent certains jeunes, ça ne les intéresse pas, donc ils
vont sur internet pour avoir des réponses à leurs fantasmes»
, se désole Aslam Timol, représentant de l'île de la Réunion au CFCM.
Pour l'anthropologue du fait religieux Dounia Bouzar, membre de l'Observatoire de la laïcité, «
c'est très bien de rassurer, de redire ce qu'est l'islam. Mais les radicaux se fichent pas mal de
ce qu'est l'islam, c'est ça le problème». «C'est pour ça que j'ai monté une cellule avec des
psychologues: il faut trouver d'autres façons de permettre des sorties de la radicalité»
, ajoute celle qui dirige le Centre de prévention contre les dérives sectaires liées à l'islam.
L'experte s'intéresse notamment à l'endoctrinement pratiqué par le groupuscule dit des
«véridiques»
, qui attire en Syrie des jeunes Français, notamment des filles, sous couvert d'engagement
humanitaire.
La radicalité de Mohamed Merah et Mehdi Nemmouche est d'une autre nature. «Ils n'ont pas
fréquenté de mosquée, on ne peut pas dire que c'est le catéchisme musulman qui a été mal
fait. Mais dans notre inconscient, en Europe, nous sommes tous en train - politiques, médias,
sociologues, musulmans, non-musulmans - de construire une figure du musulman comme
guerrier» ,
déplore l'anthropologue.
«Or on observe une recherche de toute-puissance chez ces hommes sans père ni repère, qui
avaient le sentiment de ne pas avoir de place, n'avaient pas de lien au territoire»,
fait valoir Dounia Bouzar.
«Je pense qu'il faut former les imams afin qu'ils comprennent mieux les processus d'emprise
mentale»
, ajoute-t-elle :
«Je vois chez eux l'envie de se remettre en question dans la façon dont ils enseignent : on
travaille peut-être trop sur l'image du Prophète combattant, pas assez sur le messager de
paix».
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