
Maladie d’Alzheimer – Enjeux scientifiques, médicaux et sociétaux
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des. Les lésions neurofibrillaires intéressent successivement la région ento-
rhinale (stades I et II de Braak), hippocampique (stades III et IV), et
néocorticale (stades V et VI). Chaque stade ajoute une nouvelle structure
touchée à celles qui l’étaient au stade précédent. Il en est de même pour les
5 « phases » de Thal qui décrivent l’évolution des dépôts de peptide Aβ, qui
surviennent de façon successive et additive, dans le néocortex, dans l’aire
entorhinale et l’hippocampe, dans les noyaux sous-corticaux, dans le tronc
cérébral et finalement dans le cervelet.
La progression des lésions neurofibrillaires dans le cortex (cortex entorhinal
puis hippocampe, et enfin néocortex) correspond à la progression des symp-
tômes. En revanche, les dépôts de peptide Aβ sont moins bien corrélés aux
symptômes. Il est fréquent de trouver, chez un sujet âgé considéré comme
intellectuellement normal, des dépôts diffus de peptide Aβ dans le cortex
cérébral associés à des dégénérescences neurofibrillaires dans l’hippocampe
et le cortex entorhinal. Ces lésions paraissent constantes dans le cerveau de
centenaires ayant fait l’objet d’un examen post mortem. Elles peuvent être
rencontrées chez des sujets jeunes considérés comme asymptomatiques. Leur
signification est discutée. Leur fréquence a laissé penser qu’elles pouvaient
rester stables et n’être le témoin que du vieillissement cérébral physiologi-
que, un concept aux limites peu précises. Selon une autre hypothèse, ces
lésions, même sans conséquence clinique, pourraient signer la présence
d’une maladie d’Alzheimer encore asymptomatique.
De nombreuses inconnues demeurent dans la neuropathologie de la maladie
d’Alzheimer et dans ses corrélations cliniques, notamment du fait de la
rareté des études post mortem systématiques de patients atteints de maladie
d’Alzheimer et de sujets âgés normaux (particulièrement en France).
L’hypothèse la plus communément admise aujourd’hui de la « cascade
amyloïde » suppose que les dépôts de peptide Aβ sont à l’origine de la
pathologie neurofibrillaire. Pourquoi, dans cette hypothèse, observe-t-on,
dans les stades précoces, des lésions neurofibrillaires sans dépôts amyloïdes ?
Le peptide Aβ peut-il s’accumuler dans le parenchyme avant la constitution
des plaques séniles ? Quelle est la relation entre la pathologie liée au peptide
Aβ et celle associée à la protéine Tau ?
Les souris transgéniques exprimant un ou différents gènes portant une ou
plusieurs mutations responsables de maladie d’Alzheimer familiale permet-
tent d’appréhender expérimentalement certains des stades de la pathologie ;
les dépôts amyloïdes n’ont encore jamais été à l’origine d’une accumulation
intracellulaire de protéine Tau chez la souris, et inversement. Il est donc
indispensable de confronter la complexité de la neuropathologie humaine à
ses modèles animaux.
Par ailleurs, les corrélats pathologiques du MCI et des symptômes tels que les
troubles du comportement, le syndrome extrapyramidal, les troubles du som-
meil, l’amaigrissement, ont été très peu étudiés sur de larges cohortes de
Synthese.fm Page 504 Thursday, October 11, 2007 12:50 PM