Saint Louis, Philippe le Bel, les derniers Capétiens directs (1226

Saint Louis, Philippe le Bel, les derniers Capétiens directs
(1226-1328)
Charles-Victor Langlois
Texte mis en page par Marc Szwajcer
LIVRE PREMIER — LES ÉVÉNEMENTS
POLITIQUES (1226-1285)
Chapitre I — La minorité de Louis IX
I. Blanche de Castille, son entourage et ses adversaires — II. Le gouvernement de Blanche de Castille,
jusqu’au départ du cardinal de Saint-Ange — III. Chevauchées et conventions, de 1229 à 1231 -— IV.
Dernières années de la régence.
Chapitre II — Louis IX et son entourage
I. Louis IX — II. Propos et maximes de Louis IX — III. L’entourage de Louis IX.
Chapitre III — Politique intérieure (1235-1270)
I. La noblesse — II. Louis IX, le Saint-Siège et le clergé de France — III. Les villes et le commun.
Chapitre IV — Politique extérieure (1235-1270)
I. La France, la Papauté et l’Empire jusqu’en 1254 — II. Arbitrages de Louis IX (Flandre, Angleterre, etc.) —
III. Louis IX et les royaumes du Midi — IV. La question d’Orient.
Chapitre V — Le temps de Philippe III (1270-1285)
I. Philippe III et son entourage — II. Les premières années du règne — III. Relations avec les royaumes du
Midi — IV. La croisade d’Aragon.
LIVRE II — LES ÉVÉNEMENTS POLITIQUES (1286-
1328)
Chapitre I — Les derniers Capétiens directs
I. Philippe le Bel et ses fils — II. L’entourage des derniers Capétiens directs.
Chapitre II — Philippe le Bel et Boniface VIII
I. Philippe le Bel et les prédécesseurs de Boniface. Avènement de Boniface — II. Le premier différend entre
Philippe et Boniface — III. Les origines du second différend. La rupture — IV. L’affaire de Bernard Saisset -
V. Le second différend (jusqu’en novembre 1302) — VI. Le second différend, de novembre 1302 à juin 1303 —
VII. L’attentat d’Anagni — VIII. L’épilogue du différend sous Benoît XI et Clément V.
Chapitre III — Philippe le Bel et Clément V. L’affaire des templiers
I. L’Ordre du Temple au commencement du XIVe siècle — II. Préliminaires du procès des Templiers — III.
Le procès des Templiers : première phase, jusqu’à l’été de 1308 — IV. Le procès des Templiers : seconde
phase, jusqu’au Concile de Vienne — V. L’Ordre au Concile de Vienne — VI. Épilogue de l’affaire.
Chapitre IV — Les causes célèbres des premières années du XIVe siècle
I. Bernard Délicieux — II. L’affaire de Guichard de Troyes — III. Les brus du roi — IV. Autres procès et
faits-divers.
Chapitre V — Juifs, Lombards, monnaies
I. Les Juifs — II. Les Lombards — III. Les monnaies.
Chapitre VI — Le roi et la nation (1285-1328)
I. L’Église de France sous Philippe le Bel — II. La noblesse et le commun sous Philippe le Bel — III.
Consultations générales de la nation. Jusqu’en 1314 — IV. Le mouvement de 1314 - V. Les cahiers des ligues
de 1314 et les ordonnances de Louis X — VI. L’activité et la disparition des ligues au temps de Philippe V —
VII. Consultations et assemblées sous Philippe V et Charles IV — VIII. Conclusion.
Chapitre VII — La France et les pays voisins (1285-1328)
I. Les idées de Pierre Dubois — II. Le Midi et l’Orient — III. L’Angleterre — IV. La Flandre — V. L’Empire.
LIVRE III — LES INSTITUTIONS ET LA
CIVILISATION (1226-1328)
Chapitre I - Les institutions monarchiques
L’administration centrale : I. Définitions — II. Les services de l’Hôtel — III. Les sessions judiciaires de la
Curia regis. Les parlements, le Parlement — IV. Les commissions des comptes. Chambre aux deniers et
Chambre des comptes — V. Le Conseil. L’administration locale — VI. Les fonctionnaires du roi et les
commissaires de la Cour dans les provinces.
Chapitre II - La société française au XIIIe siècle
I. Le livre de Guillaume Le Maire — II. Jehan et Blonde — III. Bauduin de Sebourc — IV. Les fabliaux.
Chapitre III — Le mouvement intellectuel
I. Les Universités — II. Tendances générales du XIIIe siècle — III. Littérature savante, en latin — IV.
Littérature en langue vulgaire.
Chapitre IV — L’activité artistique
I. Un artiste du XIIIe siècle. Villard de Honnecourt, d’après son album — II. Les artistes du XIIIe siècle —
III. Les écoles et les œuvres.
Livre premier — Les événements politiques de 1226 à 1285
Chapitre I — La minorité de Louis IX
I. BLANCHE DE CASTILLE, SON ENTOURAGE ET SES ADVERSAIRES
LA mort subite, suspecte, de Louis VIII ouvrit en France une crise. L’héritage de haines que
Philippe Auguste et Louis VIII avaient accumulé pendant trente années de conquêtes fut
dévolu, en novembre 1226, à un enfant de douze ans ; et, par là, la France et la
monarchie, si prospères au commencement du XIII
e
siècle, semblèrent, du jour au
lendemain, en péril.
Louis VIII, à son lit de mort, avait déclaré que son successeur, avec le royaume, et ses
autres enfants mineurs devaient être, jusqu’à leur majorité, sous le « bail » (en la garde)
de la reine Blanche, sa veuve.
L’archevêque de Sens, les évêques de Chartres et de
Beauvais l’affirmèrent par écrit. Cette désignation in extremis, faite au détriment des
princes du sang, ne fut pas sérieusement discutée. Le droit public de la monarchie était
encore souple, informe. Les ennemis de la reine Blanche, qui l’ont accablée d’injures, ne se
sont jamais unis pour l’accuser d’avoir usurpé la régence ou de prolonger illégalement la
minoride son fils. Les barons de France acceptèrent, en fait, sans poser la question de
droit, que la reine fût préposée, de par la volonté du roi défunt, au gouvernement du
royaume. C’est ainsi que la défense des traditions capétiennes fut remise, en des
circonstances difficiles, à une femme étrangère.
LA REINE BLANCHE DE CASTILLE.
La reine Blanche était la fille d’Aliénor d’Angleterre et d’Alphonse le Noble de Castille, la
sœur de Bérengère de Léon, cette princesse virile qui sut se débrouiller au milieu des
intrigues violentes de la noblesse castillane, et qui fit de Ferdinand III, son fils, un roi et un
saint. Amenée en France à douze ans, en 1200, elle n’était jamais, depuis, sortie du
royaume ; mais elle n’avait pas oublié l’Espagne : il y eut toujours des dames et des
serviteurs espagnols dans sa maison ; elle recevait souvent de là-bas, et elle y envoyait
des messages et des cadeaux. Femme du prince Louis, elle avait été une épouse féconde,
fidèle, active ; lorsque Louis, appelé en Angleterre par les ennemis du roi Jean, avait vu ses
affaires compromises, Blanche avait organisé à Calais une flotte de secours. Un conteur
populaire du XIIIe siècle, le Ménestrel de Reims, rapporte à ce sujet une anecdote, qui,
vraie ou fausse, peint le caractère attribué par les contemporains à la bru de Philippe
Auguste. Le prince Louis, à bout de ressources, serré de près par les Anglais, avait en vain
demandé de l’argent à son père. « Quand madame Blanche le sut, elle vint au roi et lui dit
: Laisserez-vous ainsi mourir mon seigneur, votre fils, en pays étranger ? Sire, pour Dieu, il
doit régner après vous, envoyez-lui ce qu’il lui faut, et d’abord les revenus de son
patrimoine. Certes, dit le roi, Blanche, je n’en ferai rien. Non, sire ? Non vraiment, dit le
roi. Par le nom de Dieu, dit madame Blanche, je sais, moi, ce que je ferai : j’ai de beaux
enfants de mon seigneur ; je les mettrai en gage, et je trouverai bien quelqu’un qui me
prêtera sur eux. Et elle s’en alla
comme folle ; mais le roi la fit rappeler et lui dit : Blanche,
je vous donnerai de mon trésor autant comme vous voudrez ; faites-en ce que vous
voudrez ; mais sachez, en vérité, que je ne lui enverrai rien. Sire, répondit madame
Blanche, vous dites bien. Et alors un grand trésor lui fut livré, qu’elle envoya à son
seigneur. » Voilà tout ce que l’on sait d’elle avant le moment la mort de son mari lui
imposa de grandes responsabilités.
SES CONSEILLERS.
Autour d’elle, pour l’assister, il y avait des hommes d’expérience, vieillis à la cour de
Philippe Auguste. Frère Guérin, chevalier de l’Hôpital, un des héros de Bouvines, devenu
évêque de Senlis et chancelier de France, que l’on considérait en novembre 1226 comme «
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