PLACEMENTS DE POINTE Anticorps monoclonaux : derrière le jargon,le potentiel our le profane, les anticorps monoclonaux tiennent probablement plus du mystère que de la réalité, mais ils représentent un espoir très concret pour le traitement de certaines maladies comme le cancer ou les déficiences du système immunitaire. Nous proposons ici un petit tour d’horizon sur cette technologie qui ne cesse de progresser chaque année. Quand des éléments indésirables s’immiscent dans notre organisme (du virus de la grippe aux cellules tumorales), notre système immunitaire se met en branle. Des espions immunitaires, les anticorps, prennent les indésirables en filature et signalent alors leur présence à une autre catégorie d’espions, les «doubles 0» de l’immunité, qui ont comme mission de liquider ces envahisseurs mal intentionnés. Quand les premiers espions pisteurs ne s’acquittent pas de leur tâche de reconnaissance, on peut tenter de les remplacer par d’autres plus actifs. C’est ce que deux chercheurs ont imaginé au milieu des années 70. Kohler et Milstein eurent ainsi l’idée de prendre un envahisseur typique, de l’injecter à des souris, de déterminer quelle catégorie de cellules de souris produit l’espion pisteur spécialisé dans la filature de l’envahisseur injecté et enfin d’extraire ces cellules productrices d’agents de renseignements. Théoriquement, en cultivant ces cellules, on obtiendrait les agents de filature désirés et on P pourrait traiter les humains chez qui ils sont manquants. Trois problèmes surviennent toutefois avec ces espions venus de la souris. D’abord, le système immunitaire des humains les rejette comme corps étrangers. Ensuite, leur vie active est très courte. Finalement, ils sont nettement moins efficaces que leurs équivalents humains. La solution : humaniser les agents de renseignements d’origine murine (c.-à-d. de souris). Ce qui exige alors de porter la composition des agents de renseignements humains à 75 % et ceux murins à 25 %. C’est ce que Reopro (Centocor) a mis au point en 1994. Leur produit a rapporté 418 M$ US en 2000. Rituxan a vu le jour ensuite et a engendré des revenus de 848 M$ US en 2001. En septembre 2001, Imclone a signé une AVRIL 2002 31 ANDRÉ P. BOULET entente de développement et de mise en marché avec Bristol Myers Squibb prévoyant des paiements de 1 G$ pour chaque objectif de développement réussi et une prise de participation de 1 G$ si tout va selon les plans. Depuis 1997, on tente d’obtenir un agent de renseignements totalement humain, c’est dire que l’on essaie de produire industriellement des anticorps très purs : les anticorps monoclonaux. Au lieu d’insérer dans la souris l’indésirable, on insère maintenant le gène qui fabrique l’agent. On cherche aussi à insérer ce gène dans des virus ayant une propension à infecter des bactéries. Ces virus porteurs du gène de l’agent de renseignements d’origine humaine s’introduisent à leur tour dans la bactérie, lui refilent leur code génétique remanié, et la bactérie active investie de ce génome produit des agents pisteurs humains en quantité industrielle! Actuellement, il y a 10 anticorps humains en développement. On croit que, en 2008, 60 de ces produits seront sur le marché, représentant des revenus de 12 G$ US. Deux cent vingt-cinq compagnies de biotechnologie y travaillent, et des centaines de produits pourraient apparaître, ciblant le cancer, les maladies du système immunitaire, celles de l’appareil cardiovasculaire, etc. André P. Boulet, Ph. D., est viceprésident affaires scientifiques à Gestion de Fonds mutuel BioCapital inc.