Sur les nombres de Stirling de 1 espèce

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Sur les nombres de Stirling de 1ère espèce
B AKIR FARHI
Département de Mathématiques
Université de Béjaia
Algérie
Béjaia, le 11 novembre 2013
Table des matières
1 Définition et simples propriétés
2
2 Relation de récurrence liant entre les nombres de Stirling de 1ère espèce 4
3 Interprétation combinatoire des nombres de Stirling de 1ère espèce
5
4 Série génératrice associée au nombres de Stirling de 1ère espèce
7
5 Formule explicite pour les nombres de Stirling de 1ère espèce et ses applications arithmétiques
8
1
Les nombres de Stirling de 1ère espèce
B AKIR FARHI
Résumé
Dans ce papier, on étudie les propriétés élémentaires des nombres de Stirling de première espèce ainsi que leur signification combinatoire et deux
de leurs applications arithmétiques qui consistent à démontrer le théorème d’Ibn Al-Haytham et le petit théorème de Fermat.
1 Définition et simples propriétés
Pour tout ce qui suit, étant donné n ∈ N, on notera par x n et x n les polynômes
en x, définis respectivement par :
x n := x(x − 1)(x − 2) . . . (x − n + 1)
x n := x(x + 1)(x + 2) . . . (x + n − 1),
avec les conventions naturelles x 0 = x 0 = 1.
N. B : Il est évident que l’on a pour tout n ∈ N :
(−x)n = (−1)n x n .
Définition : Les nombres de Stirling 1 de 1ère espèce sont, par définition, les
nombres entiers s(n, k) (n, k ∈ N, k ≤ n) qui figurent dans le développement
du polynôme x n . On a précisément pour tout n ∈ N :
xn =
n
∑
s(n, k)x k
(1)
k=0
Exemple : On a : x 3 = x(x − 1)(x − 2) = x 3 − 3x 2 + 2x ; d’où l’on tire :
s(3, 0) = 0 , s(3, 1) = 2 , s(3, 2) = −3 et s(3, 3) = 1.
La première question qu’on se pose concerne le signe de s(n, k). On a la :
Proposition 1. Pour tous n, k ∈ N, avec k ≤ n, le signe du nombre entier s(n, k)
est (−1)n+k .
Démonstration. Soit n ∈ N. En substituant dans (1) x par −x, on obtient :
(−x)n =
n
∑
s(n, k)(−x)k ,
k=0
1. James Stirling (1692-1770) : Mathématicien écossais.
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Les nombres de Stirling de 1ère espèce
B AKIR FARHI
c’est-à-dire :
(−1)n x n =
n
∑
(−1)k s(n, k)x k .
k=0
D’où l’on tire :
xn =
n
∑
(−1)n+k s(n, k)x k
(2)
k=0
Comme les coefficients du polynôme x n sont de toute évidence tous positifs, on
en déduit que (−1)n+k s(n, k) ≥ 0, ∀n, k ∈ N, avec k ≤ n. Autrement dit, le signe
de tout nombre s(n, k) est (−1)n+k . Ce qui achève cette démonstration.
Nous enchainons sur la proposition suivante qui donne quelques propriétés faciles des nombres s(n, k).
Proposition 2. Pour tout n ∈ N∗ , on a :
s(n, 0) = 0 et s(n, n) = 1
n
∑
s(n, 1) = (−1)n−1 (n − 1)!
(−1)k s(n, k) = (−1)n n!
(3)
(4)
(5)
k=1
n
∑
|s(n, k)| = n!
(6)
|s(n, k)| ≤ n! (pour tout k ∈ N, k ≤ n)
(7)
k=1
Démonstration. Soit n ∈ N∗ fixé.
• Démontrons (3) : Les nombres s(n, 0) et s(n, n) sont respectivement les coefficients de x 0 et de x n dans le développement du polynôme x n = x(x − 1) · · · (x
−n + 1). Il est bien clair que ces coefficients sont respectivement 0 et 1, comme
il fallait le prouver.
• Démontrons (4) : Le nombre s(n, 1) est par définition le coefficient de x dans le
développement du polynôme x n = x(x −1) · · · (x −n +1). Ce qui est aussi le coefficient constant du polynôme (x−1)(x−2) · · · (x−n+1). Ce coefficient est simplement la valeur de ce dernier polynôme en 0 ; c’est donc égale à (−1)(−2) · · · (−n
+1) = (−1)n−1 (n − 1)!. D’où s(n, 1) = (−1)n−1 (n − 1)!, comme il fallait le prouver.
• Démontrons (5) : L’identité (5) résulte simplement de la substitution de x par
−1 dans l’identité polynômiale (1) tout en remarquant que (−1)n = (−1)(−2) · · ·
(−n) = (−1)n n!.
• Démontrons (6) : En multipliant les deux membres de l’identité (5) par (−1)n ,
on obtient :
n
∑
(−1)n+k s(n, k) = n!.
k=1
3
Les nombres de Stirling de 1ère espèce
B AKIR FARHI
Mais puisque le signe de chaque nombre s(n, k) (1 ≤ k ≤ n) est (−1)n+k (en
vertu de la proposition 1), on a pour tout k ∈ {1, . . . , n} : (−1)n+k s(n, k) = |s(n, k)|
∑
et l’on conclut enfin que : nk=1 |s(n, k)| = n!, comme il fallait le prouver.
• Démontrons (7) : L’estimation (7) est une conséquence immédiate de (6).
La proposition est démontrée.
Remarque : Nous verrons plus loin que la propriété (6) devient évidente compte
tenu du sens combinatoire des nombres de Stirling de 1ère espèce.
2 Relation de récurrence liant entre les nombres de
Stirling de 1ère espèce
On a la proposition suivante :
Proposition 3. Pour tous n, k ∈ N∗ avec k ≤ n, on a :
s(n + 1, k) = s(n, k − 1) − ns(n, k)
(8)
|s(n + 1, k)| = |s(n, k − 1)| + n |s(n, k)|
(9)
et
Démonstration. Soit n ∈ N∗ fixé. On a d’une part :
x n+1 =
n+1
∑
s(n + 1, k)x k = x n+1 +
k=0
n
∑
s(n + 1, k)x k
k=1
(car s(n + 1, 0) = 0 et s(n + 1, n + 1) = 1). Et d’autre part :
x n+1 = x(x − 1) · · · (x − n + 1)(x − n) = (x − n)x n = (x − n)
=x
=
n
∑
s(n, k)x k − n
n
∑
k=0
n+1
∑
k=0
n
∑
k=1
k=0
s(n, k − 1)x k −
s(n, k)x k =
n
∑
n
∑
s(n, k)x k
k=0
n
∑
s(n, k)x k+1 −
k=0
ns(n, k)x k = x n+1 +
ns(n, k)x k
k=0
n
∑
(s(n, k − 1) − ns(n, k)) x k
k=1
(car s(n, 0) = 0 et s(n, n) = 1).
En identifiant les coefficients de x k (k ∈ N∗ , k ≤ n) des deux expressions que
l’on a trouvé pour x n+1 , on aboutit à :
s(n + 1, k) = s(n, k − 1) − ns(n, k),
qui n’est rien d’autre que (8).
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Les nombres de Stirling de 1ère espèce
B AKIR FARHI
Etant donnés n, k ∈ N∗ avec k ≤ n, l’identité (9) s’obtient en multipliant les
deux membres de (8) par (−1)n+k+1 et en se rappelant que le signe de s(a, b)
est (−1)a+b (∀a, b ∈ N, a ≥ b) en vertu de la proposition 1. Ceci achève notre
démonstration.
Le triangle des nombres de Stirling de 1ère espèce
En se servant de la relation récurrente (9), on peut dresser les nombres de Stirling de 1ère espèce (en valeurs absolues) dans un triangle (infini) du même type
que le triangle arithmétique d’Al-Karaji 2 des coefficients binomiaux. On obtient le suivant :
n =0 1
n =1 0 1
n =2 0 1 1
n =3 0 2 3 1
n = 4 0 6 11 6 1
n = 5 0 24 50 35 10 1
..
.. ..
..
..
.. .. . .
.
.
. .
.
.
. .
Dans ce triangle, chaque ligne de rang n ≥ 1 commence par un 0 et se termine
par un 1 et ses coefficients du milieu s’obtiennent par la relation récurrente (9)
en fonction des coefficients de la ligne qui la précède. Par exemple, le nombre
50 de la 5ème ligne est obtenu par la formule 6 + 4 × 11 (où les nombres 6 et 11
proviennent de la 4ème ligne).
3 Interprétation combinatoire des nombres de Stirling de 1ère espèce
Le sens combinatoire des nombres de Stirling de 1ère espèce est relatif à l’ensemble des permutations d’un ensemble fini. Nous rappelons d’abord quelques
notions sur ce sujet :
Soient n ∈ N∗ et A = {a 1 , . . . , a n } un ensemble fini à n éléments. Une permutation des éléments de A peut être vue comme une bijection de l’ensemble A
dans lui même. L’ensemble de toutes les permutations de A se note par S(A).
C’est un ensemble fini de cardinal n! et en le munissant de la loi de composition
des applications (de A dans A), on en formera un groupe qui n’est commutatif
que pour n = 1 ou 2. Ce groupe s’appelle « le groupe symétrique associé à A ».
(
)
2. Abu Bakr Al-Karaji
ú
k. QºË@ QºK. ñK. @
: Mathématicien arabe, né en 953 et mort en 1029.
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Les nombres de Stirling de 1ère espèce
B AKIR FARHI
Lorsque A et B sont deux ensembles finis de même cardinal, il est immédiat que les deux groupes S(A) et S(B ) sont isomorphes. La structure du groupe
symétrique associé à un ensemble fini A ne dépend donc en réalité que du cardinal de A. Pour cette raison, il convient de noter par S n (n ∈ N∗ ) le groupe
symétrique associé à un ensemble à n éléments (peu importe l’ensemble à n
éléments en question). On appelle S n « le groupe symétrique d’indice n ».
Soient n ∈ N∗ , A = {a 1 , . . . , a n } un ensemble à n éléments et σ une permutation des éléments de A (i.e., σ ∈ S(A)). On considère Rσ la relation binaire sur
A définie par :
déf
∀a, b ∈ A : a Rσ b ⇐⇒ ∃k ∈ N tel que b = σk (a).
On montre alors que Rσ est une relation d’équivalence sur A. Une classe d’équivalence modulo Rσ s’appelle « cycle relatif à σ », ou simplement « σ-cycle ». On
obtient ainsi une partition de A en un nombre fini de σ-cycles. Pour σ = Id A par
exemple, les σ-cycles que l’on obtient sont : {a 1 }, {a 2 }, . . . , {a n } (on a exactement
n σ-cycles). Pour que tout cela soit plus clair, étudions en un exemple :
Exemple : Prenons
( A = {1, 2, 3, 4, 5, 6}
) et σ la permutation des éléments de A,
1 2 3 4 5 6
donnée par : σ =
. La classe de l’élément 1 modulo Rσ est
3 5 4 1 2 6
cl(1) = {1, 3, 4} ; la classe de l’élément 2 est cl(2) = {2, 5} et la classe de l’élément
6 est cl(6) = {6} et on a ainsi trouvé toutes les classes. Les σ-cycles de A sont
donc : {1, 3, 4}, {2, 5} et {6} ; ainsi A contient exactement 3 σ-cycles.
Nous somme maintenant prêt à donner l’interprétation combinatoire des
nombres de Stirling de 1ère espèce. On a le théorème suivant :
Théorème 4. Pour tout n ∈ N∗ et tout k ∈ N, avec k ≤ n, le nombre de permutations d’un ensemble à n éléments qui fournissent exactement k cycles est |s(n, k)|.
Démonstration. Pour tout n ∈ N∗ et tout k ∈ N, avec k ≤ n, on note provisoirement par P (n, k) le nombre de permutations d’un ensemble à n éléments qui
fournissent exactement k cycles. On montrera que ces nombres P (n, k) vérifient la relation de récurrence :
P (n + 1, k) = P (n, k − 1) + nP (n, k)
(∀n, k ∈ N∗ , k ≤ n),
ce qui permettra de conclure.
Etant donnés n, k ∈ N∗ , avec k ≤ n, soit A n+1 = {a 1 , a 2 , . . . , a n+1 } un ensemble
à (n + 1) éléments et σ une permutation arbitraire de A n+1 fournissant exactement k cycles. Nous essayons de voir comment qu’on obtienne σ à partir d’une
permutation σ′ de l’ensemble A n = {a 1 , . . . , a n }. Pour ce faire, nous raisonnons
sur le dernier élément a n+1 de A n+1 . On distingue les deux cas suivants :
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Les nombres de Stirling de 1ère espèce
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• Ou bien σ(a n+1 ) = a n+1 . Ceci revient à dire que a n+1 est un point fixe par σ
ou encore que le σ-cycle contenant a n+1 est {a n+1 }. Dans ce cas σ s’obtient
comme un prolongement d’une permutation σ′ de A n qui fournit exactement
(k − 1) cycles. Le nombre de tels σ est donc égale à P (n, k − 1).
• Ou bien σ(a n+1 ) ∈ {a 1 , . . . , a n }. Dans ce cas, a n+1 intégrera un cycle associé à
une certaine permutation σ′ de A n , laquelle fournit exactement k cycles. Pour
chaque choix de σ(a n+1 ) (n choix possibles), on a P (n, k) choix possibles pour
σ′ . Ainsi, le nombre de tels σ est nP (n, k).
En conclusion, le nombre de permutations de A n+1 fournissant exactement k
cycles est
P (n + 1, k) = P (n, k − 1) + nP (n, k),
comme prétendu.
Nous venons de montrer que les nombres P (n, k) satisfont la même relation de
récurrence que les nombres |s(n, k)| (cf. la relation (9) de la proposition 3). Mais
puisque, on a par définition même : P (n, 0) = 0 = |s(n, 0)| (∀n ∈ N∗ ) et P (1, 1) =
1 = |s(1, 1)|, on conclut par une récurrence évidente que P (n, k) = |s(n, k)| pour
tous n ∈ N∗ , k ∈ N (k ≤ n). Le théorème est démontrée.
4 Série génératrice associée au nombres de Stirling
de 1ère espèce
On a l’important théorème suivant :
Théorème 5. Pour tout k ∈ N, on a :
∞
∑
s(n, k)
n=k
xn
logk (1 + x)
=
n!
k!
(10)
Démonstration. On détermine de deux façons différentes le développement
(formel) de la fonction f (x, y) = (1 + x) y en série de Taylor en y. D’une part,
d’après la formule du binôme généralisée, on a :
(1 + x) y
= 1+ yx +
=
∞
∑
n=0
=
=
yn
y(y − 1) 2 y(y − 1)(y − 2) 3
x +
x +...
2!
3!
xn
n!
(
∞ ∑
n
∑
n=0 k=0
∞ ∑
n
∑
s(n, k)y k
s(n, k)
n=0 k=0
)
xn
n!
xn y k
,
n!
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Les nombres de Stirling de 1ère espèce
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soit
y
(1 + x) =
)
xn k
s(n, k)
y
n!
n=k
(
∞ ∑
∞
∑
k=0
(11)
D’autre part, d’après le développement de Taylor de la fonction exponentielle,
on a :
(
)
∞ y log(1 + x) k
∞ logk (1 + x)
∑
∑
y
(1 + x) = exp{y log(1 + x)} =
=
yk
(12)
k!
k!
k=0
k=0
L’identification des deux formules (11) et (12) entraîne (d’après l’unicité du développement de Taylor) que l’on a pour tout k ∈ N :
∞
∑
s(n, k)
n=k
xn
logk (1 + x)
=
,
n!
k!
comme il fallait le prouver. Le théorème est démontrée.
5 Formule explicite pour les nombres de Stirling de
1ère espèce et ses applications arithmétiques
La formule (10) du théorème 5 précédent permet d’en déduire une formule explicite très importante pour les nombres s(n, k). On a le :
Théorème 6. Pour tous n, k ∈ N, avec n ≥ k, on a :
∑
n!
1
s(n, k) = (−1)n+k
k! n1 ,...,nk ∈N∗ n 1 n 2 · · · n k
(13)
n 1 +···+n k =n
Démonstration. Soit k ∈ N. On a :
(
)
ℓ k
∞
∑
k
ℓ+1 x
log (1 + x) =
(−1)
ℓ
ℓ=1
=
∑
(−1)(ℓ1 +1)+···+(ℓk +1)
ℓ1 ,...,ℓk ∈N∗


∑
∑
x ℓ1 +···+ℓk
(−1)n+k 

 xn.
=


ℓ1 · · · ℓk
ℓ
·
·
·
ℓ
k
n≥k ℓ1 ,...,ℓk ∈N∗ 1
ℓ1 +···+ℓk =n
En comparant ceci avec (10), nous déduisons que l’on a pour tout n ∈ N, n ≥ k :
s(n, k) = (−1)n+k
n!
k!
∑
ℓ1 ,...,ℓk ∈N∗
ℓ1 +···+ℓk =n
1
,
ℓ1 ℓ2 · · · ℓk
comme il fallait le prouver. Le théorème est démontré.
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Les nombres de Stirling de 1ère espèce
B AKIR FARHI
La formule (13) du théorème 6 sert en particulier à en déduire des propriétés
arithmétiques sur les nombres s(n, k), notamment lorsque n est un nombre
premier. On a le :
Corollaire 7. Soit p un nombre premier. Alors on a pour tout k ∈ {2, 3, . . . , p − 1} :
s(p, k) ≡ 0 (mod p).
Démonstration. Etant donné k ∈ {2, 3, . . . , p − 1}, le nombre rationnel :
r :=
∑
n 1 ,...,n k ∈N∗
n 1 +···+n k =p
1
n1 n2 · · · nk
est visiblement une somme de nombres rationnels dont les dénominateurs sont
tous non multiples de p, c’est à dire premiers avec p. Ce nombre r peut se représenter donc sous la forme r = ba , avec a, b ∈ N∗ et b premier avec p. Par suite,
on a d’après le théorème 6 :
s(p, k) = (−1)p+k
p! a
.
k! b
Ce qui équivaut à :
bk!s(p, k) = (−1)p+k p!a.
Cette égalité montre que p divise le nombre bk!s(p, k). Mais puisque p est premier avec bk! (car p est premier avec b et premier avec k!, étant donné que k <
p), il découle du lemme de Gauss que p divise s(p, k) ; autrement dit s(p, k) ≡
0 (mod p). Ce qui démontre le corollaire.
Nous déduisons du corollaire précédent l’important théorème suivant qui
est dû au grand savant arabe Al-Hassan Ibn Al-Haytham 3 mais que la majorité
des auteurs attribuent à tort à J. Wilson 4 . On a le :
Théorème 8 (Ibn Al-Haytham). Pour tout nombre premier p, on a :
(p − 1)! ≡ −1 (mod p).
Autrement dit, p divise le nombre ((p − 1)! + 1).
(
)
. @ á‚m
Ì '@ : Connu en Europe sous
3. Al-Hassan Ibn Al-Haytham Al-Basri ø Qå”J. Ë@ ÕæJ
êË@ áK
le nom d’Al-Hazen. Il est mathématicien, physicien et philosophe arabe, né en 965 en Irak et
mort en 1039 en Egypte.
4. John Wilson (1741-1793) : Mathématicien britannique.
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Les nombres de Stirling de 1ère espèce
B AKIR FARHI
Démonstration. Soit p un nombre premier. On a par définition même des nombres
de Stirling de 1ère espèce :
p
∑
p
s(p, k)x k = x .
k=0
En substituant x par −1, on obtient :
p
∑
p
(−1)k s(p, k) = (−1) = (−1)(−2) · · · (−p) = (−1)p p!.
k=0
C’est à dire :
∑
s(p, 0) − s(p, 1) + (−1)p s(p, p) +
(−1)k s(p, k) = (−1)p p!.
2≤k≤p−1
Mais comme s(p, 0) = 0, s(p, 1) = (−1)p−1 (p − 1)! et s(p, p) = 1 (cf. la proposition
2), il en résulte que :
∑
(
)
(−1)p (p − 1)! + 1 +
(−1)k s(p, k) = (−1)p p!.
2≤k≤p−1
Il ne reste qu’à prendre modulo p les deux membres de cette égalité, tout en
tenant compte des faits que p! ≡ 0 (mod p) et s(p, k) ≡ 0 (mod p) pour k ∈
{2, . . . , p − 1} (en vertu du corollaire 7), pour obtenir :
(
)
(−1)p (p − 1)! + 1 ≡ 0 (mod p).
Ce qui donne la congruence désirée :
(p − 1)! ≡ −1 (mod p).
Le théorème est démontrée.
Nous allons conclure ce papier par une autre application arithmétique aussi
importante, connue sous le nom du « petit théorème de Fermat 5 ». On a le :
Théorème 9 (Le petit théorème de Fermat). Soit p un nombre premier. Alors
pour tout x ∈ Z, on a :
x p ≡ x (mod p).
Démonstration. Pour p = 2, le théorème nous dit qu’un nombre entier et son
carré sont toujours de même parité, ce qui est immédiat. Supposons pour la
suite que p est un nombre premier impair et soit x ∈ Z. Les restes possibles de
la division euclidienne de x sur p sont : 0, 1, 2, . . . , p − 1. Ainsi, l’un au moins des
5. Pierre de Fermat (1601-1665) : Mathématicien français.
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Les nombres de Stirling de 1ère espèce
B AKIR FARHI
nombres entiers : x, x −1, x −2, . . . , x − p +1 est multiple de p. Par conséquent, le
produit de tous ces entiers est aussi un multiple de p ; c’est à dire que le nombre
p
x(x − 1) · · · (x − p + 1) = x est multiple de p. Mais par ailleurs, on a :
x
p
=
p
∑
s(p, k)x k = s(p, 0) + s(p, 1)x +
k=0
∑
s(p, k)x k + s(p, p)x p
2≤k≤p−1
= x p + (p − 1)!x +
∑
s(p, k)x k
2≤k≤p−1
(car, d’après la proposition 2, on a : s(p, 0) = 0, s(p, 1) = (−1)p−1 (p − 1)! = (p − 1)!
et s(p, p) = 1). En utilisant les congruences du corollaire 7 et du théorème 8, il
en résulte que :
p
x ≡ x p − x (mod p).
Et l’on conclut ainsi que x p − x ≡ 0 (mod p), c’est à dire que : x p ≡ x (mod p),
comme il fallait le prouver. Notre démonstration est achevée.
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