Les médecins partent en
croisade contre le tabac
Les professionnels
de la santé exigent
un cadre légal qui protège
les jeunes de l'industrie
de la cigarette
Les médecins mettent la pression
sur les parlementaires fédéraux qui
vont travailler sur la future loi sur
les produits du tabac. Hier, neuf
sociétés de médecine, ainsi que
leur faîtière, la FMH, ont lancé un
appel aux élus: «Pour que nos en-
fants ne deviennent pas nos pa-
tients.» Les praticiens «exigent»
l'interdiction générale de la publi-
cité, de la promotion et du sponso-
ring pour le tabac. La Commission
de la sécurité sociale et de la santé
publique du Conseil des Etats se
penchera sur le texte législatif la
semaine prochaine.
La Suisse a signé la convention-
cadre de l'Organisation mondiale
de la santé (OMS) pour la lutte anti-
tabac, mais ne l'a pas encore rati-
fiée, faute de mise en oeuvre.
L'OMS préconise une interdiction
généralisée de la publicité pour les
cigarettes.
En l'état, le projet de loi pro-
posé par le Conseil fédéral interdit
la vente aux moins de 18 ans, mais
ne proscrit pas complètement la
pub. Le conseiller fédéral Alain
Berset a essayé, tant bien que mal,
de trouver un compromis entre les
défenseurs de la santé et les mi-
lieux de l'économie.
Hier, les médecins n'y sont pas
allés par quatre chemins. «Celui qui
ne s'oppose pas à la publicité pour
le tabac et au sponsoring se rend
complice de l'industrie du tabac», a
lancé le Dr Macé Schuurmans, de la
Société suisse de pneumologie.
Pour les professionnels de la santé,
les jeunes sont particulièrement
vulnérables: «Il est facile de consi-
dérer le tabagisme comme un pro-
blème d'adulte, note le Dr Gaudenz
Hafen, de l'unité de pneumologie
du CHUV. Ce sont les adultes qui
meurent des maladies liées au ta-
bac. Néanmoins, l'addiction à la ni-
cotine commence pour la plupart
des consommateurs à l'adoles-
cence. Alors appelons le tabagisme
de son vrai nom: c'est une maladie
pédiatrique.» Selon les spécialistes,
la grande majorité des fumeurs ont
commencé avant l'âge de 19 ans et
l'addiction se montre plus forte
chez les jeunes que chez les adul-
tes.«Appelons
le tabagisme
de son vrai nom:
c'est une maladie
pédiatrique»
Gaudenz Hafen
Unité de pneumologie du CHUV
L'industrie du tabac l'a bien
compris. «Les campagnes de pro-
motion visent à recruter de nou-
veaux consommateurs parmi les
jeunes, continue Gaudenz Hafen.
C'est un âge où ils sont biologique-
ment et psychologiquement plus
vulnérables.» Pour les médecins, il
est donc nécessaire que le cadre
légal empêche ce recrutement de
jeunes consommateurs via le mar-
keting. Ils pointent du doigt les
concours sur Internet, le sponso-
ring de manifestations comme les
festivals ou encore les automates
placés dans les lieux festifs.
Dans leur appel, ils demandent
que la loi cantonne le tabac à ce
qu'il devrait être, «un produit hau-
tement nuisible pour la santé qui
ne doit pas pouvoir faire l'objet
d'une quelconque promotion et
dont le commerce doit être soumis
aux réglementations interna-
tionales». R.B.