Le 28 octobre 1913, alors que l’Alsace et une partie de la Lorraine sont
rattachées à l’Empire allemand, le jeune sous-
lieutenant von Forstner (1) traite
les savernois de « Wackes »
(voyous). Ces propos, qui peuvent paraitre anodins
aujourd’hui, provoquent pourtant l’indignation jusqu’au sein même de l’empire
allemand et conduisent à une crise politique. Ces événements deviendront :
L’Affaire de Saverne
Suite au traité de Francfort, l’Alsace et la partie nord-
est de la Lorraine sont rattachées à
l’Empire allemand en 1871. L’Alsace-
Lorraine bénéficie de l’essor économique du Reich et
une majeure partie des habitants semble y trouver son compte et, finalement, se fait à
l’idée d’appartenir à l’Allemagne. Mais, aux yeux des prusso-
allemands, la
« dégermanisation » est grandissante dans le nord-est de la France. L’Alsace-
Lorraine
deviendra alors un territoire colonial qui se verra refuser, en partie, le statut d’Etat fédéré
qui n’aura pas la même autonomie, ni la même souveraineté que les autres Etats fédérés.
La population s’indigne de l’attitude de l’administration prusso-
allemande. Le
mécontentement augmente. Les tensions entre autochtones et Prussiens s’accentuent et
les incidents deviennent récurrents. Après 42 années d’occupation, d’oppression et de
tracasserie, la germanisation de force conduira à l’incident de Saverne.
En 1913, Saverne, 9 000 habitants et ville de garnison, abrite en ses murs les 1
400
hommes du 99è régiment d’infanterie encadrés par le général Berthold von Deimling, le
plus haut représentant en Alsace-Lorraine.
Le 28 octobre 1913, le sous-
ans, et dont Saverne est la première affectation, vient d’apprendre qu’un soldat allemand
a été condamné à deux mois de prison pour avoir poignardé un Alsacien lors d’une rixe.
Lui apportant son soutien, il lui aurait alors déclaré « Ach
! Ce n’est pas moi qui t’aurais
puni pour ce coup-là. Au contraire, pour chacun de ces sales « Wackes
» que tu abattras,
je t’en donne 10 Marks. « Le sous-officier Willy Hoeflich rajoute : «
Et moi, je t’en
donnerai trois de plus
». Les deux officiers ont alors fait sortir les recrues alsaciennes des
rangs en leur demandant de se présenter en criant «
Je suis un Wackes, nous sommes des
Wackes ». Von Forstner poursuit l’humiliation par ces propos : «
Pour ma part, je vous
autorise à chier sur le drapeau français ».
Le 6 novembre l’Elsässer et le
Zaberner
Anzeiger
, deux journaux locaux, relatent ces
événements qui sont aussitôt repris par des
journaux français et allemands.
Le 7 novembre 1913, la population savernoise
proteste et manifeste devant le domicile de
Günther von Forstner aux cris de «
Sale
Prussien
». Nouveau rassemblement le 9
novembre, plus de 1
000 personnes se
retrouvent sur la place du château. Forstner
nargue la foule. Craignant un dérapage, le maire
Louis Knoepffler fait appel aux pompiers pour
disperser la foule par des jets d’eau, mais un
pompier opposé à cette répression vient de
sectionner un tuyau. C’est l’hilarité générale. Le
commandant de régiment Ernst von Reuter se
fait traiter de « Dreckpreuss », « Totekopf
» et
autres noms d’oiseaux. En se retirant tard dans
la nuit, la foule crie « Vive la France », «
Vive la
République » et entonne la Marseillaise.
Le sous-
lieutenant von Forstner est condamné à
six jours d’assignation à résidence. Malgré un
retour au calme, la protestation alsacienne
continue notamment quand Forstner se montre
à nouveau en public. Les provocations
prussiennes envers les savernois se font de plus
en plus dures et régulières.
Le 28 octobre 1913, alors que l’Alsace et une partie de la Lorraine sont
lieutenant von Forstner (1) traite
(voyous). Ces propos, qui peuvent paraitre anodins
aujourd’hui, provoquent pourtant l’indignation jusqu’au sein même de l’empire
est de la Lorraine sont rattachées à
Lorraine bénéficie de l’essor économique du Reich et
une majeure partie des habitants semble y trouver son compte et, finalement, se fait à
allemands, la
Lorraine
deviendra alors un territoire colonial qui se verra refuser, en partie, le statut d’Etat fédéré
qui n’aura pas la même autonomie, ni la même souveraineté que les autres Etats fédérés.
allemande. Le
mécontentement augmente. Les tensions entre autochtones et Prussiens s’accentuent et
les incidents deviennent récurrents. Après 42 années d’occupation, d’oppression et de
000 habitants et ville de garnison, abrite en ses murs les 1
400
hommes du 99è régiment d’infanterie encadrés par le général Berthold von Deimling, le
lieutenant et baron Günther von Forstner, âgé d’à peine 19
ans, et dont Saverne est la première affectation, vient d’apprendre qu’un soldat allemand
a été condamné à deux mois de prison pour avoir poignardé un Alsacien lors d’une rixe.
! Ce n’est pas moi qui t’aurais
» que tu abattras,
Et moi, je t’en
». Les deux officiers ont alors fait sortir les recrues alsaciennes des
Je suis un Wackes, nous sommes des
Pour ma part, je vous
Zaberner
, deux journaux locaux, relatent ces
événements qui sont aussitôt repris par des
Le 7 novembre 1913, la population savernoise
proteste et manifeste devant le domicile de
Günther von Forstner aux cris de «
Sale
». Nouveau rassemblement le 9
000 personnes se
retrouvent sur la place du château. Forstner
nargue la foule. Craignant un dérapage, le maire
Louis Knoepffler fait appel aux pompiers pour
disperser la foule par des jets d’eau, mais un
pompier opposé à cette répression vient de
sectionner un tuyau. C’est l’hilarité générale. Le
commandant de régiment Ernst von Reuter se
Totekopf
» et
autres noms d’oiseaux. En se retirant tard dans
Vive la
lieutenant von Forstner est condamné à
six jours d’assignation à résidence. Malgré un
retour au calme, la protestation alsacienne
continue notamment quand Forstner se montre
à nouveau en public. Les provocations
prussiennes envers les savernois se font de plus
Le 28 novembre 1913 verra l’apogée de
ces tensions. Von Forstner et son escorte
sont injuriés par des jeunes, une vague
d’arrestations s’en suit. L’affaire devient
nationale et provoque une crise politique
en Allemagne, entre le gouvernement
Holwegg et le Reichstag, entre ceux qui
prônent une démocratisation et les
adeptes d’une germanisation plus ferme
de l’Alsace-Lorraine.
Le Kaiser Guillaume II qui chasse le
renard à Donaueschingen, minimise les
faits qui lui sont rapportés et approuve le
comportement des officiers.
conseil municipal de Saverne
proteste alors solennellement auprès du
Kaiser contre les arrestations arbitraires
de ses citoyens.
Le 30 novembre 1913, une importante
manifestation contre les violences des
soldats a lieu à Mulhouse. La vague
d’indignation s’étend maintenant à
l’Empire allemand tout entier et des
manifestations naissent spontanément
dans plusieurs grandes villes.
Le 2 décembre 1913, von Forstner, encore lui, est cette fois-
ci la risée d’un certain
Blanck, un cordonnier au pied bot, qui éclate de rire à sa vue. Forstner le frappe de son
épée et le blesse à la te. La tension monte encore d’un cran suite à cette agression. Le
sous-lieutenant est cette-fois-
ci condamné à 43 jours d’arrêt, sanction aussitôt levée au
prétexte que Forstner aurait agi en légitime défense. Les dizaines d’années d’oppression,
de tracasseries et d’offense remontent encore un peu plus à la surface.
Les événements de Saverne ont mis le feu aux poudres et les débats au Reichstag
deviennent plus que houleux. La législation sur les interventions militaires à l’intérieur du
Reich est modifiée.
Les relations entre l’Alsace-
Lorraine et le reste de l’Empire allemand sont détériorées.
Les incidents de Saverne sont assimilés à des actes de résistance contre la
germanisation.
Une profonde défiance envers les Alsaciens-
Lorrains s’installe. Les milieux pangermanistes
(2) soutiennent qu’un conflit militaire avec la France est inévitable. En Allemagne comme
en France, on se prépare pour une guerre. Cette guerre ne sera pas la conséquence
directe de l’Affaire de Saverne, mais éclatera cependant quelques mois plus tard après
l’attentat de Sarajevo.
(1) Le sous-
lieutenant Günther von Forstner est tué deux ans plus tard sur le front de l’Est
lors de la Première Guerre Mondiale
(2) La Ligue Pangermanique est un mouvement politique du XIXe siècle
; le nationalisme,
visant l’unification de tous les peuplements germanophones pour en créer la Grande
Allemagne « Grossdeutschland ». Ce parti défend le « Volkstum
» (l’esprit de la race) qui
influencera un certain Adolf Hitler.
Sources
:
Collection les Essaies, Analyse de l’Alsace
-
Wikipédia, Incident de Saverne
ci la risée d’un certain
Blanck, un cordonnier au pied bot, qui éclate de rire à sa vue. Forstner le frappe de son
épée et le blesse à la te. La tension monte encore d’un cran suite à cette agression. Le
ci condamné à 43 jours d’arrêt, sanction aussitôt levée au
prétexte que Forstner aurait agi en légitime défense. Les dizaines d’années d’oppression,
Les événements de Saverne ont mis le feu aux poudres et les débats au Reichstag
deviennent plus que houleux. La législation sur les interventions militaires à l’intérieur du
Lorraine et le reste de l’Empire allemand sont détériorées.
Les incidents de Saverne sont assimilés à des actes de résistance contre la
Lorrains s’installe. Les milieux pangermanistes
(2) soutiennent qu’un conflit militaire avec la France est inévitable. En Allemagne comme
en France, on se prépare pour une guerre. Cette guerre ne sera pas la conséquence
directe de l’Affaire de Saverne, mais éclatera cependant quelques mois plus tard après
lieutenant Günther von Forstner est tué deux ans plus tard sur le front de l’Est
; le nationalisme,
visant l’unification de tous les peuplements germanophones pour en créer la Grande
» (l’esprit de la race) qui
Wikipédia, Incident de Saverne
influencera un certain Adolf Hitler.
Sources : Collection les Essaies, Analyse de l’Alsace -
Wikipédia, Incident de Saverne
Hansi, L’histoire d’Alsace racontée aux petits enfants -
France Culture, Incidents de
Saverne – Action Antifasciste Alsace, L’affaire de Saverne
Bernard LINDER
67700 - WALDOLWISHEIM
Comité de Saverne-Bouxwiller
linderbernard@orange.fr
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