JTA 2007 : Cellules souches embryonnaires humaines : réparer à la

Cellules souches embryonnaires humaines :
réparer à la carte nos organes défaillants et nos
tissus endommagés
B Hedon , L Reftmann , F Pellestor , V Loup , T Anahory et Samir Hamamah
Introduction
Pourquoi tout ce bruit autour de l’embryon humain ? Parce que aujourd’hui, 26 ans après la naissance de
Louise Brown par fécondation in vitro, l’assistance médicale à la procréation (AMP) reste un sujet sensible en
raison des implications philosophiques, morales, médicales, sociologiques et religieuses. Mais, des progrès
réalisés les 10 dernières années ont été soldées en 1998 à partir d’embryons humains cultivés pendant une
semaine, l’obtention à ‘volonté’ des cellules souches pouvant servir au traitement de certaines maladies
(Thomson et al, 1998). Une cellule souche est une cellule indifférenciée, issue de l’embryon, du foetus ou de
l’adulte. Elle est caractérisée par ses capacités d’auto renouvellement (multiplication à l’identique pour
produire de cellules souches), de différentiation dans certaines conditions (pour engendrer les cellules
spécialisées qui constituent les différents tissus et donc immortelles), et de prolifération cellulaires en culture.
Des découvertes très récentes ont démontré la possibilité d’obtenir des cellules souches pluripotentes, plus
communément appelées cellules souches embryonnaires ou cellules ES capables de régénérer n’importe
quel organe déficient (Rosenthal, 2003).
Une nouvelle ère dans la biologie des cellules souches embryonnaire chez l’homme a débuté il y a 6 ans
avec l’obtention de cellules issues de blastocystes et de tissus foetaux ayant la possibilité unique de se
différencier en cellules de n'importe quel autre tissu de l'organisme.
Les cellules souches représentent donc aujourd'hui un enjeu scientifique majeur et leur utilisation dans le
cadre de nouvelles thérapies semble ouvrir des perspectives nouvelles.
Le Royaume-Uni en 2001 et la Belgique en 2003, ont donné l’autorisation de mettre en oeuvre de recherches
sur le clonage thérapeutique, c’est-à-dire la création d’embryons humains clonés, source de cellules souches
multipotentes. Il en est de même pour la Belgique depuis quelques mois. En France, grâce à la loi bioéthique
de 6 août 2004), il est désormais possible d’importer des lignées ES provenant des pays qui en permettent
l’exportation. Egalement, il est possible en France de dériver en vue de l'obtention des cellules souches
embryonnaires à partir d’embryons congelés pour lesquels il n'y a plus de projet parental. 3 équipes
Françaises ont déjà été autorisés pour la dérivation.
Ce qui nous inquiète aujourd'hui c'est la tricherie mise en lumière après la publication de l'équipe de Hwang.
Dès 2004, les résultats du Hwang publiés dans le journal 'Science' ont été mis en cause. Leur reproductibilité
par d'autres équipes compétentes, s'est avérée impossible. Est-ce que l'article publié en 2004 dans
représentait déjà une fraude volontaire ? Doit-on incriminer la compétition et l'immense pression médiatique
et financière subie par un chercheur adulé dans son pays (le Dr Hwang demeure le premier à avoir réussi le
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clonage d'un chien)? Malheureusement, la fraude n'est pas rare en science et en médecine. Des cliniciens
des Etats-Unis ont essayé dans le passé de tricher sur le devenir et l'évolution de la tentative de FIV en
faisant croire aux patients qu'elles étaient enceinte via la simple administration de l'hormone hCG avant de
leur annoncer une prétendue fausse couche. D'autres cliniciens ont utilisé leur propre sperme afin
d'encaisser le bénéfice engendré par ces dons. Bien sûr, ces affaires là ont donné lieu à des procès et à
l'emprisonnement des fautifs.
On doit à nouveau reconsidérer la faisabilité à court terme du clonage humain à visée thérapeutique au
regard des difficultés rencontrées. D'autre part, ce scandale risque d'amplifier les peurs existantes vis à vis
du clonage à visée thérapeutique chez l'homme. Dans cette situation et dans le doute qui persiste
actuellement, l'opinion publique comme les autorités peuvent choisir l'interdiction du clonage thérapeutique
dans les pays où il est autorisé (Royaume Uni et la Belgique). La tricherie et la fraude sont inévitables et
sans doute fréquentes dans tout les secteurs de la société et pourtant cela reste abominable lorsqu'elles
proviennent de chercheurs soit disant dévoués à la recherche de la vérité. Heureusement, la vaste majorité
des chercheurs est animée par un sens aigu de la vertu et par un réelle motivation pour le progrès des outils
thérapeutiques au service de l'homme.
Chronologie de la recherche sur les cellules souches
embryonnaires.
Quelques dates importantes ayant marqué l’avancé spectaculaire de la recherche sur les cellules souches
embryonnaires humaines :
1981 : isolement et culture des cellules souches embryonnaires (ES) de souris (Evans et al, 1981)
1994 : isolement de cellules de la masse cellulaire interne (ICM) de blastocystes humains et les maintenir en
culture (Bongos et al, 1994).
1995 : isolement des lignées de cellules souches embryonnaires de primate . Ces cellules souches
embryonnaires sont diploïdes et ont un caryotype normal. Elles sont pluripotentes et se différencient en types
cellulaires dérivés de tous les trois feuillets primordiaux. On constate que les cellules souches embryonnaires
de primates ressemblent aux cellules souches de carcinomes embryonnaires humaines et permettent de
penser qu'il pourrait être possible de produire et de maintenir en vie des cellules souches embryonnaires
humaines in vitro (Thpmson et al, 1995).
1998 : production des cellules souches embryonnaires humaines à partir de la masse cellulaire interne d'un
blastocyste humain cédé par un couple ayant eu une FIV. Les cellules ainsi obtenues sont cultivées et
subissent plusieurs passage en conservant un caryotype normal, préservant un taux élevé d'activité
télomérasique et exprimant une variété de marqueur typique de cellules carcinomes embryonnaires
humaines et de cellules souches embryonnaires de primates (Thomson et al, 1998) .
2000 : Production de cellules souches embryonnaires humaines à partir de la masse cellulaire interne de
blastocystes cédés par des couples inscrits en FlV. Ils constatent que les cellules embryonnaires souches
prolifèrent in vitro sur des périodes prolongées tout en conservant un caryotype normal. Elles se différencient
spontanément en lignées cellulaires somatiques issues des trois feuillets primordiaux et forment des
tératomes quand on les injectent dans des souris immuno-déficientes (Pera et al, 2000).
2000 : production de cellules souches embryonnaires humaines et leur différenciation en neurones
(Reubinoff et al, 2000)
2003 : production de cellules souches embryonnaires humaines à partir de dents de lait humaines tombées
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naturellement (Masako et al, 2003).
2004 : cellules souches embryonnaires humaines ont été obtenues par transfert du noyau d’une cellule
somatique d’une femme dans son ovule anucléé (Hwang et al 2004)
2005 : cellules souches embryonnaires humaines ont été obtenues par transfert du noyau d’une cellule
somatique issus des 11 malades (Hwang et al 2005)
Définitions des cellules souches ?
Les cellules souches sont des cellules indifférenciées capables d'une part de se reproduire afin de maintenir
un réservoir permanent de leur espèce, et d'autre part, de donner naissance à des cellules différenciées à
l'exemple entre autres des cellules de l'hématopoïèse, des hépatocytes ou les cellules musculaires. Une
propriété importante est le caractère clonogénique de ces cellules, une seule cellule est capable de
renouveler une population entière (Weissman et al, 2001). On peut classer les cellules souches selon leur
capacité à donner un ou plusieurs types cellulaires :
Les cellules totipotentes : Les cellules dites totipotentes forment l'embryon dans les quatre premiers jours
de son développement, elles peuvent engendrer tous les tissus de l'organisme et participent à la formation
d'un être humain entier.
Les cellules souches pluripotentes : plus communément appelées cellules souches embryonnaires (ES),
elles sont issues de la partie interne du blastocyste. Les cellules ES sont dérivées des cellules de la masse
cellulaire interne (ICM) d’un blastocyste (photo 1). Actuellement, 15 lignées obtenues à partir de l’embryons
humain sont disponibles (Cowan et al , 2004).
Il existe une autre variété de cellules pluripotentes, les cellules primordiales germinales (cellules EG). Elles
sont prélevées sur des foetus avortés à la huitième semaine, elles appartiennent à la lignée cellulaire qui
formera les ovules et les spermatozoïdes dont leurs capacités de différenciation sont inférieures à celles des
cellules ES. Egalement, il y a les cellules EC (embryonal carcinoma cells). Derivent de lignées immortelles de
tératocarcinome.
Les cellules souches multipotentes : elles sont à l'origine de plusieurs types de cellules différenciées. Les
plus connues sont les cellules souches hématopoïétiques de la moelle osseuse, à l'origine de toutes les
cellules sanguines (Erythrocytes, leucocytes ,thrombocytes, lymphocytes.). Les cellules souches
mésenchymateuses, quant à elles, se révèlent capables de produire les chondroblastes (futures cellules
cartilagineuses), les myoblastes (futures cellules musculaires) et les adipoblastes (futures cellules
adipeuses).
Les cellules souches unipotentes : elles ne peuvent former qu'un seul type de cellules différenciées. Ce
sont par exemple les kératinocytes de la peau.
Quelles sont les sources d’obtention de cellules souches embryonnaires chez
l’homme ?
Cette question soulève aujourd'hui dans le monde des problèmes tant éthiques que scientifiques.
Théoriquement, il existe deux sources permettant d'obtenir des cellules souches embryonnaires:
à partir d’embryons dits surnuméraires obtenus lors d’une tentative de fécondation in vitro : ce sont des
embryons dont leurs caractéristiques n’est pas compatible avec une congélation (mauvaise qualité
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morphologique), soit 2 embryons par tentative en moyenne.
à partir d’embryons congelés pour lesquels il n’y a plus de projet parental : la loi Française prévoit qu’au
bout de 5 ans, les embryons non utilisés seront détruits. Avec le consentement des parents, ces embryons
peuvent, dans certains pays (Royaume-Uni, Suède, Finlande), être utilisés pour des recherches spécifiques
sous le contrôle d’une haute autorité. Il est actuellement impossible de dresser un bilan exacte sur le plan
national, car l’ambiguïté de la loi de 1994, non révisée, n’a pas aidé à la collecte précise des intentions des
couples ayant des embryons congelés.
à partir d’embryons créées par clonage thérapeutique d'une cellule somatique (Wang et al, 2004) : ce
sont d’embryons obtenus par fusion entre le noyau d'une de ses cellules somatiques et un ovocyte énucléé.
Le gouvernement Britannique a déjà autorisé cette pratique depuis 2001 ainsi que la Belgique en 2003 à
condition que l'embryon obtenu par cette approche ne soit en aucun cas transféré dans un utérus d’une
receveuse. Le clonage dit reproductif est aujourd'hui condamné dans pratiquement dans le monde entier.
Questions et problèmes d’ordre philosophique, politique, éthique et juridiques posés
par l’utilisation de cellules souches embryonnaires
La question philosophique ou éthique est de savoir si le statut de l'embryon dans les premiers stades de son
développement permet son utilisation sans autre objection. L'embryon n'est-il qu'un amas de cellules ou est-il
à considéré comme une future personne à part entière ?
Si on considère que la vie commence dès la fécondation, la destruction alors de cet embryon lors de son
utilisation pour obtenir de cellules souches est inacceptable, car elle revient à instrumenter un être humain.
D’autre considèrent que la vie commence après la fécondation, dans ce cas là on risque de parler de la
‘personnification différée de l’embryon’ .
Des réponses à ces questions seront nécessaires avant l'intégration des cellules souches embryonnaires
dans des protocoles thérapeutiques.
Puisque la recherche sur l’embryon humain est autorisée dans notre pays sous certaine condition, peut-on
espérer que la recherche sur les cellules souches d’origine embryonnaires le sera également ? Si non,
d’autres pays le feront comme c’est le cas actuellement avec la perspective de pouvoir utiliser les cellules
souches importées d’ailleurs. De toutes les façons, l’utilisation éventuelle à des fins scientifiques ou
thérapeutiques d’embryons surnuméraires obtenus lors d’une tentative de fécondation in vitro soulève la
question de la propriété de ces embryons ou des cellules ES qui en dérivent, de leur commercialisation.
La législation Française actuellement en vigueur stipule que toute recherche sur l’embryon préimplantatoire
qui n’est pas réalisée pour son bénéfice directe est strictement interdite. Dans ces conditions, toute obtention
de cellules souches embryonnaires sera impossible.
En l’état actuel de chose, le statut des embryons surnuméraires obtenus après Juillet de 1994, est
complètement flou et ambigu en l’absence de révision des lois de bioéthique.
En 2002 et juste avant le changement de gouvernement, l’administration Jospin a autorisé l’importation de
lignées de cellules souches embryonnaires . L’administration de Rafarin semble s’y opposer sous la pression
de groupe ‘Alliance pour les droits de la vie’ . Ce groupe ayant contesté la validité de l’autorisation de
l’importation de cellules souches a saisi le Conseil d’Etat et a obtenu l’annulation. Cependant, le tribunal
administratif de Paris a validé l’autorisation d’importation des cellules souches embryonnaires au motif d’une
distinction entre embryon et cellules souches embryonnaires
Les députés socialistes ont proposé de supprimer le moratoire relatif à la recherche sur les cellules souches
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embryonnaires humaines lors de l’examen en deuxième lecture du projet de loi sur la bioéthique en
décembre 2003. A titre exceptionnel et pour une période de 5 ans, les députés en décembre 2003, ont voté
en second lecture, l’autorisation des recherches sur l’embryon humain. Au Sénat, la loi sera discutée en
second lecture le 8 Juin.
En Allemagne, le comité central d’éthique pour la recherche sur les cellules (ZEK), lié à l’institut Robert Koch
(RKI), a autorisé la firme ProteoSys AG à importer les cellules souches dont les lignées WA01, WA07 et
WA09 bien que toute forme de clonage humain y compris celui à des fins de recherche médicale soit
interdite.
Utilisations potentielles des cellules souches embryonnaires humaines:
Applications en Recherche fondamentale :
Etant capables de se reproduire indéfiniment et de donner naissance à tous les types de cellules existants,
les cellules souches embryonnaires représentent un précieux outil de recherche fondamentale. Grâce aux
cellules souches embryonnaires, les travaux de recherche sur l'embryogénèse et l'oncogénèse trouveront
des opportunités nouvelles d'analyse et d'observation. De nouveaux médicaments seront testés sur différents
types cellulaires. Des cellules souches embryonnaires humaines pourraient être utilisées dans l'étude de
l'embryogénèse précoce et permettre de mieux comprendre des phénomènes qui ont pour conséquence des
défauts congénitaux et des anomalies placentaires pouvant conduire à des avortements spontanés.
En étudiant des cellules souches embryonnaires humaines in vitro, il pourrait être possible d'identifier les
évènements génétiques, moléculaires et cellulaires qui aboutissent à ces anomalies et de développer des
méthodes pour les prévenir. De telles cellules pourraient aussi être utilisées pour explorer les effets des
anomalies chromosomiques au stade précoce du développement. Cela pourrait inclure la capacité d'observer
le développement des tumeurs pédiatriques précoces dont plusieurs sont d'origine embryonnaire.
Thérapie cellulaire
Les cellules souches embryonnaires pourraient constituer le point de départ de la thérapie cellulaire . Chez la
souris, diverses études ont montré que des cardiomyocytes développés à partir de cellules souches
embryonnaires murines sont capables de coloniser le tissu cardiaque endommagé . Des rats paralysés
traités par injection de cellules souches embryonnaires ont retrouvé leur mobilité.
De nombreux usages ont été proposées pour l'utilisation des cellules souches embryonnaires humaines.
L'usage le plus souvent évoqué est leur utilisation dans la thérapie de la transplantation , pour remplacer ou
restaurer des tissus endommagés par la maladie ou d'autres lésions.
Transplantations :
Les maladies qui pourraient être traitées par transplantation de cellules souches embryonnaires humaines
sont par exemple la maladie de Parkinson, le diabète, les lésions traumatiques de la moelle épinière, les
dégénérations des cellules de Purkinje, la dystrophie musculaire de Duchenne
de Boulogne, l'infarctus du myocarde et l'oestéogénésis imperfecta. Cependant les traitements de ces
maladies exigent que la différenciation des cellules souches embryonnaires humaines soit induite vers des
types cellulaires spécifiques.
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