mesure la vie morale des laïcs. En Occident, leurs tâches quotidiennes sont plus simples et d'ordre plus pratique
qu'en Orient, où ils débattent, à Athènes, à Antioche comme à Alexandrie, les questions issues des traditions
philosophiques. La naissance de la théologie a lieu en Orient. Elle est l'œuvre de saint Augustin, évêque d'Hip-
pone (Hippo Regius), dont la pensée influencera la chrétienté occidentale pendant des siècles.
Création des monastères
A l'opposé de chrétiens qui, dès le IV e siècle, choisissent de vivre en ermites en s'isolant dans le désert, d'au-
tres chrétiens, en Occident, vont se grouper dans des collectivités: les monastères. Au VI e siècle, un Italien,
Benoît de Nursie, élabore une règle destinée aux moines, qui régit jusqu'au moindre détail leur vie quotidienne.
Un principe nouveau y apparaît, l'interdiction de toute propriété personnelle: «Si quelqu'un était surpris s'adon-
nant à ce vice détestable , on l'avertirait une première et une seconde fois; s'il ne s'amendait pas, il serait soumis
à la correction.»
C'est dans un monastère du Mont-Cassin (Italie), régi par cette règle, que naît l'ordre des Bénédictins, fondé par
Benoît de Nursie et bientôt représenté dans tous les pays d'Occident. Les monastères bénédictins - où les moi-
nes sont dits «réguliers» - seront jusqu'au X e siècle des centres importants de conversion. Une autre contribu-
tion au développement de l'institution monastique est due à l'action du moine irlandais Colomban, au VI e siè-
cle, qui fondera de nombreux monastères en Europe, jusqu'en Italie du Nord.
De nouvelles conversions
La papauté a maintenu le principe de son droit à diriger l'Eglise universelle, mais, en Orient, elle a échoué de-
vant l'opposition coordonnée des empereurs byzantins et des patriarches de Constantinople. A la fin du VI e
siècle, un évêque de Rome, Grégoire I er , donne un nouvel élan à la politique de conversion et obtient du roi
anglo-saxon du Kent qu'il adhère au christianisme. Un premier évêché dépendant de Rome, celui de Cantorbé-
ry, est fondé en Angleterre. Au VIII e siècle, le développement des relations commerciales entre l'Angleterre et
l'Italie, par la vallée du Rhin, crée des conditions favorables à de nouvelles conversions, notamment chez les
Francs et d'autres peuples germaniques. Les clercs formés dans les monastères anglais jouent un grand rôle
dans la reprise en main de la Gaule par les Carolingiens.
L'époque carolingienne
L'autorité de Rome se renforce aux VIII e et IX e siècles, les Lombards ayant été vaincus par les Carolingiens.
Mais le pouvoir pontifical commence alors à se monarchiser, à s'éloigner des réalités locales auxquelles sont
confrontés les évêques, les prêtres et les moines. Sans soutien suffisant, ceux-ci ne peuvent réellement faire
obstacle aux aristocrates qui convoitent les terres dont sont dotées les paroisses rurales. Pourtant clergé séculier
et clergé régulier locaux jouent un rôle irremplaçable: l'appui qu'ils apportent aux Carolingiens est le plus puis-
sant facteur d'unification de l'Occident.
L'Occident chrétien s'épanouit à l'époque carolingienne. La dynastie, soumise inconditionnellement à l'Eglise,
construit des monastères: Corbie, Saint-Riquier, Tours, en France; Lorsch, Fulda, Corvey, en Allemagne. Dans
les cathédrales, les évêques rassemblent, à Pâques, tous ceux qui, adultes, veulent recevoir le baptême. Peintu-
res sur manuscrits, beaux monuments de pierre, peintures murales constituent progressivement un art original,
totalement chrétien, rompant avec l'ancien art romain.
Le latin, langue unificatrice
L'un des aspects remarquables du processus d'unification de l'Occident est la généralisation de l'emploi du latin.
L'effort pour retrouver un latin grammaticalement correct est poursuivi du VIIe au IX e siècle. Cet effort se tra-
duit par la création d'une école dans chaque évêché et, dans les monastères, de centres de copie de manuscrits
anciens. Au IX e siècle, le travail de copie est servi par une écriture superbe, utilisée dans tout l'Occident: la
minuscule caroline. Le clergé, les nobles et les rois s'expriment en latin, tandis que dans le peuple naissent, par-
lées mais non écrites, des langues qui amalgament plus ou moins l'héritage latin et les expressions germaniques,
et dont sont issues les langues de l'Europe moderne, non sans conflits ni difficultés.
Des frontières menacées
L'Occident n'est ni stable ni sûr de son avenir. Les guerres intérieures ne disparaissent pas, ni les désordres
créés par certains aristocrates. Jusqu'à la mort de Charlemagne cependant, la violence est détournée au-delà des
frontières: Saxons, Frisons, Lombards, Slaves contiennent mal cette poussée vers le nord, l'est et le sud; les
troupes franques conquièrent également le nord-est de l'Espagne jusqu'à l'Èbre. Mais, au nord, les Scandinaves,
encore non chrétiens, commencent une expansion vers le sud dont la chrétienté subira le choc. Au sud, les navi-
res musulmans sont redoutés en Méditerranée occidentale. A l'est, les Slaves, qui ont fléchi un moment, entre
l'Elbe et l'Oder (Odra), résistent de mieux en mieux aux offensives impériales. Et à l'est encore, à la fin du IX e
siècle, réapparaît une menace grave qui concerne aussi les Slaves: celle des Hongrois venus d'Asie.