Le débat à visée philosophique, qu'est-ce que c'est ? - Le terme « philosophia », composé des mots (philos) « ami » (sophía) « sagesse, savoir », signifie : « amour de la sagesse » ou « amour du savoir ». La philosophie est une tension vers un savoir ou une sagesse que l'on ne possède pas, et en ce sens elle relève d'un désir permanent. Définition du verbe « philosopher » : « Tenir une réflexion sur des problèmes philosophiques » (Petit Larousse, 2000) Il s'agit bien d'une réflexion, d'un raisonnement à mener sur des causes dans une conception générale du monde. La philosophie revient à s'interroger sur le monde et à « chercher les raisons et principalement les raisons profondes, des choses ». Paul Foulquié Tout débat n’est pas philosophique. Un « débat à visée philosophique » est distinct - du débat scientifique - du débat d’interprétation en français - du débat argumenté Le débat à visée philosophique : un débat « guidé » Le «débat philo» n'est qu'une possibilité de débat. Il revêt une forme de questionnement particulier. Il ne donne pas lieu à des décisions votées et applicables. Le consensus n'est pas le but recherché. Toute question ne peut pas être considérée comme philosophique car elle doit répondre à certains critères. Michel Tozzi parle de question philosophique à partir du moment où cette question « pose le problème du sens, de la finalité, de la valeur d'une situation ou d'un phénomène pour l'homme qui ne peut se réduire à l'explication scientifique des faits ou à la modification technique de la réalité ». Exemple de questions : Qu’est-ce qu’un ami ? Pourquoi les hommes ont-ils parfois peur de ce qui est différent ? Qu’est-ce que grandir ? Quelles différences y’a t-il entre croire et savoir ? Faut-il toujours dire la vérité ? Qu’est-ce qu’être libre ? A quoi sert l’argent ? La démarche de débat à visée philosophique repose sur trois objectifs essentiels : • approfondir un thème (en lien avec d’autres activités de la classe), aborder la complexité d’une notion • structurer sa pensée et son expression orale • écouter l’autre, le respecter dans le débat, prendre en compte ses idées et son propos « La discussion philosophique en classe est une interaction verbale entre élèves, instituée par un dispositif garanti par l’enseignant. Ce dispositif assure à la fois une distribution démocratique de la parole et des exigences intellectuelles. » Michel Tozzi Il s’agit d’un dispositif avec une double visée : 1) démocratique par ses règles de prise de parole, sa répartition des fonctions entre élèves, inspirées de la pédagogie institutionnelle ; 2) philosophique, par trois exigences intellectuelles sur lesquelles veille, par son type d’animation, le professeur. Celles-ci visent à tenter : - de problématiser des questions ou des affirmations (s’interroger, mettre en doute). * Problématiser, c’est être capable d’interroger un sujet pour en faire sortir un ou plusieurs problèmes. * Afin de problématiser, il faut se mettre dans une démarche de recherche, de questionnement par rapport à un domaine particulier. * C'est aussi être capable de questionner son propre jugement, ses propres opinions et de revêtir une attitude critique par rapport à son propre savoir. - d’argumenter rationnellement (et non passionnellement) des thèses comme réponses à la question posée (pour savoir si ce que l’on dit est vrai) et des objections à ces thèses. L'argumentation ne doit pas être perçue comme un moyen de persuader les autres personnes du groupe de penser la même chose que nous, mais bien plus d'appuyer, de valider ses propos personnels. Les raisons invoquées devront permettre à chacun de soumettre ses opinions et celles des autres à un nouveau questionnement. - de conceptualiser des notions (définir progressivement les termes pour savoir de quoi on parle et s’accorder sur ce dont on parle). Ce processus est le plus spécifique au domaine de la philosophie. Il est important de se questionner sur la notion mais aussi de questionner les relations qu'elle entretient avec d'autres notions en s'appuyant sur les différences ou ressemblances entre ces notions. La philosophie à l'école se présente comme un questionnement, une interprétation et une réflexion sur le monde et l'existence humaine. La classe se constitue en communauté de recherche qui aspire à la vérité, mais dans un rapport non dogmatique au savoir et fonctionne dans un rapport coopératif aux règles de la discussion, avec une éthique communicationnelle. On n'apprend pas la philosophie mais on apprend à philosopher. À l'école primaire, il s'agit de donner aux enfants une première approche de la pensée philosophique et de leur permettre d'acquérir des habitudes dans leur raisonnement.